182 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 72 La Convention nationale proroge de deux décades le congé qu'elle a précédemment accordé à Mailhe, l’un de ses membres, pour le rétablissement de sa santé (104). [. Mailhe au président de la Convention nationale, de Banières-de-Luchon, le 3?™ s.-c.] (105) Citoyen président, L’officier de santé du 9ème bataillon de Haute-Garonne, à qui une longue expérience a donné une connoissance parfaite de la nature et des effets des eaux minérales et des bains de Banières-de-Luchon, m’a assuré que les cinq décades qui m’ont été accordées par la Convention pour rétablir ma santé par l’usage de ces eaux et dont une grande partie se trouvera absorbée par l’aller et le retour, ne me suffiront pas, et que mon voyage deviendra infructueux si je n’obtiens pas une prorogation de congé. Veuille donc exposer ma position à l’Assemblée, et la prier de m’accorder deux décades de plus. Par là elle me mettra en mesure de recouvrer ma santé, et de participer avec toute l’énergie de mon patriotisme à ses immortels travaux. Je joins à ma lettre une attestation de l’officier de santé. Mailhe. 73 Les représentans du peuple près l’école de Mars écrivent à la Convention nationale que l'exercice à feu annoncé pour aujourd’hui est renvoyé à demain, et invitent leurs collègues à venir augmenter par leur présence l’émulation des jeunes guerriers dont la surveillance leur est confiée (106). [Les représentants du peuple à l’Ecole de Mars, au président de la Convention nationale, le 9 vendémiaire an III] (107) Citoyen, Nous avions choisi le 9 vendémiaire pour faire un exercice à feu parceque nous pensions que le 10 seroit un jour de fête à Paris, et que nous craignions que cette circonstance n’empê-chat plusieurs de nos collègues de venir ï juger des progrès des élèves de Mars. Nous apprenons que la fête a été ajournée (104) P.-V., XLVI, 195. Décret anonyme selon C* II 21, p. 4. (105) C 321, pl. 1343, p. 12. (106) P.-V., XLVI, 195. Débats, n 739, 126; Mess. Soir., n° 773. (107) C 321, pl. 1338, p. 6. et en même temps le comité de Salut public nous prévient qu’il a aujourd’hui un travail à faire avec le général. Ces deux motifs nous forcent à renvoyer à demain l’exercice à feu annoncé pour au-jourd’huy, nous te prions d’en instruire la Convention et d’engager nos collègues à venir augmenter par leur présence l’émulation des jeunes guerriers dont la surveillance nous est confiée. Salut et fraternité. Bouillerot, Moreau. 74 Un membre, au nom du comité des Finances, fait un rapport sur les contributions perçues dans la Belgique, et d’où il résulte que le total des sommes versées à la Trésorerie nationale s’élève à treize millions trois cent cinquante-neuf mille quatre cents quatre livres, tant en lingots qu’en monnoie française et étrangère : de vifs applaudissemens se font entendre à plusieurs reprises. La Convention nationale décrète que le rapport et le tableau y annexé seront insérés au bulletin de correspondance (108). CAMBON, au nom du comité des Finances : Citoyens, il est arrivé il y a quatre jours, à la Trésorerie nationale, vingt-neuf charriots escortés par des cavaliers, qui ont apporté des matières d’or et d’argent en lingots ou en monnoie, qui sont le produit des contributions levées dans la Belgique. Ce convoi a paru extraordinaire ; il a produit une grande sensation : tous les journaux en ont parlé, mais aucun n’a pu en indiquer le montant. Votre comité des Finances a cru qu’il étoit nécessaire de vous rendre compte des sommes qui ont été imposées et perçues dans la Belgique, et de celles qui sont arrivées à la Trésorerie nationale. La publicité de ce compte éclairera l’opinion publique, elle est peut-être nécessaire pour prévenir les manœuvres que la malveillance pourrait employer pour entraver les opérations du gouvernement, ou pour tromper le peuple, en exagérant ou diminuant le véritable produit des contributions exigées. Le convoi, composé de vingt-neuf charriots, arrivé le 5 du courant à la Trésorerie nationale, étoit composé de 3 441 343 L. C’est le septième qui est entré à la trésorerie. Le total des sommes reçues monte à 13 359 404 L, tant en lingots qu’en monnoie française ou étrangère. Ne croyez pas cependant que les opérations des représentans du peuple se bornent à procurer à la nation une si foible ressource; ils n’ont pas suivi le plan adopté par Dumouriez. (108) P.