[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (10 novembre 1790.] 361 duit dans notre ville de manière à mériter l’estime générale ; et nous désirons bien que le témoignage que nous aimons à lui rendre, serve à lui procurer des amis dans la crise fâcheuse où il se trouve. Nous vous serons obligés, Monsieur, si vous voulez bien nous faire connaître sa situation présente, et nous indiquer les moyens que nous pourrions prendre pour lui être utiles. Vous ajouteriez, Monsieur, à la confiance que vous nous avez déjà inspirée, et au respect avec lequel nous sommes, Monsieur, vos très humbles serviteurs. Les membres composant la société des amis de la Constitution. Signé : Belland, président. N-13. Copie de l'ordre du roi, pour l'arrestation du sieur Davoust. DE PAR LE ROI. Il est ordonné au prévôt des maréchaux et autres officiers de robe courte premiers sur ce requis, de saisir et arrêter le sieur Davoust, sons-lieutenant au régiment Royal-Ghampagne, et de le conduire en toute sûreté dans les prisons militaires de la ville d’Arras. Enjoint Sa Majesté au geôlier et garde des prisons de ladite ville de l’y recevoir et détenir sous bonne et sûre garde, jusqu’à nouvel ordre. Mande et ordonne Sa Majesté, à tous officiers et sujets , de donner audit of-cier porteur du présent ordre toute aide et assistante si besoin est pour l’exécution d’icelui. Fait à Paris, le 20 juillet 1790. Signé : Louis. Et plus bas : La Tour-du-Pin. N° 14. Cartouche délivrée aux soixante soldats. Nous, soussignés .......... lequel a servi depuis .......... jusqu’à ce jour, et est tenu de se rendre dans son pays. DÉNONCIATION du sieur La Tour-du-Pin par la commune de Paris. Lois. Nul ne peut être accusé ni détenu que dans les cas déterminés par la loi, et selon les formes qu’elle a prescrites. (Déclaration des droits de l’homme, art. 7.) Violations des lois. N* 1. Le sieur Muscar, fourrier des grenadiers du régiment de Vivarais, a été arrêté à Douai le 27 janvier 1790, et conduit au fort de Scarpe, enferme dans un cachot, sans qu’il y ait eu aucun ordre de lui donner à manger. Il ne paraît pas que ce crime ap-Sartînt au sieur La Tour-de-Pin. [ais on va voir qu’il se l’est bientôt approprié. Dans les premiers jours de février, Muscar a été conduit dans la prison militaire de la ville de Verdun. La partie du régiment de Vivarais, qui était restée avec ses chefs, fut envoyée en même temps dans la citadelle de la même ville. Le conseil général de la commune de Verdun, instruit qu’on se proposait de faire juger militairement le sieur Muscar, arrêta que le commandant de la place serait invité à se conformer , dans l'instruction de toutes affaires criminelles dont la connaissance lui appartenait, au décret de l'Assemblée nationale, sanctionné par le roi, au mois d'octobre 1789, ayant pour objet la réformation de quelques points de la jurisprudence criminelle. Il adressa deux expéditions de cet arrêté, l’une à l’Assemblée nationale, l’autre au sieur de La Tour-du-Pin, avec prière de donner des ordres pour qu'à l'avenir les décrets de V Assemblée nationale, concernant l'instruction des procédures criminelles, fussent observés par les con-Preuves. Lettre du sieur Doudeau, homme de loi de la ville de Douai, aux officiers municipaux de la ville de Verdun, du 6 février 1790, déposée aux archives de la commune de Verdun. (Voyez aux Pièces justificatives, n° 1, p. 355.) Voyez aux Pièces justificatives, n° 1, la lettre ci-dessus. Voyez aussi, n° 2 (p. 356), la lettre du sieur La Tour-du-Pin à M. le Président de l’Assemblée nationale. Voyez enfin, n° 3 (p. 356), celle des officiers municipaux de Verdun, au sieur La Tour-du-Pin, du 22 avril 1790. Voyez aux Pièces justificatives, n° 4 (p. 357), l’arrêté du conseil général de la commune de Verdun, du 11 février 1790. Voyez ibid, même numéro. 