SÉANCE DU 22 FLORÉAL AN II (11 MAI 1794) - N° 30 239 Ce décret ne me renvoyant point au district pour statuer ce que de droit et restant muet sur la restitution des fruits de 17 années, qui m’ont été pris, ainsi que sur des dépens que j’ai été forcé de payer par saisie réelle de mes autres biens, sur les dommages intérêts, justes et légitimes, et autres objets, détaillés dans mon mémoire imprimé, ci-joint, ce qui fait que : Malgré que le tribunal du district connaisse très bien la justice de mes demandes, il a cru ne pouvoir rien prononcer que préalablement il n’eut une explication du Comité ou de la Convention disant qu’il est défendu à tous tribunaux d’interpréter la loy. Ce considéré, le citoyen Durand sollicite de nouveau, de votre justice une explication sur le décret rendu en sa faveur le 1er frimaire dernier, et le renvoi à son district de Marmande pour y statuer ce qu’il appartiendra sur toutes les demandes qu’il a formées résultantes de la cassation de l’arrêté du ci-devant parlement de Bordeaux. » Durand supp\ «La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [BEZARD, au nom de] son Comité de législation sur la pétition du citoyen Durand jeune, de la commune de Marmande; » Considérant que le tribunal qui est saisi des contestations d’entre le pétitionnaire et le citoyen Neuville n’a fait aucun référé sur l’interprétation du décret du premier frimaire, dont parle Durand; que les répétitions et les difficultés que les parties ont portées devant les juges de Marmande, sont encore indécises, et que les pétitionnaires ne peuvent demander l’interprétation d’une loi dont l’exécution ou l’application ne paroissent pas embarrasser les autorités qui en sont chargées; » Passe à l’ordre du jour. » Le présent décret ne sera pas imprimé (1). 30 [Les enfants de Prince, à la Conv.; Hainvillers, s.d.] (2). Les enfants de feu Isidore Prince, au nombre de six, exposent que Nicolas Prince, leur oncle paternel n’ayant prêté qu’avec modification le serment prescrit par les décrets des 13 et 14 juillet 1790, et la loi du 29 novembre de la même année, a été déchu des fonctions de curé d’Es-trées-St-Denis, district de Compiègne, qu’il exerçait depuis longtemps. H était septuagénaire, accablé d’infirmités, de maladies et de douleurs, et retiré à Compiègne, lorsque le décret du 14 août de l’année 1792 y est parvenu. Obtempérant à la loi de la déportation qui lui fut notifiée, il s’est fait transporter dans la ville de Bruges, en Flandres, où peu de jours après son arrivée il est décédé. (1) P.V., XXXVII, 134. Minute de la main de Bé-zard, (C 301, pl. 1072, p. 2). Décret n° 9101. (2) DIII 192, doss. 9 (Hainvillers). La nouvelle de son décès a été annoncée à Estrées-St-Denis dans la première quinzaine du mois de septembre 1792, par une lettre datée de Bruges. Cette nouvelle a été confirmée en ladite commune par plusieurs avis subséquents; en sorte que le décès de ce particulier y passant pour une certitude morale, les exposants qui en sont les seuls et uniques héritiers, se sont mis en possession de ses biens. Mais la déclaration de ses biens qui consistent en quelques mines de terres labourable et des prés et pâtures, a été portée au district de Noyon par les officiers municipaux de la commune d’Hainvillers, aussitôt qu’ils ont eu connaissance du décret de la Convention des 29 et 30 du premier mois de l’an 2 de la République. Sur la certitude constante du décès de leur oncle, plus d’un an avant cette dernière loi, les exposants ont demandé qu’il fut sursis à la vente des biens déclarés, jusqu’à ce que les circonstances leur permissent de communiquer avec Bruges pour en rapporter l’extrait mortuaire de leur oncle; mais on a exigé qu’ils le produissent incontinent, et la chose leur est impossible, vu la guerre subsistante entre