883 [Assemblée nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 mai 1791.J projet. La base de ce projet a paru n’être autre chose que la théorie du scrutin à liste double. Or la coalition, l’intrigue savent déjouer toutes ces combinaisons. Bien loin de donner la seconde place au choix que dicte la conscience, après avoir donné la première aux affections et aux passions particulières, on ne nomme ordinairement en seconde ligne que des hommes dont on ne craint nullement la concurrence; d’où il suit que les réductions de scrutin ne donneraient pour résultat que de très mauvais choix. Nous sommes tous convenus que malgré quelques imperfections que nous y avons vues, cette forme de scrutin valait mieux que ce que nous avions dans ce moment. Mais le point sur lequel le comité est resté d’avis, c’est qu’il serait presque impossible d’adopter aujourd’hui ce scrutin, et d’espérer qu’il sera en usage pour les élections prochaines que vous avez très rapprochées. Ensuite il y a une considération qui n’a point frappé l’Assemblée; le scrutin proposé par M. Péiion n’est applicable qu’à l’élection des députés au Corps legislatif, et n’est pas applicable à la nomination des électeurs, en sorte qu’il ne peut remplir qu’à moitié les intentions de l’Assemblée. Plusieurs artistes ont imaginé une mécanique ingénieuse pour ces scrutins, et au moment du travail sur la révision, on vous proposera non pas seulement le plan de M. Pétion, mais deux ou trois autres projets ainsi que celui qui est en usage en Angleterre, et qui convient parfaitement à un peuple libre. C’est alors que vous arrêterez définitivement le mode de scrutin pour le tomps à venir. Nous avons même observé, dans le plan de M. Pétion, que le scrutin réductif au second tour ne l’était point du tout en dernière analyse; car on ne peut se dissimuler qu’après un premier, ou un second tour de scrutin, lorsque l’on arrive au troisième tour, c’est tout uniquement une pluralité relative. Je sais bien que, dans le scrutin individuel à la pluralité des suffrages, cette pluralité, qui paraît absolue au troisième tour, ne l’est pas dans le fait; mais comme on ne pourrait rien décider aujourd’hui à cet égard, nous pensons qu’il faut renvoyer la fixation définitive du mode de scrutin au moment où vous vous occuperez de la révision des décrets, et que le mode provisoire, proposé parle comité de Constitution, peut être admis pour la prochaine élection, sans inconvénient. Je demande qu’on adopte provisoirement le mode proposé par le comité. {Aux voix! aux voix!) M. Pétion. Je soutiens et je suis dans le cas de vous démontrer ( Murmures ) que le scrutin proposé parle comité va jeter dans des longueurs interminables ....... ( Interruptions .) Plusieurs membres : Lisez les articles, mon-sieur le rapporteur, M. Démeunler, rapporteur . Voici les articles 4 et 9. Art. 4, « A compter du jour de la publication du présent déciet, la disposition provisoire contenue en l’article 20 de la section première du décret du 22 décembre 1789, est abrogée; les électeurs seront choisis au scrutin de liste simple, et en 3 tours, si cela est nécessaire; et il n’y aura plus de scrutin de liste double, en aucun cas. » {Adopté.) Art. 9. « La nomination des suppléants au Corps législatif se fera au scrutin individuel et à la majorité absolue des suffrages, nonobstant la disposition provisoire de l’article 33 du décret cité en l’article 4, laquelle demeure abrogée. » {Adopté.) M. Armand. Je fais la motion que les députés de l’Assemblée nationale ne puissent être nommés haut jurés. M. Reederer. Je demande que pour s’élever à la hauteur de la proposition du préopinanl, l’Assemblée décide qu’après la session actuelle fois ses membres se retireront dans un couvent. {Rires.) M. Démennier, rapporteur. Je dois présenter à l’Assemblée quelques dispositions qui me paraissent devoir être consignées simplement dans le procès-verbal, sans avoir besoin de rendre un décret. Le ministre de l’intérieur a consulté votre comité des contributions très récemment, pour savoir