BAILLIAGE DE CHAUOLLES. CAHIER fies doléances et vœux du clergé du Charotais (1). Du 2© mars 1789- Art. Ier. Il nous paraît que les Etats généraux à époque fixe et périodique, tels qu’il a plu au Roi de nous les faire espérer, composés des députés élus librement par les trois ordres de l’Etat, savoir : le tiers-état en nombre égal aux deux premiers ordres, réunis fait la base fondamentale de la régénération de la monarchie, dans lesquels Etats toutes les questions y seront décidées en pleine assemblée à la pluralité des voix, comptées par tête et non par ordre, et la décision dés opinions divisées, arrêtées par la voie du scrutin. Le retour périodique des Etats généraux, fixé de cinq ans en cinq ans, nous parait le plus analogue au bien général du royaume. Le clergé du Gharolais est d’avis que les Etats généraux prochains doivent commencer leur première opération par régler et déterminer tous ces points, et en faire une loi fondamentale de la monarchie. Art. 2. Le même clergé, persuadé que les Etats provinciaux sont une barrière efficace et nécessaire au despotisme ministériel, pense qu’il est de la plus grande importance pour le bien général de la nation, qu’il en soit établi dans toutes les provinces du royaume, et qu’ils soient organisés de la même manière que les Etats généraux, sauf les détails que les prochains jugeront à propos d’y ajouter. Réclame spécialement la même chambre du clergé que ceux de cette province, les derniers supprimés et réunis à la Bourgogne, soient rétablis. Que toute commission intermédiaire , tant pour les Etats généraux que provinciaux, soit entièrement supprimée comme funeste et dangereuse, et qu’à l’avenir on n’en rétablisse jamais. Ï1 paraît au même ordre que, dans la suite, la convocation des Etats généraux la plus simple, la plus naturelle, serait celle qui se ferait par Etats provinciaux.. Ce moyen, en rendant les Etat généraux moins nombreux, ne les rendrait pas moins nationaux ni moins constitutionnels. Que tous ces points devraient être décidés, en second lieu , dans les Etats généraux prochains, et la décision érigée en loi constitutionnelle. Art. 3. Qu’avant de traiter aux prochains Etats généraux des finances et des impôts, on fixât les réformes et on arrêtât les articles concernant la régénération de la monarchie. Art. 4. Le vœu du même clergé serait qu’on érigeât en loi constitutionnelle que, conformément à la déclaration de Sa Majesté, nul impôt ne serait levé sur les sujets de l’Etat sans le consentement de la nation réunie en Etats généraux. (1) Nous publions ce cahier d’après un manijscritdes Archives de l’Empire, ’ Art. 5. De tous les maux dont la nation est désolée, la vicieuse administration de la justice est un des plus funestes ; sa réforme paraît indispensable, ainsi que la réunion des justices seigneuriales aux tribunaux les plus prochains. Art. 6. Qu’il plaise à Sa Majesté de créer deux degrés de juridiction Seulement, un de première instance, et un en dernier ressort, et un tribunal pour juger les forfaitures et pour recevoir les appels en cassation; réclame ledit clergé la conservation de l’officialité diocésaine, toute autre supprimée. Art. 7. Que chaque juge soit tenu de motiver toutes les dispositions de son jugement, tant en matière civile qu’en matière criminelle, en première comme en dernière instance. Art. 8. Que tout jugement ne soit prononcé que sur des instructions par écrit, et non autrement; et en conséquence, que les audiences soient supprimées. Art, 9. Suppression des offices de jurés-pri-seurs, comme inutiles et ruineux; les droits d© contrôle supprimés ou modifiés par un nouveau tarif. Art. 10. Abrogation des décrets et confirmation de la loi aut solve aut cede. Art. 11. Que, pour parer aux inconvénients des ventes secrètes, il soit ordonné que, par la suite, les contrats d’acquisition seront non-seulement affichés au bureau des hypothèques, mais encore publiés, à l’issue de