154 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 mars 1791.] de les préserver d’une houteuse et désespérante oisiveté, et ils osent vous présenter cette pétition : « 1° Tout vicaire qui était en place au moment de la suppression de sa paroisse, sera employé de droit dans celle où sod territoire est réuni, quand même les curés de ces nouvelles paroisses auraient déjà appelé des ex-religieux, à leur préjudice; « 2° Ceux qui deviendraient inutiles dans la nouvelle circonscription des paroisses, seront employés de préférence où il en sera besoin, et les ci-devant religieux ne pourront y être admis qu’à leur défaut; 3“ Le vicaire sera continué après le décès de son curé, comme les vicaires de la cathédrale le sont après le décès de l’évêque. » « Il convenait, Messieurs, à un curé de défendre la cause des vicaires. La bonté avec laquelle vous avez accueilli quelques-uns des écrits patriotiques du curé-maire de Chavignon, et entre autres Y Ecclésiastique citoyen, le Vœu de la raison à Louis XVI et la Réponse à V évêque de Sois - sons, lui fait espérer que vous ne désapprouverez pas qu’il se soit rendu au désir de ses compagnons. Il est trop heureux d’avoir trouvé cette occasion de renouveler ses hommages à nos illustres législateurs. « Jean-François Nusse, curé et maire de Chavignon, faisant pour les vicaires des églises supprimées de plusieurs départements. » M. le Président répond : « Les vertueux pasteurs que leurs augustes fonctions appellent auprès du peuple, et qui remplissent dignement le ministère d’espérances et de consolations que la religion leur confie, seront toujours recommandables aux représentants du peuple. « Cette religion, aux yeux de qui tous les hommes sont frères, réclamait pour eux la Constitution qui leur rend, devant la loi, l’égalité qu’ils ne peuvent cesser d’avoir devant l’Etre suprême. « Déjà vous avez éprouvé l’un des grands bienfaits de la Révolution ; déjà, pour parvenir aux dignités éminentes de l’Eglise, le seul titre est l’estime publique, les seuls droits sont des vertus. « L’Assemblée nationale prendra votre demande en considération. Reposez-vous sur elle de votre sort : elle acquittera envers vous la dette de la nation; continuez d’acquitter la vôtre par des exemples digues de la doctrine sublime dont vous êtes les dispensateurs. « L’Assemblée nationale vous permet d’assister à sa séance. » (L’Assemblée ordonne l’impression du discours de la députation, ainsi que de la réponse de M. le Président, et décrète le renvoi de la pétition au comité ecclésiastique.) M. Barthe, évêque du département du Gers , est admis à la barre et s’exprime ainsi : « Messieurs, quelque précieux que soit l’avantage de paraître dans cette auguste Assemblée, je sens plus vivement encore le bonheur de vous exprimer les sentiments de reconnaissance et d’admiration que m’inspirent vos sublimes travaux. « La critique insultait à vos sages décrets concernant la suppression des dîmes, et moi, décimateur d’un canton peu fertile ( Rires à droite ), pénétré de douleur de voir mes déci-mables presque assimilés à des colons partiaires, j’avais déjà, dans nos assemblées de sénéchaussées, fait une proposition dont le résultat devait être le même que celui de vos opérations. « On s’est élevé contre le décret par lequel vous avez déclaré que les biens du clergé étaient à la disposition de la nation ; et moi, par un discours prononcé devant l’autel de la patrie, j’ai démontré la justice de ce décret et réduit ses détracteurs au plus profond silence. Voilà le procès-verbal de la confédération des gardes nationales, dans lequel ce discours est consigné. « Le fanatisme a allumé ses torches et aiguisé ses poignards, le sang des citoyens a malheureusement coulé aux deux extrémités des parties méridionales de l'Empire, à l’occasion de votre célèbre décret concernant le culte religieux; mais grâce au patriotisme prudent et éclairé des corps administratifs, grâce au zèle infatigable des gardes nationales, et peut-être encore, si j’osais le dire, aux soins et aux écrits de leur aumônier (Rires à droite ; applaudissements à gauche), les Toulousains ont été préservés des désordres qui agitaient les contrées voisines. « Plusieurs mois avant votre décret, j’avais publié, j’avais établi les principes incontestables qui en forment les bases, je m’étais appliqué à démontrer l’accord qui existe entre les droits de l’homme et les devoirs qu’impose la religion, j’avais combattu l’indifférence pyrrhonienne des Bayle , les ménagements trop politiques des Rousseau, et les inconséquences trop manifestes des Wolf. <> Au moment où vous décrétiez la constitution civile du clergé, ce chef-d’œuvre de votre sagesse et de votre zèle pour le maintien de la pureté primitive de la religion, je faisais voir aussi dans mes leçons théologiques que les principes en étaient déjà consignés dans les quatre articles de la déclaration du clergé de 1682. « Quelques fonctionnaires publics se permettaient d’attaquer ouvertement cette constitution civile que nous vous devons ; j’ai démontré, j’ose le dire, j’ai démontré selon toute la rigueur des formes mathématiques (Rires à droite ), que cette constitution était sage, que vous aviez eu le droit de la décréter, que, la décrétant, vous n’aviez pas excédé les bornes de vos pouvoirs ; permettez que je vous fasse l’hommage de mes travaux. « C’est sans doute à ces faibles efforts pour la défense de la religion et de la patrie que je dois le choix dont le département du Gers m’a honoré ; si je n’eusse consulté que mes forces, je n’aurais pas accepté les fonctions importantes qui viennent de m’être confiées; mais j’ai dû me soumettre aux ordres de la Providence, qui dirige tous les évènements. Il me reste un vœu à former, et c’est le plus ardent des vôtres ; c’est de voir terminer ce Code qui servira de modèle à tout l’univers, ce Code qui rend à notre sainte religion la pureté de la discipline de ses premiers siècles. C’est alors qu’accompagné de mes collaborateurs, suivi de tous les fidèles dont le soin m’est confié, portant dans mes bras ce Code plus qu’humain, je l’offrirai àl’Eternel, et, dans mes transports d’allégresse, je m’écrierai comme le juste Siméon : « C'est maintenant, Seigneur, « que vous pouvez disposer de ma vie. » (Murmures à droite.) M. Barthe fait ensuite hommage à l’Assemblée du discours qu’il prononça devant l’autel