[Paris, inlra muros.J [États gén. 1789. Cahiers.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 269 tion des domaines a obtenu depuis trois ans, et qui oblige les ecclésiastiques à passer à l’enchère, en présence du subdélégué de l’intendant, les premiers baux des nouvelles constructions ou reconstructions. L’édit du Roi du mois de septembre 1786, concernant les embellissements de Paris, porte la plus grande atteinte aux droits de propriété. Le corps de ville est dispensé, par cet édit, de payer aux seigneurs, sur la directe desquels sont assis les édifices qui doivent être détruits pour les embellissements de la ville, les droits de lods et vente et d’indemnité. Le chapitre de l’Eglise de Paris a particulièrement à se plaindre des dispositions de cet édit, ainsi que de l’arbitraire qui règne dans la taxation des droits de voirie auxquels on donne tous les jours une nouvelle extension. Libre exercice des différents tribunaux. 5° Il sera fait à Sa Majesté de très-humbles supplications de maintenir les différents tribunaux ecclésiastiques et civils, souverains et subalternes, dans le libre cours et exercice de leurs pouvoirs et juridiction, trop souvent interrompus par des commissions, évocations ou attributions particulières; comme aussi d’abréger les longueurs des procédures, et d’en diminuer les frais. Réformations relatives aux abus et à la législation. 6° Sa Majesté sera pareillement très-humblement suppliée d’accueillir favorablement les plaintes et doléances qui lui seront adressées par les gens des trois Etats de son royaume pour le redressement des griefs qui lui seront exposés, et de même d’accorder les changements dans les différentes parties de la législation, que les temps et les circonstances auraient pu rendre nécessaires, et dont la demande pourrait lui être formée. ADMINISTRATION. Article unique Nous demandons que Sa Majesté fasse connaître aux représentants de la nation assemblée en Etats généraux la véritable situation de ses finances, l’état fidèle de la dette publique et du déficit actuel, à l’effet de prendre les mesures nécessaires pour assurer la dette publique, combler le déficit, et établir l’équilibre entre la dépense et la recette, par tous les moyens que pourront fournir un bon système d’administration dans les finances, de perception des impôts, de retranchement, d’économie et de distribution dans les dépenses, et une parfaite exactitude dans la comptabilité. Au moyen de l’ordre stable qui sera établi dans toutes cés parties de l’administration, sans lequel tous les efforts de la nation seraient vains et inutiles, nous nous porterons, avec le plus grand zèle, à tous ceux qui peuvent dépendre de nous, pour assurer par des contributions volontaires, justes, raisonnables et proportionnelles, la gloire et la prospérité de l’Etat, l’b onneur et la splendeur de la couronne, et la satisfaction personnelle de Sa Majesté, dont le bonheur sera toujours le vœu le plus ardent de ses peuples. Tels sont nos intentions et nos vœux : nous chargeons nos députés à l’assemblée du bailliage de ............. de les faire valoir lors de la rédaction des cahiers de la chambre ecclésiastique dudit bailliage, afin de servir d’instruction à ceux des membres de ladite chambre qui seront députés aux Etats généraux. Nous laissons d’ailleurs a nosdits députés la faculté de requérir ce qu’en outre du contenu ci-dessus, ils jugeront, suivant leurs lumières et conscience, être bon, utile et nécessaire pour la gloire de la religion, les véritables intérêts de la nation, l’honneur de l’ordre ecclésiastique, le service du Roi et la prospérité publique. PROCÈS-VERBAL De l'assemblée du clergé de la paroisse royale Saint-Paul , tenue en la salle presbytérale , le 21 avril 1789 (1). L’an 1789, le mardi 21 avril, conformément à l’ordonnance de M. le lieutenant civil, le clergé de la paroisse royale Saint-Paul s’est assemblé dans la salle presbytérale de ladite paroisse, où, après avoir nommé un secrétaire et deux vérificateurs, l’on a fait appel de tous les assistants, dont le nombre s’est trouvé monter à 32. Alors M. le curé de Saint-Paul a déclaré que le nombre des électeurs devait être de deux, en en choisissant un sur vingt, d’après le règlement du Roi et la susdite ordonnance. Ensuite il a ajouté qu’il était important, avant de nommer les électeurs mandataires de l’assemblée, de procéder à la nomination d’une commission, chargée de rédiger leur mandat; en conséquence, ont été unanimement élus commissaires rédacteurs : MM. l’abbé Balestrier de Ganilhac, prêtre de la communauté. Pignol de Saint-Amant, vicaire général de Lescar, censeur royal. De