la République et l’Autriche. Pauvres comme ils sont, n’ayant d’appui que dans la justice de la Convention nationale ils lui demandent : Qu’il lui plaise surseoir, jusqu’à 6 mois après la paix, à la vente des biens de Nicolas Prince, leur oncle qui n’a été ni atteint ni frappé par le décret des 29 et 30 du premier mois de la République. Et cependant ordonner par provision que les exposants continueront d’en jouir, aux offres qu’ils font de les rendre à la République avec les fruits qu’ils en auraient perçus, frais d’exploitation prélevés, au cas que durant ledit sursis ils ne rapporteraient pas la preuve légale du décès de leur dit oncle, arrivé à Burges dans le mois d’août ou de septembre 1792. Sauf en ce dernier cas la réclamation à faire de leur part de quelques-uns de leurs propres, mal à propos confondus par la déclaration des officiers municipaux de la commune d’Hainvil-lers, avec les biens dudit Nicolas Prince, leur oncle. Antoine Bernard. « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [fait par BEZARD] de la pétition des six enfans de feu Isidore Prince, tendante, 1°. à ce qu’il soit sursis, jusqu’à six mois après la paix, à la vente des biens de Nicolas Prince, leur oncle, ancien curé des trois-Saint-Denis (sic), qui, ayant prêté le serment avec modification, se fit transporter à Bruges, quoique septuagénaire et infirme; » 2°. A ce que, par provision, les pétitionnaires jouissent de ces biens, à la charge de les rendre à la République, ainsi que les fruits, dans le cas où pendant le sursis ils ne rapporteroient pas la preuve légale du décès de leur oncle, à Bruges, dans le mois d’août ou de septembre 1792; » Considérant, 1°. qu’aux termes de la loi du 26 août 1792, Nicolas Prince, par son âge et ses infirmités, n’étoit assujetti qu’à la réclusion; SÉANCE DU 22 FLORÉAL AN II (11 MAI 1794) - N° 30 239 Ce décret ne me renvoyant point au district pour statuer ce que de droit et restant muet sur la restitution des fruits de 17 années, qui m’ont été pris, ainsi que sur des dépens que j’ai été forcé de payer par saisie réelle de mes autres biens, sur les dommages intérêts, justes et légitimes, et autres objets, détaillés dans mon mémoire imprimé, ci-joint, ce qui fait que : Malgré que le tribunal du district connaisse très bien la justice de mes demandes, il a cru ne pouvoir rien prononcer que préalablement il n’eut une explication du Comité ou de la Convention disant qu’il est défendu à tous tribunaux d’interpréter la loy. Ce considéré, le citoyen Durand sollicite de nouveau, de votre justice une explication sur le décret rendu en sa faveur le 1er frimaire dernier, et le renvoi à son district de Marmande pour y statuer ce qu’il appartiendra sur toutes les demandes qu’il a formées résultantes de la cassation de l’arrêté du ci-devant parlement de Bordeaux. » Durand supp\ «La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [BEZARD, au nom de] son Comité de législation sur la pétition du citoyen Durand jeune, de la commune de Marmande; » Considérant que le tribunal qui est saisi des contestations d’entre le pétitionnaire et le citoyen Neuville n’a fait aucun référé sur l’interprétation du décret du premier frimaire, dont parle Durand; que les répétitions et les difficultés que les parties ont portées devant les juges de Marmande, sont encore indécises, et que les pétitionnaires ne peuvent demander l’interprétation d’une loi dont l’exécution ou l’application ne paroissent pas embarrasser les autorités qui en sont chargées; » Passe à l’ordre du jour. » Le présent décret ne sera pas imprimé (1). 