78 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE action du gouvernement révolutionnaire, de provoquer le rétablissement de la loi populicide du 22 prairial et la réorganisation d’une nouvelle boucherie sous le titre de tribunal révolutionnaire, et enfin dans l’espoir de rattraper la portion de tyrannie que leur avoient confiée les triumvirs, et qu’ils ont vue avec regret s’échapper de leurs mains. Qu’ils tremblent ces allar-mistes, ces continuateurs de la tyrannie ! le tocsin qu’ils sonnent, comme celui qu’au 9 thermidor fit sonner la commune conspiratrice, annonce leur agonie. Qu’ils tremblent! bientôt, comme elle, ils disparoitront. Qu’ils tremblent, tous les factieux, tous les fripons, tous les dila-pidateurs de la fortune publique, tous ces êtres immoraux qui ne cherchent à perpétuer l’anarchie que pour se soustraire à l’aide du désordre au supplice que méritent leurs forfaits, et ne s’efforcent de faire succéder la terreur à la justice que pour comprimer ceux qui témoins de leurs crimes appelleroient sur leurs têtes la vengeance nationale! Qu’ils tremblent! leur masque est tombé, la proclamation énonciative de vos principes, que vous venez d’adresser au peuple, a déchiré le voile. Cette proclamation tant désirée sera pour le peuple la boussole qui le dirigera; elle sera le miroir dans lequel il reconnoitra vos ennemis et les siens ; elle va enfin le tirer de la fluctuation allarmante dans laquelle on l’entretenait; elle va fixer invariablement l’esprit public, que vous seuls avez le droit de diriger, quoiqu’en disent ces individus, qui prétendent qu’il appartient exclusivement aux sociétés populaires, dans lesquelles réside immédiatement la souveraineté du peuple. O sophisme! ô blasphème politique ! tu es trop bien senti pour avoir besoin d’être combattu! Cette proclamation salutaire va déjouer les projets des terroristes, rallier à la représentation nationale ceux qu’ils avoient égarés, redonner leur énergie à ceux qu’ils avoient comprimés, et assurer à jamais le triomphe de la justice et de la liberté. Les citoyens de la section de Mutius, qui jamais ne se sont écartés des principes, qui ont fait, avec un courage soutenu la guerre à tous les ennemis de la Révolution, ont entendu la lecture de cette adresse avec calme et silence; ils l’ont couverte d’applaudissements et ont unanimement arrêté qu’elle serait lue dans 3 séances de suite, affichée dans le heu de leurs séances, proclamée avec pompe dans l’arrondissement de la section, et qu’une députation de six de ses membres se rendroit aujourd’hui dans votre sein, pour jurer en leur nom de n’avoir jamais d’autres principes que ceux énoncés dans votre adresse au peuple et de faire dans tous les temps un rempart de leurs corps à la représentation nationale. Vive la République. Vive la Convention! Signé des six commissaires. 15 Sur l’exposé de quelques abus qui se sont glissés dans certains comités, La Convention nationale décrète que ceux qui, ayant fait faillite, ne se sont pas complètement libérés avec leurs créanciers, ne peuvent exercer aucune fonction publique (34). CLAUZEL : On s’élève de tous côtés contre les fripons et les voleurs; cependant il existe dans les autorités constituées, des banqueroutiers qui n’ont pas fait honneur à leurs affaires. L’Assemblée a exclu ces hommes immoraux des comités révolutionnaires, je demande qu’ils le soient aussi des autres fonctions. — Applaudi (35). [Clauzel saisit cette occasion pour instruire la Convention d’une nouvelle preuve de la probité de certains membres des comités révolutionnaires. Ils forçoient leurs créanciers, qu’ils avoient ruinés par des banqueroutes frauduleuses, de leur donner des quittances finales, en les menaçant de les faire incarcérer et même guillotiner. Il propose, et l’Assemblée décrète qu’aucun banqueroutier, qui ne sera pas entièrement acquitté avec ses créanciers, ne pourra exercer de fonctions publiques.] (36) 16 Les canonniers des Amis-de-la-Patrie [Paris] viennent, à leur retour du département de la Mayenne, féliciter la Convention sur la chûte de Robespierre (37). [Bayard, capitaine d’artillerie, au nom de la section des Amis de la Patrie, lit l’adresse suivante] (38) Représentens, La compagnie des canonniers de la section des Amis de la Patrie qui depuis 9 mois a quitté l’enceinte de la représentation nationale, pour faire la guerre aux scélérats chouans dans le département de la Mayenne ; nous avons le regret de ne point annoncer la mort du dernier; représentens les enfants de la liberté, n’ont rien de plus précieux en rentrant dans leurs foyers ; de se rendre au sénat de leurs pères. Nos femmes, nos enfants, ne recevront notre amitié qu’après avoir félicité la Convention nationale du courage et de la fermetté opiniâtre qu’elle a montrée dans les complots scélérats de ce brigand Robespierre, monstre ypocrite du répu-(34) P.-V., XL VII, 122. C 321, pl. 1333, p. 35, minute signée de Clauzel, et p. 40 imprimée. Bull., 21 vend, (suppl. 2). (35) Débats, n 750, 324; Ann. Patr., n° 650; C. Eg., n° 785; F. de la Républ., n 21; Gazette Fr., n” 1015; J. Fr., n° 747; J. Mont., n° 1; J. Paris, n° 22; J. Perlet, n° 749; J. Univ., n 1782; M.U., XLIV, 332. (36) Ann. R.F., n" 21. (37) P.