477 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] CHAPITRE VII. Des milices. Art. 1er. Cet article, oublié à la suite des impôts quoique l’un des plus onéreux, demande la plus grande attention de la part des Etats généraux. 11 n’existe pas de taille plus criante. En conséquence et d’un vœu unanime, les habitants de cette paroisse demandent que le tirage des milices soit à jamais supprimé. Art. 2. Convaincus de la nécessité des troupes, et voulant donner une preuve de leur dévouement à leur prince, ils proposent de se soumettre volontairement à une taxe qui sera prescrite par les Etats généraux, payable par chaque garçon qui aura atteint la majorité avant d’être marié. CHAPITRE VIII. Des chirurgiens , sages-femmes et maîtres d’école. Art. 1er. Les habitants de toutes les campagnes devraient voter unanimement pour qu’il soit fait un fonds destiné à placer, d’arrondissement en arrondissement, des chirurgiens et des sages-femmes qui seraient obligés de donner des secours gratuits aux citoyens éloignés des villes où ils peuvent s’en procurer. Art. 2. Les chirurgiens ou sages-femmes seraient assujettis à une correspondance intime avec les curés ou juges des lieux, qui pourraient leur indiquer lés personnes qui auraient besoin d’eux. Art. 3. Il devrait être décerné un prix d’encouragement pour celui qui aurait le mieux rempli l’étendue de ses obligations. Le suffrage des paroisses dans ce cas-là ne pourrait être suspect. Art. 4. Qu’il soit également fait un fonds pour les maîtres d’école de chaque paroisse, qui les mette dans le cas de se livrer en entier à l’éducation publique qui leur est confiée et de ne tirer aucune rétribution des citoyens. Art. 5. Sur le surplus des demandes, plaintes, doléances et remontrances relatives au bien public, les habitants de cette paroisse s’en rapportent à la sagesse et à la prudence des représentants de la nation aux Etats généraux. Ainsi fait et arreté à Gourquetaine par nous, habitants de ladite paroisse soussignés, aux termes des règlements. Ainsi signé : Jacques Thibault; F. Thiboust; P. Aubry; J.-J. Foiret; G. Demay; J. -G. Gardien; J.-B. Gardien; G. Beaümais; J.-E.' Foiret; G. Grandet; Jarlet; Ferant, greffier, et Mallet, greffier de Gourquetaine. CAHIER Des plaintes et dolëanees des habitants de la paroisse de Coye (1). Art. 1er. Demander que les Etats généraux prennent en considération l’état de disette où se trouve actuellement la France pour en chercher la cause et en détruire les effets. Estimant, suivant nos faibles lumières, que cette cause provient encore plus du monopole et de l’accaparement des blés dans différentes provinces que du manque de récoltes. La grêle que nous avons essuyée cette année est un fléau envoyé par la Providence, dont chacun doit respecter les décrets. Mais il n’en est pas de même des compagnies monopoleuses et accapareuses qui, depuis l’époque de cette même (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. grêle, ont mis tout en usage pour s’emparer de la majeure partie des blés de uos provinces par les seules vues de cupidité et d’avarice, et qui, ayant en leurs mains ces précieuses productions de première nécessité, nous imposent la dure nécessité d’v avoir recours à un prix au-dessus des facultés de la majeure partie du peuple. Cet objet doit exciter la réclamation de tous les citoyens français, lesquels ont tous le même intérêt de secourir les indigents, qui forment la classe la plus nombreuse. On peut encore proposer d’imposer des peines corporelles à tous ceux qui, par la suite, se permettraient de pareilles vexations. Art. 2. De supprimer les compagnies et associations pour ce qui regarde et concerne le commerce des grains, par l’inconvénient que de riches capitalistes peuvent, à raison de leurs capitaux, envahir des parties considérables de blé, ce qui nuit essentiellement au commerce et à la subsistance du peuple. Ges compagnies, soutenues sous le faux prétexte d’entretanir l’abondance dans la capitale, ne sont autre chose que des sangsues qui cherchent à s’enrichir aux dépens du public et qui, après avoir ainsi vexé le peuple, obtiennent souvent des gratifications et