I Assemblée nationale.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 121 juillet 1791. J 495 chandises qu’ils pourront retirer d’un pays qu’ils ont été forcés d’abandonner. Leur fuite et l’abandon de notre commerce rendront rares les retraits de Syrie. Il nous a paru qu’il était convenable d’en favoriser l’introduction. C’est ce qui nous a portés à vous proposer de n’imposer qu’à 20 livres le quintal les cotons filés du Levant. Quantaux cafés de Moka qui viennenten France par le commerce du Levant, ils méritent certainement la préférence sur ceux qui sont importés par le commerce de l’Inde. Nous avons déjà établi les raisons qui doivent faire pencher la balance en faveur du commerce du Levant; nous nous bornerons à répéter qu’il ne vient pas une balle de café du Levant, qu’elle ne soit la représentation d’un produit de notre sol ou de notre industrie, et que souvent il arrive que les cafés de Moka sont les retours des cafés des îles qu’on vend dans les Echelles. Les Turcs de toutes les classes font un grand usage de café; ceux qui ne sont pas aisés consomment du café de nos colonies, et la vente de cette denrée est une des principales branches de notre commerce en Turquie. Le café de Moka, introduit par le commerce de l’Inde, est tarifé à 20 livres le quintal; il nous a paru juste de n’imposer ce même café qu’à 12 livres le quintal, lorsqu’il sera introduit par le commerce du Levant. Transit des marchandises du Levant. Il importe à une nation commerçante de se procurer directement, par la voie des échanges, non seulement ce qui est nécessaire à ses consommations, mais encore ce qu’elle peut fournir aux besoins des autres nations. Lorsqu’elle peut retirer cet avantage de son commerce, sans nuire à son industrie, elle est assurée d’obtenir une grande balance en sa faveur. Elle doit donc employer tous les moyens pour atteindre à ce but. Le transit, lorsqu’il n’a pas pour objet des marchandises manufacturées dont le versement en route pourrait préjudicier à nos fabriques, est un des principaux moyens de prospérité. En favorisant le commerce qu’il sert, il féconde les lieux qu’il parcourt, et il augmente la richesse publique par les moyens qu’il emploie. Marseille est le plus grand entrepôt du commerce du Levant. Sa position lui donne des communications commodes avec Genève, la Suisse et l’Allemagne. Tous ces pays consomment beaucoup de marchandises du Levant. S’ils n’avaient pas la facilité de les tirer de Marseille par la voie du transit, ils s’approvisionneraient en Italie; et la perte de leurs commissions occasionnerait une diminution sensible dans notre commerce. Il serait impolitique de laisser le transit des marchandisesduLevantgrevéde quelque droit(l). Livourne, Venise et Trieste ont également des communications avec la Suisse et l’Allemagne. Ne nous exposons pas, dans un objet si important, à des concurrences que la moindre combinaison fiscale pourrait favoriser. Votre comité vous propose donc d’affranchir ce transit. (1) Ces marchandises acquittaient les droits de douane de Lyon et de Valence, et les drogueries devaient de plus le droit particulier do droguerie. Le café était sujet à un impôt de 3 livres par quintal, etc. Droit de 20 0/0 sur les marchandises du Levant - qui proviennent du commerce de j V étranger. Indépendamment des droits fixés par les tarifs sur les marchandises du Levant, elles sont encore soumisesà un droit de 20 0/0de la valeur, et aux 10 sous pour livre en sus. Ce droit est dû dans 4 cas : 1° lorsque ces marchandises proviennent du commerce étranger ; 2° lorsqu’elles sont importées par des bâtiments étrangers ; 3° lorsqu’elles ont été entreposées en pays étranger; 4° enlin lorsqu’elles appartiennent à des étrangers. Les marchandises étrangères de même nature sont soumises au même droit de 20 0/0, si elles ne sont point accompagnées d’un certificat qui constate que leur origine est autre que celle du Levant et de la Barbarie. Ces dispositions, qui appartiennent à l’autre siècle et au ministère de Colbert, sont toutes dirigées contre la navigation étrangère, en faveur de la navigation nationale. C’est à leur exécution que nous devons le maintien et l’augmentation de notre commerce dans les Echelles, sans qu’il s’en détourne quelque branche. L’intérêt national nous prescrit de n’en point faciliter la déviation. Mais autant il est nécessaire de conserver l’intégrité de notre commerce direct au Levant, autant il est juste et convenable d’empêcher que, par des combinaisons faites dans les vues d’un intérêt national, on ne nuise à ce même intérêt. Si la perception du droit de 20 0/0 n’était pas tenue dans de justes bornes, il pourrait en résulter du préjudice pour notre industrie. La perception la plus sévère sur les marchandises qui sont particulières au Levant, et qui ont un