[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [il mars 1790.] jjK de billet recevrait une prime égale au quart de sa valeur. Celle forme de tirage est simple et n’exige aucune liste ; la chance ne peut que donner de l’attrait et du cours aux billets; et il est indubitable qu’au moins, à la fln de chaque mois, on préférerait à l’argent un papier qui offre un bénéfice possible et considérable. Les 150 millions de ces billets peuvent être délivrés à la caisse d’escompte, en paiement de la plus grande partie des 170 millions qui sont dns par la nation; à la charge, en continuant de payer la somme limitée d’argent qu’elle distribue chaque jour, d’échanger aussitôt, à bureau ouvert, ces papiers contre ses propres billets. Il paraît incontestable qu’on serait empressé de venir troquer les billets de caisse, qui ne rapportent rien, contre de nouveaux effets qui portent avec eux une espérance assez considérable, et de tous les mois; enfin, des billets souscrits par des particuliers, contre des billets dont le gage serait souscrit par la ville de Paris, et hypothéqué sur des immeubles dont la vente serait ouverte, et comme la caisse d’escompte n’a que pour environ 152 millions de billets dans la circulation, aussitôt que cet échange serait consommé, elle conserverait seulement quelques millions d’effets circulants, elle' serait dégagée de toute association aux opérations du gouvernement; elle pourrait reprendre le cours de ses opérations ordinaires et de pur commerce; et en payant à bureau ouvert, en argent, çe qui resterait de ses billets, elle rapprocherait de nous cette époque désirée, de ses paiements libres au premier juillet. Je ne sais, Messieurs, si noire zèle nous aveu-le, si le désir de voir finir les maux inséparables 'une grande révolution, et de terminer nos in-uiétudes, nous fait embrasser des chimères qui attent nos espérances; mais nous croyons que les idées et les vues que nous vous proposons sont également avantageuses, et à la nation, et à la ville de Paris; nous croyons qu’elles sont le seul moyen de remédier à la disette du numéraire, de raminer la confiance, et de faire renaître le commerce. L’Assemblée nationale sait qu’elle ne peut sauver la chose publique qu'en donnant de la valeur aux assignats sur les biens du clergé ; les billets souscrits par la ville, et hypothéqués sur les, fonds du clergé, auront la valeur que n’ont pu obtenir les assignats. L’Assemblée sait que la vente de ces biens ne peut être bien faite, et à profit, que par des agents qui en fassent leur chose, qui sachent temporiser, saisir les moments, et estimer le cours des biens, avant de les exposer en vente. L’Assemblée aura, dans les officiers municipaux, des agents qui seront des citoyens intéressés à la chose publique qu’ils ont déjà sauvée une fois. Elle libérera la caisse d’escompte de ses engagements, elle renouvellera le crédit de cette administration, dont la gêne inquiète tous les esprits, et dont la chûte ébranlerait, si elle n’anéantissait Eas, le crédit public : enfin, l’Assemblée, eu réta-lissant tout à coup la circulation, fera taire les ennemis de l’Etat, qui répandent, dans Paris et dans les provinces, que la banqueroute est faite, ou va se faire; et, ce qui est plus important encore que ces rumeurs populaires, elle assurera en effet, et pour jamais, la dette publique qu’elle a déjà mise sous la garde de l’honneur et de la loyauté française. Quant à la ville de Paris, elle sera chargéed’une opération, de la plus grande importance ; elle n’y est point engagée par la portion des bénéfices qu’elle réclame pour des objets d’utilité; c’est une demandé de citoyens purs et désintéressés ; c’est une demande que des citoyens généreux peuvent faire ou peuvent accorder ; mais ce qui la flattera, Messieurs, ce qui l’honorera, c’est votre confiance, c’est d’être employée à une œuvre utile à la France entière; c’est d’avoir part à un acte de votre sagesse, qui sera le complément de la Révolution, et en donnant l’exemple, à cet égard, aux autres villes, d’ajouter ce service aux traits de courage et de patriotisme de nos concitoyens qui ont commencé la Révolution. Si