de prétendus dédommagements, tandis qu’ils ne devraient encourir que disgrâces. Art. 3. On peut encore proposer de supprimer ce qu’on appelle communément les blés du Roi. Cette sorte de spéculation, sous le même prétexte d’abondance, ne sert encore qu’à affamer les sujets français. Cela coûte des sommes immenses à l’Etat par les frais de transport et de manutention, et encore c’est que souvent les achats s’en font à contre-temps, comme nous l’éprouvons cette année où, au moment de la grêle désastreuse qui a ravagé nos provinces, ces greniers destinés à procurer l’abondance étaient destitués de provision, et ce qu’il a fallu pour les remplir a, par conséquent, été pris sur la subsistance du peuple, dont il résulte que c’est faire le mal sous le prétexte de procurer du bien. Art. 4. On peut encore proposer que, dans le cas où on voudrait avoir des greniers de ressource, ce qui paraît à propos et nécessaire dans un état nombreux, afin d’éviter les malheurs dont nous sommes menacés, d’obliger les communautés religieuses, et même les fortes maisons de idiarité, qui pour la plupart ont des bâtiments immenses, à se pourvoir, chacune selon la force de ses revenus, d’une quantité de blés, lesquels seraient soumis à l’inspection et auxquels on pourrait avoir recours au cas de besoin. Gette précaution ne coûterait rien à l’Etat et ne serait pas à charge à ces mêmes communautés, et ce qu’elles achèteraient dans les temps d’abondance, elles ne les vendraient que dans les temps de disette. Conséquemment, le plus haut prix les dédommagerait des frais de garde et de manutention. Art. 5. On peut encore demander que les propriétés individuelles soient à jamais respectées; que nul n’y puisse porter atteinte, en sorte que chacun puisse faire de tout ce qui légitimement lui appartient, tout ce que bon lui semblera, et accorder la liberté illimitée du commerce intérieur du royaume, notamment pour ce qui regarde le commerce des grains, dont l’administration devrait être ôtée des mains des intendants et remis au pouvoir des cours souveraines. Etant tous sujets français, nous devons tous concourir au bien général, et en conséquence, 478 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les mars.] lorsqu’une province est plus abondante que l’autre, il est naturel, pour qu’il règne une juste égalité, que celle-là fournisse aux besoins de l’autre. Lesdits habitants représentent qu’ils sont trop chargés à la taille; que leur territoire, quoique assez étendu, ne comporte que de très-mauvaises terres sablonneuses, et des bois dont le village est environné, ce qui leur procure une quantité de gibier qui diminue encore le peu de récolte que leurs terres peuvent leur fournir. Fait et arrêté en l’assemblée tenue en la paroisse de Goye, pour la nomination des députés à l’assemblée du châtelet de Paris, qui se tiendra le 18 du présent mois. Signé par les habitants de ladite paroisse, au désir de l’ordonnance de M. le prévôt de Paris, et par nous, officier soussigné ; signé et paraphé ne varietur , cejourd’hui 13 avril 1789. Signé Da fils; Picque; Lemoine; Letellier; Le-cerf ; Graux ; Sébastien ; Champagne l’aîné; Goujon ; Craux ; Casse ; Letellier ; Annuaume de Sur-val, et Lejeune. # CAHIER Des plaintes et doléances de la paroisse de Cre-teil (1). Art. 1er. Que tous les privilèges pécuniaires soient supprimés et l’impôt payé par chacun des membres des trois ordres de l’Etat indistinctement dans la proportion de ses facultés. Art. 2. Que nul impôt ne soit levé, s’il n’est consenti par les Etats généraux du royaume et sa durée déterminée. Art 3. Que les Etats généraux aient leur retour périodique de trois ou cinq ans, et que leur tenue soit arrêtée dans l’Assemblée précédente. Art. 4. Que l'impôt de la perception soit simplifié le plus possible. Art. 5. Que les aides et gabelles soient supprimées. Art. 6. Que les capitaineries soient supprimées comme très-nuisibles aux propriétés des citoyens et à l’agriculture , tant par la quantité de gibier qui déva-te les récoltes que par les gênes que les cultivateurs éprouvent des gardes, et les défenses de faucher les prairies avant la Saint-Jean, quoique