ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j J '’79;. 170 [Convention nationale.] gique sur la nécessité et les moyens de se pré¬ cautionner contre les derniers efforts de l’aris¬ tocratie expirante. La Convention nationale or¬ donne la mention honorable de cette adresse, son insertion au « Bulletin » et la renvoie à son comité de sûreté générale pour lui en faire un prompt rapport (1). Suit le texte de l’adresse de la Société des Jaco¬ bins d'après le Bulletin de la Convention (2). TJ ne députation a été admise à la barre. L’orateur a prononcé le discours suivant : « Citoyens représentants, « Vous avez sauvé la République en plaçant la terreur à l’ordre du jour; le conspirateur interdit s’est caché dans l’ombre, les malveillants dis¬ persés ont abandonné leurs projets liberticides, l’égoïste épouvanté est enfin venu au secours de la République, son coffre-fort s’est ouvert, l’or qu’il avait enfoui est entré dans le Trésor public, l’imposteur qui avait bâti sa fortune sur la cré¬ dulité humaine, et abusé de sa longue erreur des siècles, a lui-même soulevé le voile mysté¬ rieux qui couvrait tous ces prestiges : la Conven¬ tion jouissait du plus glorieux triomphe. Après avoir fondé la République, elle établissait le règne de la raison, conservatrice de tous les droits de l’homme, et base unique de la félicité générale : quelle criminelle intrigue, quelle auda¬ cieuse coalition veut l’arrêter dans sa carrière, et la priver du. prix de ses travaux ? Législateurs, les ennemis du peuple que vous avez enchaînés font un dernier effort pour se soustraire à la toute-puissance de la loi; ce n’est plus par la force qu’ils luttent contre nous, c’est par la ruse qu’ils se flattent de nous réduire : la minorité révoltée croit en imposer à la masse invincible du peuple. Vous avez vu une foule turbulente se précipiter à vos comités et à votre barre pour vous proposer de rétrograder. La voix des Circés a retenti autour de vos oreilles; des femmes, des enfants vous ont demandé leurs époux et leurs pères : c’est ainsi que pour vous réduire et faire fléchir votre courage, on a pris tous les masques et toutes les attitudes. Des débris fumants d’une ville rebelle des orateurs captieux se sont élancés pour exciter votre pitié; ils ont tenté de vous effrayer par des tableaux terribles composés avec art, pour donner le change à votre sensibilité. « Vous n’avez entendu que la voix de la patrie; elle a étouffé les cris de la rage déçue des cons¬ pirateurs. Vous avez été inflexibles. Plus vous avez montré d’autorité, plus vos ennemis et les nôtres ont redoublé d’astuce; désespérant de se soustraire à la vengeance nationale, ils ont formé le projet d’engloutir les patriotes eux-mêmes dans le gouffre prêt à les dévorer; ils ont em¬ ployé l’arme la plus funeste, celle de la calomnie, contre les plus ardents défenseurs de la liberté. « Des nuages se sont élevés sur les meilleurs (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 52. (2) Bulletin de la Convention du 3e jour de la lre décade du 4e mois de l’an II (lundi 23 dé¬ cembre 1793). citoyens; la pomme de discorde a été jetée au milieu d’eux : on a imaginé des conspirations fantastiques, pour faire oublier des conspira¬ tions réelles; une stupeur indéfinissable s’est emparée de tous les esprits; tous les bons ci¬ toyens se cherchaient et ne se trouvaient plus. Les intrigants ont redoublé d’audace, les mo¬ dérés sont devenus brûlants; l’un, rampant, est sorti de la fange pour lancer son dard imper¬ ceptible contre la vertu. Les amis sincères de la liberté cherchent la lumière au milieu de ce brouillard épais et de ce tourbillon contre-révolutionnaire. Nos ennemis, en précipitant leur vengeance, se sont décelés eux-mêmes. La mine est enfin éventée; son explosion n’est plus à craindre. Vous avez été abusés, législateurs : votre religion a été trompée sur des rapports mensongers et des dénonciations controuvées : on vous a sur¬ pris