comment on pouvait faire exécuter i’article de vo're décret sur la constitution des assemblées administratives, qui dit que les électeurs de département se réuniront tour à tour dans les chefs-lieux de district. Le comité a répondu que cette disposition n’étant déterminée par aucun décret, le moment de la présenter à l’Assemblée était venu, et qu‘on en rendrait compte dans ce moment-ci; qu’en attendant, le ministre pourrait répondre aux directoires des départements que, pour l’exécution de cet article de la loi, il doit être mis, dans un vase, le nom des districts qui composent le département, en annonçant, eu avance, le jour du tirage; et le limage une fois arrêté, dire que l’assemblée des électeurs se tiendra dans tel ou tel endroit. On peut prendre ce parti ou tout autre; mais nous ne croyons pas qu’il faille faire une loi sur l’exécution de cet article. Si vous adoptez cette explication, on peut la consigner dans le procès-verbal; et le ministre de l’intérieur ne sera pas embarrassé. Je sais qu’on demande que les chefs-lieux de district qui sont les plus rapprochés du centre soient indiqués ; l’Assemblée seidétermi-nera, ainsi qu’elle le voudra. M. Mougtns de Roquefort. Je crois que le mode que présente M. le rapporteur ne peut s’appliquer qu’à la nomination des députés au Corps législatif. M. Ramel-üogaret. Je pense qu’il faut renvoyer la proposition de M. Démeunier à la législature prochaine. Vous avez promis, Messieurs, que la prochaine législature s’occuperait de la réduction des districts; vous avez ensuite annoncé que le comité de Constitution vous présenterait un projet de décret sur les opérations que les assemblées électorales auront à remplir pour manifester un vœu non équivoque sur cette matière. C’est donc ici te moment de décréter, puisqu’elles vont se former, qu’elles sont autorisées à délibérer sur la réduction des districts ; et j’ai l’honneur de vous observer que si vous ne décrétez pas cette proposition-là aujourd’hui, il se passera plus de 2 ans avant que cette réduction ait lieu. 584 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* [28 mai 1791.] M. Démeunier, rapporteur. On ne peut se dissimuler que les administrations de district ne soient d’une utilité majeure dans ce moment-ci. Le préopinant, qui ne peut en disconvenir, a sûrement oublié le décret que vous avez rendu à cet égard. Ce décret est tout ce que vous avez pu fairede mieux, puisque vous avez dit que les frais d’administration seraient à la charge des administrés, et qu’ils émettraient leurs vœux pour la comervation ou pour la réunion de leur district. La proposition du préopinant, qui a déjà été renvoyée à votre comité, se trouve donc par cela même résolue. M. Ramel-Mogaret. Je retire ma proposition. (L’Assemblée, considérant qu’il a été décrété uela première élection se fera dans le chef-lieu u département, renvoie cette question à la por-chaine législature.) M. le Président. On m’annonce la mort de M. Pélissier, député du département des Bouches-du-Rhône, décédé eu la ville de Saint-Rémy, district de Tarascon, le 18 de ce mois. M. Prieur. C’était un excellent patriote. M. le Président indique l’ordre du jour de la séance de demain et lève la séance à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. BUREAUX DE PUSY. Séance du samedi 28 mai 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. Un membre propose de fixer une séance extraordinaire pour lundi soir, afin de continuer la discussion sur les domaines congéables, dans le cas où la séance d’aujourd’hui ne suffirait pas pour la terminer. (Cette motion est adoptée.) M. de Sillery, au nom du comité des rechercher , fait un rapport sur une dénonciation des sieurs liutteau , Gannet et Gonnard, en soulèvement des travailleurs employés aux ateliers des travaux publics, contre le sieur Thévenot et les sieur et dame de Lacombe et s’exprime ainsi : Messieurs (2), avant de commencer le rapport que je vais vous faire au nom du comité des recherches de l’Assemblée nationale, je dois avoir l’honneur de vous observer qu’étant impérieusement obligé de vous rendre compte des plus petiis détails, je me servirai des mêmes expressions qui sont consignées dans les déclarations. L’affaire dont je vais avoir l’honneur de vous rendre compte, mérite toute votre attention ; quoique nous n’ayons pas une suite de preuves assez complète pour prononcer définitivement, les détails que vous allez entendre, étaient plus que suffisants pour attirer toute la surveillance de votre comité. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. (2) Le Moniteur ne donne qu’un court extrait de ce rapport. Dans l’état de convulsion politique où se trouve maintenant la capitale, les citoyens partagés dans leurs opinionsonl formé successivement plusieurs associations différentesetanaloguesàleurs principes. La majorité des citoyens, qui heureusement veut le bien publie, a fait peut-être trop d’attention au rassemblement de quelques sociétés éphémères, qui se seraient évanouies d’elles-mê nés, et qui n’ont acquis quelque importance que par les contrariétés qu’on leur a fait éprouver. Je compare les sociétés naissant des circonstances, professant des principes différents au vœu reconnu de la nation, à une véritabl�émeute populaire, qui se forme sans projet, qui se grossit par l’exemple, et qui se dissipe à la moindre réflexion d’un homme de bien. Le comité des recherches, dans les premiers jours de mars, fut informé qu’il se tramait dans la capitale un complot dangereux. A cette époque une société, connue sous le nom de Club monarchique, fixait l’attention de tous les citoyens de Paris. Elle était accusée de professer des principes entièrement opposés à ceux des citoyens, et déjà plusieurs fois on avait cherché à troubler ses séances. En vous rendant compte, Messieurs, des faits matériels sur lesquels vous devez prononcer, il e>t du devoir des législateurs qui font un rapport qui doit être public, d’improuver tout ce qui est coupable; et quoique les motifs qui souvent ont déterminé le peuple à se porter en foule pour s’opposer au rassemblement de quelques-uns d’eux, paraissent excusables, il est de notre devoir del’avertir qu'il commet une grande faute quand il se livre à ces mouvements tumultueux ; qu’ils sont diamétralement opposés à la liberté qu’il idolâtre, et que nous sommes résolus de défendre au péril de notre vie; que toutes les voies de rigueur aigrissent les esprits au lieu de les calmer; et qu’en fait d’opinion, il faut plaindre ceux qui se trompent et atiendre du temps, la persuasion, le calme et la tranquillité. M. Rutteau, ci-devant employé eu qualité de premier lieutenant au régiment de Namur, au service des Etats Belgiques, et muni de certificats authentiques, qui attestent son honneur et sa piobité, de retour à Paris, a également rendu les plus grands services à l’époque de la Révolution, ainsi que le prouve une attestation dé la section de l’Hôtel de Ville, signée Foréau , président de la section, et d’un très grand nombre de citoyens; il obtint ensuite une place de piqueur dans l’atelier des travaux publies de Vaugirard, dont le sieur Thévenot était le chef. Dans cette nouvelle fonction ayant occasion de voir fréquemment le sieur Thévenot, celui-ci, suivant son rapport, le distingua et lui fit quelques ouvertures pour connaître sa façon de penser. Rutteau soupçonnant quelques intrigues, répondit au sieur Tnévenot de manière à pouvoir mériter sa confiance. Le détail de toutes les conversations du sieur Rutteau avec le sieur Thévenot, est consigné dans une suite de déclarations signées du sieur Rutteau dont je vais vous donner un extrait. Les déclarations du sieur Rutteau ne sont que le récit qu’il assure être fidèle, de ses conversations avec le sieur Thévenot, dont il avait gagné la confiance. Votre comité, Messieurs, croit ne devoir faire aucune réflexion sur les détails qufil va vous donner ; vous jugerez vous-mêmes de l'importance des déclarations dont vous allez avoir la connaissance. Nous avons différé pendant quelque temps le rapport que nous devions vous en faire; il