-V., XLVI, 195. SÉANCE DU 9 VENDÉMIAIRE AN III (30 SEPTEMBRE 1794) - N° 74 183 Aussi, le résultat de leurs opérations est-il bien différent : au lieu d’épuiser le trésor national, par des demandes continuelles de numéraire, ils en envoient journellement. Au lieu de nous affamer, ils nourrissent les armées de la République avec le produit du territoire conquis, et ils envoient dans l’intérieur l’excédent de ce produit. Ils nous font passer les matières et le produit des arts qui peuvent nous être nécessaires. Le premier soin des représentans du peuple a été d’établir l’ordre dans la comptabilité; ils ont cherché à centraliser leurs opérations avec celles du gouvernement, et établi la plus grande surveillance dans la perception. Ils ont chargé, par un arrêté, la Trésorerie nationale du soin d’organiser des agens pour faire la levée des contributions dans la Belgique, et pour la surveiller. Les commissaires de la Trésorerie nationale ont envoyé sur les lieux un agent intelligent, qui a préparé l’organisation ordonnée par les représentans du peuple ; des agens ont été nommés pour percevoir ou pour surveiller le produit des contributions, et pour l’envoyer, chaque décade, dans un centre commun qui a été établi à Bruxelles, d’où on les fait passer de suite à Lille. Les comissaires de la trésorerie ont chargé les agens qui doivent diriger les opérations, de leur fournir chaque décade tous les divers ren-seignemens sur les recettes, de telle manière que la Convention nationale peut connoître et surveiller chaque jour le produit des contributions ordonnées ou rentrées. En exécution de cet ordre, les commissaires de la Trésorerie nationale ont déjà reçu l’état général des contributions imposées, et de celles payées au compte jusqu’au quatrième jour des sans-culottides. Ils l’ont mis sous les yeux de votre comité des Finances, auquel ils rendent successivement compte de leurs opérations, et je suis chargé de vous en présenter le tableau. Suivant cet état, les sommes imposées sur dix-huit villes de la Belgique montent à 60 290 875 L ; les sommes payées, partie ou espèces monnoyées, et partie en lingots, montent à 14 445 938 L ; et celles arrivées à la trésorerie s’élèvent à 13 359 404 L. Je vais vous faire connoître la quotité des sommes imposées et perçues sur chaque ville. Etat des contributions imposées par arrêté des représentans du peuple, sur les villes occupées par les armées de la République dans la Belgique, et des sommes reçues à compte. Votre comité des Finances s’est apperçu que le recouvrement étoit peu avancé dans plusieurs villes, et qu’il n’étoit pas encore commencé dans d’autres. Il a chargé les commissaires de la Trésorerie nationale, d’écrire à leurs agens, pour leur recommander de fixer souvent l’attention des représentans du peuple sur l’état des choses, afin de les mettre à portée de prendre les mesures que leur sagesse leur suggérera, pour hâter une perception dont la marche ne sauroit être trop rapide. Les opérations des représentans du peuple dans la Belgique ne se bornent pas à la levée de numéraire ; ils envoient en France les objets utiles aux arts, à l’enseignement et aux fabriques; ils s’occupent même de la vente des domaines nationaux qui est déjà commencée, et leur produit nous servira à retirer une partie des assignats de la circulation. La Trésorerie nationale, outre les sommes arrivées de la Belgique, vient de recevoir de l’agent chargé des opérations du même genre dans le pays de Trêves, l’avis d’un envoi qu’il vient de faire au payeur-général de la Moselle, montant à 915 523 L 6 s. 5 d., provenant, tant de la contribution de 3 millions imposée sur le pays de Trêves, que de diverses saisies. Cet envoi est composé de 227 483 L 8 s. 3 d. en nu- 184 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE méraire, et le surplus en assignats; il est accompagné d’un caisson chargé du trône électoral. La République n’ayant aucun emploi à faire de ce meuble, l’exemple que vous avez donné par la punition des tyrans, devant avertir les ambitieux qu’il seroit dangereux pour eux d’avoir l’envie d’y monter, à quelque titre que ce puisse être, nous enverrons au creuset national les matières d’or et d’argent qui font son ornement. La levée des contributions dans le pays de Trêves a nécessité un acte de justice nationale. Une des communes imposées avoit apporté en paiement de son contingent, des assignats qui ont été reconnus