les vues, les moyens généraux que nous vous avons proposés, Messieurs, vous paraissent utiles à employer dans toutes les municipalités; si, surtout, fl vous paraît important de les mettre en exécution, et promptement dans cette grande municipalité de Paris, qui peut offrir à des besoins très urgents, des secours très puissants, alors, Messieurs, mes collègues et moi, fiers et heureux de cette adoption que vous nous accorderez, déjà autorisés par votre aveu, nous nous retirerons par devers nos commettants pour soumettre ces moyens à leurs lumières, leur proposer de faire les offres que vous serez disposés à agréer, et leur demander leur autorisation. Signé : Bailly, maire; Boullemerdb la Màr-tinière, procureur-syndic; Celerier, lieutenant de maire; Le Couteulx dr là Noràye, lieutenant de maire; Cànuel, conseiller-assesseur. M. le comte de Castellane. Je demande que le mémoire soit imprimé, distribué et renvoyé au comité des finances afin qu’il en fesse rapport mardi prochain. (Cette proposition est adoptée.) M. le baron de Gernon, membre du comité de constitution, rend compte d’une difficulté qui s’est élevée entre les députés de la sénéchaussée de Nérae et ceux de la sénéchaussée de Condom. Les uns et les autres réclament lavilledeMoncra-beau pour leur district. Il propose le décret suivant qui est adopté : L’Assemblée nationale décrète, conformément à l’avis de son comité de constitution, que la ville de Moncrabeau sera réunie au district de Nérae, 4 moins qu’elle n’exprime 4 cet égard un vœu contraire. M. le Président lève la séance après avoir indiqué celle de demain pour neuf heures du matin. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRESIDENCE DE M. L’ARBÉ DE MQNTESQUIOU. Séance, du jeudi 11 mars 1790, au matin (1). M. le Président ouvre la séance à 9 heures du matin. M. Merlin, Vun de MM. Les secrétaires , donne lecture de la séance du mardi soir, 9 mars. M, Guillaume, autre secrétaire, fiait lecture du procès-verbal de la séance d’hier. (lj Cette séance est incomplète au Moniteur. \\Q [Assemblée nationale.] ARCHIVES Pi Il ne s’élève aucune réclamation. M. Eianjuinais, au nom du comité ecclésiastique, dit que l’Assemblée a renvoyé à ce comité, il y a environ trois semaines, une motion relative aux adjudications des bois ecclésiastiques. Le comité propose un projet de décret qui est adopté ainsi qu’il suit : « Sur ce qui a été exposé de la part du comité ecclésiastique et de celui des Domaines, que des municipalités donnant à certains décrets de l’Assemblée nationale une interprétation contraire à leur véritable sens, ont mis opposition à des coupes de bois dépendants d’établissements ecclésiastiques, quoiqu’elles aient été autorisées dans les formes légales avant 1789, ou dans le courant de cette année, avant le mois de novembre dernier, ce qui trouble des marchés contractés sous la foi publique, suspend des approvisionnements nécessaires, et donne lieu à des recours en garantie qu’il est important de prévenir : « L’Assemblée nationale décrète que les coupes extraordinaires des bois des ecclésiastiques autorisées et adjugées dans les formes légales antérieurement à la publication du décret du 2 novembre dernier , ne peuvent être arrêtées ni troublées par aucun corps ni individu, sous prétexte des décrets des 2, 17 et 27 novembre, et 11 décembre 1789 ; ordonne, en conséquence, que les adjudications desdites coupes seront exécutées nonobstant les oppositions des municipalités, ou d’autres corps ou individus, à la charge néanmoins aux adjudicataires de verser dans la caisse de l’administration des Domaines le prix des adjudications, duquel il ne sera disposé que d’après l’avis des assemblées de districts ou de départements, ou de leurs directoires. « Il sera sursis par provision, et jusqu’à ce qu’il ait été autrement ordonné, à toutes permissions et adjudications de coupes extraordinaires des bois dépendants d’établissements ecclésiastiques, et sera le présent décret incessamment présenté à la sanction royale. » M. Goupil de Préfeln dénonce une erreur importante qui a été commise dans l’impression in-4° faite à l’imprimerie royale de