[Assemblée nationale.] et le délai ci-dessus prescrits, les créanciers seront tenus, outre les frais auxquels le-dites oppositions donneront lieu, des dommages-intérêts résultant du retard qui aura été apporté à la liquidation et au payement du prix des offices. Ces dommages-intérêts seront fixés au moins à l’intérêt à 5 0/0 du prix desdits offices, à compter de la date des certificats des conservateurs des finances jusqu’au jour de la radiation desdites impositions sur leurs registres. Ils pourront être estimés à plus forte somme dans le cas où les titulaires justifieront de pertes plus considérables qui leur seraient causées par le retard de leur payement. » (Ce projet de decret est adopté.) L’ordre du jour est un projet de décret du comité ecclésiastique sur les biens nationaux grevés de fondations dans les églises paroissiales. M. Lanjuinais, rapporteur. J’ai l’honneur de présenter à l’Assemblée le projet de décret qu’elle a demandé à son comité ecclésiastique, sur les biens de fondations de messes et autres services dans les églises paroissiales. Votre comité a reconnu que parmi les fondations de paroisses toutes ne méritent pas sans doute la même faveur. Il vous proposera dans peu sur ce sujet des distinctions que peut-être vous approuverez; mais cette discussion entraînerait de longs débats, et malheureusement les ventes sont retardées sous prétexte de fondation. De là des lenteurs, des chicanes, pour les ventes mêmes que vous avtz décrétées, au point que des départemenis ont sursis aux adjudications : il faut faire rentrer dans le commerce tous les fonds qui ne sont point employés dans les fabriques. C’est le moyen d’augmenter l’industrie, et, sans fouler le peuple, d’augmenter le produit des impôts; c’est une mesure nécessaire à cause des frais de réparation qui grèvent en général beaucoup trop les établissements publics. Il n’y a donc là qu’avantage pour tous; d’ailleurs, je n’eusse jamais demandé l’ajournement sur les biens des fabriques, si l’on avait proposé d’en faire l’intérêt; mais il s’agissait de les déclarer biens nationaux. 11 me reste à vous établir un fait. Il y a dans le royaume des paroisses qui n’ont pas de fabri-ues, la plus grande partie en ont ; mais enfin, ans la partie méridionale de la France, il est un grand nombre de paroisses qui n’ont pas de fabriques. Nous proposons une disposition par laquelle l’intérêt annuel du prix des biens de fondation sera payé uniquement aux fabriques qui auraient payé la desserte aux ecclésiastiques; mais nous ne pouvons pas dans ce moment créer des fabriques où il n'y en a point ; votre comité croit remplir vos vues par le décret suivant : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comilé ecclésiastique, décrète ce qui suit : Art. 1er. « Les immeubles réels, affectés à l’acquit des fondations de messes et autres services établis dans les églises paroissiales et succursales, seront vendus dès à présent dans la même forme et aux mêmes conditions que les biens nationaux. Art. 2. « Pour tenir lieu aux curés et aux autres prêtres attachés auxdites églises, sans avoir été pourvus de leurs places à titre perpétuel de bé-[10 février 1791.] néfice, et qui administraient lesdits biens, de la jouissance qui leur en avait été laissée provisoirement pour l’acquit desdites fondations, il leur sera payé, jusqu’à ce qu’il eu soit autrement ordonné, sur le Trésor public, par les receveurs de district, l’intérêt à 4 0/0, sans retenue, du produit net de la vente desdits biens. Art. 3. « Quant auxdites églises où lesdits biens étaient administrés par les fabriques, il sera provisoirement payés auxdites fabriques, sur le Trésor public, par le receveur du district, l’intérêt à 4 0/0, sans retenue, du produit net de la vente, à la charge de l’employer comme l’eût été le revenu desdits biens, savoir : aux dépenses du culte et à l’acquit des fondations. Art. 4. « Toutes ventes d’immeubles réels desdites fondations, faites jusqu’à présent dans les formes prescrites pour lu vente des biens nationaux, sont validées par le présent décret, à charge de l’intérêt à 4 0/0, payable sur le Trésor public, ainsi qu’il a été ci-dessus dit. » M. d’Estotirmel. Je demande au comité ecclésiastique qu’il ne nous apporte pas, sans y être préparé, des dispositions relatives au décret qui a été rendu le 5 novembre, sur la désignation des biens nationaux, et qu’il se conforme à la discipline adoptée par l’Assemblée nationale, qui est qu’aucun décret ne soit proposé et ne soit mis à l’ordre du jour sans