308 {Assemblée nationaie.J Lois, Nul ne pourra, sous peine d'être puni comme perturbateur du repos public , se prévaloir d’aucun acte prétendu émané de Sa Majesté ou de l’Assemblée nationale, s’il n’est revêtu des formes prescrites par la Constitution, et s’il n’a été publié par les officiers chargés de cette sanction. (Article l,r du décret de l’Assemblée nationale, du 23 février 1790, sanctionné par le roi.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES, Violations des lois. seils de guerre, comme par les tribunaux ordinaires. Les craintes de la commune de Verdun n’étaient pas sans fondement. Le sieur de La Tour-du-Pin avait en effet donné ordre au sieur de Cour* tavel, colonel du régiment de Viva-rais, de mettre le sieur Muscar au conseil de guerre. La démarche du conseil général de la commune de Verdun offensa grièvement le ministre. Il écrivit aux officiers municipaux , que Sa Majesté n'avait pas vu sans étonnement qu'ils se fussent mêlés d'un objet absolument étranger aux fonctions qui leur étaient confiées. Cependant leur lettre et leur arrêté Eroduisirent au moins quelque effet, e ministre écrivit au commandant de Verdun : « Sa Majesté entend * qu’il (Muscar) ne soit pas mis au conseil de guerre jusqu’à nouvel « ordre; et vous voudrez bien re-«r garder comme non-avenu ce que a j’ai mandé à M. de Courtavel, au oc sujet de ce fourrier. » En suspendant l’accusation, l’instruction et le jugement, non seulement il ne rendit pas la liberté à Muscar, mais il chargea au contraire le commandant de Verdun de le faire resserrer très étroitement , de prescrire au geôlier de le surveiller avec soin, et de le prévenir que si Muscar parvenait à s'échapper, Sa Majesté le rendrait personnellement responsable de son évasion. Dans la nuit du 9 au 10 avril 1790, le sieur Marchand, sous-lieutenant de la maréchaussée, ayant avec lui deux cavaliers, a enlevé le sieur Muscar des prisons de la ville de Verdun, et l’a fait conduire, de brigade, en brigade dans les prisons de Montmédy, Le sieur Marchand, interrogé par la municipalité de Verdun, est convenu du fait. Il a dit avoir agi en vertu d’une lettre qui lui a été adressée par M. Bouillé, à laquelle était enjoint un ordre signé du roi , contresigné La Tour-du-Pin, en date du 2 avril. Il a ajouté que l'ordre portait expressément que cet enlèvement serait fait sans en prévenir personne. Sur la dénonciation de ce fait à l’Assemblée nationale, le sieur La Tour-du-Pin a dit que, depuis que cet homme infiniment dangereux (Muscar) est dans la citadelle de Verdun, il n'a cessé d'y employer toutes sortes de moyens pour exciter de nouveaux troubles dans le régiment de Viva-rais. Mais ce fait est d’une fausseté notoire. Il a été formellement démenti par la municipalité de Verdun. Jamais Muscar n’a été enfermé dans la citadelle. Dès l’instant de son arrivée à Verdun, il a été constitué prisonnier dans la prison militaire de la ville , et non dans la citadelle. Outre la notoriété du fait, le registre des écrous en fournit une preuve irréfragable. D’un autre côté, pour empêcher toute communication entre Muscar et le régiment, ou a eu Pat* tentioa do no mettre aucun sous-{10 novembre 1790.] Preuves. Voyez aux Pièces justificatives, n» 5, la lettre du sieur de La Tour-du-Pin au commandant de Verdun, du 17 février 1790 (p. 358). Voyez aux Pièces justificatives, n° 6, l.a lettre du siepr de La Toqr-du-Pin aux officiers municipaux dp Verdun, du 19 février 1790 (p. 358). Voyez aux Pièces justificatives, n* 5, la lettre du sieur de La Tour-du-Pin au commandant de Verdun, du 17 février 1790 (p. 358). Ibidem , même numéro , même lettre. Voyez aux Pièces justificatives, n° 7, le procès-verbal et l’arrêté du corps municipal de la ville de Verdun, du 10 avril 1790, (p. 358). Ibidem, même numéro, même pièce. Voyez aux Pièces justificatives, n* 2, la lettre du sieur de La Tour-du-Pin à M. le président de l’Assemblée nationale (p. 356). Voyez aux Pièces justificatives, n*3, la lettre des officiers municipaux de Verdun au sieur de La Tour-du-Pin, du 22 avril 1790 (p. 356). (Assemblée nationale.) Lois. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Violations des lois. officier ni soldat dans la prison de la ville pendant tout le temps que Muscar y a été détenu. Muscar inspire à la commune de Montmédy le même intérêt qu’à celle de Verdun. Le ministre, fatigué de trouver partout des surveillants im-Sortuns, fait transférer sa victime de ontmédy à Longwy, et de Longwy au château de Rodemack. Partout Muscar est tenu au secret, par ordre de M. Bouillé , d’après ceux du ministre. Quel est donc leur droit sur la personne de Muscar? Ils n’ont plus même le prétexte de la subordination et de la discipline militaire. Le congé de Muscar est expiré au mois de juin 1790 ; et cependant il est encore aujourd’hui leur prisonnier ! Quel droit avaient-ils sur lui avant l'expiration de son congé ? Celui de l’accuser, s’il était coupable, celui de l’accuser et de faire instruire son procès suivant les formes prescrites par la loi. Jamais ils n’ont pu avoir le droit de le constituer prisonnier, de le retenir pendant onze mois dans les prisons, lorsqu’il n’y avait contre lui ni jugement, ni information, ni accusation légale. Quel est le crime de Muscar ? Il ne peut être présumé coupable, tant qu’il n’est pas accusé légalement. Mais écoutons le sieur LaTour-du-Pin : « Muscar a été, dit-il, le principal * moteur de l’insurrection qui a eu « lieu au régiment de Vivarais. » C’est à Lens, au moment du départ du régiment pour Douai, que l’insurrection a eu lieu. Lorsqu’elle a éclaté, Muscar était à Douai ; ou près d’y arriver, avec un détachement du régiment. Lorsqn’on apprend cette insurrection à Douai, lorsque l’officier qui commandait le détachement annonce l’ordre de repartir pour rejoindre le régiment à Lens, lorsque les grenadiers refusent d’obéir, c’est Muscar qui les réprimande, c’est lui qui les ramène à leur devoir, c’est lui qui leur enjoint d’obéir sans murmurer, et c’est pourtant lui que le ministre accuse d’être le principal moteur de l’ insurrection ! C’est lui qu’on enferme dans le fort de Scarpe, au moment même où il prêche la subordination et l’obéissance ! Les grenadiers attestent que : « Muscar a toujours réprimé les ré-« fractaires à la discipline militaire, c qu’il les a punis suivant la rigueur « des ordonnances, qu’il fut toujours « zélé pour le maintien du bon ordre, « qu’il ne leur a jamais inculqué rien « de contraire au respect et à l’obéis-« sance dus à leurs chefs en ge-« néral et à chacun en particulier, « les ayant toujours engagés à ren-« trer dans l’ordre, et à se soumettre « à ce que leurs chefs décideraient « sur la malheureuse difficulté qui a « divisé le régiment » : et c’est lui que le ministre accuse d’être le principal moteur de l’insurrection ! Les habitants de la ville de Béthune, où le régiment de Vivarais a résidé trois ans et demi, attestent que la conduite de Muscar lui a mérité l’estime générale, et c’est lui que [10 novembre 1790.) 363 Preuves. Voyez aux Pièces justificatives, n» 8, la lettre des officiers municipaux de de Montmédy à ceux de Verdun, du 24 avril 1790 (p. 359). Voyez aux Pièces justificatives, n° 10, la lettre du maire de Thion� ville à celui de Verdun, du 15 juillet 1790 (p. 359) . Voyez aux Pièces justificatives, n° 2, la lettre du ministre à M. le président de l’Assemblée nationale (p. 356). Voyez auxPièces justificatives, n° 10, la déclaration des grenadiers du régiment de Vivarais, du 30 janvier 1790 (p. 360). Ibidem , même numéro , même pièce. Voyez aux Pièces justificatives, n°‘ 11 et 12 (p. 360;. Lettre des amis de la Constitution, de Béthune, au maire et au procurour de la eommune de Verdun. 