l’adresse de l’Assemblée nationale aux Français. Dans cette édition, page 11, ligne 14, au lieu de maux inséparables d'une grande révolution , on lit, maux irréparables. Il demande que l’Assemblée ordonne la rectification de cette erreur. La motion est adoptée et le décret suivant est rendu : « L’Assemblée a décrété que l’édition faite à l’imprimerie royale, en douze pages d’impression de format in-quarto, dans laquelle, à la ligne quatorzième de la page onzième, le mot irréparables se trouve substitué au mot inséparables que porte le texte de cette adresse, est déclarée être en ce point une édition fautive : en conséquence, a décrété qu’il est fait défenses à toutes personnes de distribuer aucun exemplaire de ladite édition dans laquelle cette faute ne soit corrigée, comme aussi de faire aucune nouvelle édition de ladite adresse dans laquelle cette faute se trouve répétée : arrête, au surplus, que son président se retirera incessamment vers le roi, pour solliciter Sa Majesté d’accorder sa sanction royale au décret de l’Assemblée nationale portant que son adresse aux Français sera lue aux prônes de toutes les paroisses du royaume. » M. Bouche. M. le Président a sans doute porté LEMENTAIRES. [11 mars 1790.] auroi le décret rendu vendredi dernier, et par lequel Sa Majesté est suppliée d’enjoindre à ses ministres de remettre aux différents comités, et sur leur première réquisition, les pièces qui seront demandées, et notamment le Livre Rouge, etc. Je demande que M. Je Président nousapprennequelle a été la réponse du roi. M. le Président. Le roi m’a dit qu’il prendrait toujours en grande considération tous les décrets de l’Assemblée nationale. C’est sa réponse ordinaire lorsqu’on présente quelques actes à sa sanction. M. Camus. Le décret dont il s’agit n’est pas susceptible d’être sanctionné. (Cette discussion n’a pas de suite.) M. le Président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion sur les articles proposés par le comité féodal. M. Merlin. Le comité a rejeté l’article additionnel que j’avais eu l’honneur de vous présenter hier, et que vous lui aviez renvoyé. Il a peusé qu’il fallait, par un léger changement dans le premier des articles décrétés hier, assimiler les partages aux contrats de vente. Cet article commence ainsi : « Il ne pourra être prétendu par les personnes qui ont ci-devant acquis des particuliers, par vente ou autre titre équipollent à vente, etc. Au lieu de ces derniers mots, le comité propose de mettre par vente et partage ou par tous autres actes de propriété incommutable. (On se dispose à aller aux voix.) M. Fréteau de Saint-Just. Vous ne pouvez pas faire un plus grand tort, un tort plus gratuit aux familles, si vous adoptez cet article. Une semblable question mérite bien d’être discutée. Votre comité, sur des objets moins importants, vous a rapporté d’une manière détaillée les motifs pour et contre. Il n’est pas absolument nécessaire que vous preniez aujourd’hui un parti : il ne s’agit pas d’un article constitutionnel. J’adjure la justice et la sensibilité de l’Assemblée de ne pas trancher si vite une question qui aurait d’aussi grandes conséquences pour les familles. Je le demande pour ce tribunal auguste, qui s’est immortalisé par la sagesse de ses décrets, et qui en ce moment détruirait l’œuvre de sa justice. (L’Assemblée ajourne l’objet de cette discussion à mardi prochain.) M. Merlin propose ensuite, au nom du comité féodal, deux articles destinés à être placés après l’article 2 du titre III des droits féodaux rache-tables. Ces articles sont ainsi conçus : 1° Les contestations sur l’existence ou la quotité des droits énoncés dans l’article précédent, seront décidées d’après les preuves autorisées par les statuts, coutumes et règles observées jusqu’à présent. 2° Lorsqu’il sera produit pour raison d'un même tènement, plusieurs reconnaissances, dont les unes grèveront plus que les autres, les moins onéreuses seront préférées, sans avoir égard au plus ou moins d’ancienneté de leurs dates. M. Lanjuinais observe que le premier article ne servira à autre chose, qu’à conserver les bizarreries des usages en vigueur dans divérses