avoir auparavant été imprimé et distribué. ( Interruption .) J’appuie mon opinion sur les inconvénients qui résultent des décisions locales du comité ecclésiastique; je puis vous en citer une preuve : L’abbaye de Malvaux avait été réunie à l’abbaye de Versailles par des lettres patentes enregistrées au parlement. Il était dit que les religieuses auraient 1,200 livres de pension. Votre comité ecclésiastique, quoique les lettres patentes fussent enregistrées, a rendu une décision par laquelle leurs pensions seraient réduiies à 700 livres pour une dame de chœur, et 350 livres pour les sœurs converses. Plusieurs membres : Ce n’est pas cela. Plusieurs membres : C’en est assez; à l’ordre du jour! M. d’Estourmd. Je vous demande, Messieurs, si votre comité a eu le droit de rendre cette décision. Plusieurs membres à gauche : Aux voix! M. d’Estosirmcl . Ma demande tend à renvoyer au pouvoir exécutif toutes les consultations qui seront faites sur l’exécution des décrets. Quant au décret dont il est question, je pense que, comme il est la suite de l’ajournement proposé par le titre premier du décret du 4 octobre, votre comité ecclésiastique aurait dû, non pas vous proposer une mesure partielle pour les biens désignés dans le décret, mais renfermer tous ceux dont l’ajournement a été prononcé. Cette disposition est d’autant plus nécessaire, que vous avez ajourné les biens des fabriques, séminaires et collèges, et que je ne vois ici qu’une disposition partielle et isolée. On a dit qu’il est nécessaire de vendre. Je ne comprendrai jamais ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (10 février 1791.) 85 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. pourquoi il est plus instant de vendre les biens des fabriques que de vendre les autres biens ajournés; ils sont de même nature, ils doivent donc subir le même sort. Je me borne à demander que le projet de décret soit ajourné, et que le comité nous rapporte des dispositions d’après les décrets des 4 octobre dernier et jours suivants. Je demande de plus que le décret soit mis à une séance du soir, attendu que ce n’est pas constitutionnel et que nous avons d'autres objets beaucoup plus importants. (L’ajournement est repoussé.) M. l’abbé Guillou. Je demande que les maisons destinées au logement des ecclésiastiques pour le service des paroisses ne soient pas vendues. Dans la province de Bretagne, que j’habite, nos paroisses sont très étendues : les particuliers ont fait des fondations pour loger des ecclésiastiques, afin d’en avoir dans leur canton ; et si vous vendez ces maisons habitées par des ecclésiastiques et nécessaires pour le service, vous occasionnerez du trouble dans la province, parce que dans chaque canton, très éloigné quelquefois du lieu principal, on est fort aise d’avoir des ecclésiastiques. Je demande donc que vous vouliez bien excepter du décret les maisons occupées par les ecclésiastiques et nécessaires au service divin. (L’amendement est renvoyé au comité.) M. Tuant de la Bouverie. On vous propose aujourd’hui, Messieurs, que l’intérêt fixé à 5 0/0 soit réduit à 4 sur les biens ecclésiastiques ; je ne trouve pas cela juste. Je demande que l’Assemblée, conformément aux vrais principes, décrète que l’intérêt restera à 5 0/0, parce que ces sommes seront sujettes aux autres impositions, comme elles doivent l’être, ou bien, si vous vous écartez des principes, qu’il soit déclaré que cette rente ne sera pas sujette à l’impôt. M. Lanjninais, rapporteur. Cette motion est dans le sens du comilé. M. Tronchet. Je crois qu’il y aurait une distinction à faire quant au payement de la totalité de la rente, qui vous est proposé par le comité. En effet, il y a trois espèces de fondations qui sont chargées d’une donation faite à la cure même, les autres sont des fondations qui sont chargées d’une donation formant un titre dans la paroisse, et enfin les autres sont chargées d’une rente faite à la fabrique. Il arrive quelquefois que le produit de ces fondations-là n’est pas même suffisant pour acquitter ia fondation, et alors elle est sujette à s’éteindre; mais il arrive Je plus souvent que le produit de la donation est plus fort, et excède le produit de la charge à acquitter; alors l’excédent est un bénéfice ou pour le titulaire ou pour la fabrique. Il n’y a pas de doute qu’il faut payer à la fabrique l’intérêt total du prix de la vente. Vous avez accordé aux titulaires supprimés un traitement relatif aux revenus qu’ils avaient, et ce serait faire vis-à-vis d’eux une injustice que de leur