-V., XLVII, 122. Gazette Fr., n" 1015 ; J. Fr., n° 747; J. Mont., n° 1. (38) C 322, pl. 1353, p. 18. Moniteur, XXII, 217; Débats, n 750, 321. SÉANCE DU 21 VENDÉMIAIRE AN III (12 OCTOBRE 1794) - N° 17 79 blicanisme et de la liberté; mais votre amour pour la patrie; a su déjouer ses infâmes complots. Nous avons apris avec joie la punition de ces traîtres en portant leur tête à l’échafaud; mais leur mort fut trop douce, après de pareils attentats;... représentans;... poursuivez frapés les traîtres qui voudraient asservir la république ; en se faisant un parti ; ne doutés point de notre courage : les canonniers du 10 août sont sous vos yeux ; faites des lois justes et équitables à un peuple qui depuis longtems soupire pour sa liberté. Nous saurons nous battre pour la déffendre ; et vous maintenir dans les droits sacrés; que ce même peuple a scu vous délégués. Nous renouvelons ici le serment de mourir libres. Vive la république. Vive la représentation nationale. 17 La section de l’Homme-Armé a, celle du Mont-Blanc h, la section Poissonnière c, celle de la Fraternité d, la section de Guillaume Tell et ses canonniers e, celle de la Réunion f [Paris], défilent successivement en masse dans la salle de l’Assemblée, qu’elles félicitent sur son Adresse au Peuple français. Toutes expriment les mêmes sentimens énoncés par les précédentes sections. Mention honorable, insertion au bulletin (39). a [La section de l’Homme-Armé à la Convention nationale ] (40) Représentants, Grâces vous soient rendues du plus beau présent que vous pussiez faire à la france. Les factions qui l’ont agitée et qui voudroient l’agiter encore, l’hypocrisie, l’abus des mots, la corruption des principes furent l’arme de ses ennemis les plus dangereux, leurs manoeuvres scélérates fut de dénaturer le vice et la vertu, d’en confondre les caractères et d’altérer pour longtemps la morale du peuple. C’est d’aujourd’hui qu’elle est replacée sur ses bazes éternelles, d’aujourd’hui nous avons une morale publique; votre adresse au peuple français sera désormais le flambeau sous lequel (39) P.V., XLVII, 123. Ann. R.F., n° 21; C. Eg„ n 785; F. de la Républ., n° 21; J. Fr., n” 747 ; J. Mont., n° 2; J. Per-let, n” 749; Mess. Soir, n° 785; M.U., XLIV, 334-335; Rép., n° 22. (40) C 322, pl. 1353, p. 19. Moniteur, XXII, 224; Débats, n° 751, 326-327; Bull., 21 vend.; Ann. R.F., n° 21; F. de la Républ., n" 21; Gazette Fr., n° 1015; J. Mont., n° 1; J. Per-let, n” 749. on placera les aristocrates et les modérés qui jouent le rôle de républicains, les fripons, les dilapidateurs, les intrigants, les dominateurs et les exagérés, qui crient dans leur fureur qu’ils sont les seuls vrais patriotes. Votre adresse à la main, tous les hommes de bien ne seront plus comprimés par la terreur, ils oseront parler un langage qui est le vôtre, ils oseront dire tout haut, qu’il n’y a point de patriotisme sans vertu, point de vertu sans l’observation des devoirs de père, d’époux, de citoyen et d’homme, sans un profond respect pour les lois, les moeurs et l’humanité. Eh ! re-présentants, quand l’homme de bien dans les — assemblées publiques parle selon son coeur, que sa parole est puissante, tout le peuple se ralie à sa voix, toutes les factions se cachent et se dispersent, tous les scélérats sont anéantis de quelque masque qu’ils se couvrent. Jouissez donc de votre gloire et de l’approbation de la france, elle va bientôt paroître tout entière pour vous honorer et vous bénir. Sévérité contre le crime, attention à tous les indices, mais protection à l’innocence, honneur à la probité, opprobre aux intrigues et aux partis, guerre à tous les tirans, à tous les dominateurs, gouvernement révolutionnaire jusques à la paix, dévouement à la République une et indivisible, confiance et dévouement à la seule Convention nationale. La section de l’Homme-Armé, dans cette nuit terrible et mémorable du 9 thermidor, fut l’une des premières à se prononcer contre l’audace des rebelles. Ne croyez pas représentants qu’elle ait dans son sein des combats à livrer, l’union carractérise la pureté de son patriotisme, tout ce qui est bon y est unanime, aussy l’une des premières aujourd’huy, elle accourt se ralier à vos principes sublimes, elle y a reconnu les siens propres, elle y voit avec ravissement au milieu des triomphes de nos armées le gage du salut intérieur, de la tranquilité publique et de la régénération universelle. Vive la République, vive la Convention nationale, vivent à jamais la probité, les moeurs et la justice. [On applaudit .] Leduc, président, Richebraque, rédacteur. La Convention ordonne l’impression de cette adresse. [Extrait du registre de l’asssemblée générale de la section de l’Homme-Armé, du 20 vendémiaire an III] (41) Appert laditte assemblée générale après les applaudissements réitérés, donnés à la lecture de l’adresse de la Convention nationale au peuple français, avoir arrêté que la section se rendroit demain en masse dans le sénat français pour y exprimer ses sentiments, à la barre, que les citoyens Richebraque, Target et Leduc (41) C 322, pl. 1353, p. 19.