30 [Les enfants de Prince, à la Conv.; Hainvillers, s.d.] (2). Les enfants de feu Isidore Prince, au nombre de six, exposent que Nicolas Prince, leur oncle paternel n’ayant prêté qu’avec modification le serment prescrit par les décrets des 13 et 14 juillet 1790, et la loi du 29 novembre de la même année, a été déchu des fonctions de curé d’Es-trées-St-Denis, district de Compiègne, qu’il exerçait depuis longtemps. H était septuagénaire, accablé d’infirmités, de maladies et de douleurs, et retiré à Compiègne, lorsque le décret du 14 août de l’année 1792 y est parvenu. Obtempérant à la loi de la déportation qui lui fut notifiée, il s’est fait transporter dans la ville de Bruges, en Flandres, où peu de jours après son arrivée il est décédé. (1) P.V., XXXVII, 134. Minute de la main de Bé-zard, (C 301, pl. 1072, p. 2). Décret n° 9101. (2) DIII 192, doss. 9 (Hainvillers). La nouvelle de son décès a été annoncée à Estrées-St-Denis dans la première quinzaine du mois de septembre 1792, par une lettre datée de Bruges. Cette nouvelle a été confirmée en ladite commune par plusieurs avis subséquents; en sorte que le décès de ce particulier y passant pour une certitude morale, les exposants qui en sont les seuls et uniques héritiers, se sont mis en possession de ses biens. Mais la déclaration de ses biens qui consistent en quelques mines de terres labourable et des prés et pâtures, a été portée au district de Noyon par les officiers municipaux de la commune d’Hainvillers, aussitôt qu’ils ont eu connaissance du décret de la Convention des 29 et 30 du premier mois de l’an 2 de la République. Sur la certitude constante du décès de leur oncle, plus d’un an avant cette dernière loi, les exposants ont demandé qu’il fut sursis à la vente des biens déclarés, jusqu’à ce que les circonstances leur permissent de communiquer avec Bruges pour en rapporter l’extrait mortuaire de leur oncle; mais on a exigé qu’ils le produissent incontinent, et la chose leur est impossible, vu la guerre subsistante entre la République et l’Autriche. Pauvres comme ils sont, n’ayant d’appui que dans la justice de la Convention nationale ils lui demandent : Qu’il lui plaise surseoir, jusqu’à 6 mois après la paix, à la vente des biens de Nicolas Prince, leur oncle qui n’a été ni atteint ni frappé par le décret des 29 et 30 du premier mois de la République. Et cependant ordonner par provision que les exposants continueront d’en jouir, aux offres qu’ils font de les rendre à la République avec les fruits qu’ils en auraient perçus, frais d’exploitation prélevés, au cas que durant ledit sursis ils ne rapporteraient pas la preuve légale du décès de leur dit oncle, arrivé à Burges dans le mois d’août ou de septembre 1792. Sauf en ce dernier cas la réclamation à faire de leur part de quelques-uns de leurs propres, mal à propos confondus par la déclaration des officiers municipaux de la commune d’Hainvil-lers, avec les biens dudit Nicolas Prince, leur oncle. Antoine Bernard. « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [fait par BEZARD] de la pétition des six enfans de feu Isidore Prince, tendante, 1°. à ce qu’il soit sursis, jusqu’à six mois après la paix, à la vente des biens de Nicolas Prince, leur oncle, ancien curé des trois-Saint-Denis (sic), qui, ayant prêté le serment avec modification, se fit transporter à Bruges, quoique septuagénaire et infirme; » 2°. A ce que, par provision, les pétitionnaires jouissent de ces biens, à la charge de les rendre à la République, ainsi que les fruits, dans le cas où pendant le sursis ils ne rapporteroient pas la preuve légale du décès de leur oncle, à Bruges, dans le mois d’août ou de septembre 1792; » Considérant, 1°. qu’aux termes de la loi du 26 août 1792, Nicolas Prince, par son âge et ses infirmités, n’étoit assujetti qu’à la réclusion; 240 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE » 2°. Qu’il a préféré la déportation en se retirant à üruges; *• 3°. Que, suivant l’art. VII de la loi du 22 ventôse, les biens des ecclésiastiques qui ont préféré la déportation à la réclusion sont frappés de la confiscation à compter du jour de leur sortie du territoire français; » Décrète qu’il n’y a lieu à délibérer. » Le présent décret ne sera pas imprimé; il sera envoyé au district de Compiègne » (1). 