364 [Assemblée nationale.) Lois. Les ordres arbitraires emportant exil, et tous autres de même nature, ainsi que toutes lettres de cachet, sont abolis, et il n’en sera plus donné à l’avenir. (Article 10 du décret de l’Assemblce nationale du 16 mars 1790, promulgué par lettres patentes du 26 du même mois.) Cette loi est une application et un développement de l’article 7 de la déclaration des droits de l’homme {Voyez ci-dessus n° 1). Il ne pourra désormais être expédié de cartouche jaune et infamante à aucun soldat, qu’après une procédure instruite et en vertu d’un jugement prononcé selon les formes usitées dans l’armée, pour l’instruction des procédures criminelles militaires. (Article 4 du décret du 6 août 1790, sanctionné le 8.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Violations des lois. le sieur La Tour-du-Pin tient dans les fers comme un scélérat dont il importe de purger la société ! N» II. Le sieur Davoust, sous-lieutenant au régiment Royal-Champagne, a été arrêté à Hesdin le 19 août 1790, mis en prison, transféré le 21, pendant la nuit, dans la citadelle d’Arras, et mis au secret, par ordre daté du 20 juillet 1790, signé Louis, et plus bas : La Tour-du-Pin. N° III. Le décret ci-contre venait d’être sanctionné, lorsque le sieur La Tour-du-Pin fit demander au comité militaire une autorisation pour renvoyer avec des congés absolus vingt cavaliers du régiment de Royal-Cham-pagne, qui étaient, suivant lui, détestés par tous les camarades. Le comité répondit au ministre que l’Assemblée nationale n’avait défendu que les cartouches infamantes, et que c’était à lui à faire ce que sa prudence lui dicterait. Voici comment sa prudence en ordonna ; Le 21 août 1790, le sieur Biaudos, ci-devant Casteja, distribua, par ordre du sieur La Tour-du-Pin, au milieu de tout l’appareil militaire, non pas vingt, mais soixante cartouches à des sous-officiers et cavaliers du régiment de Royal-Cham-pagne ; quoiqu’il n’y eût contre eux, ni jugement, ni procédure, ni information, ni accusation légale. A la vérité, les cartouches n’étaient pas jaunes ; mais voici leur contexture : « Nous soussignés, etc., . • . [10 novembre 1790.] Preuves. Toutes les pièces relatives à l’affaire du sieur Muscar sont au comité des rapports de l’Assemblée nationale et au secrétariat de la municipalité de Verdun. Voyez aux Pièces justificatives, n° 13, l’ordre du roi, pour l’arrestation du sieur Davoust (p. 361). Voyez aux Pièces justificatives, n° 14 (p. 361), la cartouche délivrée aux 60 cavaliers : voyez de plus les dépositions des habitants d’Hesdin, des sous -officiers et soldats renvoyés ou restants au régiment, les procès-verbaux de la municipalité d’Hesdin, et l’information du commissaire du roi qui s’y sont transportés en vertu du décret du 4 septembre 1790. Toutes ces pièces sont aux comités militaires, des recherches et des rapports de l’Assemblée nationale. lequel a servi depuis le jusqu’à ce jour, et est tenu de se rendre dans son pays. » Ainsi, l’acte même qui devait, par sa nature , rendre la liberté aux soixante cavaliers, était pour chacun d’eux un ordre d'exil. Cet abus de l’autorité ministérielle est tout à la fois un attentat aux droits de l’homme, une violation du décret qui défend d’expédier des cartouches infamantes, et de celui qui défend tous ordres emportant exil. Voilà les faits que la commune de Paris dénonce contre le sieur Latour-du-Pin, ci-devantministre de la guerre. Elle supplie l’Assemblée nationale de prendre ces faits en considération, de déclarer qu’il y a lieu à accusation sur ces faits contre le sieur Latour-du-Pin, d’ordonner que l’accusation sera instruite et jugée dans les formes prescrites par les lois constitutionnelles, par le tribunal ui sera incessamment organisé pour connaître es crimes de lèse-nation et des cas de responsabilité des agents du pouvoir exécutif; et de prendre, au surplus, les mesures que sa sagesse lui suggérera, d’après les observations qui terminent la dénonciation du sieur Champion, ci-devant garde des sceaux, pour qu’aucun agent du pouvoir exécutif ne puisse échapper à la responsabilité. DÉNONCIATION du sieur Guignard, par la commune de Paris. Il y a plusieurs mois que le procureur de la commune a dénoncé le sieur Guignard, comme principal auteur d’un complot de coqtre-révolu-