faux; le porteur interrogé a avoué qu’on les avoit empruntés à Luxembourg : ainsi, la coabtion de nos ennemis vou-loit nous tromper en ayant l’air de s’acquitter des sommes exigées en dédommagement d’une partie des frais que nous faisons pour la défense de notre liberté. Le représentant du peuple Bourbotte a cru qu’il étoit prudent de prendre des moyens pour n’être pas trompé. Il a ordonné qu’à compter du 30 fructidor, on ne recevroit point des assignats en paiement, et que les communes se-roient obligées de s’acquitter en numéraire. Ainsi, les esclaves qui ont eu recours à la perfidie, ne pourront plus l’employer à la caisse impériale de Luxembourg, pour nous payer avec des assignats faux. Votre comité se fera rendre compte, chaque décade, de l’état des contributions imposées et perçues, il vous en présentera le résultat. — On applaudit (109). 75 Un membre [GODEFROY], au nom du comité des Finances, propose un projet de décret qui est adopté en ces termes : La Convention nationale, après avoir entendu son comité des Finances, décrète : La Trésorerie nationale paiera sur la présentation du présent décret, au citoyen Mercklein, artiste, la somme de six mille livres, à titre d’indemnité, pour raison de la machine qu’il a présentée pour vérifier les assignats. Le présent décret ne sera inséré qu’au bulletin de correspondance (110). (109) Moniteur, XXII, 123-124; Débats, n" 739, 121-124; Bull., 9 vend.; M. U., XLIV, 141, 142, 147; J. Mont., n 155, 162; mention dans Ann. R. F., n“ 10; Ann. Patr., n° 638; C. Eg., n° 773; F. de la Républ., n° 10; Gazette Fr., n” 1003; J. Fr., n 735 ; J. Paris, n° 10 ; J. Perlet, n° 737 ; J. Univ. , n° 1771, 1772; Mess. Soir, n° 773; Rép., n° 10. (110) P.-V., XL VI, 196. C 320, pl. 1329, p. 43. Minute de la main de Godefroy. Bull., 13 vend, (suppl.). 76 Un membre, au nom des comités de Salut public, de Sûreté générale, de Marine et des colonies, présente un projet de décret pour la nomination d’une commission chargée de l’examen et du rapport de l’affaire des colonies (111). MAREC : Citoyens, je vous ai exposé, dans la séance du 4ème jour des sans-culottides, que vos trois comités de Salut public, de Sûreté générale, de Marine et des colonies, avaient, en exécution de votre décret du 5 fructidor, nommé respectivement quelques-uns de leurs membres pour préparer le travail relatif à l’examen et à la discussion de l’affaire des colonies. Les commissaires des trois comités se sont assemblés, il y a quelques joins, pour convenir définitivement d’une organisation et d’un mode d’opérations propres à remplir les vues des comités et à faire marcher le travail avec la rapidité convenable. Mais en jetant d’abord les yeux sur eux-mêmes, sur leur existence politique, ils ont facilement reconnu qu’ils n’avaient et ne pouvaient avoir aucun caractère, aucun pouvoir suffisant pour faire les premiers actes préparatoires à la confection ou à la rédaction du travail qui leur a été imposé. En effet presque tous les papiers relatifs à l’affaire des colonies se trouvent consignés ou dans les divers dépôts pubbcs de Paris, ou sous les scellés apposés chez les colons détenus ou autres individus. Il est aussi certains colons, certains hommes que leurs affaires, leurs fonctions ou leurs intérêts ont appelés aux colonies à différentes époques ; il est, dis-je certains individus qui peuvent être consultés pu interrogés comme des témoins plus précieux, comme, s’il est permis de le dire, des répertoires vivants, plus propres à répandre un grand jour sur telle ou telle particularité, que les documents, mémoires ou renseignements écrits, les plus authentiques en apparence. Dans tous les cas il faut pouvoir retirer et rassembler, dans les bureaux de la commission des Colonies, les papiers, titres et documents consignés maintenant dans les différents dépôts ; il faut pouvoir ordonner la levée des scellés, appeler et interroger les divers détenus, les accusés, les accusateurs, les témoins; il faut pouvoir même prononcer la mise en liberté de tels ou tels individus, et la mise en arrestation de tels ou tels autres, suivant les circonstances. Or, les commissaires ont senti qu’ils ne pouvaient remplir aucune de ces formalités, faire aucun de ces actes préparatoires indispensables, car ils ne sont, en l’état, que des rapporteurs respectifs des comités, ils n’en sont et n’en peuvent être ni les délégués, ni les repré-(111) P.-V., XLVI, 196.