la messe paroissiale, pendant trois dimanches consécutifs, au lieu où est situé le bien vendu, et dans la paroisse du vendeur et de l’acquéreur. Art. 12. Demande ledit clergé l’observation des lois portées contre le duel, le blasphème et l’usure. , Art. 13. Le même supplie Sa Majesté, comme protectrice de l’Eglise, de confirmer l’ordonnance de Blois de 1576, concernant la discipline ecclésiastique. Art. 14. Que le droit de propriété soit inviolable dans tous les ordres et membres de l’Etat, et que la liberté de tous et un chacun des sujets de Sa Majesté soit à jamais assurée. Art. 15. Le vœu unanime étant que tout impôt soit proportionnel aux propriétés et facultés d’un chacun , et répartis par un rôle commun aux trois ordres de l’Etat, le clergé souscrit par acclamation au vœu général. Art. 16. Demande, en conséquence de l’article ci-dessus, la suppression de la chambre ecclésiastique. Art. 17. Supplie Sa Majesté, le même clergé, de suspendre la nomination à une partie des béné-fiçes simples et consistoriaux, et ordonner que les revenus en soient destinés pour le solde des dettes du clergé. Art. 18. Le même clergé espère de la bonté du Roi qu’il daignera s’occuper aux Etats généraux d’améliorer le sort des curés, et le supplie de y considérer qu’un pasteur qui n’a que pour soi est un citoyen pauvre, eu égard aux obligations [États gén, 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Charolles ] 0j£} qu’il a de soulager le malheureux confié à ses soins. Art. 19. Les vicaires, coopérateurs des curés, ne doivent pas être oubliés. Sa Majesté verra avec peine des ministres des autels condamnés à vicarier sous la seule et incertaine rétribution d’un manœuvre. Art. 20. Demande l’ordre du clergé que l’article 14 de l’édit de 1768, concernant les novales, soit révoqué; cet édit, ne favorisant pas les curés à portion congrue , dépouille les autres d’une partie de leurs biens ; que lesdits curés soient rétablis dans la possession des novales existantes depuis cette époque. Art. 21 . Qu’il soit ordonné aux juges subalternes de ne procéder, après la mort des bénéficiers, à l’apposition du scellé sur les registres et titres des bénéfices, ainsi qu’à l’inventaire desdits titres et papiers, qu’en présence de deux curés voisins, dûment appelés. Art. 22. Réclame le susdit clergé la suppression des droits abusifs que perçoivent les évêques et chapitres de cathédrale sur les bénéfices-cures anuuellement, droits qui ne sont fondés sur aucuns titres, et que les curés ne payent que pour éviter des procès. Art. 23. Qu’il plaise à Sa Majesté de vouloir bien ordonner que, dans les endroits où les chapitres ne sont pas assez nombreux pour faire décemment l’office divin, ils soient réunis à d’autres pour former un seul chapitre composé au moins d’un doyen et douze chanoines. Ar t . 24 . Que ,dans chaque chapitre de cathêdrale'et collégiale, il y ait un certain nombre de canonieats qui ne se donneraient qu’aux curés qui auraient de bonnes raison de se retirer. Art. 25. Que l’article 14 de l’édit du mois d’août de 1749 soit réformé, et qu’il soit permis aux gens de mainmorte d’acquérir, recevoir ou replacer des rentes constituées à autre titre qu’à titre gratuit, sur des particuliers, sans lettres patentes ni aucuns droits d’amortissement. Art. 26. Que la permission aux gens de mainmorte de faire des échanges, soit entre eux, soit entre les autres citoyens, soit donnée pour toujours. Art. 27. Les religieux ont été très-utiles à l’Etat et le sont encore ; le clergé du Charolais supplie Sa Majesté de les conserver pour la décharge des familles et le soulagement des curés dans les travaux de leur ministère. Mais il pense qu’il est à propos de supprimer toute mendicité parmi eux en les rentant suffisamment et en fixant le nombre dans chaque monastère, sans qu’on puisse ériger les communautés, soit d’hommes, soit de filles, en chapitre noble. Art. 28. D’ordonner aux Etats généraux