Menardeau, ancien avocat général du parlement de Bretagne. Gappeau, prêtre de la communauté. Thomas, prêtre de la communauté. Grosnier, prêtre de la communauté. La nomination des commissaires rédacteurs faite, on procéda à l’élection des députés électeurs, et ceux qui furent nommés sont : MM. Dieulouard, licencié en droit de la Faculté de Paris et vicaire de la paroisse. Guyot, vicaire général de Cambrai, prédicateur ordinaire du Roi et censeur royal. On procède aussitôt après à la rédaction des articles du cahier, comme il suit : CAHIER Du clergé résidant sur la paroisse royale Saint-Paul, assemblé par mandement du Roi , les 22 et 23 avril 2789, en la salle presbytérale de ladite paroisse. Au moment d’une régénération générale dans l’Etat, tous les cœurs s’ouvrent à des espérances flatteuses; on croit toucher à des jours aussi heureux pour les sujets, que glorieux pour le monarque, et l’Europe entière admire déjà le chef d une nation libre, qui se montre l’ami de la saine raison et de la vérité, avec cette circonstance rare qui triomphe des plus fortes contradictions. Le clergé de Saint-Paul, faisant profession d’un patriotisme épuré, par cette charité qui embrasse les intérêts de tous les hommes, et semble s’oublier elle-même, désire que les Etats généraux s’occupent particulièrement des bases sur lesquelles doit porter l’édifice d’une constitution sage. Il aurait pu leur présenter un plan de constitution pour les paroisses de la capitale, (1) Nous publions ce document d'après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. 270 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] objet qui l’intéresse particulièrement, mais il pense que les Etats généraux feront assez pour cet objet, s’ils veulent bien nommer une commission sagement .composée de deux ou de plusieurs membres de chacune des parties intéressées. En attendant, il charge ses députés électeurs de solliciter l’admission des articles suivants dans le cahier général du clergé de Paris, ou dans ceux des trois ordres. Objets relatifs à la religion et au bien du clergé. Art. 1er. Le vœu de l’assemblée est que l’on maintienne la religion catholique, apostolique et romaine, à l’exclusion de tout autre culte. Art. 2. Que l’état civil des non catholiques soit favorisé; avec cette restriction néanmoins que, dans aucun cas, ils ne puissent être admis dans les administrations municipales et de judicature, ni concourir que médiatement à la confection des lois qui intéressent les trois ordres, et qu’à cet effet ils soient électeurs et non éligibles aux Etats généraux. Art. 3. Que la police, relative à la sanctification des dimanches et fêtes, soit rigoureusement exercée. Art. 4. Que les synodes diocésains et les conciles provinciaux soient rétablis. . Art. 5. Que dans les assemblées générales et particulières du clergé, les curés et les autres prêtres travaillant dans le saint ministère, aient droit délire leurs représentants dans une proportion convenable. Art. 6. Qu’on supprime les économats, ou qu’on fasse des règlements qui rappellent les fonds de cette administration à leur destination primitive. Art. 7. Que le clergé contribue aux charges de l’iitat, dans la proportion et selon la même forme que les deux autres ordres, du moment où les Etatslgénéraux auront pourvu à la liquidation de ses dettes. Art. 8. Qu’en attendant, les curés et le corps des prêtres employés dans les paroisses aient dans la chambre syndicale des représentants, pris parmi eux, et nommés par eux, dans la proportion convenable, et que l’état des contributions et des contribuables soit public. Art. 9. Qu’il soit établi un conseil de conscience pour la distribution des bénéfices et grâces ecclésiastiques. Art. 10. Que les canons relatifs à la résidence des évêques soient mis en vigueur, ainsi que ceux relatifs à la pluralité des bénéfices dont le revenu est suffisant à l’entretien d’un prêtre. Art. 11. Qu’il soit procédé à une meilleure répartition des revenus ecclésiastiques. Art. 12. Qu’il soit assigné des fonds pour les prêtres attachés au service des paroisses, et pour ceux qui deviennent infirmes. ' Art. 13. Que les portions congrues soient fixées en denrées et non en argent. Art. 14. Que les bénéfices à titre de prieuré simple ne soient possédés que par des prêtres. Art. 15. Que le tiers des canonicats et prébendes des cathédrales et collégiales soit affecté pour retraite à des curés et des prêtres travaillant dans le saint ministère. Art. 16. Que les preuves de noblesse dans tous les chapitres, et pour toutes les places et dignités ecclésiastiques, autres que dans le très-petit nombre de chapitres