74 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE que ceux qui comme moi, n’ont rien à se reprocher, périssent aujourd’hui ou sauvent la patrie. ( Applaudissements .) Il faut que le peuple sache apprécier ces libelles infernaux, protégés par l’apathie de ceux qui ont la force publique en main. Il faut que tout le monde soit à sa place. S’il y a des conspirateurs parmi les Jacobins, la liste est au département; que le gouvernement les saisisse, mais qu’il ne nous laisse pas assassiner. Si au moins hier, lorsque nous étions entourés de blessés, de femmes, d’enfants assommés par les contre-révolutionnaires ; si, lorsque nous avions arrêté les assassins que nous avions pris en flagrant délit, les poches pleines de pierres, après avoir brisé nos portes et pris nos serrures, car ils ne perdaient pas la tête ; alors, si nous avions reçu du gouvernement un coup d’oeil, je ne dis pas de protection, mais de compassion, nous aurions été contents. Si les membres des comités du gouvernement étaient venus nous visiter au milieu de ce bombardement, ils auraient vu des patriotes blessés, dont le coeur palpitait de joie à la nouvelle de la prise de Maëstricht et au cri de Vive la Convention ! [et la liberté] (76), ils auraient vu les assassins que nous avions arrêtés dans nos sorties ; car nous faisions là des sorties comme dans une ville de guerre; ils auraient vu ces assassins protégés par les patriotes et couverts du bonnet de la liberté. Et voilà les hommes qu’une faction vendue à l’aristocratie, qu’un Tallien, un Fréron, Tallien surtout, que je dénoncerai lorsqu’on aura lu les lettres, voudraient faire passer pour des contre-révolutionnaires! [Bruit et applaudissements .] (77) Les troupes étaient à la gauche de notre salle, et les assassins à la droite. C’est aux représentants qu’ils en voulaient, [à Amar] (78) ; en venant du Palais-Royal, ils le disaient hautement, et moi-même [j’ai été saisi au collet] (79), j’en ai saisi un; je les remis entre les mains de la force armée, et on lui a rendu la liberté un instant après. [Il se fait du bruit.} (80) [Nous aurons du courage, s’il en faut, dit un membre] (81) BOURDON (de l’Oise) : J’y étais, et je dirai aussi les faits. ( Murmures de quelques tribunes; l’indignation de la Convention les apaise bientôt.) DUHEM : Dis donc, dis donc! Reubell s’élance à la tribune. CLAUZEL : Je demande que le président du comité de Sûreté générale rende compte de ce qui s’est passé cette nuit dans la séance des quatre comités de Salut public, de Sûreté générale, de Législation et Militaire réunis. (76) Débats, n° 779, 722. (77) Débats, n° 779, 722. (78) Débats, n° 779, 722. (79) Débats, n° 779, 722. (80) Débats, n° 779, 722. (81) Débats, n° 779, 723. DU ROY : Je demande la parole au nom de la Convention. CLAUZEL : À peine le comité de Sûreté générale... {Bruit.) Je veux vous rendre compte de ce qui s’est passé ; je dois avoir la parole. DU ROY : Je la demande contre le comité de Sûreté générale. CLAUZEL : [au nom du comité de Sûreté générale]. Nous étions hier au comité de Sûreté générale, mes collègues Bourdon, Reverchon et moi, lorsque, sur les huit heures, on vint nous annoncer qu’il y avait un rassemblement aux Jacobins : sur le champ nous convoquâmes les comités Müi-taire, de Salut pubbc et de Législation. Nous nous réunîmes et nous ordonnâmes à une force armée d’aller engager le peuple, au nom de la loi... Quelques voix : Ce n’est pas le peuple... [le peuple n’assassine pas, c’étaient des aristocrates] (82) D’autres : Si, si! DUHEM : C’est le peuple du Palais-Royal. [Le peuple n’est pas composé d’assassins, dit encore une autre voix.] (83) BENTABOLE : Président, fais respecter la Convention. AMAR prend le fauteuil. CLAUZEL : Pour engager, au nom de la loi, ces individus à se retirer. On a dit que les comités de gouvernement ne s’étaient point occupés de ce rassemblement, et à peine furent-ils réunis qu’ils arrêtèrent que trois membres (84) de chacun des comités Militaire, de Salut public et de Sûreté générale, monteraient à cheval pour porter des secours aux assiégés. DUHEM : Oui, après deux heures de bombardement. [{Bruit)] (85) CLAUZEL : Comme les quatre comités sont encore réunis, je demande qu’ils viennent ici pour être présents au compte que rendra le président du comité de Sûreté générale (86). {Applaudissements. ) La proposition de Clauzel est adoptée. Un membre [CLAUZEL] propose de faire avertir les membres des divers comités de se rendre à la Convention pour être pré-sens au rapport qui doit être fait sur ce qui s’étoit passé la veille aux Jacobins. Décrété (87). (82) Rép., n° 53. (83) Débats, n° 779, 723. (84) Débats, n° 779, 723, signale deux membres du comité Militaire et deux du comité de Sûreté générale. Rép., n° 53, indique que « des représentants, pris dans le sein des comités réunis, montèrent à cheval sans aucun délai, et se portèrent au lieu où était le tumulte ». (85) Débats, n° 779, 723. (86) Débats, n° 779, 723, indique que c’est le citoyen « Reubell qui présidoit hier les trois comités » ; C. Eg., n° 814. (87) P.-V., XLIX, 108-109. Rapporteur Goupilleau (de Fontenay) selon C* II, 21.