faire payer l’intérêt à 4 0/0 de la totalité du prix de la vente, puisque cela fait une partie du revenu qui fait l’objet de leur traitement. Je propose, en conséquence, de distinguer les charges données aux fabrique�, et d’ordonner que l’intérêt à 4 0/0 sera payé en totalité aux fabriques: à l’égard des autres fondations chargées de donations à la cure ou au chapelain titulaire dans la paroisse, je propose, non pas d’en payer l’intérêt à ces titulaires, mais de faire évaluer la somme nécessaire par chaque année pour acquitter les fondations, d’après i’état qu’en fournira la fabrique de la paroisse, et de faire payer à la fabrique de la paroisse le montant de ce qui sera nécessaire à l’actif de ces fondations, à 1a charge de les faire acquitter. M. Treilhard. C’est moi, et non pas le comité ecclésiastique, qui vous ai présenté hier le projet de décret qui est reproduit aujourd’hui. J’ai cru devoir adopter la motion de M. de Tracy, et je vous ai proposé, de concert avec lui, une rédaction que vous avez renvoyée au comité. Après avoir justifié le comité sur ce point, je crois que je peux me dispenser de le justifier sur les inculpations particulières de M. d’Estour-mel, que vos comiiés donnent quelquefois des dispositions hasardées. Certainement l’exemple qu’il a cité a été si mal choisi, que vous me dispenserez d’y répondre ; je cro'S qu’il suffit d’une simple observation pour vous déterminer à adopter le projet du comité. De quoi s’agit-il, Messieurs ? Vous avez décrété l’aliénation des biens nationaux, vous avez décrété l’aliénation des biens grevés de fondations comme tous les autres ..... Plusieurs membres : Non ! M. Treilhard ...... Vous avez seulement fait une exception, par le décret du 23 septembre, pour les biens grevés de fondations dans les églises paroissiales; car les biens qui appartenaient aux chapitres ou aux corps supprimés, qui dépendaient des bénéfices aussi supprimés, quoique grevés de fondations, ont été déclarés vendables; ils sont vendus presque partout. Il ne s’agit donc ici que des biens grevés de fondations dans les églises paroissiales. C’est, Messieurs, dans cette position, qu’on vous a proposé de vendre tous ces objets-là. Nous sommes tous d’accord qu’il faut vendre. (Murmures à droite.) Vous avez aussi décrété que les ecclésiastiques qui administraient ces biens et faisaient le service des fondations, sans avoir de titre perpétuel, continueront provisoirement de faire le service et de jouir de leurs anciens revenus, sans qu’ils puissent être imputés sur leurs traitements. Nous allons vous présenter dans la suite et bientôt, je l’espère, une disposition sur la manière dont les fondations seront acquittées, sur les personnes par qui elles le seront, sur les salaires que vo is pourrez donner à cet égard : le travail sera déiinitif, et c’est alors que ia réflexion de M. Tronchet, qui est infiniment juste au fond, trouvera son application. Il faut distinguer la vente qu’il faut faire du payement provisoire des fondations, qui est très juste. En ce moment, il ne s’agit pas d’innover quelque chose au service des fondations, ni au salaire provisoire que vous avez accordé aux desservants; mais il est intéressant de mettre dans le commerce le plus de biens-fonds qu’il sera possible. Vous conserverez la jouissance provisoire des desservants, en leur donnant une rente de 4 0/0 du produit net de la vente. 80 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [10 février 1791. Je demande, non pas la question préalable sur l’amendement de M. Tronchet, mais le renvoi au comité et l’adoption du projet du comité. M. Tronchet. Je demande moi-même le ren-roi de ma motion au comité. (Ce renvoi est décrété.) M. de Folleville. M. le rapporteur a dit que la raison qui nécessitait cette vente était que les frais supportés par les fabriques étaient une dépense locale ; j’ai dû en conclure que les biens possédés étaient aussi un avantage local. Cependant, effrayé de toutes les propositions du préopinant, jedemande que l’amendement de M. Tuant soit non seulement adopté, mais même étendu. J’observe sur cela, Messieurs, que, plus ces biens seront mis en parcelles, plus les frais de vente seront considérables. Je pense que l’intérêt doit être porté à 5 0/0. (L’amendement est rejeté par la question préalable.) M. de Lévîs. Je demande que le comité ecclésiastique s’occupe de terminer les difficultés qui se sont élevées à raison des chapelles cas-trales et que l’on ne distingue pas les chapelles où l’évêque donne le visa de celles