nobles d’origine, soient supprimées. Art. 17. Qu’il ne soit fait aucun vicaire général qu’il n’ait travaillé six aps dans le saint ministère, et aucun évêque qui ne l’ait suffisamment exercé, ou après six ans de grand vicariat. Art. 18. Que les baux des bénéficiers ne soient point résiliés à leur mort, si l’on ne prouve lésion de plus d’un tiers, et que le bail ait été passé sans enchère. Objets relatifs au bien des trois ordres. Art. 1er. Le vœu de l’assemblée est qu’il appartienne essentiellement à la nation de statuer sur la constitution, d’en arrêter les bases, et de faire elle-même ses lois avec l’attache du souverain. Art. 2. Que le pouvoir exécutif réside essentiellement et uniquement dans la personne du monarque. Art. 3. Que la liberté de la presse soit accordée et sagement, tempérée par la responsabilité de l’auteur de l’ouvrage et de l’imprimenr. Art. 4. Que les ministres et tous administrateurs soient responsables de leur administration aux Etats généraux. Art. 5. Que toutes les propriétés fondées sur des titres réels soient respectées. Art. 6. Que les Etals généraux soient convoqués à des époques déterminées. Art. 7. Qu’aucun citoyen ne puisse être arrêté en vertu d’une lettre de cachet, ou de quelque ordre que ce soit, sans être remis dans les vingt-quatre heures entre les mains de ses juges naturels, et mis en liberté sous caution suffisante, si ce n’est dans les délits soumis à la peine afflictive. Art. 8. Qu’acun impôt ne soit établi, qu’aucun emprunt ne soit censé légitime qu’il n’ait été consenti par les Etats généraux. Art. 9. Qu’on opine par tête aux prochains Etats pour la confection des articles qui doivent établir la constitution, et qu’ensuite la constitution établie, on délibère par ordre : le premier moyen étant plus propre à constater la volonté générale, et le second à conserver les intérêts communs et respectifs. Art. 10. Que les Etats généraux soient parfaitement indépendants, et qu’à eux seuls appartienne leur police intérieure. Art. 11. Qu’on surveille de plus près l’administration des prisons. Art. 12. Qu’on supprime les lettres d’Etat, les arrêts de surséance, les évocations, les privilèges locaux, les commissions et lettres de commitlimus. Art. 13. Qu’on supprime les lettres de noblesse pour les charges de judicature et pour toutes les places éminentes, et que, pour entrer au service, il suffise, selon l’ancien usage, de présenter un certificat de noblesse, signé de quatre gentilshommes du pays, ou une attestation des Etats de la province. Art. 14. Que les peines portées par les lois soient les mêmes pour tous les ordres de l’Etat. Art. 15. Qu’on flétrisse par quelque signe distinctif les banqueroutiers jugés frauduleux. Art. 16. Qu’on abolisse les formes humiliantes auxquelles les gens et députés du tiers-état étaient assujettis, nul homme ne devant être aux genoux d’un autre homme, Art. 17. Qu’aucune charge ou commission, surtout celles qui ont finance, ne puissent conférer la noblesse héréditaire. Art. 18. Que la dérogeance ne soit encourue que par forfaiture jugée; la noblesse étant une propriété transmissible par voie de substitution. Art. 19. Que les droits de franc-fief soient supprimés. 271 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, inlra muros.J Art. 20. Qu’on établisse une nouvelle forme de lever la milice, celle qui existe étant vexatoire pour les campagnes. Art. 2i. Qu’on proscrive l’agiotage et les loteries comme contraires aux bonnes mœurs, en ce qu’elles ruinent lepeuple et commandent le crime. Art. 22. Qu’on supprime au moins les petits spectacles de. la capitale, source féconde de toute sorte de corruption. Art. 23. Qu’on supprime les privilèges exclusifs, contraires à l’industrie et au commerce. Art. 24. Qu’il soit formé une commission qui s’occupe promptement du grand objet d’une éducation nationale, seule capable de rétablir les moeurs et les vertus civiles. Art. 25. Qu’on fasse remarquer le vice et l’immoralité des rentes viagères. Art. 26. Qu’il soit pourvu au moyen de conserver l’inviolabilité des lettres confiées à la poste. Tous lesquels articles rédigés par nous, commissaires nommés à cet effet, et soussignés, ont été généralement et unanimement arrrêtés et approuvés par l’assemblée. Signés L’abbé de Balestrier de Canilhac ; Pignol de Saint-Amant, vicaire général de Lescar ; l’abbé deMenardeau, ancien avocat général du parlement de Bretagne ; Gappeau , prêtre ; Grosnier , prêtre Thomas, prêtre. Et par une suite de l’esprit d’union et de charité fraternelle que ledit clergé désire maintenir parmi tous les ordres de l’Etat, MM. Guyot, vicaire général de Cambrai, député