430 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. d’examiner les questions suivantes, divisées en deux classes. Première classe. 1° L'Assemblée nationale sera-t-elle permanente ou périodique? 2° Quelles seront les qualités des éligibles, soit dans l’Assemblée nationale, soit dans les assemblées secondaires ? Seconde classe. 1° Quelle sera l’influence de l’autorité royale en matière de législation ? Aura-t-elle le droit de veto ? Ce droit sera-t-il limité ou illimité, absolu ou suspensif? 2° L’Assemblée nationale sera-t-elle composée d’une ou de deux chambres? s’il y en a deux, comment seront-elles composées? Quels seront leurs droits, leurs pouvoirs et leur influence réciproque? M. de Tolney. Avant de délibérer sur la motion du préopinant, il faudrait connaître le travail du comité. M. Bergasse a un travail complet, il faut le connaître, et l’Assemblée ne doit fixer sa marche qu’après l’avoir médité. La motion actuelle présente sans doute des questions très-intéressantes. L’organisation des assemblées offre une grande discussion ; mais, avant de s’en occuper, ne faudrait-il pas tixer l’organisation des assemblées secondaires? II parait que dans ce moment-ci nous avons besoin de force et d’action. Nous avons, à la vérité, l’autorité de l’opinion ; mais cette puissance n’est que morale. Nous ne pouvons faire exécuter nos décrets que par le secours des municipalités; elles seules sont en action; mais ces municipalités sont encore sous la verge du despotisme; ce sont des établissements élevés sur les ruines de la liberté publique, et dans la dépendance du pouvoir exécutif. Il me paraît donc que dans le principe nous devons nous occuper d’organiser les assemblées paroissiales, les assemblées municipales, les assemblées provinciales, et enfin l’Assemblée nationale. Il est important et nécesaire de mettre sur-le-cbamp ces assemblées en activité. Par là vous j serez certain de votre autorité, vos décrets seront exécutés ; par là vous ferez facilement consommer l’opération d’établir par égalité la perception des impôts pour les six derniers mois de l’année. Une circonstance me paraît influer sur ce projet. 11 faut préparer le plan de toutes les assemblées graduelles ; il faut donner des ordres pour leur établissement ; tout cela nécessite au moins un délai de deux mois. Ainsi toutes les assemblées seront, dans le courant d’octobre, en activité, c’est à-dire à l’époque où l’on renouvelle les rôles. Ce moyen me paraît seul suffisant pour apaiser la fermentation du peuple. Aussi j’appuie la motion de M. Duquesnoy dans la première partie. L’amendement que je propose, c’est de former des assemblées de divers grades avant de s’occuper de la Constitution. Mais je regarde comme nécessaire de s’occuper avant tout des assemblées secondaires, et de rétablir en quelque sorte le pouvoir exécutif de l’Assemblée. 11 faut donc former les assemblées paroissiales, former les assemblées municipales, les assemblées provincia-[14 août 1789.[ les, et enfin l’Assemblée nationale. Tel est l’ordre des choses, tel est celui que je propose. M. Duquesnoy appuie la proposition de M. de Volney, et il consent que la partie de sa motion qui y a quelque rapport soit rédigée dans les termes proposés par ce dernier. M. Crénière dit qu’avant de s’occuper de la discussion des diverses motions proposées, il est intéressant de connaître le travail des comités; en conséquence, il demande, quant à présent, la question préalable sur ces motions et amendements. M. de llontmorency en appuyant cet avis, remarque que la motion faite est contraire à la marche que l’Assemblée s’était prescrite et à l’ordre de travail déjà établi ; il ajoute qu’il est à propos d’engager le comité de Constitution à présenter incessamment son travail sur la Constitution et ses vues sur l’établissement des assemblées secondaires. M. Prieur. Tous les jours l’Assemblée rend des décrets; à qui en confiera-t-elle l’exécution? , Ce sera sans doute aux municipalités. La plupart de celles qui existent sont vénales, et ont perdu toute autorité et toute confiance. Il faut donc s’empresser de créer des municipalités nationales; il n’est pas moins important d’établir des assemblées provinciales nationales, pour donner des instructions locales, dont les représentants de la nation ont un besoin fréquent. Sous ces deux rapports, l’amendement de M. de Volney doit être adopté. Je demande que le comité de rédaction soit chargé de présenter incessamment un travail sur ce sujet. Le pouvoir judiciaire, ébranlé par l’arrêté du 4, qui abolit la vénalité des charges, doit fixer aussi l’attention de l’Assemblée. Il faut charger le comité de rédaction de présenter sans délai les bases d’un travail qui ait pour but de lui rendre son énergie. Quandmêmela déclaration desdroitsde l’homme serait retardée, les principes qu’elle doit consacrer vivraient toujours dans nos cœurs, et ce délai ne compromettrait point la chose publique. M. Regnauld. J’appuie la motion. Elle offre à l’Assemblée le seul parti que sa sagesse et son amour du bien public puissent adopter. Le comité de Constitution offre en général plus de discussions que de résultats; il doit se borner maintenant à préparer le travail sur les quatre questions présentées. M. le baron de Aloniboissier propose, pour faciliter le travail, que les députés de chaque généralité soient autorisés à se réunir et à préparer ainsi les éléments des assemblées secondaires. M. de Clermont-Tonnerre annonce que lundi le comité de Constitution présentera un travail très-considérable, et propose de renvoyer après ce rapport l’examen delà notion de M. Duquesnoy. Il observe qu’en suivant une autre marche, ce serait remonter des conséquences aux principes. On demande d’aller aux voix. M le Président pose ainsi la question : y [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 août 1789.] 