182 [Convention nationale, [ ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j | Novembre ïraj1 moyens de multiplier les subsistances. La terre sera mieux cultivée, dit -il, lorsqu’elle le sera - par petites portions ; elle sera plus riche, lorsque le cultivateur cessera d’être mercenaire; elle sera plus variée lorsque chaque portion de terrain fournira aux besoins d’une famille. Cependant il y a tel sol dont la culture ne pourrait se soutenir sans une certaine ai¬ sance de la part du fermier, à cause des avances qu’elle exige. 11 est donc sage de proposer un maximum, afin de contenir l’injuste aridité, et de laisser une latitude salutaire à l’émulation, aux entreprises laborieuses du cultivateur. La plus grande richesse d’une récolte est dans sa variété. Il faut donc favoriser toutes les espèces de subsistances. Il en est une surtout qui est un pain tout formé par la nature et qui Se reproduit avec une abondance prodigieuse, sa culture est facile et toujours assurée : c’est la pomme de terre. Cessons de dépendre «Tune seule production. Que la tranquillité, que l’existence d’une nation entière ne soit plus attachée à la réussite ou à la privation du froment. Il est de notre prévoyance de faire en sorte que notre subsistance, comme notre liberté, soit désormais à l’abri de tous les événe-- ments. La discussion du projet présenté à la suite de ces réflexions est ajourné à quinzaine. Au nom du comité de législation, le décret sui¬ vant est rendu : La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport de son comité de législation [Merlin l(de Douai), rapporteur (1)] sur la pétition du citoyen Vassal contre l’arrêté des administrateurs du district de Rozay, départe¬ ment de Seine-et-Marne, du 9 de ce mois, gui lui enjoint de faire évacuer, sous trois jours, sa maison, qualifiée « château », située dans la com¬ mune de la Fortelle, et ordonne que cette maison sera démolie à ses frais, comme étant comprise dans le décret de la Convention nationale, du 38 du 1er mois de la présente année, et dans l’arrêté pris, le 3 brumaire courant, par le citoyen Dubouchet, représentant du peuple, député dans le département de Seine-et-Marne; les propriétaires de terres et les fermiers à planter en pommes de terre un nombre déterminé d’arpents. Le projet de ce décret a été ajourné jusqu’au rap¬ port qui doit être fait sur le Code rural. III. Compte rendu du Journal de Perlet. Coupé présente un projet de décret relatif aux grandes exploitations. On en décrète l’ajournement. Les comités d’agriculture et de législation présen¬ teront au 1er frimaire le Code rural. IV. Compte rendu du Mercure universel. L’Assemblée a décrété diverses propositions rela¬ tives aux grandes fermes et la défense à tous culti¬ vateurs ou fermiers d’exploiter plus d’une ferme. (IJ D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales , carton C 277, dossier 730. « Décrète que la pétition et l’arrêté ci-dessus seront envoyés au représentant du peuple Dubou¬ chet, qui, après vérification faite de l’état de la maison dont il s’agit, statuera, tant sur le point de savoir si elle est dans le cas de la démolition, que sur les autres objets de la réclamation du citoyen Vassal; « Surseoit, jusqu’à la décision qui sera défini¬ tivement prise par le citoyen Dubouchet, à la démolition ordonnée par l’arrêté du district de Rozay; « Charge ses comités de la guerre et de législa¬ tion de lui présenter incessamment leurs vues sur le mode d’exécution du décret du 38 du 1er mois. « Le présent décret ne sera point imprimé. Il en sera sur-le-champ adressé des expéditions manuscrites, tant au représentant du peuple Du¬ bouchet qu’aux administrateurs du district de Rozay (1). » Un membre du comité de législation [Camba¬ cérès, rapporteur (3)] fait adopter le décret sui¬ vant (3) : « La Convention nationale, après avoir entendu lefrapport de son comité de législation, décrète ce qui suit : Art. Ie1*. « Les enfants actuellement existants, nés hors du mariage, seront admis aux successions de leurs père et mère, ouvertes depuis le 14 juil¬ let 1789. « Ils le seront également à celles qui s’ouvri¬ ront à l’avenir, sous la réserve portée par l’ar¬ ticle 10 ci-après. Art. 2. «"Leurs droits de successibilité sont les mêmes que ceux des autres enfants. Art. 3. « Us ne pourront néanmoins déranger de leur chef les partages faits; mais ils prendront leur portion sur les lots existants. Art. 4. « Si le père ou la mère de l’enfant né hors du mariage a transmis ses biens en tout ou en par¬ tie, soit ab intestat , soit par disposition, à des pa¬ rents collatéraux ou à des étrangers, ceux-ci, lors de la remise qu’ils feront à l’enfant né hors du mariage, pourront retenir le sixième de ce qui leur est échu, ou de ce qui leur a été donné. Art. 5. « Dans tous les cas, les enfants nés hors du mariage seront tenus de recevoir les biens en (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 276. (2) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton G 277, dossier 730. (3) Voy. ci-dessus, séance du 9 brumaire, le rap¬ port de Cambacérès et séance du 11 brumaire, la discussion à laquelle il a donné lieu. [Convention nationale ] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, { 183 Pétât où ils se trouveront à compter de ce jour, et de s’en rapporter, sur la consistance de ces biens, a l’inventaire qui en aura été dressé à la mort de leur père ou mère. Art. 6. « Les héritiers directs ou collatéraux qui ne pourront pas représenter en nature les effets et biens compris dans l’inventaire, feront état aux enfants nés hors du mariage du prix qu’ils en ont tiré, ou de leur valeur au temps de la mort de leurs pères ou mères. « De leur côté, les enfants nés hors du ma¬ riage feront état aux héritiers directs ou colla¬ téraux des impenses utiles ou nécessaires que ceux-ci ont faites dans les biens, et ils rapporte¬ ront aux héritiers directs ce qui leur a été donné par leurs pères ou mères, les fruits et revenus exceptés. Art. 7. « Les enfants nés hors du mariage ne pourront exiger la restitution des frais perçus, ni préjudi¬ cier aux droits acquis, soit à des tiers possesseurs, soit à des créanciers hypothécaires ou autres ayant titre authentique, avant le 1er brumaire courant. Art. 8. « Pour être admis à l’exercice des droits ci-dessus, dans la succession de leurs pères décédés, les enfants nés hors du mariage seront tenus de prouver leur possession d’état, « Cette preuve ne pourra résulter que de la représentation d’écrits publics ou privés du père ou de la suite des soins donnés à titre de pater¬ nité et sans interruption, tant à leur entretien qu’à leur éducation. La même disposition aura heu pour la succession de la mère. Art. 9. « Les enfants nés hors du mariage, dont la filiation sera prouvée de la manière qui vient d’être déterminée, ne pourront prétendre aucun droit dans les successions de leurs parents colla¬ téraux, ouvertes depuis le 14 juillet 1789. « Mais à compter de ce jour, il y aura successi-bilité réciproque entre eux et leurs parents colla¬ téraux, à défaut directs. Art. 10. « A l’égard des enfants nés hors du mariage, dont le père et la mère seront encore existants lors de la promulgation du Code civil, leur état et leurs droits seront en tous points réglés par les dispositions du Code. Art. 11. . « Néanmoins, en cas de mort de la mère avant la publication du Code, la reconnaissance du père, faite devant un officier public, suffira pour constater, à son égard, l’état de l’enfant né hors du mariage, et le rendre habile à lui suc¬ céder. Art. 12. « Il en sera de même dans le cas où la mère serait absente ou dans l’impossibilité absolue de confirmer, par son aveu, la reconnaissance du père. Art. 13. « Sont exceptés ceux de ces enfants dont le père ou la mère était, lors de leur naissance, en¬ gagé dans les liens du mariage. « Il leur sera seulement accordé, à titre d’ali¬ ment, le tiers en propriété de la portion à laquelle ils auraient droit s’ils étaient nés dans lé ma¬ riage. Art. 14. « Néanmoins, s’il s’agit de la succession de per¬ sonnes séparées de corps par jugement ou acte authentique, leurs enfants nés hors mariage exerceront tous les droits de successibilité énon¬ cés dans l’article 1er, pourvu que leur naissance soit postérieure à la demande en séparation. Art. 15. « A l’égard des enfants nés hors du mariage, qui sont en instance avec des héritiers directe ou collatéraux, pour la succession de, leur père ou de leur mère, ouverte avant le 14 juillet 1789, et dont les réclamations n’auraient pas été termi¬ nées par jugement en dernier ressort, il leur sera accordé le tiers de la portion qu’ils auraient eue s’ils étaient nés dans le mariage. Art. 16. « Les enfante et descendante d’enfante nés hors du mariage représenteront leurs pères et mères dans l’exercice des droite que la présente loi leu* attribue. Art. 17. « Tous procès actuellement existante entre des enfants nés hors du mariage et les héritiers di¬ rects ou collatéraux de leur père ou de leur mère, sont et demeurent anéantis. Art. 18. « Des arbitres choisis par les parties, ou, à leur refus, par le juge de paix du lieu de l’ouverture de la succession, termineront toutes les contes¬ tations qui pourront s’élever sur l’exécution de la présente loi, notamment dans le cas où il n’aurait pas été fait inventaire à la mort du père ou de la mère des enfante nés hors du ma¬ riage. « En aucun cas, les jugements de ces arbitres ne seront sujets à l’appel. 