74 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 8 Joseph Berard, blessé à Saint-Domingue, présente une pétition. Renvoyé au comité des Secours, pour en faire le rapport demain (15). 9 La citoyenne Sève, fondée de pouvoir de sa famille, héritière de René Sève, décédé abbé commendataire de la Clarté-Dieu, l’économe-général s’étant emparé de tous ses biens, elle demande que tous détenteurs et dépositaires soient tenus de faire droit à cette famille. Renvoyé au comité de Législation (16). 10 André Dumont informe la Convention qu’une infinité de sections [de Paris] demandent à pa-roître à la barre. Il sollicite leur admission. L’Assemblée les admet (17). Une députation nombreuse de la section des Arcis [Paris] fait part du rapport de l’arrêté d’adhésion à l’adresse de la société de Dijon, arraché, dit-elle, par les continuateurs de Robespierre. Plus de terreur, c’est l’arme des tyrans : justice sévère, justice ! Armons-nous des principes répandus dans votre sublime Adresse aux Français, digne des félicitations de la République. elle finit par annoncer le rapport de son arrêté d’adhésion à l’adresse du club électoral, en date du 9 de ce mois. Mention honorable, insertion au bulletin (18). [La section des Arcis à la Convention nationale ] (19) F. Chamouland, orateur de la députation : Citoyens représentans, La section des Arcis nous députe vers vous, pour vous faire part de son triomphe sur les ennemis du bien public, sur les continuateurs de Robespierre. (15) P.-V., XLVII, 120-121. (16) P.-V., XLVII, 121. (17) Gazette Fr, n° 1015; Moniteur, XXII, 217. (18) P.-V., XLVII, 121. (19) C 322, pl. 1353, p. 13. Moniteur, XXII, 218-219; Débats, n° 750, 317-318; Bull., 21 vend.; Ann. Patr., n 650; Ann. R.F., n” 21; C. Eg., n“ 785; F. de la Républ., n* 21; Gazette Fr., n° 1015; J. Fr., n 747; J. Mont., n° 1 ; J. Paris, n° 22; J. Perlet, n° 749; M.U., XLIV, 332. Ces hommes sanguinaires, après avoir trompé la religion d’une partie de notre assemblée, étoient parvenus à arracher un arrêté d’adhésion en faveur de l’adresse attribuée à la société populaire de Dijon, et à le maintenir pendant deux séances ; mais enfin les vrais patriotes ont réussi à dessiller les yeux de leurs frères égarés [ils leur ont fait apercevoir le précipice dans lequel on voulait les plonger] (20). L’erreur a été reconnue, et ils s’empressent de vous apprendre le raport de cet arrêté. Vous voyez à votre barre, citoyens représentans, les mêmes hommes, qui n’ont cessé de lutter contre ces êtres, pour qui le patriotisme et l’humanité sont deux vertus incompatibles. Plus de terreur ! avons-nous dit ; c’est l’arme des tyrans. Justice sévère, justice... Que le coupable meure, mais qu’on sauve l’innocent! Nous voulons le gouvernement révolutionnaire, et non un gouvernement de sang; nous voulons un gouvernement vigoureux, qui ne reçoit son action que d’un seul et unique centre choisi par le peuple ; et il n’en est point d’autre que la Convention nationale. Nous voulons le triomphe de la liberté et de l’égalité; nous voulons le bonheur du peuple; mais ces hommes féroces, accoutumés à ne se repaître que du spectacle barbare de cadavres amoncelés, osent traiter de modérés tous ceux qui ne veulent point assassiner. Ces cannibales altérés de sang humain, sans moeurs, sans conscience, sans lois, n’aiment à boire que dans des coupes ensanglantées. Sans cesse le poignard à la main, ils promènent partout leur fureur, cherchant de nouvelles victimes. Le temple de la justice est le seul endroit qu’ils n’osent aborder. Ils craignent que sa lumière brillante n’éclaire leurs actes de cruauté. Ils courent après les ombres épaisses de la frayeur, pour ôter aux âmes timides la connaissance de leurs forfaits. Citoyens représentants ! Anéantissez ces destructeurs du genre humain ; ils machinent votre perte dans le silence : prévenez leurs complots homicides. Si vous temporisez, ils agiront. Ils diront peut-être que votre système de justice dans ce moment n’est propre qu’à faire des esclaves; perfide assertion! Sommes-nous des esclaves, lorsque nous avons le droit de dire la vérité à nos représentans? sommes-nous des esclaves, lorsque nous pouvons leur adresser ce discours ? Législateurs ! Le peuple a des besoins, occupez-vous de les faire cesser! Pourquoi, dans votre sein, ces dénonciations vagues, si souvent réitérées, qui font oublier l’intérêt général, et ne tendent qu’à servir les manoeuvres de nos ennemis, en semant parmi vous de continuelles dissenssions. L’arme de la division est la seule ressource qui reste aux tyrans coalisés. Brisez-la par le calme et l’union. Vous voulez que la concorde soit une divinité de la france. Eh bien, élevez-lui des autels dans le sanctuaire des lois! (20) Moniteur, XXII, 218. SÉANCE DU 21 VENDÉMIAIRE AN III (12 OCTOBRE 1794) - N° 11 75 Est-ce là le langage que tiendraient des esclaves ? Citoyens représentans ! Attachons-nous