qui n’ont pas suivi cet usage. M. Tuant de la Bouverie. Il ne faut pas comprendre dans la vente des biens nationaux les biens attachés au service des chapelles sur lesquelles le visa a été accordé, puisque cela ne change pas la nature des bénéfices. M. Boutteville-Dnmetz rappelle les dispositions adoptées antérieurement sur cet objet. M. Treilhard. La question est déjà jugée. Vous avez décrété que toute chapelle serait regardée comme affectée au culte public, c’est-à-dire comme appartenant à la nation, à moins qu’elle ne soit dans l’intérieur d’une maison particulière, et qu’elle n’ait qu’un seul chapelain dont la nomination soit à la seule disposition du propriétaire et sans nécessité de provisions de l’évêque. M-ais, lorsque vous avez besoin de l’institution du supérieur, cela devient un objet public et un bien national: si l’on ne regarde pas comme bien domestique et non national les biens qui ne réuniraient pas ces conditions, on pourrait s’adresser aux administrations pour s’occuper avec l’évêque des moyens de pourvoir à l’exécution des fondations. M. de Cnstine. Les mots : à la seule disposition du propriétaire , s’appliquent aux patrons comme propriétaires disposant par la nomination aux chapelles; l’Assemblée a d’ailleurs déjà prononcé en faveur des patrons des chapelles cas-trales. (L’Assemblée, après une épreuve douteuse, décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer.) M. l’abbé Breuvard. Messieurs, vous ne voulez pas mécontenter les communautés, les paroisses, mais vous voulez être justes à leur égard; chacun a droit de donner son avis quand il s’agit de sa propriété : ne disposez donc pas, sans leur propre consentement, de biens dont votre comité reconnaît que la propriété leur appartient. En conséquence, je demande par amendement qu’il ne soit procédé à la vente des biens de fondations des églises paroissiales qu’avec le consentement des communautés mêmes ou des administrateurs de leurs fabriques. (Cet amendement est rejeté par la question préalable.) M. Foucault de Lardimalie. Il' existe une espèce d’immeuble qui ne dépend pas de l’autorité de l’Assemblée nationale. Ce sont de simples fondations qui n’ont aucune hypothèque sur les propriétés foncières, qui sont données à la charge, par le curé, de faire des prières pour le fondateur. Or, il u’est pas dans le pouvoir de l’Assemblée nationale de changer cette fondation. [Murmures.) Je demande donc qu’au lieu d’im-meubles, on mette les fonds de terre seulement. M. Tan] ni nais, rapporteur. Je réponds à M. Foucault par la question préalable. M. Foucault de Tardimalie. Je demande que M. le rapporteur me donne une réponse plus motivée que la question préalable. M. d’Aubergeon de Murinaig. Un domaine est chargé d’une redevance en bougies, en agneaux, etc.; comment rembourserez-vous cette fondation? M. Tanjuinaig, rapporteur. Messieurs, plusieurs de ces objections ont besoin d’éclaircissements. Il y a deux sortes de biens affectés aux fondations; savoir: des rentes et des immeubles réels. Quand un bien-fonds est hypothéqué seulement à la sûreté du service, alo"rs ce n’est pas un immeuble réel de la fondation, car c’est la rente qui est le bien delà fondation. (Murmures.) Or, vous ne parlez point des rentes. Tout est donc clair. (L’Assemblée décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur l’amendement.) M. Defcrmon. Ce n’est pas assez de vendre les biens des fondations régies par les fabriques, il faut que tous les immeubles dépendant des fabriques soient vendus, puisque la nation pourvoira désormais au culte public. M. le Prcgident met aux voix le projet de décret. Le côté droit s’écrie : Point de voix! (Le projet de décret du comité est adopté.) M. Tanjuînaig, rapporteur. Le comité serait d’avis, pour plus grande sûreté, d’expliquer les bâtiments, édifices et emplacements qu’il est nécessaire de conserver. Voici l’article additionnel que nous vous proposons : « Les autres biens immeubles réels desdites fabriques seront de même vendus; et de leur produit net il sera payé auxdites fabriques l’intérêt à 4 0/0, comme il est dit ci-dessus, à charge de l’employer aux dépenses desdites églises. Sont exceptés seulement de ladite aliénation les bâtiments et les propriétés foncières actuellement consacrés à différents usages relatifs au culte, comme églises et sacristies, tours et clochers... ( Murmures à droite)... fabrique�, cimetières, presbytères des paroisses, succursales et autres bâtiments servant à loger les personnes employées au service de l’église. »