176 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE suffît d’annoncer qu’il est infiniment au-dessous de celui que la malveillance, qui grossit tout, qui empoisonne tout, se plaît à publier. J’ai déjà observé que, depuis trois mois, il n’y avait pas eu moins de poudre dans la poudrerie : la perte dans cette partie est légère; elle n’ôte rien à nos moyens d’attaque contre nos ennemis. Valenciennes et Condé nous en ont fourni dix fois plus que nous n’en avons perdu : aussi n’est-ce pas sur cet objet que pourra s’exercer la malveillance; elle annoncera sans doute avec complaisance que l’établissement perdu ne se réparera jamais, ou du moins qu’il ne se réparera qu’avec une lenteur mortelle. Je pourrais dire que le soldat républicain n’a pas besoin de poudre, quand il a une baïonnette; cent actions l’ont assez prouvé; mais j’annonce hautement que les mesures sont prises pour que la fabrication des poudres ne soit pas ralentie; qu’elle sera distribuée, sur plusieurs points, dans des moulins déjà existants; que de nouvelles fabrications révolutionnaires succéderont aux anciennes dans des lieux éloignés de toute habitation; que de nouveaux mécanismes, qu’on venait de perfectionner, vont économiser l’emploi des hommes, et qu’enfîn, avant huit jours, le produit de la fabrication sera de niveau, peut-être supérieur à celui de la fabrication ancienne. Rois, despostes, aristocrates, fanatiques de toute espèce, apprenez donc enfin à connaître cette nation, dont le courage s’accroît dans le péril, et dont le malheur centuple les ressources. Les sages décrets que la Convention a rendus hier, celui qu’elle vient de rendre sur le rapport du comité des Secours me laissent à proposer, de la part des deux comités, le décret suivant (44). La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de ses deux comités de Sûreté générale et de Salut public, décrète qu’il sera fait mention honorable du zèle que les citoyens de Paris et des communes environnantes ont manifesté dans la journée de l’explosion de la poudrerie de Grenelle. Le présent décret et le rapport qui a précédé seront imprimés, insérés au bulletin, distribués et envoyés aux quarante-huit sections de Paris (45). 25 Plusieurs membres annoncent qu’on va procéder àu renouvellement des membres sortis du comité de Salut public, conformément au décret d’organisation des comités. Avant de procéder à l’appel nominal, les citoyens Billaud-Varenne et Collot d’Her-(44) Moniteur, XXI, 654-655; Débats, n° 712, 278-281, qui signale de fréquents applaudissements à l’écoute de ce rapport. J. Fr., n° 707; F. de la Républ., n° 425; J. Univ., n° 1742; J. Paris, n° 611; M. U., XLIII, 253. C. Eg., n° 744; J. S.-Culottes, n° 564; Ann. R.F., n° 273; Rép., n° 256. (45) P.-V., XLIV, 277. Décret n° 10 670. Rapporteur : Treilhard. Moniteur, XXI, 654-656; Débats, n° 712, 278-282; Ann. Patr., n° 609; Gazette Fr., n° 975. bois, membres de ce comité, annoncent qu’ils ont donné leur démission. Un rapporteur du comité de Salut public annonce que les trois membres désignés par le sort pour être remplacés dans le comité de Salut public, sont Carnot, Lindet, Barère : il leur annonce en même temps que Billaud et Collot ont donné leur démission (46). DUHEM : Je demande que la Convention décrète qu’attendu ces deux démissions on ne remplacera qu’un membre au comité de Salut public. Cette proposition est décrétée. CAMBON : Je crains que, si nous acceptons les démissions qui nous sont proposées, l’aristocratie n’en profite. (Non, non ! s’écrie-t-on). Il ne faut pas seulement que les législateurs soient irréprochables, mais il faut encore que le soupçon ne plane point sur leur tête. Je demande que les démissions soient réfusées (47). (Cambon) pense que, d’après le décret d’avant-hier, qui a déclaré calomnieuses les accusations intentées contre plusieurs membres de l’Assemblée, il seroit à craindre que la malveillance ne profitât de ces démissions pour répandre des nouvelles calomnies et des soupçons, dont l’ombre même ne doit pas planer sur des représentans du peuple (48). On réclame l’ordre du jour. L’Assemblée l’adopte. BILLAUD : Il ne peut y avoir d’équivoque sur les motifs qui ont dicté une démission, quand elle est volontaire. COLLOT; Ce n’est pas d’aujourd’hui que nous avions l’intention de donner notre démission; nous en avions formé le projet dès le moment que la Convention a posé le principe qu’un trop long séjour des mêmes membres dans le même comité pourrait être dangereux pour la liberté publique. Plusieurs de nos collègues étaient instruits de notre résolution (oui, oui ! disent plusieurs membres), et cela ne tient à aucune circonstance (49). (Collot) : ... Le moment nous a paru d’autant plus favorable, que, par les diverses attributions données par l’Assemblée à ses comités dans leur réorganisation, le travail dont nous étions chargés se trouve donc réduit à peu de chose : nous ne serions que d’une foible utilité : au lieu que notre retraite donnera à nos collègues des seconds qui leur seront plus utiles, et les seconderont dans des fonctions auxquels un seul homme ne peut suffire. L’Assemblée applaudit (50). La Convention nationale décrète que les deux membres de ce comité sont censés être sortis par le sort, et en conséquence rend le décret suivant : Deux des membres du comité de Salut public ayant donné leur démission, la (46) Débats, n° 712, 282. (47) Moniteur, XXI, 656. (48) Débats, n° 712, 282. (49) Moniteur, XXI, 656. (50) Débats, n° 712, 282; M. U., XLIII, 253; C. Eg., n° 744; J. Fr., n° 707. SÉANCE DU 15 FRUCTIDOR AN II (1er SEPTEMBRE 1794) - N“ 27 177 Convention décrète qu’il n’en sortira plus qu’un par le sort, et qu’il sera tiré à l’instant entre les trois qu’il avait déjà désignés pour sortir à ce renouvellement (51). En exécution du décret ci-dessus, les trois membres dudit comité qui désirent tirer au sort annoncent à la Convention que c’est le citoyen Barère qui sera le membre sortant entre eux trois. Le citoyen Tallien, membre du comité de Salut public, donne à la Convention sa démission de membre de ce comité. TALLIEN : Les principes que vous venez de consacrer en acceptant la démission de Billaud et de Collot m’engagent à prendre la parole. J’ai depuis plusieurs jours observé ce qui se passe dans cette Assemblée. J’ai envisagé l’intérêt public, le salut de la patrie, et je me suis dit avec tous les bons citoyens : « Nul homme dans une république, ne doit se mettre à la place des principes; si sa présence dans un comité peut être une pierre d’achoppement, une espèce d’entrave au succès révolutionnaire, il doit se condamner à une espèce d’ostracisme ». Il est temps que les hommes disparaissent devant les principes, et que la liberté, l’égalité et la justice réunissent seules tous les suffrages. C’est à cette base fondamentale de tout bon gouvernement que je me rallie. Loin de moi l’idée de jeter dans la Convention nationale de nouveaux germes de dissensions, qui n’ont déjà que trop troublé nos délibérations. Je sacrifie donc, en ce moment, tout amour-propre et tout ressentiment particulier sur l’autel de la patrie, et je déclare que je donne ma démission de membre du comité de Salut public; je rentre dans les rangs pour y combattre avec la même énergie tous les ennemis de la révolution. Puisse la résolution que je prends en ce moment devenir l’époque de la réunion de tous les vrais amis du peuple et de l’anéantissement de ses ennemis. Je demande que la Convention accepte ma démission (52). La Convention nationale décrète que l’appel nominal sera fait à l’instant pour la nomination de quatre membres pour compléter ce comité (53). On procède à l’appel nominal, à la suite duquel la Convention nationale rend le décret suivant : La Convention nationale, après avoir procédé à l’appel nominal, décrète que les citoyens Delmas, Cochon, Merlin (de Douai) et Fourcroy, représentants du peuple, sont nommés membres du comité de Salut public, pour remplacer les membres qui sont sortis le même jour dudit comité (54). (51) Décret n° 10 675. Rapporteur : Richaud. (52) Moniteur, XXI, 656; Débats, n° 712, 283. (53) Décret n° 10 676. Rapporteur : A. Dumont. (54) Décret n° 10 677. Rapporteur anonyme selon C*Il20, p. 278. La séance est levée à quatre heures (55). Signé, Merlin (de Thionville), président; Bentabole, Frêron, Guffroy et Barras, secrétaires. AFFAIRES NON MENTIONNÉES AU PROCÈS-VERBAL 26 [Le citoyen Berruer, cour du Muséum, aux membres du comité de Salut Public, le 8 fructidor an 1/7(56) Le c. Berruer, sculpteur, s’étant présenté le 14 thermidor, aux citoyens inspecteurs de la salle, avec plusieurs projets pour les concours, ils ont été refusés, parceque le délai était expiré, il a été renvoyé au comité de Salut public, pour en obtenir la permission de faire recevoir ses ouvrages : il a présenté, en conséquence au comité de Salut public, le 15 thermidor, un mémoire qui a été timbré de la date du 15, et enregistré sous le n° 483. Il a été aussi enregistré au secrétariat le 17, sous le n° 3676. Ce mémoire a été ensuite envoyé de commission en commission, et toutes ont répondu que le comité de Salut public, SEUL, pouvait prononcer sur la demande du citoyen Berruer, qui se borne à ce seul point; c’est que les citoyens inspecteurs de la salle soient autorisés à recevoir ses projets pour les différents concours, et à les faire placer dans la salle de la liberté. Décrété sur la motion de Chénier, 15 fructidor. 27 [L’administration du district de Luxeuil, Haute-Saône, au président de la Convention, le 7 fructidor an II] (57) Citoyen, Tandis que nos armées repoussent aux frontières les satellites des despotes, la raison fait dans l’intérieur les plus grands progrès. Le siècle des prêtres n’est plus. La République est triomphante. Les vases et ornements du ci-devant culte vont se purifier dans le creuset national, et pour la première fois vont être utiles à la société. Cette administration, a envoyé hier à la diligence de Vesoul, dans quatre caisses, six cens quatorze marcs, cinq gros d’argenterie, provenant des ci-devants églises de ce ressort, dix marcs de galons, cinquante livres pesant d’étoffes, tissées et brodées en or et argent, une châsse en ivoire, (55) P.V., XLIV, 277-278. Bull., 16 fruct.; M. U., XLI1I, 253; J. S.-Culottes, n° 564; Ann. Patr., n° 609; Ann. R.F., n° 273; Rép., n° 256; J. Fr., n° 707; F. de la Républ., n° 425; Gazette Fr., n° 975; J. Univ., n° 1742; J. Paris, n° 611. (56) C 320, pl. 1314, p. 23. (57) C 318, pl. 1293, p. 3. 12