573 [Assemblée nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juillet 1791.] voir vous proposer d’annuler ce monument des anciennes déprédations. Mais, en révoquant l’échange, il reste à statuer sur le remboursement des sommes qui ont été payées d’avance pour soulte de l’échange; à cet égard, le comité croit devoir distinguer une première créance de 500,000 livres qui avaient été prêtées en 1781 pour servir à rétablir le crédit de M. His, de Hambourg. D’après les lettres des ministres qui ont proposé au roi de faire cette avance à la maison His, il paraît que les motifs qui ont déterminé ce prêt étaient les services que M. His et son père avaient rendus à l’Etat. Quoique M. d’Ës-pagnac ait souscrit comme débiteur, il n’en est pas moins vrai que les fonds ont été destinés au soutien d’une maison de commerce à laquelle le gouvernement croyait devoir de la reconnaissance. Ainsi, r au lieu d’une répétition rigoureuse, le comité vous aurait proposé, Messieurs, d’en faire la remise, si les termes de l’acte qui constate ce prêt et les précautions prises pour en assurer le remboursement ne l’eussent empêché de prendre sur lui cette proposition. Il n’en est pas de même des 500,000 livres qui ont été avancées à compte du prix de Sancerre. Cette somme n’a été délivrée que dans la vue de mettre M. d’Espagnac en état de satisfaire les créanciers qui avaient des droits sur cette terre, qui devait être remise au roi franche de toute hypothèque. 'La manière dont cette décision du roi a été exécutée peut faire craindre que le recouvrement de cette somme ne soit pas assuré. Ce recouvrement ne serait pas incertain, si le ministre des finances, chargé de l’exécution des ordres du roi, s’y fût conformé, en veillant à l’emploi des sommes qui sortaient du Trésor public ; la nation se trouverait aujourd’hui aux droits des créanciers hypothécaires et elle n’aurait aucun risque à courir. Mais l’intérêt qui attachait M. de Galonné à cet échange déterminait sa facilité envers son échangiste. La somme, qui aux termes du contrat du 30 mars 1785 devait être payée en 3 termes, M. d’Espagnac l’avait touchée dès le 12 janvier précédent, soit en argent comptant, soit en assignations sur le Trésor royal. M. de Savalette, qui avait effectué ce payement, ne l’avait cependant pas fait sans précautions; il avait exigé que le notaire de M. d’Espagnac se chargeât personnellement de l’emploi de 100,000 écus, montant des assignations; mais la reconnaissance a été rendue en exécution d’un ordre de M. de Galonné, qui autorise M. d’Espagnac à en substituer une pure et simple, et il est résulté de cet arrangement qu’aucune partie de la somme de 500,000 livres n’a été employée à payer lis dettes hypothéquées sur le comté de Sancerre. S’il est un cas où la responsabilité d’un ministre soit évidente, c’est bien celui où se trouve M. de Galonné, relativement à ce payement. Quand on lui accorderait, dans toute sa latitude, le principe par lui posé, qu’on ne peut inculper un ministre sur ce qui a été agréé par le roi antérieurement à la loi de responsabilité, il ne pourrait du moins disconvenir qu’il n’ait dû être responsable lorsqu’il agissait contre la décision du roi. Or, dans l’affaire dont il s’agit, on voit que, suivant l’intention expresse de Sa Majesté, la somme que M. d’Espagnac recevait, ne devait être employée qu’à décharger la terre de Sancerre des hypothèques dont elle émit affectée. Le ministre est donc coupable d’avoir fait ce payement sans précaution, et il doit répondre des suites de sa négligence à cet égard. Le comité a l’honneur de vous proposer le projet de décret suivant : Projet de décret. « L’Assemblée nationale, considérant que rien ne justifie que le gouvernement ait excité en 1777 le sieur d’Espagnac à faire l’acquisition de la terre de Sancerre ; « Qu’aucun motif réel de justice ou de convenance n’a déterminé l’échange de cette terre en 1784; « Que le consentement donné par le roi à cet échange a été surpiis par un exposé infidèle du sieur de Galonné, alors son ministre, devenu partie intéressée dans ce même échange; « Que, dans le choix des domaines échangés, on a compris des forêts considérables, contre l’intention que le roi avait expressément manifestée ; « Que la masse des domaines donnés en échange a été progressivement augmentée, au préjudice de l’Etat, par des distractions et des remplacements combinés; « Et qu’enfin l’intérêt national, blessé par la disproportion énorme qui existe entre le domaine de Sancerre et ceux qui ont été cédés en échange ne permet pas de consommer un pareil contrat ; « Décrète ce qui suit : « Art. 1er. L’Assemblée nationale révoque le con-t rat d’échange, pas.'é le 30 mars 1785, entre les commissaires du roi d’une part, et le sieur Jean-Frédéric-Guillaume Sahuguet d’Espagnac de l’autre, et tout ce qui a précédé et suivi ; décrète en conséquence que tous les domaines compris audit contrat et aux lettres patentes des mois de mars et d’août 1786, sont réunis au domaine national, pour être administrés par les proposés à la régie des domaines nationaux, à compter de la publication du présent décret, délaisse audit sieur d’Espagnac le ci-devant comté de Sancerre, pour s’en remettre en possession actuelle, et en jouir comme si ledit échange n’avait pas eu lieu. « Art. 2. L’agent du Trésor public se pourvoira par les voies de droit en payement de la somme de 500,000 livres dont il a été donné quittance audit sieur d’Espagnac, par le contrat d’échange. « Art. 3. Il se pourvoira également, en rér éti-tion de pareille somme de 500,000 livres payée en vertu de l’ordonnance du comptant, du 9 janvier pour soulte provisoire dudit échange, et ce, tant contre ledit sieur d’Espagnac que contre le sieur de Galonné, quia fait délivrer cette somme contre la décision du roi, du 26 septembre 1784, sans en assurer l’emploi en payement des dettes hypothéquées sur le ci-devant comté de Sancerre. « Art. 4. L’agent du Trésor public poursuivra en outre le remboursement de la somme de 160, 733 1. 4 s., payés en vertu des ordonnances de comptant, des 28 mars 1781, 10 septembre et 12 novembre 1786, sur laquelle somme il sera fait déduction au sieur d’Espagnac des frais relatifs audit échange. ■>