(Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [24 mai 1791.) du Corps législatif, rendu sur la proposition du roi, sanctionné et proclamé par lui. « Art. 9. Et dans le cas où le Corps législatif ne serait point assemblé, le roi pourra de sa seule autorité proclamer que tels places ou postes sont en état de guerre , sous la responsabilité personnelle des ministres; mais, lors de la réunion du Corps législatif, il délibérera sur la proclamation du roi à l’effet de la valider ou de l’infirmer par un décret. » M. Rewhell. L’article 7 est très délicat. Si l’on en croit les bruits qui se répandent journellement, on n’attend qu’un instant favorable pour insulter Landau, Wissembourg, Strasbourg; sitôt que l’insulte sera faite, vous ne pourrez vous dispenser de déclan r ces places en état de guerre, et alors vous aurez fait cesser dans les villes toute autorité civile, quelle qu’elle puisse être; vous aurez investi le commandant militaire de toute l’autorité possible; et si le commandant militaire est un aristocrate, que deviendra la province? M. Prieur. Je demande, moi, ce que deviendra la France, Messieurs, le jour où vos magistrats populaires, où vos corps administratifs seront dépouillés, non seulement de la police, mais du droit de protéger les citoyens, il n’y a plus véritablement de liberté. Considérez d’ailleurs que la déclaration que telle place est en élat de guerre peut être très fréquente, et que, sur des alarmes bien ou mal fondées, il serait très possible que le Corps législatif déclarât toutes les places en état de guerre. Quels dangers alors à remettre entre les mains des militaires une police universelle! Mais parlons sans chaleur et transigeons sur l’article. N’y aurait-il pas moyen de donner la police intérieure aux officiers civils pour ce qui regarde les petits désordres qui peuvent se commettre dans l’intérieur des villes et de laisser le reste aux officiers militaires? M. Delavîgne. Les articles 7, 8 et 9 doivent être renvoyés au comité de Constitution et au comité militaire, et rapportés par eux à une séance du matin, car ils sont évidemment constitutionnels. L’article 9 surtout mérite le plus sérieux examen. Je conclus au renvoi et à l’ajournement. M. de Hoailles. Je ne m’oppose pas à l’ajournement; mais j’observe qu’il est impossible de ne pas distinguer la différence qui existe entre une ville en état de paix et une ville en élat de guerre. Il ne faut pas que l’autorité civile puisse croiser l’autorité militaire, si vous voulez que les moyens de défense soient efficaces. M. Bureaux de Pusy, rapporteur. J’ai annoncé moi-même à l’Assemblée, dans une précédente séance, qu’il y avait dans ce projet des articles constitutionnels; ainsi je consens à l’ajournement à une séance du matin. Mais, quant au renvoi aux comités, il est parfaitement inutile, parce que ces articles ont été concertés avec le comité de Constitution et qu’ils ne sont que des conséquences nécessaires du décret sur la paix et la guerre. (L’Assemblée, consultée, décrète le renvoi des articles 7, 8 et 9 aux comités militaires et de Constitution, qui sont chargés de les examiner de nouveau, de leur substituer d’autres articles 393 propres à concilier la sûreté des places avec la liberté et les droits des citoyens et d’en faire le rapport à une séance du matin.) M. le Président lève la séance à neuf heures et demie. PREMIÈRE ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE OU MARDI 24 MAI 1791, AU SOIR. PROJET DE décret sur la conservation et le classement des places de guerre et postes militaires ; sur la suppression des états-majors des places ; sur la manière de suppléer à leur service; sur le commandement et le service des troupes de ligne en garnison ; sur les rapports des troupes de ligne avec les gardes nationales , et sur ceux du pouvoir civil avec l'autorité militaire dans les places ; sur la conservation et la manutention des établissements et bâtiments militaires, meubles , effets , fournitures et ustensiles à l'usage des troupes; sur les logements desdites troupes; et sur l'administration des travaux militaires (1) ; présenté à l’Assemblée nationale, au nom de son comité militaire, par M. Bureaux de Pusy, rapporteur de ce comité. TITRE 1er. Conservation et classement des places de guerre et postes militaires. — Police des fortifications. Art. 1er. Les places de guerre et postes militaires seront partagés en trois classes, suivant leur degré d’importance et conformément au tableau annexé au présent décret. Les places et postes de la première classe seront non seulement entretenus avec exactitude, mais encore renforcés dans toutes celles de leurs parties qui l’exigeront, et constamment pourvus des principaux moyens nécessaires à leur défense. Ceux de la seconde classe seront entretenus sans augmentation, et ceux de la troisième classe seront conservés en masse, pour valoir au besoin, sans démolition, et sans autre entretien que celui des bâtiments qui seront conservés pour le service militaire, et des ouvrages relatifs aux manœuvres des eaux. Art. 2. Ne seront réputés places de guerre ou postes militaires que ceux énoncés au tableau annexé au présent décret. Art. 3. Dans le nombre des places de guerre et postes militaires désignés à l'article précédent, si un examen ultérieur prouvait que quelques forts, citadelles, tours ou châteaux sont absolument inutiles à la défense de l’Etat ils pourraient être supprimés et démolis en tout ou en partie, et leurs matériaux et emplacements aliénés au profit du Trésor public. Art. 4. Nulle construction nouvelle de places de guerre ou postes militaires et nulle suppression ou démolition de ceux actuellement existants ne pourront être ordonnées que d’après l’avis d’un conseil de guerre, confirmé par un (1) Voy. ci-dessus, même séance, p. 385, le rapport de M. Bureaux de Pusy sur cet objet.