[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 juillet 1790.1 341 M. de La Platrière fait hommage à l’Assemblée de l’éloge du chancelier de L’Hôpital. Cet hommage est reçu avec satisfaction. M. Vernier demande que l’on s’occupe sans relâche de la discussion du rapport de M. Lebrun sur toutes les parties de la dépense publique ; il se plaint de l’inexactitude des membres de différents comités, et la présente comme la cause de la lenteur de plusieurs opérations importantes. M. Garat l’aîné. La cause véritable de cette inexactitude et de cette lenteur, c’est que la même personne est d’un grand nombre de comités. Je demande que l’Assemblée décide qu’on ne pourra être désormais que d’un seul , et qu’elle force à opter. M. Chabroud représente que cette motion tend à gêner la confiance de l’Assemblée , et que c’est aux membres honorés de cette confiance à examiner, dans leur conscience, s’ils peuvent remplir tous les devoirs auxquels ils se sont consacrés. M. Briois de Beanmetz. Cette motion, plusieurs fois présentée, a toujours été rejetée; une semblable disposition aurait été sage et utile lors de l’établissement des comités : elle ne tendrait, aujourd’hui, qu’à tripler la durée de la session actuelle. La désorganisation des comités les obligerait à recommencer leurs opérations. (L’Assemblée décide de passer à l’ordre du jour.) M. le Président dit que l’ordre ancien pour les tribunes recommence aujourd'hui, et il a démandé les intentions de l’Assemblée pour savoir si on continuera de recevoir les députés fédérés dans les deux extrémités de la salle, au delà des pilastres. (L Assemblée ordonnequ’on les admettra encore jusqu’au 30 de ce mois.) M. le Président. L’ordre du jour est la discussion d’un projet de décret du comité des finances sur les assignats. M. lie Couteulx de Canteleu, rapporteur (1). Messieurs, le comité des finances a pris en considération l’empressement du public de voir, enfin, les assignats substitués dans la circulation aux billets de la caisse d’escompte , servant de promesses d’assignats. Il croit répondre à cet empressement, et en même temps simplifier les dispositions nécessaires pour opérer les échanges des assignats contre les billets de caisse, en vous proposant de rendre provisoirement un décret pour leur émission. Le comité des finances a pensé, Messieurs, qu’il convenait de restreindre d’abord l’émission des assignats au seul échange des billets de caisse , que cela écarterait toute confusion sur leur emploi ; qu’à cet effet, vous approuveriez que les sommes qui devront être fournies au Trésor public lui soient encore délivrées en billets de caisse servant de promesses d’assignats. Par celte disposition, Messieurs , il ne sortirait aucun assignat de la caisse de l’extraordinaire pour satisfaire aux besoins de l’administration, ce qui simplifierait, à vos yeux, la marche de vos assignats, faciliterait la comptabilité de la (1) Ce rapport n’a pas été inséré au Moniteur. caisse de l’extraordinaire, lui ôterait tout rapport avec le Trésor public, et restreindrait ses fonctions à celles déterminées par l’article 9 de vos décrets des 19 et 21 décembre, celles de rembourser les capitaux de toutes les dettes dont vous aurez décrété l’extinction; et ce ne sera pas en vain, Messieurs, que vous vous occuperez incessamment de cette extinction, lorsqu’on veut ici vous livrer au$ frayeurs d’une banqueroute, à celles d’une accumulation de dettes incalculables. Votre comité des finances aperçoit, dans la continuation et la persévérance de vos travaux, le port auquel nous désirons tous arriver. Vous ne tarderez pas à jouir (j’ose vous en répondre, Messieurs), du repos et des fruits de votre pénible et périlleuse navigation. Tous ceux qui, dans les pays étrangers, s’intéressent à la France; ceux qui y out toujours conservé, depuis plusieurs générations, des liaisons de prédilection, les publicistes des nations les plus éclairées en Europe, portent sur votre position actuelle , qu’ils connaissent parfaitement, et sur l’effet de vos décrets, qu’ils méditent dans le calme et l’éloignement de nos passions, un jugement bien différent de celui qu’on a voulu, qu’on voudra encore faire prévaloir au milieu de vous à cette même tribune. Il est vrai que ces mêmes étrangers, dans toutes leurs lettres, que je pourrais ici produire, ne peuvent donner aucune croyance aux inculpations exagérées qu’on s’efforce de répandre sur la résistance de la nation entière à payer les impôts, parce que des insurrections partielles, excitées peut-être par des mécontents, inévitables même dans un changement universel , ne décident jamais les destinées d’une nation civilisée , qui ne peut enfin méconnaître les vrais moyens d’affermir ses droits, sa force et sa liberté. D’ailleurs, Messieurs, ils jugent de l’avenir par votre vigilance actuelle et votre empressement à réprimer ces désordres. Ü’est par l’émission progressive des assignats, Messieurs, que vous connaîtrez l’extinction successive de la dette de la nation envers la caisse d’escompte, et la quotité des billets retirés de la circulation, qui seront en égalité de l’émission des assignats. Votre comité des finances s’est remis sous les yeux les sommes qui, en exécution de vos décrets, ont été successivement versées par la caisse d’escompte dans le Trésor public. 110 millions ont été fournis en conformité de vos décrets des 19 et 21 décembre 1789; 20 millions en exécution de celui du 17 avril; 20 millions en exécution de celui du 11 mai; 20 millions en exécution de celui du premier juin; 30 millions en exécution de celui du 19 juin, et 45 millions conformément à votre dernier décret du 4 juillet : ces six sommes réunies présentent un total de 305 millions; ainsi, il reste une somme de 95 millions à fournir pour le service de l’année, qui compléterait l’emploi des 400 millions destinés au service de 1789 et 1790, et dont la dette sera définitivement représentée par les 400 millions d’assignats que vous avez créés. Votre comité a considéré, au surplus, qu’il serait prudent de mettre en activité les bureaux du trésorier de l’extraordinaire, de constater, par quelque expérience, le bon ordre de ses registres et la facilite des échanges à Paris, avant de les étendre dans les provinces, parce qu’en même temps votre comité s’occupera des moyens de vaincre les inconvénients graves qui se présen-