caractère si déterminé qu’il est impossible de les méconnaître, n’oifre point d’inconvénients. Il n’en est pas de même par rapport aux productions qui sont communes au Levant et à d’autres pays, et qui ne peuvent être distinguées. Relativement à celies-ià, il faut prendre les mesures propres à diminuer les embarras de la perception, et à empêcher qu’une application injuste du droit ne les repousse. On y parviendra en retranchant du tarif tous les articles qui ne sont pas d’une grande considération dans nos échanges et dans nos importations ; en donnant aux propriétaires des marchandises étrangères au Levant des facilités pour constater leur véritable origine. D’après ces considérations, votre comité a l’honneur de vous proposer le décret suivant : « Art. 1er. Le commerce des Echelles du Levant et de Barbarie est libre à tous les Français. « Art. 2. On peut envoyer, de tous les ports du royaume, des vaisseaux et des marchandises dans toutes les Echelles. « Art. 3. Tout négociant français peut faire des établissements dans toutes les parties du Levant et de la Barbarie, en fournissant, dans la forme usitée, et jusqu’au règlement qui sera incessamment présenté à l’Assemblée nationale, sur le mode d’organisation de l’administration du Levant, un cautionnement qui garantisse les autres établissements français, des actions qui pourraient être exercées contre eux, par son fait ou celui de ses agents. « Art. 4. Les cautionnements qui seront fournis par les habitants des autres départements que celui des Bouches-du-Rhône, pourront être reçus par les directoires de leurs départements, qui en feront remettre un extrait à la chambre de commerce de Marseille. « Art. 5. Les retours du commerce du Levant 496 [Assemblée nationale. j ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 juillet 1791.j et de Barbarie peuvent se faire dans tous les ports du royaume, après avoir fait quarantaine à Marseille, en avoir acquitté les frais et le3 droits imposés pour l’administration du Levant, à la charge de rapporter un certificat de santé. « Art. 6. Les marchandises provenant desdits retours, à l’exception des tabacs qui y seront traités comme dans les autres ports du royaume, pourront entrer à Marseille, s’y consommer, et en être réexportées par mer , en franchise de tout autre droit que celui imposé pour l’administration des Echelles. « Art. 7. Lesdites marchandises payeront, à leur introduction dans le royaume, les droits auxquels sont assujetties, par le tarif général, celles de même espèce qui viennent de l’étranger; à l’exception cependant des toiles de coton blanches et des cotons filés, qui ne seront soumis qu’à un droit de 20 livres du cent pesant, et du café Moka, dont le droit sera réduit à 12 livres, aussi par quintal. « Art. 8. Le transit par terre desdites marchandises de Marseille pour Genève, la Suisse, le Piémont, la Savoie, l’Allemagne et les Pays-Bas de la domination étrangère, sera affranchi de-tous droits, à la charge que lesdites marchandises seront expédiées par acquit-à-caution portant soumission de les faire sortir dans le délai de 3 mois, car l’un des bureaux de Chaparillan, Pont-de-Beauvoisin, Seyssel, Meyrin, Verrières de-Joux, Jougnes, Héricourt, Strasbourg, Saint-Louis, Sarrelouis, Thionville, Givet, Valenciennes et Lille. « Art. 9. Dans le cas où les retours du Levant s’effectueraient dans d’autres ports que celui de Marseille, après y avoir fait quarantaine, les marchandises importées seront, à leur arrivée, entreposées sous la clef de la régie. Celles desdites marchandises qui seront tirées de l’entrepôt pour être réexportées par mer, ou pour passer à l’étranger en transit, ne seront sujettes à aucun droit. Celles qui entreront dans la consommation du royaume payeront les droits du nouveau tarif. « Art. 10. Pour favoriser le commerce direct des Français au Levant, les marchandises du Levant et de Barbarie comprises dans l’état annexé au présent décret, importées de l’étranger, même sur bâtiments français, ou direclements du Levant, sur navires étrangers, ou sur navires français ayant relâché à l’étranger et y ayant fait quelque chargement, seront assujetties, tanta Marseille que dans les autres ports du royaume au droit de 20 0/0 de la valeur, porté par ledit état. Ce droit sera indépendant de celui du tarif général. « Art. 11. Les marchandises importées directement du Levant par navires français, quoique pour le compte des étrangers, jouiront de la même f anchise que celles importées pour le compte des Français. « Art. 12. Le droit de 20 0/0 sera perçu, également par addition à celui d’entrée sur les marchandises dénommées dans l’état n° 2, annexé au présent décret, importées de l’étranger dans le royaume, tant par terre que par mer, sans être accompagnées de certificats justificatifs d’une origine autre que celle du Levant, délivrés par les consuls ou agents de la nation française, où il y en aura d’établis, et, à leur défaut, par les magistrats des lieux d’envoi. Bans le cas où les certificats n’accompagneront pas les marchandises, le droit sera consigné, et la restitution n’en sera faite u’autant que le certificat sera rapporté dans le élai de 3 mois. « N° 1er. État des marchandises du Levant qui devront le droit de 20 0/0 de la valeur à l'entrée de Marseille , lorsqu'elles y seront apportées par vaisseaux étrangers , ou par vaisseaux français qui auront relâché en pays étrangers , et qui y auront fait quelques chargements. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLE JlEN T AIRES. [21 juillet 1191.] ■497 1" Série. T. XXVIII, 32 498 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |21 juillet 1791.] [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 juillet 1791. J 499 « N° 2. Etat des marchandises venant de l’étranger, qui devront, à toutes les entrées du royaume, indépendamment des droits du tarif général, un droit additionnel de 20 0/0 de la valeur, d’après l’évaluation portée par l’état n° 1, lorsqu’elles seront du Levant; ou, si elles sont de même espèce que celles du Levant, sans être accompagnées du certificat justificatif d’une autre origine, savoir : « Alun de Smyrne, casse du Levant, cendres du Levant, cires jaunes, cordouans ou maroquins, coton du Levant en laine, cuirs-buffles ou buftlins, encens, éponges, folium du Levant, follicule de séné, galle, gomme adragant, arabique, ammoniaque, sérapine et turique, huiles du Levant et de Barbarie; laines du Levant et de Barbarie, natron ou soude, opium, plumes d’autru-clie blanches ou noires, poil de chameau en laine, poil de chevreau ou laine de chevron, poil de chèvre filé, rhubarbe, safranum, séné, soies du Levant, vitriol de Chypre. » (La discussion est ouverte sur ce projet de décret.) Un membre fait une observation relativement à la compagnie d’Afrique, et demande, pour qu’ii ne soit rien préjugé sur les droits dont celte compagnie jouit sur les côtes de Barbarie, que son observation soit insérée au procès-verbal. Deux membres s’opposent à cette insertion, vu que ce privilège, accordé par les régences d’Afrique, ne peut avoir rien de commun avec la liberté du commerce du Levant à accorder à tous les citoyens français. Plusieurs membres , à propos de l’article 5, trouvent des inconvénients à ce que les retours du commerce du Levant et de Barbarie soient invariablement fixés à Marseille pour en être réexportés en franchise; ils demandent par amendement que le mot provisoirement soit ajouté à l’article. D'autres membres combattent cet amendement, s’appuyant sur ce qu’il ne peut y avoir qu’un lazaret" dans le royaume pour la quarantaine des équipages qui arrivent du Levant, à cause du danger de la contagion. (L’Assemblée décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur l’amendement.) Après quelque discussion sur les autres articles, le projet de décret est mis aux voix, avec quelques légères modifications, dans les termes suivants : Art. lor. « Le commerce des Echelles du Levant et de Barbarie est libre à tous les Français. Art. 2. '< Il est libre d’envoyer, de tous les ports du royaume, des vaisseaux et des marchandises dans toutes les Echelles. Art. 3. « Tout négociant français peut faire des établissements dans tontes les parlies du Levant et de la Barbarie, en fournissant, dans la forme usitée, et jusqu’au règlement qui sera incessamment présenté à l’Assemblée nationale, sur le mode d’organisation de l’administration du Levant, un cautionnement qui garantisse b s autres établissements français, des actions qui pourraient être exercées contre eux, par son fait ou celui de ses agenis. Art. 4. « Les cautionnements qui seront fournis par les habitants des autres départements que celui des .Bouches-du-Rhône pourront être reçus par les directoires de leurs départements, qui en feront remettre un extrait à la chambre de commerce de Marseille. Art. 5. « Les retours du commerce du Levant et de Barbarie pourront se faire dans tous les ports du royaume, après avoir fait quarantaine à Marseille, et avoir acquitté les frais et les droits imposés pour l’administration du Levant, à la charge de rapporter un certificat de santé. Art. 6. « Les marchandises provenant desdits retours, àl’exception des tabacs qui y seront traités comme dans les autres ports du royaume, pourront entrer à Marseille, s’y consommer, et en être réexportées par mer eu franchise de tout autre droit que celui imposé pour l’administration des Echelles. Art. 7. « Lesdites marchandises payeront, à leur introduction dans le royaume, les droits auxquels sont assujetties, par le tarif général, celles de même espèce qui viennent de l’étranger, à i’ex-