692 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j 1| janvier 'irai avec sécurité et leur dit en avant d’une liaie épaisse : « Camarades, voulez-vous des cartou¬ ches? — Apportez », lui crièrent-ils. Ce cavalier franchit la haie, il reconnaît son erreur, mais trop tard, il était entouré. « Rends-toi », lui crièrent-ils. Ils se saisirent des rênes de bride de son cheval et s’emparèrent du passage, ce cavalier faisant semblant de se rendre jette à terre son sac de cartouches, ces brigands lâchent aussitôt les rênes pour les ramasser. Mandement aussitôt lève son sabre, les frappe de droite et de gauche et de tous les côtés, saute sur le dra¬ peau qu’il leur arrache et se fait jour à travers la haie. A peu de distance de là il se vit entouré ar le régiment ennemi, il le traversa au milieu u feu et des baïonnettes, mais, se voyant pris de tous les côtés, il fut obligé de le repasser une seconde fois, sans se dessaisir de son drapeau. Il distingue le colonel, qui était en avant de son régiment; il tombe sur lui à coups de sabre en lui cnant à haute voix : « Voilà la cavalerie qui arrive pour vous charger ! » A peine eut-il lâché ce mot, que le régiment ennemi, croyant la cava¬ lerie déjà au milieu de ses rangs, jette bas ses armes, ses havresacs et prend la fuite. Mandement se saisit du colonel et abandonna le drapeau. La prise du colonel était infiniment plus importante puisqu’il en est résulté la dé¬ route de ce régiment. Mandement avec sa prise rencontre le général Jourdan qui était blessé, avec lequel il fit route jusqu’au quartier général. Ce cavalier a eu un reçu de l’adjudant général Ernouf en date du 8 septembre dernier, qui constate qu’il a amené à Cassel un colonel allemand. « Nous, membres du Conseil d’administration du 6e régiment de cavalerie, certifions que l’ac¬ tion du citoyen Mandement détaillée ci-dessus est véritable et à notre connaissance; certifions en outre que ce cavalier, depuis qu’il sert au régiment, s’y est toujours conduit en brave müitaire et bon républicain; en lui rendant jus¬ tice nous ne pouvons nous empêcher, et il est de notre devoir de mettre sous les yeux de la Convention, du ministre de la guerre et des gé¬ néraux son action héroïque, ou à la fois il a montré l’intelligence, le sang froid et le courage possible; nous osons espérer une récompense pour ce soldat républicain qui a si bien mérité. « Arrêtons que le présent mémoire sera porté au général en chef Jourdan qui a connaissance du fait, le prions en outre de vouloir bien le signer afin de l’adresser au ministre de la guerre pour que la Convention en soit instruite. « Au cantonnement de Favris, ce 17 frimaire deuxième année républicaine, signé Roussel, Saemdouck, Pelletier, Petit et Tardieu. « Vu et certifié l’exposé ci-dessus, dont j’ai été témoin. « Au quartier général du Petit-Failly, le 26 frimaire an deuxième de la République française une et indivisible. « Le général de brigade, ci-devant chef d’esca¬ dron au 6e régiment de cavalerie. « Signé : Soland. « Le citoyen Jourdan, qui était général de division à l’affaire de Hondschoote et qui avait sous ses ordres le 6e régiment de cavalerie, certifie que le citoyen Mandement, cavalier au¬ dit régiment a fait prisonnier le colonel autri - chien dont il est question ci-dessus et qu’il l’a conduit au quartier général à Cassel. « A la Réunion-sur-Oise, le 28 frimaire, 2e année républicaine, « Signé : Jourdan. « Pour copie conforme à l’original : « Le chef de brigade commandant le 6e régi¬ ment de cavalerie, « Signé : Tardieu. » Pour copie conforme : Le ministre de la guerre, J. Bouchotte. Compte rendu du Bulletin de la Convention (1). Belle action du citoyen Mandement, cavalier au 6e régiment, lors de l’affaire d’Hondscoote. Le 6e régiment de cavalerie étant en bataille derrière les lignes d’infanterie, attendant le moment d’agir, on demanda des cavaliers de bonne volonté pour porter des