SÉANCE DU 3 FLORÉAL AN II (22 AVRIL 1794) - Nos 43 ET 44 161 43 [COCHON] membre du comité de la guerre fait un rapport sur les moyens de rendre à la réquisition les jeunes gens qui s’y seroient soustraits sous prétexte d’entrer dans la cavalerie. Un autre membre [BREARD] propose d’appliquer la même mesure aux individus de même âge qui se seroient présentés pour entrer dans la marine (1). BREARD : Pendant que j’étais en mission, j’ai vu une fourberie qu’employaient les muscadins pour s’exempter de la réquisition. Ils déclaraient qu’ils voulaient servir dans la marine; on les envoyait dans un port, et alors ils faisaient si bien par leur conduite qu’ils s’en faisaient chasser ou s’allaient réfugier dans les hôpitaux militaires. Je demande que le Comité de la guerre présente une disposition additionnelle relative à ces mauvais citoyens. LEGENDRE : Il y a beaucoup de citoyens de la première réquisition qui se sont engagés dans la cavalerie, et qui, envoyés aux escadrons, se sont trouvés ou trop petits ou trop faibles. Il me semble que tous ceux qui sont dans ce cas doivent aller reprendre leur premier poste (2). Après une légère discussion le décret est rendu en ces termes : « La Convention nationale, après avoir entendu son comité de la guerre, décrète : «Art. I. — Tout citoyen dans l’âge de la réquisition, qui se sera présenté pour entrer dans la cavalerie ou dans la marine, et aura ensuite été renvoyé pour défaut d’aptitude à ces deux services, ou se sera retiré sous quelque prétexte que ce soit, sera soumis à la réquisition pour l’infanterie, et tenu de se rendre de suite à la destination qui lui sera donnée, à moins qu’il ne soit jugé n’être pas propre au service de cette armée. « II. — Tout militaire qui, en exécution de la loi du 3 brumaire dernier, sera sorti d’un corps de troupes à pied pour entrer dans les troupes à cheval, et qui aura été ensuite réformé, pour défaut d’aptitude au service de la cavalerie, sera tenu, sous peine d’être réputé déserteur de rentrer sans délai dans le corps dont il étoit sorti, à moins que son congé de réforme ne porte qu’il n’est propre à aucun service. » On fait diverses propositions additionnelles à ce décret (3) : TAILLEFER : Il se trouve des individus qui, pour éviter la réquisition, s’appliquent des grades d’officiers réformés, quoiqu’ils ne soient pas dans le cas de la réforme. Je demande un article à cet égard. GENISSIEU : Lors du licenciement de l’armée révolutionnaire, on a donné aux individus qui la composaient la faculté d’entrer dans de (1) P.V., XXXVI, 53. B1", 3 flor. (2) Mon., XX, 283. (3) P.V., XXXVI, 54. nouveaux corps; mais ce n’était qu’une faculté, et non pas un ordre. Cependant cette faculté ne doit pas exempter de la réquisition ceux que leur âge y appelle. BREARD : Je ne m’oppose pas aux amendements qu’ont proposés les préopinants; mais ils peuvent faire l’objet d’un examen réfléchi de la part du comité de la guerre. Cela n’empêche point qu’il ne combine tout de suite ma proposition; car il est venu chez moi trois ou quatre ci-devant nobles, qui roulaient depuis beaucoup de temps sur le pavé de Paris, me dire confidentiellement : « Comment ferons-nous pour rentrer dans la marine ? Je leur ai répondu : « La République n’a pas besoin de soldats comme vous; vous ne serez jamais de bons matelots ». CARRIER : Outre les ruses employées dans la marine, dans la cavalerie, dans l’armée révolutionnaire, il y en a d’autres qui se sont mis dans les charrois. On ne peut faire un pas dans Paris sans rencontrer une foule de ces muscadins. Je demande que le Comité présente une mesure pour