344 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE défenseurs de la patrie, lorsqu’ils sont propriétaires de biens indivis avec les déportés et les prêtres reclus; la même mesure doit être employée pour les uns comme pour les autres. Le cohéritier, comme le créancier d’un curé réfractaire, ne sont pas moins de bons citoyens; la loi ne peut les confondre avec les rebelles; elle leur doit protection. Notre législation serait bien imparfaite si une famille de patriotes qui aurait eu le malheur de compter parmi ses membres un prêtre fanatique était encore obligée de partager sa punition en voyant vendre ses propres héritages parce qu’ils n’auraient pas été jusqu’alors partagés, et que l’effet rétroactif d’une loi aurait mis cette famille dans l’impossibilité de faire le dépôt de ses titres dans un temps utile. Le comité vous propose de déclarer communes aux propriétaires qui possèdent par indivis des biens avec les écclésiastiques déportés ou reclus les dispositions des articles VII et VIII de la loi du 9 ventôse. Cette simple déclaration ne serait pas suffisante; il faut annuler les arrêtés des administrations de district et de département qui auraient rejeté les titres de copropriété par le motif qu’ils n’auraient pas été déposés dans le mois de la publication de la loi du 13 septembre, pourvu que les dépôts aient été effectués dans les 4 mois prescrits. Le comité croit que vous devez maintenir les ventes faites en vertu de ces arrêtés, parce que l’adjudicataire a traité en bonne foi, et que les aristocrates ne manqueraient pas d’en profiter pour attaquer le crédit national (1). Voici le projet de décret que votre comité vous propose : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de Législation, décrète : article Ier. Les dispositions des articles VII et VIII de la loi du 9 ventôse sont déclarées communes aux citoyens qui ont des propriétés indivises avec les écclésiastiques déportés ou reclus. article ii. Sont déclarés nuis et comme non avenus les arrêtés des administrations de district ou de département qui ont rejeté le dépôt des titres des copropriétaires indivis, quoique fait dans le temps prescrit par les articles précités. article ni. Néanmoins les adjudications faites jusqu’à ce jour, en vertu de ces arrêtés, sont maintenues, et l’adjudicataire paiera au copropriétaire le prix relatif à la quotité pour laquelle il aura fait ou fera reconnaître ses droits par le directoire de district. Plusieurs membres combattent ce dernier article, en ce qu’il semble légitimer des arrêtés contraires aux lois. L’article est rejeté. Les deux premiers sont décrétés (2). (1) Rapport imprimé signé de Bezard (C 317, pl. 1278, p. 20); Moniteur (réimpr.), XXI, 553-554. Le dernier paragraphe a été supprimé au rapport imprimé ainsi que l’art. III du projet de décret. (2) Moniteur (réimpr.), XXI, 554. Un membre [BEZARD], au nom du comité de Législation, fait un rapport et présente un projet de décret qui est adopté en ces termes : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de Législation, décrète : ARTICLE Ier. Les dispositions des articles VII et VIII de la loi du 9 ventôse dernier sont déclarées communes aux citoyens qui ont des propriétés indivises avec les ecclésiastiques déportés ou reclus. ARTICLE IL Sont déclarés nuis et comme non avenus les arrêtés des administrations de district ou de département qui ont rejeté le dépôt des titres des copropriétaires indivis, quoique fait dans le temps prescrit par les articles précités. Le présent décret sera inséré au bulletin de correspondance (1). 39 Sur la proposition d’un membre [THU-RIOT], la Convention nationale décrète : ARTICLE Ier. Le comité des Inspecteurs de la salle fera imprimer dans le mois les résultats des comptes des représentans du peuple qui ont été chargés de mission. ART. IL Le comité des Finances recevra le compte des dépenses secrètes et extraordinaires des représentans du peuple chargés de mission, et en fera imprimer également les résultats dans le délai d’un mois (2). 40 Le citoyen Debugny, écrivain au bureau de l’ingénieur en chef à Saint-Omer (3), demeurant à Saint-Momelin, district de Bergues, département du Nord, fait hommage d’un mémoire avec les dessins relatifs à l’invention d’une nouvelle espèce de voiles et agrès, au moyen desquels on pourroit diriger des bateaux plats contre les vents et la marée, au point déterminé. (1) P.-V. , XLIV, 48-49. Minute signée Bezard (C 317, pl. 1278, p. 20.). Décret n° 10 502. Reproduit au Bm , 5 fruct. (suppI l). M.U. , XLIII, 92; J. Fr. , n° 697; Rép. , n° 246; J. Perlel, n° 699. (2) P.-V., XLIV, 49. Minute signée de Thuriot (C 317, pl. 1278, p. 21). C*II 20, p. 261 indique Bourdon (de l’Oise) rapporteur. Décret n° 10 499. Moniteur (réimpr.), XXI, 557 (se reporter au n° 37 pour le compte rendu des débats à ce sujet); Débats , n° 700,60, n° 701,69; M.U., XLIII, 93; Gazette fr(se, n° 965; Rép., n° 245; J. Paris, n° 599; Ann. R.F., n°263; J. S. -Culottes , n° 553 (les gazettes citent, outre Thuriot, Cambon et Lecointre). (3) Pas-de-Calais. SÉANCE DU 4 FRUCTIDOR AN II (21 AOÛT 1794) - Nos 41-43 345 La Convention accepte l’hommage, en ordonne la mention honorable au procès-verbal, et charge son comité de Marine d’examiner cette invention, d’en faire faire les épreuves, s’il le juge utile, et d’en faire son rapport à l’Assemblée (1). 