cartouches à nos bataillons qui s’avançaient en faisant un feu terrible sur les redoutes; nos cavaliers, malgré le feu terrible de l’ennemi, s’empressèrent de porter des secours à leurs frères d’armes; rien ne ralentit leur ardeur. Un d’entre eux nommé Mandement remplit son sac de cartouches, se porte au galop vers nos bataillons, et leur dit : « Camarades, avez-vous besoin de cartouches ! — Non, camarade ; nous no tirons plus; nous chargeons ces brigands-là à l’arme blanche. » En se retirant, ce cavalier aper¬ çoit dans un pré huit ou dix soldats d’infanterie qui gardaient un drapeau; croyant que o’ était de nos troupes, il marche vers eux avec sécurité, et leur dit en avant d’une haie épaisse : Cama¬ rades, voulez-vous des cartouches? — Apportez, lui crièrent-ils. Ce cavalier franchit la haie; il reconnaît son erreur, mais trop tard, il était entouré. Rends-toi, lui dirent-ils, ils se saisirent des rênes de son cheval et s’emparèrent du pas ■ sage. Ce cavalier, faisant semblant de se rendre jette à terre son sac de cartouches. Ces brigands lâchent aussitôt les rênes pour les ramasser. Mandement aussitôt tire son sabre, frappe de droite et de gauche, de tous les eôtés, saute sur le drapeau qu’il leur arrache, et se fait jour à travers la haie. A peu de distance de là il se vit entouré par le régiment ennemi, il le traversa au milieu du feu et des baïonnettes, mais se voyant pris de tous les côtés, il fut obligé de le repasser une seconde fois sans se dessaisir de son drapeau. Il distingue le colonel qui était en avant de son régiment, il tombe sur lui à coup de sabre, en criant à haute voix : Voilà la cavalerie gui arrive pour vous charger! A peine eut-il lâché ce mot que le régiment ennemi croyant la cavalerie déjà au milieu de ses rangs, jette bas ses armes, ses havresacs, et prend la fuite. Mandement se saisit du colonel et abandonne le drapeau. La prise du colonel était infiniment plus (I) Bulletin de la Convention nationale du 15 nivôse an II (samedi 4 janvier 1794); Moniteur universel [n° 106 du 16 nivôse an II (dimanche 5 janvier 1794] [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 1-‘ .«93 importante, puisqu’il en est résulté la déroute de ce régiment. Mandement, avec sa prise, ren¬ contre le général Jourdan qui était blessé, et avec lequel il fit route jusqu’au quartier général. Ge cavalier a eu un reçu de l’adjudant général Ernouf, en date du 8 septembre dernier, qui constate qu’il a amené à Cassel un colonel alle¬ mand. Mention honorable; renvoi au comité d’ins¬ truction publique pour être inséré dans les Anna¬ les patriotiques, et au comité de Salut public pour donner de l’avancement au citoyen Mandement. Les pétitionnaires sont admis à la barre. Le citoyen Delanne, instituteur, admis avec ses élèves et son épouse, demande l’organisation définitive des écoles primaires; il fait diverses questions à ses élèves pour donner une idée des principes qu’il enseigne et des progrès qu’ils ont laits. Mention honorable, insertion au « Bulle¬ tin » (1). Le citoyen Eloy Clary, qui a eu un bras coupé par les Autrichiens, demande un secours. Renvoyé au comité des secours publics pour faire un rapport demain (2). Compte rendu du Moniteur universel (3). Z7n volontaire qui a perdu un de ses bras en combattant les ennemis de la patrie, réclame un secours provisoire pour se rendre dans le sein de sa famille. Plusieurs membres se plaignent des difficultés que les défenseurs éprouvent pour obtenir les secours que la loi leur accorde. Après une courte discussion, l’Assemblée renvoie cette pétition au ministre de la guerre, et sur la proposition de Charlier, elle décrète que le ministre rendra compte des moyens qu’il a adoptés, pour l’exécution de la loi rendue en faveur des militaires blessés, et que le comité des pensions présentera un rapport sur les moyens de simplifier le décret qui détermine les secours qui doivent être accordés. Suit la pétition présentée par la Société popu¬ laire de la Béunion-sur-Oise, en faveur d’Eloy Clary (4). La Société populaire de Béunion-sur-Oise, au citoyen Président de la Convention nationale. « Citoyen Président. « La Société populaire de Réunion-sur-Oise présente à la Convention nationale une malheu¬ reuse victime de la barbarie des Autrichiens dans la personne du citoyen Eloi Clary, habitant d’Oizy, district de Vervins, département de l’Aisne. « Une horde d’ennemis étant venue faire une (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 307. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 307. (3) Moniteur universel [n° 107 du 17 nivôse an II (lundi 6 janvier 1794), p. 430, col. 3], (4) Archives nationales, carton F*' 2654. incursion dans la commune d’Oizy, le 6 novem¬ bre dernier (vieux style), Clary rentrant dans sa maison trouvasafemmeecxposée à la violence. d’un hulan qui, pour assouvir son infâme bru¬ talité, avait employé les menaces et les coups. Comme un nouveau Leniger, Clary placé entre l’ignominie et la mort, se décida pour le parti que l’honneur lui commandait ; il saisit la masse dont il se servait habituellement pour battre le cuir (étant cordonnier de profession), il en asséna un coup sur la tête du brigand qui tomba sans connaissance; déjà il l’avait désarmé lorsqu’il se vit environné de huit autres aussi scélérats que celui qu’il avait terrassé. Au milieu de tous les dangers et assailli de plusieurs coups de sabre il ne perdit pas courage, se défen¬ dit toujours en véritable républicain, se dé¬ barrassa enfin de ses assassins, mais avec le poi¬ gnet gauche abattu. Il se retira dans un bois voi¬ sin où il passa la nuit, et, quoique affaibli pai l’abondance de sang qu’il avait perdu, il se rendit le lendemain à l’hôpital de Réunion-sur-Oise, distant de trois lieues de sa demeure. Ce citoyen intéressant par son malheur et son courage, est père de quatre enfants mâles en bas âge, et a sa femme enceinte. La Société populaire de Réunion-sur-Oise, qui a vérifié les faits après s’être assurée du dénuement absolu dans lequel se trouvé Clary (les satellites du despotisme lui ayant enlevé tout ce qu’il possédait en mobilier, marchan¬ dises et comestibles) a pourvu d’abord à ses be¬ soins les plus urgents; elle a accédé au désir qu’il avait de se rendre auprès de la Convention, per¬ suadée qu’il obtiendra de sa justice les moyens de de faire subsister sa famille, ne pouvant plus la soutenir par ses travaux, il se croit en état de remplir une place dans une maison ou magasin national, telle que celle de préposé à la surveil¬ lance, dans laquelle il pourra encore montrer par son zèle son inviolable attachement à la République. Réunion-sur-Oise, ce 6 nivôse, l’an II de la République une et indivisible. Delisle, président; Rimbert, secrétatire; J.-L.-A Lazard. Attestation du maire et des officiers municipaux de la commune d’Oizy (1). Nous maire et officiers municipaux de la com¬ mune d’Oizy, district de Vervins, département de l’Aisne, certifions que le jeudi 6 novembre dernier, l’ennemi étant entré en foule dans notre commune, est entré dans différentes habi¬ tations et particulièrement dans celle du citoyen Eloi Clary, père de famille de quatre enfants mâles et sa femme enceinte, où ils ont fait beau¬ coup de violences à sa femme ainsi qu’à lui, et entendant crier sa femme prit un marteau à battre cuir, comme étant cordonnier de sa pro¬ fession et en porta un coup à la tête d’un hulan qui le maltraitait, le jeta par terre et ensuite l’a désarmé; lorsque tout à coup huit autres hulans, arrivés à sa porte, lui ont porté plusieurs coups de sabre dessus le bras gauche, dont un lui a abattu le poignet; il a encore eu le courage de se sauver à la faveur d’une haie pour se rendre en une forêt assez proche de notre commune. D’après ce fait, ils ont enlevé chez ledit Cla-(1) Archives nationales, carton F15 2654.