31 BEZARD, au nom du Comité de législation : L’interprétation des articles XIV et XV de la loi du 30 vendémiaire, sur les prêtres déportés, est aujourd’hui la matière du projet de décret que je viens vous soumettre, au nom de votre Comité de législation. Les articles XIV et XV de cette loi obligent, sous peine de mort, les prêtres sujets à la déportation de se rendre au chef-lieu du département de leur domicile dans la décade de la publication, mais la loi n’assujettit pas nommément à la même formalité les prêtres sexagénaires ou infirmes, qu’elle condamne seulement à la réclusion. Cependant ceux-ci peuvent se cacher, et trouver dans leur âge, dans leurs infirmités mêmes, des moyens d’intéresser les âmes faibles, de les associer à leur sort, et de nuire ainsi à la tranquillité de la République. Il est évident que la loi, en se montrant indulgente à leur égard, en commuant la peine due à leur obstination, n’a pas voulu leur ménager le moyen de nuire. Il ne faut donc pas qu’ils puissent se soustraire à des formalités qui les mettent sous la surveillance inmmédiate de la loi. Il est certain que la loi a besoin, sur ces articles XIV et XV, d’une interprétation qui lève toutes les difficultés et les doutes que son silence pourrait faire naître dans les tribunaux. Cela est encore plus important pour les lois pénales; les personnes chargées de l’exécution des lois ne peuvent ni les modifier, ni les étendre; c’est donc au législateur seul à exercer cette fonction. Il n’est pas moins indispensable de constater les véritables infirmités qui changent en simple réclusion la déportation prononcée. Il est assez de gens qui, pour adoucir leur sort, chercheraient à en imposer; la loi doit aller au-devant d’un pareil abus. Les mesures d’humanité et de justice que l’âge et le malheur nous prescrivent dans ces circonstances n’ont pas pour objet, sans doute, de contrarier l’exécution des lois et de fournir à la fraude le moyen de les éluder. C’est encore une ressource dangereuse qu’il faut enlever à l’imposture sacerdotale, les précautions ne sauraient être trop sévères à cet égard. Un vieux fourbe, enveloppé du manteau de la religion, combattrait encore dans l’ombre avec des infirmités supposées, si la vigilance des corps administratifs, secondés de l’espérience d’officiers de santé probes et patriotes, ne les poursuivait à travers les faux-fuyants et les ruses. (1) P.V., XXXVn, 134. Minute de la main de Bé-zard, (C 301, pl. 1072, p. 3). Décret n° 9097. Il faut donc enlever d’une main ferme ces ligaments et ces bandages qui laisseront plus d’une fois apercevoir une santé dommageable à la patrie. Autre considération non moins importante. Les prêtres réfractaires qui se cachent exposent la vie et la fortune des citoyens. La loi est sévère contre ceux que les recèlent. Ils peuvent, sans se faire connaître, chercher un asile qui sera bientôt découvert. Voilà une famille entière compromise par un sentiment naturel d’humanité envers un inconnu. La loi s’est expliquée contre ceux qui leur donnent une retraite; comment distinguer ici l’ignorance de l’intention ? au lieu que, par la nécessité de se rendre à la maison de réclusion dans un délai prescrit, on sauve d’un piège funeste la bonne foi et l’humanité des citoyens; les ennemis de la République sont à découvert; la loi s’exécute, et ceux qu’elle veut atteindre sont en lieu de sûreté. C’est d’après ces motifs que votre Comité vous propose de décréter ce qui suit [adopté] (1) . « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [BEZARD, au