[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j J “.TÔ®e *n “ 369 « Art. 1er. Il sera formé dans le jour, dans le comité de Salut public, une section chargée exclusivement de l’examen et du jugement des motifs d’arrestation des citoyens incarcérés par les comités de surveillance, en exécution de la loi du 7 septembre (vieux style), concer¬ nant les personnes suspectes. « Art. 2. Cette section sera composée de cinq membres, qui sont tenus de s’assembler deux fois par jour pour cet objet. « Art. 3. Ils seront renouvelés dans le comité tous les quintidi. « Leurs noms seront secrets. « Ils travailleront seuls dans une salle par¬ ticulière. Ils décerneront à la majorité des voix les mandats de liberté. « Art: 4. La Convention adjoint au comité de sûreté générale quatre membres dont les noms suivent: Dumaz (du Mont-Blanc), Re-verchon, Bourgain et Bouillerot. » Robespierre-C’est une avec certaine répu¬ gnance que je prends la parole contre un projet de décret qui vous est présenté au nom des comités de Salut public et de sûreté générale. Si j’avais pu assister à la séance de ces comités où il a été discuté, j’aurais présenté les ré¬ flexions que je vais vous soumettre. Comme c’est moi qui ai proposé les mesures contre lesquelles le rapporteur a parlé, je me crois obligé de faire sentir les dangers qu’entraî¬ nerait le projet de décret qu’il vous présente) Je vous déclare d’abord que je le crois abso¬ lument contraire à l’esprit de celui que vous avez décrété sur ma proposition; il occupera 5 membres du comité de sûreté générale à juger des réclamations sans nombre qui lui seront présentées de toutes les parties de la Répu¬ blique. Dans les circonstances où nous nous trouvons, établir une Commission de cette espèce qui absorberait l’énergie et le patrio¬ tisme de cinq membres de la Convention, serait porter un grand préjudice à la chose publique. La mesure que j’avais prise était plus simple, sans avoir d’inconvénients, elle ne demandait pas qu’une partie du comité de sûreté générale fût uniquement occupée des réclamations de l’aristocratie. Deux membres dans les moments de loisirs, dans des circonstances favorables, sans être importunés, auraient recherché le petit nombre de patriotes qui peuvent se trou¬ ver détenus avec les aristocrates. Par ce moyen, le comité de sûreté générale n’aurait pas perdu un temps précieux pour la liberté à entendre les sollicitations des mauvais citoyens. Prenez garde de tomber dans de plus grands inconvénients que ceux que vous voulez éviter; prenez garde qu’à la faveur du décret qu’on vous propose, la liberté ne soit accordée à quelques aristocrates; qu’il ne nous conduise à l’indulgence à l’égard de l’aristocratie, qui certes ne mérite pas qu’on crée un comité pour s’occuper d’elle; elle ne doit attendre la liberté que lorsque la Révolution aura été cimentée par une paix générale. Je demande que l’on s’en tienne au premier décret. Barère-Les comités de Salut public et de sûreté générale réunis jusqu’à 2 heures du matin, ont examiné cette matière; c’est le comité de sûreté générale qui a provoqué l’attention du comité de Salut public sur cet objet. Nous avons tous trouvé que les mesures lre SÉRIE, T. LXXX1I. décrétées sur la motion de' Robespierre avaient des inconvénients et étaient dangereuses; elles tendaient à isoler du comité de sûreté générale, centre naturel des mesures générales de police, l’examen des arrestations. Robespierre craint les sollicitations; mais il n’y a pas ici de procès par écrit à juger. Les comités révolutionnaires de la République en¬ verront à la Commission la liste des détenus avec des notes sur chacun d’eux, la Commis¬ sion prononcera sans avoir égard à des péti¬ tions qui lui seront présentées et qu’elle ne recevra pas. De plus, par l’adjonction que nous vous pro¬ posons, le comité de sûreté générale n’est privé que d’un seul membre, ainsi il pourra toujours s’occuper des grands intérêts de la République. J’ajoute que le décret que je vous ai soumis est le vœu des deux comités réunis; si la Con¬ vention le trouve mauvais, elle est la maîtresse de le rejeter. Au reste, d’après les motifs déve¬ loppés dans mon rapport, on ne soupçonnera pas qu’il soit fait pour favoriser l’aristocratie. Moise Bayle-Je demande la parole pour proposer que le rapport de Barère fût imprimé et envoyé à tous les comités révolutionnaires, et que le projet de décret soit adopté; car il faut bien que celui qui a été rendu sur la mo¬ tion de Robespierre soit exécuté. Si l’exécution qu’on vous propose a des inconvénients, nous la perfectionnerons. Robespierre-Il est trop dangereux d’ouvrir une première porte à l’aristocratie. Faites im¬ primer le projet de décret et méditez-le, je suis persuadé que vous trouverez, comme moi, qu’il entraîne beaucoup d’inconvénients. Billaud-Varenne-Si dans ce décret il y a des inconvénients, ils viennent du premier qui a été rendu. Si la Convention eût conservé son énergie et sa fermeté, elle aurait passé à l’ordre du jour sur les réclamations des contre-révolutionnaires qu’on vous présenta à la barre. Il est certain que le comité de sûreté générale ne peut répondre à toutes les sollicitations de l’aristocratie, qui ne mérite que notre animad¬ version. Je demande donc le rapport du pre¬ mier décret. Goupilleau-La matière que nous discutons est assez importante, je demande l’ajournement de la discussion. Billaud-Varenne. Ce serait abuser la France entière que de maintenir un décret inexécutable, j’insiste sur le rapport du premier décret. La Convention rapporte son premier décret, passe à l’ordre du jour sur le second; ordonne l’impression du rapport de Barère et l’envoie aux comités révolutionnaires. La séance est levée à 5 heures (1). Signé : Couthon, président; Bourdon (de l’Oise), Marie-Joseph Chénier, A.-L. Thi-baudeau, Jay, Perrin (des Vosges), Pé¬ lissier, secrétaires. (1) Procès-verbaux de la Conuenlion, t. 28, p. 115. 24