électeur de l’assemblée ; de Menardeau ; Pignol de Saint-Amant ; de Balestrier de Canilhac et Gappeau ont été chargés de se transporter, l’assemblée tenant, en celle de Messieurs de la noblesse, formée sur la même paroisse, cloître Saint-Louis, et en celle de Messieurs dutiers, en l’église Saint-Gervais, à l’effet de solliciter leur avis et une discussion plus utile sur les articles ci-dessus, par la réunion des lumières et la conciliation des intérêts respectifs. Lesquelles deux assemblées ayant successivement entendu la lecture, et pris communication desdits articles, les ont unanimement et respectivement adoptés dans tout leur contenu, avec acclamation et mandat spécial à leurs députés électeurs d’en solliciter et acquérir l’admission de tous et chacun, dans les cahiers généraux et particuliers des trois ordres de la ville de Paris. Et incontinent ont été députés, de la part delà noblesse, MM. le comte Dussis, le comte de Saint-Marc, Meunier de Pleignes, de Vouges, Chapentier de Foefelles et de Monthelon; et de la part du tiers, MM. Denis, Petit de la Motte, Legendre et Bellon, à l’effet de notifier à l’assemblée au clergé de la paroisse de Saint-Paul ladite détermination, et aussi de donner communication de leurs cahiers et arrêtés particuliers, lesquels ont obtenu le suffrage général. Le clergé de la paroisse Saint-Louis en l’Ile a aussi député MM. de La Roque, vicaire général de Perpignan ; Pétrement, licencié en théologie de la faculté de Paris ; de Gassius, licencié en théologie, et vicaire de la paroisse, à Saint-Louis en l’Ile, tous trois commissaires rédacteurs des cahiers de leur paroisse, pour communiquer à l’assemblée les articles formant le vœu dudit clergé ; lesquels elle a entendu avec applaudissement, et à l’effet de témoigner la même confiance, et de former un accord des mêmes sentiments , MM. Gappeau , Merle, archiprêtre de Tours, et Le Tellier de Bro-thonne, ont été nommés pour porter au clergé de Saint-Louis lesremercîmenls et les vœux de l’assemblée. Fait et arrêté les jour et an que dessus, avec toutes protestations de droit, tant sur l’illégalité et l’insuffisance de ladite convocation, que sur celles de la représentation à l’assemblée générale des trois ordres. Bossu, curé de Saint-Paul, prédicateur du Roi, censeur royal, et président de l’assemblée. Par mandement de l'assemblée : Dieulouard, vicaire de la paroisse Saint-Paul, secrétaire de l’Assemblée, et député électeur. CAHIER Des citoyens nobles de la ville de Paris (1). Députés. Le comte de Clermont-Tonnerre. Duc de la Rochefoucauld. Comte de Lally-Tollendal. Comte de Rocnechouart. Comte de Lusignhem. Dionis Du Séjour. Duc d’Orléans. Duport. De Saint-Fargeau. Premier président de Nicolaï. M. de Nicolaï et M. le duc d'Orléans n'ayant pas pu accepter , ont été remplacés par M. le comte de Alirepoix et M. le marquis de Montesquiou-Fezensac. L’assemblée des électeurs représentant tous les citoyens nobles de Paris, avant de procéder à la nomination des députés qu’elle doit envoyer aux Etats généraux , et avant de s’occuper de ce qu’elle doit leur prescrire, a arrêté que les pouvoirs de ces députés ne dureraient qu’une année. Le vœu des citoyens nobles de Paris est que l'on opine par ordre aux Etats généraux ; que sur cette question même, les Etats ne délibèrent que par ordre; et si une décision contraire à ce vœu prévalait dans l’ordre de la noblesse, les députés demanderont acte de ce qu’ils sont restés dans la minorité : et cependant les Etats généraux aviseront dans leur sagesse aux moyens d’empêcher que le veto d’un des ordres ne puisse s’opposer à la confection des lois qui intéresseront lebonheur général de la nation. L’assemblée, après avoir lu, extrait et comparé tous les cahiers fournis par les vingt départements de la noblesse, a cru devoir diviser en deux parties celui qu’elle doit remettre aux députés. Dans la première, elle comprendra , sous le ti tre de cahier général , les demandes qui intéres sent toute la nation, et parmi ces demandes elle distinguera les articles impératifs d’avec ceux de pure instruction. Dans la seconde, qui sera intitulée cahier particulier, elle s’occupera de ce qui intéresse spécialement la ville de Paris. CAHIER GÉNÉRAL. ARTICLES IMPÉRATIFS. Constitution. Les députés demanderont avant tout qu’il soit fait une déclaration explicite des droits qui appartiennent à tous les hommes, et qu’elle constate leur liberté, leur propriété, leur sûreté. Immédiatement après celte déclaration, ils demanderont qu’il demeure reconnu comme pre-(1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé delà Bibliothèque d u, Corps législatif .