nom de] son Comité de législation, décrète : Art. I. A compter de la publication du présent décret, tous ecclésiastiques, infirmes ou sexagénaires, sujets à la réclusion, sont tenus, dans deux décades, de se transporter au chef-lieu de leurs départemens respectifs, pour être reclus dans les maisons destinées à cet effet. Art. II. Tous ceux, infirmes ou sexagénaires, qui seront trouvés sur le territoire de la République et hors des maisons de réclusion, ce délai expiré, seront jugés et punis suivant les termes des art. V et XV de la loi du 30 vendémiaire dernier. Art. III. Les certificats d’infirmité présentés par ceux qui soutiendront n’être pas dans le cas de la déportation, seront remis à l’administration du département, qui nommera deux officiers de santé pour visiter l’infirme, et vérifier la sincérité de son certificat. Art. IV. Dans le cas où les officiers de santé nommés par le département jugeroient que les certificats sont inexacts ou faux, ils donneront leur avis par écrit; et d’après l’arrêté du département la déportation sera prononcée et * effectuée. Art. V. L’insertion au bulletin du présent décret tiendra lieu de publication (2). 32 Au nom du Comité des secours publics, un autre membre [COLLOMBEL] fait rendre le décret qui suit : « La Convention nationale, après avoir en-(1) Mon., XX, 441. (2) P.V., XXXVII, 135. Texte imprimé, signé de la main de Bézard, (C 301, pl. 1072, p. 4). Décret n° 9105. Reproduit dans Bln, 24 flor. (1er suppl.); Débats, n° 599, p. 297; J. Paris, n° 497; M.U., XXXIX, 362; Audit, nat., n° 596; J. Sablier, n° 1312; J. Per-let, n° 597; J. Matin, n° 690; J. Fr., n° 595; J. Sans-Culottes, n° 452; C. É g., n° 632; J. Mont., n° 16; Ann. R.F., n° 164; J. Lois, n° 591; Feuille Rép., n° 313; Ré p., n° 143. 240 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE » 2°. Qu’il a préféré la déportation en se retirant à üruges; *• 3°. Que, suivant l’art. VII de la loi du 22 ventôse, les biens des ecclésiastiques qui ont préféré la déportation à la réclusion sont frappés de la confiscation à compter du jour de leur sortie du territoire français; » Décrète qu’il n’y a lieu à délibérer. » Le présent décret ne sera pas imprimé; il sera envoyé au district de Compiègne » (1). 31 BEZARD, au nom du Comité de législation : L’interprétation des articles XIV et XV de la loi du 30 vendémiaire, sur les prêtres déportés, est aujourd’hui la matière du projet de décret que je viens vous soumettre, au nom de votre Comité de législation. Les articles XIV et XV de cette loi obligent, sous peine de mort, les prêtres sujets à la déportation de se rendre au chef-lieu du département de leur domicile dans la décade de la publication, mais la loi n’assujettit pas nommément à la même formalité les prêtres sexagénaires ou infirmes, qu’elle condamne seulement à la réclusion. Cependant ceux-ci peuvent se cacher, et trouver dans leur âge, dans leurs infirmités mêmes, des moyens d’intéresser les âmes faibles, de les associer à leur sort, et de nuire ainsi à la tranquillité de la République. Il est évident que la loi, en se montrant indulgente à leur égard, en commuant la peine due à leur obstination, n’a pas voulu leur ménager le moyen de nuire. Il ne faut donc pas qu’ils puissent se soustraire à des formalités qui les mettent sous la surveillance inmmédiate de la loi. Il est certain que la loi a besoin, sur ces articles XIV et XV, d’une interprétation qui lève toutes les difficultés et les doutes que son silence pourrait faire naître dans les tribunaux. Cela est encore plus important pour les lois pénales; les personnes chargées de l’exécution des lois ne peuvent ni les modifier, ni les étendre; c’est donc au législateur seul à exercer cette fonction. Il n’est pas moins indispensable