184 [Convention nationale.] Art. 19. « La Convention nationale déclare communs aux enfante nés hors du mariage, dont la filia¬ tion sera prouvée de la manière déterminée par l’article 8, les secours décrétés en faveur des enfants des défenseurs de la patrie (1). » Les citoyens Wormeselles, Lemoine fils et Lacombe écrivent à la Convention qu’ils viennent d’être condamnés à mort par le tribunal révolu¬ tionnaire, suivant la loi du 6 août dernier. « Le tribunal, disent-ils, n’a pas cru pouvoir nous per¬ mettre de demander que la loi du 17 du même mois fût invoquée. » En conséquence, ils deman¬ dent qu’il soit sursis à l’exécution du jugement de mort rendu contre eux. Sur la proposition d’un membre, le décret sui¬ vant est rendu : « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu la lecture de la lettre des citoyens Worme¬ selles, Lemoine fils et Lacombe, en date du 12 brumaire l’an II de la République, passe à l’ordre du jour sur la demande en suspension d’exécution de jugement (2). » Suit la lettre des citoyens Wormeselles, Lemoine fils et Lacombe (3). « 12 brumaire, l’an II de la Répu¬ blique une et indivisible. « Citoyen Président, « Nous venons d’être condamnés à mort par le tribunal révolutionnaire qui nous a appliqué la loi du 6 août dernier. Le tribunal n’a pas cru pouvoir nous permettre de demander que la loi du 17 du même mois fût invoquée. Cependant elle révoque celle du 6 août puisqu’elle dit que la Trésorerie nationale continuera à Bordeaux le service des caisses, la Convention se réservant de statuer sur le sort des administrateurs cou¬ pables. « La Convention a bien eu l’intention de suspendre l’ effet de la loi du 6 août, car elle a postérieurement encore chargé son comité de sûreté générale de lui faire un rapport sur cette prétendue Commission. « Nous demandons en conséquence, citoyen président, que la loi du 17 août soit exécutée et que la Convention fasse un rapport avant que la loi du 6 nous soit appliquée, et qu’il soit sus¬ pendu à l’exécution du jugement à mort rendu contre nous. « G. Wormeselle est chargé par le comité de surveillance d’un travail sur cette prétendue Commission. « Lemoine fils; G. Wormeselle; Lacombe. fl) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 24, p. 277 à 281. (2) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 24, p. 281. (3) Archives nationales, carton C 280, dossier 763. 12 brumaire an II 2 novembre 1793 Compte rendu du Mercure universel (1). _ ( Suit un résumé de la lettre que nous insérons ci-dessus.) Romme observe qu’à la vérité ces condamnés étaient administrateurs, mais qu’ils étaient de la Commission soi-disant populaire de Bor¬ deaux. Après quelques discussions, l’Assemblée passe à l’ordre du jour sur cette lettre. Des jeunes citoyens de la première réquisi¬ tion, formant le 1er bataillon de la section des Tuileries, réunis à celle des Invalides, sont admis à la barre. Ils font profession de la plus sévère discipline et de la plus étroite union, et de pour¬ suivre les brigands coalisés dans leur dernier repaire. Le Président reçoit leur serment et les admet à défiler (2). Compte rendu du Moniteur universel (3). Les jeunes gens en réquisition des sections des Tuileries, des Champs-Elysées et des Invalides, (1) Mercure universel [13 brumaire an II (di¬ manche 3 novembre 1793), p. 44, col. 1]. D’autre part, les Annales patriotiques et littéraires [n° 306 du 13 brumaire an II (dimanche 3 novembre 1793), p. 1423, col. 2] rendent compte de cette lettre et discussion à laquelle elle donna lieu dans les termes suivants : « (Extrait de la lettre que nous reproduisons ci-des-sus, d'après l'original qui se trouve aux Archives nationales.) « Un membre observe que les trois réclamants ont été condamnés, non comme administrateurs, mais comme membres de la Commission populaire de Bordeaux, tous justement mis hors de la loi. « L’Assemblée passe à l’ordre du jour. » (2) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 24, p. 282. (3) Moniteur universel [n° 44 du 14 brumaire an II (lundi 4 novembre 1793), p. 179, col. 3]. D’autre part, le Journal des Débats et des Décrets (brumaire an II, n° 410, p. 170), Y Auditeur national [n° 407 du 13 brumaire an II (dimanche 3 novembre 1793), p. 4] et le Mercure universel [13 brumaire an II (dimanche 3 novembre 1793), p. 46, col. 2] rendent compte de l’admission à la barre de cette députa¬ tion dans les termes suivants : I. Compte rendu du Journal des Débats et des Décrets. Les jeunes citoyens de la première réquisition des sections des Tuileries, des Invalides et des Ghamps-Élysées, réunis, prêts à partir pour la frontière, défilent dans le sein de la Convention. Ils jurent de ne revenir que vainqueurs et d’observer la plus sévère discipline. Le citoyen Duchaume chante l’hymne des Marseillais; le bataillon répète en chœur le refrain. Quelques membres de la Convention quit¬ tent leur place pour embrasser les jeunes défenseurs de la patrie. Cette scène guerrière et touchante se passe au milieu des plus vifs applaudissements. II. Compte rendu de Y Auditeur national. < A la fin de la séance, la Convention a permis aux ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j