SÉANCE DU 17 BRUMAIRE AN III (7 NOVEMBRE 1794) - N08 38-39 521 38 Sur la lecture d’une lettre du représentant du peuple Cruves qui demande une prolongation de congé, la Convention nationale accorde une prolongation de congé de quatre décades au représentant du peuple Cruves (142). [Cruves, représentant du peuple, à un citoyen collègue de la Convention nationale, Lorgues, Var, le 5 vendémiaire an HT] (143) Liberté, Egalité. Je viens, citoyen collègue, avoir de nouveau recours a vous pour vous prier de demander a la convention nationale une prolongation de congé; des cruelles douleurs survenues a la suite de ma maladie, m’empechent de me mettre en chemin et des quelles seront calmées, je me rendray a mon poste. C’est mon seul et unique désir, vous trouverés cy-inclus les certificats de l’officier de santé. Salut et fraternité. Cruves. P. S. Je vous feraÿ passer au 1er jour un fusil a deux coups que votre espouse m’envoye a Lorgues pour vous, vous m’obligerés de m’envoyer extraits de mon congé. [Certificat de santé du représentant du peuple Cruves, établie à Lorgues le 8 brumaire an III ] (144) Je soussigné, officier de santé de cette commune de Lorgues, district de Draguignan, département du Var, certifie que le citoyen Antoine Cruves, député à la Convention nationale, étant ici par congé depuis quelques décades à l’effet de rétablir sa santé à été atteint de la fièvre double tierce a la suite de laquelle s’est manifestée une douleur de sciatique dont la cause est une limphe épaissie qui engorge le tissu de la membrane propre au mouvement des muscles de la cuisse et de la jambe, cette affection luy fait ressentir les douleurs les plus vives et le fait boiter, en foi de quoi je luy ai délivré le présent certificat pour servir et valoir en tant que de besoin, à Lorgues le huit brumaire l’an 3e de la République française une et indivisible. Boyer. Nous officiers municipaux de cette commune de Lorgues, district de Draguignan, departe-(142) P.-V., XLIX, 39-40. Rapporteur, Duval (de l’Aube) selon C* II 21, 23. (143) C 323, pl. 1383, p. 6. Le nom du correspondant de Cruves n’apparait pas dans cette adresse. Sa précédente demande de congé présentée à la Convention le 29 fructidor, avait été faite par l’intermédiaire de Barras. (144) C 323, pl. 1383, p. 7. ment du Var, certifions a qui il appartiendra que le citoyens Boÿer qui a signé le certificat cÿ dessus est tel qu’il se qualifie, et que foi doit etre ajoutée en son seing, en foi de quoi nous avons signé, Lorgues, cinq brumaire an troisième républicain. Arnaud, agent national, Cauvin, Cabasson, Arnaud, Maille, Maunier, officiers municipaux. 39 Un membre du comité des Finances [CAMBON] fait un rapport pour combattre les malveillans qui ont répandu le bruit qu’on alloit démonétiser les assignats et pour rassurer tous les citoyens sur les craintes qu’on pourroit leur inspirer à cet égard. Insertion au bulletin de correspondance (145). CAMBON, au nom du comité des Finances, a fait le rapport suivant : Citoyens, la malveillance est toujours à la porte de la Convention nationale; elle cherche quelquefois à agiter les passions ; et lorsque nous nous occupons des moyens de venir au secours du peuple et de ses intérêts les plus chers, elle profite des discussions que la confection des lois nécessite pour jeter de nouvelles allarmes. A la séance d’avant hier vous commençâtes la discussion sur les moyens de retirer des assignats de la circulation; la malveillance profite de cette discussion pour annoncer que vous allez démonétiser une partie des assignats. Cette mesure qui a été adoptée pour certains assignats à face royale au-dessus de 100 livres, fut nécessaire pour réprimer la malveillance et l’aristocratie qui avoient établi un agiotage dans l’échange des assignats à face contre les assignats républicains de 400 livres, qui perdoient alors jusqu’à dix pour cent. Aujourd’hui ce sont les mêmes assignats qu’on veut discréditer : on n’a pas oublié que c’étoit le premier assignat républicain qui a été émis, et qui a rappellé dans les échanges le mot sacré de République française ; on veut les assimiler aux assignats à face que vous avez justement démonétisés, et on cherche à altérer le crédit national en pays étranger, puisque c’est le seul assignat qui, étant de forte valeur, peut être importé à moindre frais. Hier au soir votre comité des Finances s’oc-cupoit du renvoi que vous lui avez fait, lorsque les commissaires vinrent lui annoncer que plusieurs citoyens avoient demandé l’échange des assignats de 400 L contre ceux de plus petite valeur, et que cet échange n’avoit été occasionné que par les craintes qu’on avoit inspirées sur son démonétisage. (145) P.-V., XLIX, 40. C 322, pl. 1368, p. 13, minute de la main de Cambon. 522 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Votre comité des Finances a cru qu’il étoit important de rassurer les citoyens sur les craintes qu’on voudroit leur inspirer. Nous nous occupons du renvoi que vous nous avez fait; mais nous ne proposerons jamais aucune mesure qui tende à détruire le crédit de la mon-noie républicaine, et on n’a pas proposé à votre comité de démonétiser les assignats de 400 L. Le crédit des assignats repose sur l’affermissement de la République ; et dans ce moment, les défenseurs de la liberté qui ont coopéré si puissamment à la révolution nous procurent encore, par les succès de leurs armes, les moyens d’augmenter le crédit des assignats, et d’en retirer une partie. Votre comité des Finances a cru qu’il étoit important de déjouer la malveillance en vous annonçant qu’il ne croit pas qu’il soit nécessaire de démonétiser les assignats. La Convention nationale décrète que le rapport de son comité des Finances sera imprimé dans le bulletin de correspondance (146). 40 Un membre [PAUTRIZEL] obtient la parole et la Convention rend le décret suivant ; la Convention nationale décrète que tous ceux des colons des Isles-du-Vent, qui marchant dans le sentier du patriotisme, ont constamment repoussé le fédéralisme et le royalisme, ont bien mérité de la patrie (147). 41 La Convention nationale décrète qu’il sera adjoint quatre membres au comité des Finances et que les quatre premiers suppléans qui ont été nommés rempliront ces fonctions (148). Sur la proposition de Cambon, la Convention a décrété que les quatre premiers suppléans du comité des Finances seront membres en pied de ce comité trop surchargé d’affaires pour pouvoir se passer de 48 membres (149). (146) Bull., 17 brum. Moniteur, XXII, 455-456; Débats, n° 775, 676-677; Ann. R. F., n° 47; Ann. Patr., n° 676; C. Eg., n° 811; Mess. Soir, n° 812; J. Fr., n° 773; J. Perlet, n° 775; M. U., XLV, 285-286 ; F. de la Républ., n° 48; Gazette Fr., n° 1041 ; J. Mont., n° 25 ; Rép., n° 48 ; J. Paris, n° 48. (147) P.-V., XLIX, 40. C 322, pl. 1368, p. 14, minute de la main de Pautrizel, rapporteur selon C* II 21, p. 24. Bull., 18 brum.; Débats, n° 781, 753-754; Ann. Patr., n° 676; C. Eg., n° 811; Mess. Soir, n° 812; J. Fr., n° 773; J. Perlet, n° 775; Rép., n° 48. (148) P.-V., XLIX, 40. C 322, pl. 1368, p. 15, minute de la main de Cambon, rapporteur selon C* II 21, p. 24. Débats, n° 781, 754. (149) Mess. Soir, n° 812. F. de la Républ., n° 48. 42 La Convention entend le discours que prononce Legendre (de la Nièvre), sur les ressources de la République en grains et fers et en décrète l’impression (150). 43 Le rapporteur [Robert LINDET] des comités de Salut public, d’ Agriculture et de Commerce, donne une seconde lecture du projet de décret; l’article premier porte que le maximum de chaque espèce de grains, de foin et de paille sera fixé, dans chaque district, sur le prix commun de 1790, augmenté de moitié en sus. Un membre [DEVARS] demande que le prix des grains diminue successivement chaque mois, dans une proportion décroissante. Sur cet amendement, la question préalable est invoquée et adoptée. Un autre membre [DARTIGOEYTE] demande que l’augmentation soit portée à deux tiers, au lieu de moitié. Cet amendement est accueilli et l’article premier est décrété ainsi qu’il suit : A compter du jour de la publication du présent décret, le maximum du prix de chaque espèce de grains, de foins, de pailles et autres fourrages, sera fixé, dans chaque district, sur le prix commun de 1790, augmenté des deux tiers en sus; de sorte que, dans les districts où le prix du froment étoit en 1790 de 10 L le quintal, il sera fixé à 16 L 13 s 4 d; dans les districts où il étoit à 12 L, il sera fixé à 20 L; et sera dans tous les districts, dans la même proportion et suivant la même progression (151). Robert LINDET, au nom des comités de Salut public et des Finances, reproduit à la discussion le projet de décret sur le maximum. DEVARS (de la Charente) propose que ce maximum soit établi de manière qu’il décroisse chaque mois; il pense qu’alors les cultivateurs s’empresseront de fournir les marchés. Un membre combat cette proposition, qu’il regarde au contraire comme capable d’arrêter la circulation des grains. Il suppose un commerçant qui achèterait dans un département, au maximum du mois, du blé qui, par la lenteur des transports, n’arriverait à sa destination, pour être vendu, qu’au maximun (150) P.-V., XLIX, 40. Rapporteur Roux-Fazillac selon C* II 21, p. 24. Débats, n° 775, 678; F. de la Républ., n° 48; Gazette Fr., n° 1041. (151) P.-V., XLIX, 40-41. C 322, pl. 1368, p. 16, minute de la main de Robert Lindet, rapporteur selon C*II 21, p. 24.