des décrets d’arrestation contre d’excellents patriotes. Le général de l’armée révolutionnaire, envoyé par les représentants du peuple de Ville-Affranchie pour une1 mission importante, a été mis dans les fers sans être entendu; d’autres patriotes ont été frappés simultanément, et l’on menace tous les hommes à caractère, les fonda¬ teurs de la République. « Il est évident, législateurs, qu’une nouvelle trame est ourdie contre la sûreté générale; on veut confondre le crime et la vertu, proscrire l’innocent et le coupable, pour forcer les pa¬ triotes à une capitulation honteuse; on parle même d’une amnistie en faveur de tous les détenus indistinctement. Nous sommes loiir de croire que la Convention, qui s’est couverte de tant de gloire, en se purgeant elle-même, et en livrant au glaive vengeur des lois les cou¬ pables qu’elle renfermait dans son sein; nous ne croirons jamais qu’elle puisse oublier ainsi les intérêts de la République. Mais telle est l’audace de nos ennemis, tel est le piège que l’on vous tend, législateurs. « Il est du devoir des républicains qui veillent autour de vous, et qui ne cesseront de vous ser¬ vir de rempart contre toutes les atteintes des malveillants, et de vous dénoncer les complots, pour les faire cesser et pour ôter sans retour toute espérance aux ennemis du peuple, de troubler vos glorieux travaux. « Nous vous demandons d’ordonner que le rap¬ port sur ceux de vos membres que vous avez mis en état d’arrestation, vous soit définitive¬ ment présenté. « Nous vous demandons que la conspiration annoncée par le comité de sûreté générale soit enfin dévoilée; il faut que nous connaissions tous les traîtres. « Tel est le vœu que la Société des amis de la liberté et de l’égalité nous a chargés de vous présenter. « D’après le rapport du représentant Collot, d’après les renseignements qu’il a pris Sur la conduite du général Ronsin et du patriote Vincent, aucuns soupçons fondés ne paraissent s’élever contre ces deux républicains. La Société, au contraire, a la conviction intime qu’ils ont été accusés à tort, et par ceux qui n’avaient d’autres crimes à leur reprocher que d’avoir traversé leurs manœuvres. « Législateurs, vous dénoncer l’injustice, c’est être assuré d’une réparation éclatante. Nous vous demandons le prompt châtiment des accu¬ sés s’ils sont coupables; mais aussi une justice exemplaire s’ils sont innocents. » [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. J "[vose an H 171 I 22 décembre 1793 Renvoyé au comité de sûreté générale pour en faire un prompt rapport. Compte rendu du Moniteur universel (1). Une députation de la Société des Jacobins de Paris est admise à la barre. L’orateur. Citoyens législateurs, vous avez sauvé la République en plaçant la terreur à l’ordre du jour. Aussitôt les conspirateurs se sont cachés dans l’ombre, les malveillants ont abandonné leurs projets liberticides, l’égoïste épouvanté est venu au secours de la République, ses coffres-forts se sont ouverts. L’imposteur qui avait amassé des trésors par la superstition, a soulevé lui-même le voile qui couvrait les pres¬ tiges. La Convention jouissait du glorieux triomphe d’avoir fondé la République et s’occupait d’éta¬ blir le règne de la liberté sur la pratique de toutes les vertus. Quelle criminelle intrigue veut l’arrêter dans sa carrière et la priver du fruit de ses travaux? Les ennemis du peuple font de nouveaux efforts; n’ayant pu le vaincre par la force, ils emploient la ruse pour le faire rétro¬ grader. C’est ainsi que vous avez vu une foule turbulente se précipiter à votre barre; que vous avez entendu des femmes et des enfants de¬ mander la liberté d’hommes justement arrêtés; qu’on a pris toutes les marques et toutes les atti¬ tudes pour vous apitoyer sur une ville criminelle, et donner le change à votre sensibilité. Vous avez été inflexibles, et nos ennemis ont redoublé d’astuce; ils ont employé la calomnie contre les patriotes les plus intrépides; ils