que les curés du royaume soient admis aux assemblées du clergé de France, en nombre égal aux archevêques, évêques, abbés et autres, vu que les intérêts desdits curés y sont discutés aussi bien que les intérêts des autres bénéficiers. Art. 29. Que la déclaration du 9 mars 1782, qui défend aux curés de former corporation dans l’Etat, soit supprimée. Art. 30. Nous nous apercevons tous les jours des effets d’une mauvaise éducation, nous n’en reconnaissons qu’une bonne, celle qui est fondée sur la religion. L’éducation confiée à des philosophes a produit des savants, mais rarement de bons sujets. Témoin de ces maux, demande que les Etats généraux s’occupent des moyens d’y remédier en établissant des collèges de plein exercice, les plus rapprochés, et en les coudant à des porps réguliers. ! Art. 31. Que la liberté de ta presse soit renfermée dans de justes bornes, de manière que ni la religion, ni le gouvernement, ni les mœurs n’en puissent souffrir. Art. 32. Que Sa Majesté sera suppliée d’ordonner par une loi irrévocable que le culte de la religion catholique soit le seul autorisé en France. Art. 33. Demande le clergé du Charolais, témoin de la misère des habitants de la campagne, que Sa Majesté daigne s’intéresser à leur sort en diminuant leurs charges. Art. 34. Il est incontestable que les cultivateurs préfèrent de payer en argent les corvées des grandes routes, pour éviter les concussions qu’exerçaient envers eux les ingénieurs et directeurs de ces chemins ; mais il paraît certain que cette manière de les faire faire, de toutes, est la plus abusive. L’expérience a déjà démontré que des sommes considérables, provenant de cette imposition, ont été dilapidées sans réserves, et que les chemins sont très-mal entretenus. La manière qui nous paraît la plus sage, et qui se pratiquait avec avantage dans plusieurs provinces, est celle où chaque province, eu se chargeant de ses chemins, les distribuerait par parties proportionnelles à chaque ville et village , et la forme de l’imposition, pour être ensuite répartie à chaque corvéable d’une manière fixe et invariable, avec la liberté de les faire ou faire faire à sa commodité; chaque collecteur serait chargé de veiller à l’entretien de la portion de chemin à la charge de sa communauté, comme par une obligation de sa place ; les inspecteurs envoyés par la province pour la visite des routes puniraient lesdits collecteurs qui, par négligence, n’auraient pas satisfait à cet article de leurs devoirs. Art. 35. Que tout casuel forcé, affligeant également les pasteurs obligés de le réclamer et les pauvres paroissiens chargés de le payer, soit supprimé. Art. 36. Proscrire la mendicité, et pour cela défendre, par une loi générale, à tout pauvre de sortir de sà paroisse ; et par les Etats généraux aviser aux moyens de pourvoir à leur subsistance. Art. 37. Supplier Sa Majesté d’annuler les brevets de réunion de menses conventuelles et aumô-neries à des séminaires ou évêchés, étant plus avantageux d’en former des établissements de charité ou hôpitaux dans les lieux où les biens sont situés. Les trente-sept articles ci-dessus, lus et approuvés par délibération du jour d’hier vingt-six mars mil sept cent quatre-vingt-neuf, en la chambre du clergé du bailliage du Charolais ; et se sont soussignés messieurs les ecclésiastiques, membres de cette assemblée, cejourd’hui vingt-sept mars mil sept cent quatre-vingt-neuf. Signé à la minute : de La Corse de Villeneuve ; Martinet Rey ; Demorande ; Langeron, primicier de Charolles, président dudit clergé , et Petitjean, secrétaire. Extrait signé Brémond, greffier. CAHIER Du vœu et des doléanees de l'ordre de la noblesse du bailliage du Charolais (1), Du 23 mars 1789. L’an mil sept cent quatre-vingt-neuf, le vingt-.troisième jour de mars, l’ordre de la noblesse du bailliage de Charolais, assemblé en la ville de (1) Nous publions ce cahier d’après uq mannsçrit des Archives 4e l'Ernpire, ! ’