41 Un membre demande un congé pour cause de maladie; il s’établit une discussion. La Convention passe à l’ordre du jour, motivé sur le décret du 29 thermidor (2). BERTESET [sic pour BERTEZENE, député du Gard] demande un congé de 6 décades, pour aller rétablir sa santé altérée au point qu’il ne peut assister aux séances depuis plusieurs jours. Renvoyé à l’ordre de 2 heures (3). 42 Un membre [THURIOT], demande le rapport du décret qui accorde 40 sols aux citoyens peu fortunés pour assister aux assemblées de section, et que la Convention fixe ces assemblées aux décadis. Sur ces deux propositions, le décret suivant est rendu : La Convention nationale rapporte le décret du 9 septembre, qui accorde, à titre d’indemnité, 40 sous aux citoyens peu fortunés pour assister aux assemblées de section et y exercer leurs droits. La Convention nationale décrète que les assemblées de section n’auront plus lieu que les décadis (4). 43 Un membre [BARÈRE], au nom du comité de Salut public, fait un rapport sur la reddition de la place de Calvi, en Corse (5). BARÈRE : Depuis longtemps nous ne pouvons rien espérer de favorable dans les nouvelles de l’île de Corse; les trahisons de Paoli continuent à avoir des succès; telle est la suite inévitable des perfidies et des trames ourdies (1) P.-V., XLIV, 50. Minute signée de P.J. Duhem (C 317, pl. 1278, p. 22). Décret n° 10 491. J. Fr., n° 697; Ann. R.F. , n° 264. (2) P.-V., XLIV, 50. Voir ci-dessus 29 thermidor, n° 78. (3) M.U., XLIII, 72; J. Paris, n° 599; Ann. R.F., n° 262; J. Fr., n° 696. Le décret accordant un congé à Bertezene est du 5 fruct. (Voir ci-dessous cette séance). (4) P.-V., XLIV, 50. Minute signée de Thuriot (C 317, pl. 1278, p. 21; décret joint au n° 39) Comme pour le décret n° 10 499, C*II 20, p. 261 indique Bourdon (de l’Oise) rapporteur. Moniteur, (réimpr.), XXI, 557 (pour la discussion se reporter au n°37); Débats, n° 700,60; Rép., n° 245; Gazette frçse , nos964, 965; J. Fr., n° 696; Ann. R.F., n° 263; J. Perlet, n° 698; J. Paris, n° 599; J.S. -Culottes, n° 553; J. Mont. , n° 114. (5) P.-V., XLIV, 50. avec l’Angleterre par ce vieil ennemi de la France. Les Anglais et les Espagnols occupent la Méditerranée avec tant d’avantages, depuis l’incendie des vaisseaux de la République à Toulon, qu’il a été impossible d’empêcher que la place de Calvi, totalement rasée et incendiée après 2 mois d’un siège vigoureux, ne capitulât; mais du moins sa défense a été opiniâtre, et sa capitulation n’est pas frappée de ces conventions déshonorantes qui distinguent les capitulations des coalisés, sur les frontières du Nord et au Midi de la France. La garnison a souffert tous les maux qui accompagnent un siège, avec une patience et un courage dignes des meilleurs républicains. Citoyens, l’île de Corse appartient à celui qui est maître de la Méditerranée; des représentants du peuple activent à Toulon les préparatifs de notre marine, et la nature a décrété pour la France la possession de la Méditerranée. C’est aux marins à soutenir ce beau décret et à rappeler dans les échelles du Levant, comme dans l’île de Corse, les beaux jours de la marine française (1). Lettre lue par Barère à la suite du rapport sur la reddition de Calvi. Barthelemi Arena aux représentants du peuple, au Port-la-Montagne. Calvi, le 21 therm. IL Après 2 mois d’un siège vigoureux et d’une défense opiniâtre, la garnison de Calvi a été contrainte de céder à la force et de capituler. Elle n’a pris ce parti que lorsqu’il a été impossible de pouvoir résister plus longtemps. La ville était totalement rasée ou incendiée, la place démantelée du côté de terre, les pièces démontées, les machines propres au transport et au mouvement de l’artillerie brisées, la plus grande partie des canonniers morts, blessés ou malades; un magasin à poudre sauté en l’air, l’autre percé par les boulets, et les munitions restant déposées dans une tour menacée à chaque instant d’être incendiée, parce que la porte était en face des batteries ennemies; les hôpitaux encombrés, et n’ayant depuis un mois ni viande, ni aliments propres aux blessés et aux malades accablés par les fièvres et les dyssenteries; et les fusiliers faisant le service réduits à 260, nombre insuffisant pour défendre les 3 brèches que les Anglais pratiquaient à la fois sur 2 bastions et sur une courtine, sans compter celle de la tour du palais; Cette garnison a souffert tous les maux qui ont accompagné ce siège avec une patience digne des meilleurs républicains. Sans aucune casemate, elle a tenu contre un bombardement de 15 jours, qui a jeté plus de 3 000 bombes, qui a fait écrouler toutes les maisons, et n’en a laissé aucune intacte; elle a résisté dans le palais qui n’était point à l’épreuve de la bombe, malgré les écroulements des voûtes qui ont écrasé et blessé beaucoup de monde. Elle a manqué d’aliments, excepté de pain et de légumes sans assaisonnement, et s’est nourrie de (1) D’après C*II 20, p. 260, le décret n° 10 480 porte « renvoi relatif aux secours à accorder aux réfugiés de l’Isle de Corse ». Rapporteur Barère.