ont jeté des nuages sur leurs intentions; on a imaginé des conspirations fantastiques pour détourner vos regards des conspirations réelles. La stupeur s’est emparée des esprits, l’audace de l’intrigue s’est accrue. Les modérés sont devenus brûlants. Les amis sincères de la liberté ont cherché la vérité au milieu de ce brouillard épais et de ce tour¬ billon contre-révolutionnaire. Yous avez été abusés sur des dénonciations controuvées; on vous a surpris un décret d’arrestation contre d’excellents patriotes. Le général de l’armée révolutionnaire a été mis dans les fers sans être entendu; d’autres encore ont été privés de la liberté, et on menace tous les hommes à carac¬ tère. Une nouvelle conspiration se trame; on parle d’une amnistie en faveur de tous les détenus indistinctement. Nous ne le croyons pas. La Convention qui S’est couverte de gloire en punissant les coupables qui s’étaient glissés dans son sein., ne fera pas grâce à d’autres conspira¬ teurs; mais tel est le piège qu’on a voulu vous tendre. Il est du devoir de bons républicains de vous dénoncer les complots pour les déjouer, et empêcher les ennemis de la liberté d’en former de nouveaux. Nous venons vous demander que vous ordon¬ niez de vous faire un prompt rapport sur les membres qui sont depuis longtemps en état d’arrestation, sur la nouvelle conspiration qui vous a été dénoncée par votre comité de sûreté générale. Tel est le vœu que nous vous adres¬ sons. (1) Moniteur universel [n° 94 du 4 nivôse an II (mardi 24 décembre 1793), p. 380, col. 2], Citoyens, d’après le rapport de Collot-d’Her-bois sur Commune-Affranchie, et d’après les renseignements qu’il nous a donnés sur Ronsin, et d’après ceux que nous avons pris sur Vincent, la Société pense que ces deux citoyens sont sans reproches; ils ont été accusés par des hommes qui n’avaient d’autre crime à leur reprocher que d’avoir traversé leurs manœuvres. Nous vous demandons d’ordonner qu’il vous sera fait un prompt rapport sur leur arrestation. Le Président. Toutes les fois que les dangers ont menacé la liberté, les Jacobins se sont trouvés en surveillance; les Jacobins ont rendu de grands services à la patrie, ils sont appelés à lui en rendre encore de plus grands. La Con¬ vention reçoit avec satisfaction et reconnais¬ sance les renseignements que vous venez de lui apporter; elle s’en fera faire un rapport et prendra les mesures que lui dictera sa sagesse. Elle vous invite aux honneurs de la séance. La .députation entre au milieu des applaudis¬ sements. La Convention décrète la mention honorable de la pétition, la renvoie à son comité de sûreté générale, et en ordonne l’insertion au Bulletin. La séance est levée à 5 heures (1). Signé : Couthon, président; Jay, Bourdon (de l’Oise), Marie-Joseph Chénier, A.-L. Thibaudeau, Perrin (des Vosges), Pé¬ lissier, secrétaires. PIÈCES ET DOCUMENTS NON MENTIONNÉS AU PROCÈS-VERBAL, MAIS QUI SE RAP¬ PORTENT OU QUI PARAISSENT SE RAP¬ PORTER A LA SÉANCE DU 2 NIVOSE AN II (DIMANCHE 22 DÉCEMBRE 1793). I. Adresse de la Société montagnarde de Mirande pour demander : 1° que les malveillants soient déportés en Afrique; 2° que l’exercice public du culte catho¬ lique NE SOIT PLUS TOLÉRÉ (2). Suit le texte de la Société montagnarde de Mirande, d’après un document des Archives nationales (3). La Société montagnarde de Mirande à la Convention nationale. « Mirande, le 14 frimaire, an II de la Répu¬ blique, une et indivisible. « Depuis que la guillotine a tranché les têtes coupables qui cherchaient à répandre le désordre (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 52. (2) L’adresse de la Société montagnarde de Mi¬ rande n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 2 nivôse an II; mais on lit en marge de l’original qui existe aux Archives nationales, l’indi¬ cation suivante : « Renvoyé au comité d’instruction publique le 2 nivôse an II de la République. » (3) Archives nationales, carton F” 1008s, dos¬ sier 1479.