de constater les véritables infirmités qui changent en simple réclusion la déportation prononcée. Il est assez de gens qui, pour adoucir leur sort, chercheraient à en imposer; la loi doit aller au-devant d’un pareil abus. Les mesures d’humanité et de justice que l’âge et le malheur nous prescrivent dans ces circonstances n’ont pas pour objet, sans doute, de contrarier l’exécution des lois et de fournir à la fraude le moyen de les éluder. C’est encore une ressource dangereuse qu’il faut enlever à l’imposture sacerdotale, les précautions ne sauraient être trop sévères à cet égard. Un vieux fourbe, enveloppé du manteau de la religion, combattrait encore dans l’ombre avec des infirmités supposées, si la vigilance des corps administratifs, secondés de l’espérience d’officiers de santé probes et patriotes, ne les poursuivait à travers les faux-fuyants et les ruses. (1) P.V., XXXVn, 134. Minute de la main de Bé-zard, (C 301, pl. 1072, p. 3). Décret n° 9097. Il faut donc enlever d’une main ferme ces ligaments et ces bandages qui laisseront plus d’une fois apercevoir une santé dommageable à la patrie. Autre considération non moins importante. Les prêtres réfractaires qui se cachent exposent la vie et la fortune des citoyens. La loi est sévère contre ceux que les recèlent. Ils peuvent, sans se faire connaître, chercher un asile qui sera bientôt découvert. Voilà une famille entière compromise par un sentiment naturel d’humanité envers un inconnu. La loi s’est expliquée contre ceux qui leur donnent une retraite; comment distinguer ici l’ignorance de l’intention ? au lieu que, par la nécessité de se rendre à la maison de réclusion dans un délai prescrit, on sauve d’un piège funeste la bonne foi et l’humanité des citoyens; les ennemis de la République sont à découvert; la loi s’exécute, et ceux qu’elle veut atteindre sont en lieu de sûreté. C’est d’après ces motifs que votre Comité vous propose de décréter ce qui suit [adopté] (1) . « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [BEZARD, au nom de] son Comité de législation, décrète : Art. I. A compter de la publication du présent décret, tous ecclésiastiques, infirmes ou sexagénaires, sujets à la réclusion, sont tenus, dans deux décades, de se transporter au chef-lieu de leurs départemens respectifs, pour être reclus dans les maisons destinées à cet effet. Art. II. Tous ceux, infirmes ou sexagénaires, qui seront trouvés sur le territoire de la République et hors des maisons de réclusion, ce délai expiré, seront jugés et punis suivant les termes des art. V et XV de la loi du 30 vendémiaire dernier. Art. III. Les certificats d’infirmité présentés par ceux qui soutiendront n’être pas dans le cas de la déportation, seront remis à l’administration du département, qui nommera deux officiers de santé pour visiter l’infirme, et vérifier la sincérité de son certificat. Art. IV. Dans le cas où les officiers de santé nommés par le département jugeroient que les certificats sont inexacts ou faux, ils donneront leur avis par écrit; et d’après l’arrêté du département la déportation sera prononcée et * effectuée. Art. V. L’insertion au bulletin du présent décret tiendra lieu de publication (2). 32 Au nom du Comité des secours publics, un autre membre [COLLOMBEL] fait rendre le décret qui suit : « La Convention nationale, après avoir en-(1) Mon., XX, 441. (2) P.V., XXXVII, 135. Texte imprimé, signé de la main de Bézard, (C 301, pl. 1072, p. 4). Décret n° 9105. Reproduit dans Bln, 24 flor. (1er suppl.); Débats, n° 599, p. 297; J. Paris, n° 497; M.U., XXXIX, 362; Audit, nat., n° 596; J. Sablier, n° 1312; J. Per-let, n° 597; J. Matin, n° 690; J. Fr., n° 595; J. Sans-Culottes, n° 452; C. É g., n° 632; J. Mont., n° 16; Ann. R.F., n° 164; J. Lois, n° 591; Feuille Rép., n° 313; Ré p., n° 143.