42 [Awembléê natlonalé.j ARCHIVES PARLEMENTAIRES* [29 décembre 1789.] que des esprits inquiets ont eu la coupable témérité d’y répandre. Alors, Messieurs, les projets de tous nos ennemis seront confondus : les colons et le commerce se livreront avec courage et confiance à leurs entreprises et à leurs cultures, sous la sauvegarde des lois conservatrices de l’ordre et du pouvoir exécutif, prêt à le maintenir dans toute Sa vigueur, et sous les auspices d’un Roi dont le nom, toujours cher à des Français, et toujours respecté des nègres dans les colonies, y rappelle à lui seul l’idée imposante de la force publique. 2e ANNEXE* Lettre à M. de Volney sur la contribution et la garantie des Genevois. « D’après les observations que vous avez faites dans l’Assemblée nationale, à l’instant où l’on y annonçait le don des 900,000 livres fait par les Genevois, il est de notre devoir de vous prévenir, monsieur, qu’ün grand nombre de nos compatriotes nous ont chargés de nous adresser en leur nom à l’Assemblée nationale. t Aussitôt que les objets si urgents dont cette Assemblée s’occupe actuellement pour le bonheur de la France Seront réglés, nous nous proposons de réclamer de Sa part une attention que les malheurs de notre patrie et leurs causes sollicitent également de l’humanité des représentants de la nation et de leur justice.' « Cette réclamation aura principalement pour objet la quatrième garantie qui vient d’être accordée à l’aristocratie de Genève, et à laquelle les donateurs font probablement allusion, en parlant des bienfaits de la France. « Nous montrerons qu’en privant le très-grand nombre des citoyens genevois de tous les droits inhérents à la liberté, cette garantie efface cette petite république du rang des Etats souverains, pour protéger chez elle une forme de gouvernement organisée sur ce principe, autrefois inconnu aux Genevois* qu’avant de songer à mériter la confiance publique , il faut avoir en mains les moyens de s’en passer. * La demande de cette garantie a été faite au nom de la république entière, parce que les magistrats ont trouvé le moyen de la comprendre dans la misérable transaction qu’ils firent approuver, in globo, à leurs concitoyens, en février dernier, dans un moment de confusion, de vertige et de crainte, et que ceux-ci ne furent pas libres de séparer cet objet des autres qu’on proposait â leurs suffrages. « Jamais elle n’eût été accordée, ni par la cour de Turin, ni par le canton de Berne, si le cabinet de France n’avait non-seulement donné l’exemple de cette nouvelle intervention, mais encore employé son influence sur ces deux Etats pour les déterminer à y prendre part. « Cette conduite, que vous aurez peine à comprendre, monsieur, est l’effet des sollicitations actives et continuelles des aristocrates genevois auprès des ministres du Roi, principalement auprès de M. Necker. « Nous ne voulons pas dire qüe le don, annoncé comme l’effet de leurs égards particuliers pour ce ministre, soit ou le prix de sa complaisance, ou une Condition sans laquelle là garantie Saurait pas eu lieu ; mais nous affirmons, comme des faits notoires dans Genève, que les dernières assurances données par M. Necker aux magistrats genevois, sur l’obtention de la garantie, coïncident pour le temps avec l’invitation qui leur a été faite en son nom, de s’intéresser dans la contribution patriotique; — que les souscriptions relatives à ce dernier objet ont commencé à peu près à la même époque ; — qu’elles sont restées ouvertes jusqu’à l’arrivée des pleins pouvoirs, en vertu desquels la garantie a été signée ; — et que c’est seulement alors que le dernier résultat de cette souscription a été adressé au ministre. « En attendant les développements que nous donnerons à cette affaire, dans laquelle non-seulement l’honneur et la loyauté de la nation française, mais ses intérêts “même nous paraissent également compromis, nous devons à nos concitoyens de vous informer que tous les efforts des magistrats de Genève, pour donner le plus grand éclat à la promulgation de cette garantie, à l’assemblée générale, ont été vains. « Les volontaires se sont refusés à prendre les armes pour cette prétendue fête. La plupart des citoyens, regardant ce jour comme un jour de deuil pour la patrie, se sont abstenus de l’assemblée; et celle-ci, qui, sous l’empire des lois et de la liberté, eût été d’environ douze à seize cents citoyens, a été réduite à environ trois ou quatre cents, qui, pour masquer leur petit nombre, ont ouvert les portes du temple aux personnes de tout sexe et de tout âge qui n’ont pas droit d’y assister, « Ce préliminaire ne promet pas sans doute à cette quatrième garantie un meilleur sort qu’aux trois précédentes; car, tant qu’il y aura de la vertu sur la terre, toute transaction qui tendra* comme celle-ci, à priver un peuple du droit de vivre sous des lois qui lui plaisent, ne saurait se soutenir bien longtemps. « C’est pour prévenir les commotions et les malheurs auxquels une nouvelle révolution pourrait nous exposer encore, que nos concitoyens se disposent à recourir à l’Assemblée nationale. « Une fois libres de toute garantie, rentrés dans la possession du droit sacré de faire leurs lois, sans que l’absurde veto de cinquante aristocrates paralyse leurs volontés, nos concitoyens rétabliront bientôt dans Genève une constitution qui y fixe à jamais la liberté, le calme et la concorde, dont les garanties étrangères les avaient privés. « Lorsque les aristocrates genevois pensent à ces garanties qui les ont si souvent et si dispendieusement protégés, ils vantent la générosité française. Nous l’exalterons à plus juste titre, nous la bénirons, quand cette nation loyale et magnanime cessera de permettre que son nom et ses forces soient employés à notre oppression. « Vous pouvez, monsieur, faire de ces observations l’usage que vous jugerez convenable : elles sont l’expression de la vérité. Agréez celle de notre reconnaissance pour l’intérêt que vous prenez aux droits d’une peuplade qui ne mérita jamais de les perdre, et qui en jouirait encore si l’on eût respecté à son égard les rapports sacrés qui unissent entre eux tous les corps politiques quelle que soit leur force ou leur faiblesse. « Signé : E. Clavière, J. -A. du Roveray, L.-E. Dumont. »