que cette vile engeance ne puisse se soustraire au service. COCHON : Je crois que, de toutes les propositions, il n’y a que celle de Bréard qui soit admissible; les autres questions sont décidées par les décrets antérieurs. CHARLIER : Il me semble que cette discussion a déjà beaucoup trop occupé la Convention, quand il s’agit surtout de faire une armée de muscadins. Il faut que le Comité fasse une loi répressive pour atteindre les mauvais citoyens qui se dérobent au service. J’aimerais autant qu’on s’occupât des troupes du pape. R faut les traiter comme les émigrés, dont ils partagent les sentiments, et les renvoyer comme des lâches, car ils ne sont pas dignes de défendre la cause de la liberté (1). La Convention nationale les adopte dans la rédaction suivante : « La Convention nationale charge ses comités de la guerre, de marine et de surveillance réunis, de lui présenter, dans le plus bref délai, les moyens de découvrir et de faire arrêter, comme suspects, tous ceux qui, pour se soustraire à la réquisition des jeunes gens de 18 à 25 ans, auraient, postérieurement au décret du ....... , obtenu de l’emploi ou service dans les ambulances, les charrois et toutes autres administrations militaires ou civiles » (2). 44 La société populaire de Chambly est admise à la barre. Elle applaudit au décret qui accorde des secours aux indigens, présente l’état des dons (1) Mon., XX, 283. (2) P.V., XXXVI, 55. Minute de la main de Cochon (C 301, pl. 1066, p. 37) . Décret n° 8880. Reproduit dans Audit, nat., n° 577; Débats, n° 580, p. 26; J. Mont., n° 161; Ann. Rép. fr., n° 145; C. Eg., n° 613, p. 177; M.U., XXXIX, 61; J. Paris, n° 478; Ann. patr., n° 477; J. Perlet, n° 578; J. Matin, n° 613; C. Univ., 4 flor.; Feuille Rép., n° 294; Rép., n° 124; Batave, n° 432; Mess, soir, n° 613. ... 13 SÉANCE DU 3 FLORÉAL AN II (22 AVRIL 1794) - Nos 43 ET 44 161 43 [COCHON] membre du comité de la guerre fait un rapport sur les moyens de rendre à la réquisition les jeunes gens qui s’y seroient soustraits sous prétexte d’entrer dans la cavalerie. Un autre membre [BREARD] propose d’appliquer la même mesure aux individus de même âge qui se seroient présentés pour entrer dans la marine (1). BREARD : Pendant que j’étais en mission, j’ai vu une fourberie qu’employaient les muscadins pour s’exempter de la réquisition. Ils déclaraient qu’ils voulaient servir dans la marine; on les envoyait dans un port, et alors ils faisaient si bien par leur conduite qu’ils s’en faisaient chasser ou s’allaient réfugier dans les hôpitaux militaires. Je demande que le Comité de la guerre présente une disposition additionnelle relative à ces mauvais citoyens. LEGENDRE : Il y a beaucoup de citoyens de la première réquisition qui se sont engagés dans la cavalerie, et qui, envoyés aux escadrons, se sont trouvés ou trop petits ou trop faibles. Il me semble que tous ceux qui sont dans ce cas doivent aller reprendre leur premier poste (2). Après une légère discussion le décret est rendu en ces termes : « La Convention nationale, après avoir entendu son comité de la guerre, décrète : «Art. I. — Tout citoyen dans l’âge de la réquisition, qui se sera présenté pour entrer dans la cavalerie ou dans la marine, et aura ensuite été renvoyé pour défaut d’aptitude à ces deux services, ou se sera retiré sous quelque prétexte que ce soit, sera soumis à la réquisition pour l’infanterie, et tenu de se rendre de suite à la destination qui lui sera donnée, à moins qu’il ne soit jugé n’être pas propre au service de cette armée. « II. — Tout militaire qui, en exécution de la loi du 3 brumaire dernier, sera sorti d’un corps de troupes à pied pour entrer dans les troupes à cheval, et qui aura été ensuite réformé, pour défaut d’aptitude au service de la cavalerie, sera tenu, sous peine d’être réputé déserteur de rentrer sans délai dans le corps dont il étoit sorti, à moins que son congé de réforme ne porte qu’il n’est propre à aucun service. » On fait diverses propositions additionnelles à ce décret (3) : TAILLEFER : Il se trouve des individus qui, pour éviter la réquisition, s’appliquent des grades d’officiers réformés, quoiqu’ils ne soient pas dans le cas de la réforme. Je demande un article à cet égard. GENISSIEU : Lors du licenciement de l’armée révolutionnaire, on a donné aux individus qui la composaient la faculté d’entrer dans de (1) P.V., XXXVI, 53. B1", 3 flor. (2) Mon., XX, 283. (3) P.V., XXXVI, 54. nouveaux corps; mais ce n’était qu’une faculté, et non pas un ordre. Cependant cette faculté ne doit pas exempter de la réquisition ceux que leur âge y appelle. BREARD : Je ne m’oppose pas aux amendements qu’ont proposés les préopinants; mais ils peuvent faire l’objet d’un examen réfléchi de la part du comité de la guerre. Cela n’empêche point qu’il ne combine tout de suite ma proposition; car il est venu chez moi trois ou quatre ci-devant nobles, qui roulaient depuis beaucoup de temps sur le pavé de Paris, me dire confidentiellement : « Comment ferons-nous pour rentrer dans la marine ? Je leur ai répondu : « La République n’a pas besoin de soldats comme vous; vous ne serez jamais de bons matelots ». CARRIER : Outre les ruses employées dans la marine, dans la cavalerie, dans l’armée révolutionnaire, il y en a d’autres qui se sont mis dans les charrois. On ne peut faire un pas dans Paris sans rencontrer une foule de ces muscadins. Je demande que le Comité présente une mesure pour que cette vile engeance ne puisse se soustraire au service. COCHON : Je crois que, de toutes les propositions, il n’y a que celle de Bréard qui soit admissible; les autres questions sont décidées par les décrets antérieurs. CHARLIER : Il me semble que cette discussion a déjà beaucoup trop occupé la Convention, quand il s’agit surtout de faire une armée de muscadins. Il faut que le Comité fasse une loi répressive pour atteindre les mauvais citoyens qui se dérobent au service. J’aimerais autant qu’on s’occupât des troupes du pape. R faut les traiter comme les émigrés, dont ils partagent les sentiments, et les renvoyer comme des lâches, car ils ne sont pas dignes de défendre la cause de la liberté (1). La Convention nationale les adopte dans la rédaction suivante : « La Convention nationale charge ses comités de la guerre, de marine et de surveillance réunis, de lui présenter, dans le plus bref délai, les moyens de découvrir et de faire arrêter, comme suspects, tous ceux qui, pour se soustraire à la réquisition des jeunes gens de 18 à 25 ans, auraient, postérieurement au décret du ....... , obtenu de l’emploi ou service dans les ambulances, les charrois et toutes autres administrations militaires ou civiles » (2). 44 La société populaire de Chambly est admise à la barre. Elle applaudit au décret qui accorde des secours aux indigens, présente l’état des dons (1) Mon., XX, 283. (2) P.V., XXXVI, 55. Minute de la main de Cochon (C 301, pl. 1066, p. 37) . Décret n° 8880. Reproduit dans Audit, nat., n° 577; Débats, n° 580, p. 26; J. Mont., n° 161; Ann. Rép. fr., n° 145; C. Eg., n° 613, p. 177; M.U., XXXIX, 61; J. Paris, n° 478; Ann. patr., n° 477; J. Perlet, n° 578; J. Matin, n° 613; C. Univ., 4 flor.; Feuille Rép., n° 294; Rép., n° 124; Batave, n° 432; Mess, soir, n° 613. ... 13