tous ensembles au char de la révolution ! Conduisez-le vers le temple de la liberté par la route de la justice ! Armons-nous des principes répandus dans votre sublime adresse au peuple français, digne des félicitations de toute la République. Tirons de ce dépôt précieux la foudre morale, qui doit écraser tous les corrupteurs de l’opinion publique ; et bientôt nous arriverons triom-phans au champ de la gloire et du bonheur. La section des Arcis vous annonce encore avec joie, iju eue a rapporte bon arrête u aane* sion à l’adresse du club électoral du 19 vendémiaire. Elle nous a chargé aussi de vous apprendre qu’après avoir entendu la lecture de votre adresse au peuple français, elle a arrêté à l’unanimité qu’il en serait fait une nouvelle lecture pendant trois séances consécutives, afin de mieux inculquer au peuple les sages principes qu’elle renferme. Vive la justice, vive la concorde, vive la représentation nationale ! Le comité civil ayant entendu la lecture de l’adresse ci-dessus, a arrêté en conséquence des pouvoirs à lui délégués par l’assemblée générale dans sa séance du vingt vendémiaire, qu’il l’approuvait dans son entier, fait en comité le vingt un vendémiaire l’an trois de la République française une et indivisible. Dehureau, président de la section, Barre, secrétaire. 11 Le comité révolutionnaire du second arrondissement du département de Paris félicite l’Assemblée au sujet de l’Adresse au Peuple français, et jure de poursuivre les factieux, les dilapidateurs et tous les ennemis de la République. Mention honorable, insertion au bulletin (21). [Le comité révolutionnaire du 2e arrondissement de Paris à la Convention nationale ] (22) Les membres composant le comité révolutionnaire du second arrondissement sont admis à la barre. L’orateur prononce le discours suivant : Citoyens représentans, Le comité révolutionnaire du 2e arrondissement du département de Paris s’empresse de venir vous féliciter sur l’adresse que vous avez (21) P.-V., XLVII, 121. (22) C 322, pl. 1353, p. 14. Moniteur, XXII, 219. faite au Peuple français. Vous avez proclamé son bonheur ; il est certain d’en jouir. Il connoit maintenant les bases étemelles sur lequel vous le fondez. La vertu, la liberté, l’égalité et l’union, voilà les quatre colonnes qui supporteront l’édifice des lois justes que vous lui proposerez. Il les acceptera, et vous bénira avec transport. Quant à nous, que vous avez désignés pour vous aider dans une partie de vos travaux, nous vous remercions de nous avoir placés au poste d’honneur. Nous applanirons autant qu’il nous sera possible, le chemin que doit parcou-rir le char révolutionnaire. Nous en écarterons les factieux, les dilapidateurs et tous les ennemis de la république, sous quelque forme qu’ils se présentent. S’ils résistent, tant mieux : nous reconnoitrons alors plus facilement les monstres à leurs convulsions : nous les poursuivrons et nous les atteindrons jusques dans leurs repaires les plus obscurs. Ce n’est plus que pour eux seuls que la terreur est à l’ordre du jour. La paix et la félicité sont réservées aux républicains vrais et vertueux. Assez et trop longtemps un nuage affreux et ensanglanté a obscurci l’horizon de la france. Votre vertu et votre énergie le font disparoitre : continuez, dignes représentants, et la patrie est sauvée. Tout nous le présage, tout nous l’assure : la victoire a confié son drapeau aux enfants de la Liberté. Elle sait qu’on ne pourra jamais le leur arracher. A leur aspect les villes s’écroulent; les esclaves fuient loin de nos frontières; ils sont obligés d’aller se cacher au-delà de ces limites que la nature a tracées pour former l’enceinte de la République française. Tout concourt à rendre cette époque une des plus mémorables de notre histoire. Le jour solennel fixé par vous pour l’apothéose de J.- J. Rousseau sera célébré d’âge en âge. Ce bienfaiteur des hommes de tous les siècles, cet organe des lois de la nature, ce nouveau Socrate, ce nouveau Solon reçoit de ses contemporains le juste tribut d’honneurs qui sont dûs à ses vertus et à son génie. A coup sûr la postérité la plus reculée confirmera ces honneurs, surtout quand elle recueillera les fruits de l’arbre de la liberté que vous avez planté d’après les principes de ce véritable philosophe. C’est son génie qui désormais planera dans cette auguste enceinte. C’est à vous, vertueux représentans à l’y fixer. Vous avez déposé ses restes mortels au Panthéon. Son ombre sera véritablement satisfaite, quand, ainsi que vous l’avez annoncé, vous aurez placé à côté de sa tombe, le nom de son ami, de Dombey, qui coopéra à ses études de la nature. En rendant aux grands hommes les honneurs qu’ils ont justement mérités, c’est leur préparer des successeurs qui conserveront votre ouvrage et qui le rendront impérissable. Vive la république, vive la Convention. Les membres du comité, Jourdan, président et cinq autres signatures.