437 a-t-il lieu à délibérer sur la motion de M. Du-quesnoy? L’Assemblée décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur celte motion quant à présent. Un membre du comité de vérification a dit que les pouvoirs des députés de la noblesse d’Auxois avaient été examinés et trouvés en règle. M. le Président a dit à l’Assemblée que le résultat du scrutin pour la nomination de l’archiviste était en faveur de M. Camus ; qu’il avait réuni cinq cent trente et une voix sur six cent quatre-vingt-douze. Il a observé que les membres qui devaient composer le comité pour les affaires ecclésiastiques, et celui pour la liquidation des oftices de magistrature, n’étaient pas encore élus; qu’il fallait que les bureaux s’assemblassent pour les choisir. 11 a averti l’Assemblée que le temps fixé pour l’exercice de ses fonctions allait expirer, et qu’il la priait de vouloir bien faire choix d’un nouveau président. 11 lui a annoncé enfin, que le Roi l’avait fait prévenir d’une procession qui devait avoir lieu le jour de l’Assomption, dans l’après-dînée, et du désir qu’il avait de voir une députation de l’Assemblée assister à cette cérémonie. L’Assemblée s’est empressée de répondre à cette invitation, et elle a arrêté d’envoyer une députation solennelle. M. le Président a levé la séance, et il l’a ajournée au lundi neuf heures du matin. L’Assemblée s’est divisée dans les bureaux pour procéder aux différentes nominations. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. LE COMTE DE CLERMONT-TONNERRE. Séance du lundi 17 août 1789. M. Chapelier ouvre la séance par la proclamation de M. de Clermont-Tonnerre à la présidence. L’ex-président prononce le discours suivant : Quand vous me fîtes l’honneur de me nom mer président, je déclarai que mon vœu le plus ardent était dé voir poser quelques-uns des articles qui devaient servir de base à la Constitution. Mes espérances ont été surpassées. Vous avez fait dans un jour l’ouvrage d’un demi-siècle. Les représentants d’une nation généreuse se sont disputé l’honneur de faire les plus grands sacrifices à la patrie. L’égalité des droits est établie, les provinces sont unies, tous les intérêts n’ont plus qu’un même centre. Vous avez à corriger les abus que l’elferves-cence du moment a fait naître, à rétablir le calme que la renaissance de la liberté a troublé : quant à moi, la place dont vous m’avez honoré m’inspirera toujours la plus respectueuse reconnaissance. M. de Clermont-Tonnerre. S’il était possible d’exprimer ma reconnaissance et mon respectueux dévouement pour cette auguste Assemblée, je me. serais mis en devoir de le faire; mais cela est au-dessus de mes forces. Fort de la loi dont je ne me suis jamais départi, ma conscience ne se démentira jamais. Vos bontés me donneront du courage pour remplir les fonctions de la place dont vous m’avez honoré, et l’exemple de mes prédécesseurs me soutiendra. Ces deux discours sont universellement applaudis. Un membre propose de voter des remerciements à M. Chapelier. Cette motion est acceptée avec la plus vive reconnaissance. On rend compte de l’envoi fait par M. le garde des sceaux : 1° D’une déclaration du roi donnée pour l’exécution du décret de l’Assemblée du 10 de ce mois; 2° D’une ordonnance concernant la main-forte à donner par les troupes, lorsqu’elle sera réclamée par les officiers civils ou municipaux, et le serment que devront prêter les troupes tant de terre que de mer; 3° D’une ordonnance portant amnistie pour tous les soldats et matelots qui ont quitté leurs drapeaux ou leurs corps sans congé, depuis le mois de janvier dernier; 4° De la liste de treize galériens condamnés pour fait de braconnage; 5° Enfin, de la procédure commencée au parlement de Rouen contre le procureur du roi de Falaise. Voici les pièces : Extrait de la déclaration pour le rétablissement de la paix . « Les désordres occasionnés par des personnes mal intentionnées ont répandu l’alarme dans le cœur du roi. Pour en arrêter les progrès, Sa Majesté a résolu de déposer dans le sein de l’Assemblée s.*s inquiétudes et ses craintes. Le roi est persuadé de la sagesse des mesures qu’elle a déjà prises pour concourir avec lui au rétablissement de la paix. « En conséquence, Sa Majesté ordonne à tous gouverneurs, lieutenants, jùges, etc., de tenir la main à l’observation de toutes les lois et d’assister les officiers civils et les milices bourgeoises, lorsqu’ils requerront le secours militaire, etc. » Extrait de l'ordonnance qui enjoint aux troupes de prêter serment. « Il sera prêté par les troupes le serment suivant : savoir, pour les soldats et pour les officiers, tel que la formule en a été rédigée par l’Assemblée nationale. Le corps militaire sera sous les armes, etc. » Extrait d’une lettre du Roi aux armées françaises. « Braves guerriers, les nouvelles fonctions que je vous impose ne déplairont pas à votre courage. Les officiers qui vous commandent vous donneront l’exemple du patriotisme et de la subordination aux lois. La plus grande soumission que je puisse attendre de mon armée est celle dont ils me donneront des preuves en contribuant au rétablissement de l’ordre. « L’honneur seul suffit, sans doute; cependant j’ai tout fait pour améliorer le sort des soldats, au milieu même du désordre de mes finances. J’espère le faire encore, mais dans des temps