leur maturité ait précédé cette époque, et de nettoyer leurs grains des mauvaises herbes, plus tard que la mi-mai, de sorte qu’il arrive souvent, surtout lorsque le printemps est sec, que ce n’est qu’après cette époque que les mauvaises herbes deviennent nuisibles. Les capitaineries sont d’autant plus désastreuses pour cette paroisse, qu’il existe sur son territoire treize remises, formant environ 30 arpents. Art. 7. Que les droits sur les marchandises qui passent debout sur la banlieue de Paris soient supp.imés comme injustes et très-onéreux pour le commerce, tant par leur quotité que par leurs vexations et retards qu’éprouvent les voituriers par une foule de commis qui se trouvent tant dans les lieux où il y a bureau que sur les routes. Art. 8. Que le territoire de ladite paroisse contient, suivant l’arpentage fait par ordre de monseigneur l’intendant, environ 3,000 arpents de terres et prés; qu’il y a environ 100 arpents qui ne payent pas de taille depuis fort longtemps, étant exploités par des propriétaires privilégiés, ce qui procure une surcharge au reste des contribuables de la paroisse, quoique presque annuellement ils aient fait des remontrances à ce sujet. Art. 9. Que le sol de ce territoire est sablonneux et si peu fertile dans les années sèches, que les cultivateurs récoltent à peine leur semence, et que la plus grande partie du meilleur terrain est sujette aux inondations des rivières de Seine et de Marne, dout le cours circonscrit le territoire de la paroisse. Art. 10. Que les baux des terres des bénéficiers et autres gens de mainmorte aient une durée de neuf ans au moins, sans que, pour raison de mort, changement de titulaire, mutation ou autrement, ils puissent être résiliés, comme très-contraires au progrès de l’agriculture, et que les baux soient faits judiciairement. Art. 11. Qu’il n’y ait aucune exemption pour le logement des gens de guerre, excepté les curés et militaires en service. Art. 12. Que la milice soit supprimée, et que, dans le cas où la suppression n’aurait pas lieu, il n’y eût aucune exemption, pas même pour les domestiques des ecclésiastiques ou militaires. Art. 13. Que dans le nombre des habitants de la paroisse de Créteil, il y a les deux tiers de manouvriers indigents. Art. 14. Que tous les privilèges de colombiers soient supprimés. Art. 15. Qu’au surplus, tout ce qui sera arrêté dans le cahier général des réclamations de la prévôté de Paris et qui tiendra au bien de l’Etat et au soulagement des peuples soit demandé par les députés de ladite paroisse comme s’il était exprimé aux présentes, et ont signé : Piot, syndic; Voisin ; Le Duc ; Pépin ; Aspe ; Chalouvrier; Lemoine; Chaussé; Moigneux; Plet; Mauclerc; Wiet; Aubry; Lesse; Rousselet; Le Trouy ; Proteac ; Leroux” ; Viet ; Jaquin ; J. -B. Pépin ; Cretté ; La Plaine; Charpentier; Jeandier et Roerne, greffier commis. CAHIER De la paroisse de Croissy en Brie (1). Aujourd’hui 16 avril 1789, en l’assemblée convoquée au son de la cloche, de la manière accoutumée, sommes comparus, nous, habitants de la paroisse de Croissy en Brie, en vertu de la le tre du Roi donnée à Versailles le 24 janvier dernier pour la convocation et tenue des Etals généraux et du règlement y annexé, et encore de l’ordonnance de M. le prévôt de Paris, le tout à nous signifié par huissier au châtelet le 10 du présent mois. Nous avons rédigé les plaintes et doléances qui suivent. Pénétrés de la sagesse et de la bonté du Roi, qui le portent aujourd’hui plus que jamais à chercher le bonheur de ses peuples ; qui, semblable à un bon père, va s’entourer de ses enfants chéris afin d’entendre leurs plaintes et doléances, nous nous écrions : Grâces immortelles soient rendues au meilleur des rois. Entrant dans les desseins d’un monarque aussi bienfaisant, et pressés par l’honneur et par notre conscience, répondons à ses désirs: garder un coupable silence serait trahir à la fois la confiance du Roi et de la nation. Art. 1er. Depuis trop longtemps nous sommes surchargés d’impôts et de subsides; nous nous en sommes plaints en différentes circonstances, et (l)Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire.