634 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 septembre 1191.1 tant son serment deboüt, l’Assemblée l’entende debout. ( Murmures à gauche .) A < gauche : Voua vous mettrez à genoux si vous voulez. M. d’André. LT Assemblée a décrété, Monsieur le Président, il y a un quart d’heure, qu’elle n’entendrait aucune espèce de proposition étrangère. ( Applaudissements dans les tribur nés.) M. Malonet. Pourquoi avez-vous entendu celle du président? M. d’André. Voici ce que l’on a observé à l’ouverture des états généraux, et ce qui doit ■s’nbserver encore. Le roi est entré dans la salle, on s’est levé; le roi a parlé, les députés se sont assis et couverts. A gauche : Oui ! oui ! M. Malonet. Si le roi est assis, oui. Un membre : Ceux qui ne sont pas députés doivent au moins rester debout. M. le Président. Tous ceux qui sont ici sont censés représentants de la nation. En artendant l’arrivée du roi, je donne la parole à M. Tronchet pour un projet du décret. M. Tronchet, au nom du comité féodal, présente un projet de décret concernant plusieurs difficultés qui se sont élevées sur V exécution ou l'interprétation de divers articles des décrets des 3 mai et 18 décembre 1790, relativement au rachat des droits ci-devant seigneuriaux. Ce projet de décret est ainsi conçu : « L’Assemblée nationale, voulant faire cesser plusieurs difficultés qui se sont élevées sur l’exécution ou l’interprétation des articles 7, 48, 49, 50, 51 et 52 du décret du 3 mai 1790, et 4 du titre II du décret du 18 décembre dernier, ainsi que sur les articles 19, 20, 40 et 53 du décret du 3 mai, a décrété et décrète ce qui suit : « Art. 1er. Lorsqu’il s’agira de racheter des droits ci-devant seigneuriaux, soit fixes, soit casuels, ou des rentes foncières, ci-devant non ra-chetables, qui seront affectés à un douaire, soit coutumier, soit préfixe, non ouvert, ledit rachat ne pourra être fait qu’à la charge du remploi, sauf au redevable, qui ne voudra point demeurer garant du remploi, à consigner le prix du rachat, lequel ne pourra être délivré au mari grevé dudit douaire, qu’en vertu d’une ordonnance du tribunal de district sous le ressort duquel se trouveront situés les fonds chargés desdits droits ou desdites rentes, rendue sur les conclusions du commissaire du roi, auquel il sera justifié de l’emploi. « Art. 2. Dans les pays où la femme peut consentir à l’aliénation du fonds affecté au douaire, le défaut de remploi ne pourra être opposé par la femme qui aura donné son consentement au rachat, ni par les enfants qui seront héritiers purs et simples de la femme qui aura donné ce consentement, encore que le fonds dudit douaire leur ait été déclaré propre par la loi ou par la convention. « Art. 3. Les deux dépositions ne pourront autoriser aucun recours de la part de la femme ou des enfants, à l’égard des rachats qui auront été consommés avant la publication du présent décret. Art. 4. Lorsque .le propriétaire d’un fonds situé dans les pays ou les lieux dans lesquels la maxime nulle terre sans seigneur n’était point admise ignorera quel est le ci-devant fief dont il peut relever, et les droits auxquels son fonds ■peuLêtre .assujetti, et voudra, néanmoins libérer ce fonds des charges dont il peut être tenu, il pourra se faire autoriser par le tribunal du district dans le ressort duquel sera situé son fonds, à faire publier et afficher à la porte de l’église paroissiale du lieu où sera situé son fonds, des offres à tout prétendant droits de ci-devant féodalité sur ledit fonds, de racheter Geux qui pourront lui être dus. Lesdjtes offres contiendront la déclaration de la situation du fonds, de sa contenance, et de ses tenants et aboutissants, ainsi que son évaluation, avec élection de domicile dans l’étendue de ladite paroisse, et sommation à tout prétendant droits ci-devant seigneuriaux sur ledit fonds, de les faire connaître au domicile élu, dans la quinzaine ; et, à défaut, par tout prétendant droits, de faire sa déclaration dans la quinzaine, le redevable jouira, en vertu desdites offres, du bénéfice attribué, par l’article 42 du décret du 3 mai 1790, et par celui du 12 novembre suivant, aux propriétaires qui auront exécuté le rachat, et à. ceux qui ont fait des offres valables non acceptées. « Art. 5. Dans le pays où la maxime nulle terre sans seigneur était admise, le rachat qui aura été fait entre les mains de celui qui avait ci-devant le titre de seigneur universel de la paroisse dans laquelle se trouvera situé le fonds racheté sera valable, s’il n’a point été formé d’opposition de la part d’aucun prétendant-droits de mouvance particulière sur ledit fonds ; sauf au propriétaire, qui réclamerait après le rachat ladite mouvance, à se pourvoir contre celui qui aura reçu ledit rachat en vertu de son titre universel-« Art. 6. Les dispositions des 2 articles précédents n’auront point lieu pour ceux qui auront reconnu personnellement un ci-devant seigneur particulier, par aveu, acte de foi, ou reconnaissances, ni pour ceux qui seraient héritiers ou successeurs à titre universel de celui qui aurait ainsi reconnu depuis 30 ans, un ci-devant seigneur particulier, lesquels ne pourront être valablement libérés que par des offres faites audit ci-devant seigneur, ou par un rachat fait entre ses mains. « Art. 7. La disposition de l’article 53 du décret du 3 mai 1790, qui permet de faire des offres au chef-lieu du ci-devant fief, n’ayant pas pù ôter aux redevables la faculté de faire les offres à la personne ou au domicile du propriétaire du ci-devant fief, les redevables continueront d’avoir l’option de faire lesdites offres, soit au chef-lieu du ci-devant fief, soit au domicile du propriétaire. Dans le cas où il n’y aura point de chef-lieu certain et connu dudit ci-devant fief, les offres pourront être faites à la personne ou au domicile de celui qui sera préposé à la recette des droits dudit ci-devant fief : à son défaut à la personne ou domicile de l’un des fermiers du domaine ou des domaines dudit ci-devant fief ; et, dans le cas où il n’y aurait ni préposé à la recette, ni fermiers, les offres ne pourront être faites qu’à la personne ou au domicile du propriétaire du ci-devant fief, lequel, audit cas, -supportera l’excédent des frais que cette circonstance aura occasionnés . « Art. 8. Le défaut de consignation de la somme offerte n’emporte pas la nullité des offres ; mais le propriétaire du droit pourra se pourvoir [Assemblée nationale.] ARCHIVES ‘PARLEMENTAIRES. [14 septembre 1791.] 035 devant les juges, pour faire ordonner à son profit, provisoirement -et .-sous la -réserve de ses droits, la délivrance de la somme offerte, dans le délai d’un mois -du jour du jugement,; et, faute de réalisation et d’exécution de la pant du débiteur, il sera déchu de ses offres, < En cas 'dfinsuf Usance de la somme offerte, l’intérêt du surplus courra du jour de la demande. « Art. 9‘. Dans les pays et les lieux où l’usage était de ne point payer en argent L’indemnité due par les gens de mainmorte, aux ci-devant seigneurs de fief, à raison des acquisitions faites sous leur mouvance, mais où il était d’usage de fournir pour cette indemnité une rente annuelle, soit en argent, soit en grains, la nation demeure chargée de la prestation de ladite rente, jusqu’à la vente des fonds ; et, en cas de vente, ;elle demeure chargée du remboursement de ladite rente, suivant le taux et les modes fixés par le décret du B mai 1790. « Il en sera fait de même dans les pays où l’usage était de payer l’indemnité par une somme d’argent, si ladite indemnité a été convertie en une rente, par convention. « Art. 10. Dans les pays et les lieux où il était d’usage, pour l’indemnité due par les gens de mainmorte aux ci-devant seigneurs de fief, d’accorder à ceux-ci une prestation d’un droit de quint, lods, mi-lods, ou autre prestation quelconque payable à certaines révolutions, telles que vingt, trente, quarante ans, ou autre révolution, la nation demeure chargée d’acquitter les dites prestations à leur échéance, jusqu’à la vente des fonds ; et, en cas de vente, elle sera tenue de racheter les droits ci-devant seigneuriaux ou casuels dont lesdits fonds étaient tenus avant •l'acquisition faite par la mainmorte, au taux et au mode prescrits par le décret du 3 mai 1790, et delà même manière que si le fonds n’était point passé en mainmorte. » Les 3 premiers articles de ce projet de décret sont successivement mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, voulant faire cesser plusieurs difficultés qui se sont élevées sur l’exécution ou L’interprétation des articles 7, 48, 49, 50, 51 et 52 du décret du 3 mai 1790, et du titre II du décret du 18 décembre dernier, ainsi que sur les articles 19, 20, 40 et 43 du décret du 3 mai, décrète ce qui suit : Art. let. « Lorsqu’il s’agira de racheter des droits ci-devant seigneuriaux, soit fixes soit casuels, ou des rentes foncières ci-devant non rachetables, qui seront affectés à un douaire, soit coutumier, soit préfixe, non ouvert, ledit rachat ne pourra être fait qu’à la charge du remploi, sauf au redevable, qui ne voudra point demeurer garant du remploi, , à consigner le prix du rachat, lequel ne pourra être délivré au mari grevé dudit douaire qu’en vertu d’une ordonnance du tribunal de district sous le ressort duquel se trouveront situés les Jonds chargés desdits droits ou desdites rentes, rendue sur les conclusions du commissaire du roi, auquel il sera justifié de 1! emploi. «(Adopté.) Art. 2. « Dans te pays où -la femme peut consentir A l’aliénation du fonds affecté au douaire, le défaut de remploi ne pourra être ©pposëi par la femme qui aura donné son consentement ;au «rachat, ni par les enfants qui seront héritiers purs Et simples de la femme qui aura donné ce consentement, encore que le fonds dudit douaire leur ait été déclaré propre par la loi ou par la convention. » (Adopté.) Art. ,3. Les deux dispositions préeedentesme pourront autoriser aucun 'recours de la -part de ta femme ou des enfants, à l’égard des rachats qui auront été consommés avant la publication du présent décret. » (Adopté.) Un huissier annonce le roi. Le roi entre dans l’ Assemblée, précédé de la députation et suivi de ses ministres portant la décoration de l’ordre de Saint-Louis. L'Assemblée se lève. Le roi va se placer àla gauche du président et, debout, il dit : « Messieurs, « Je viens consacrer ici solennellement l’acceptation que j’ai donnée à l’acte constitutionnel ; en conséquence, je jure (l'Assemblée s’assied.) d’être fidèle à la nation et A la loi, d’employer tout le pouvoir qui m’est délégué à maintenir la Constitution décrétée par l’Assemblée nationale constituante (le roi s’assied.) (1), et à faire exécuter les lois. (Applaudissements répétés et cris: Vive le roi!) « Puisse cette grande et mémorable époque être celle du rétablissement de la paix, de l’union, et devenir le gage du bonheur du peuple et de la prospérité de l’Empire! » (Nouveaux applaudissements et nouveaux cris : Vive le roi !) M. Duport-Dutertre , ministre de la justice, présente au roi Pacte constitutionnel. Le roi inscrit au bas, en présence de l’Assemblée, les mots : « J’accepte et je ferai exécuter », et appose sa signature. M. D upo rt-Du tertre-, ministre de la justice , descend au bureau, contresigne l’acte constitutionnel avec les autres ministres et le remet à l’un des secrétaires . M. le Président (debout) s’exprime ainsi : « Sire, « De longs abus, qui avaient triomphé des bonnes intentions des meilleurs rois, et qui auraient bravé sans cesse l’autorité du trône, opprimaient la France. (Le roi restant assis, le président s’assied.) « Dépositaire du vœu, des droits et de la puissance du peuple, l’Assemblée nationale a rétabli, par la destruction de tous les abus, les solides bases de la propriété publique. Sire, ce que cette Assemblée a décrété, l’adhésion nationale le ratifie. L’exécution la plus complète dans toutes les parties ce l’Empire atteste l’assentiment général; il déconcerte les projets impuissants de ceux que le mécontentement aveugla trop longtemps sur leurs propres intérêts; il promet à Votre Majesté qu’elle ne voudra plus en vain le bonheur des Français. « L’Assemblée nationale n’a plus rien à désirer en ce jour à jamais mémorable où vous consommez dans son sein, par le plus solennel engage-(1) 'Le Hodey (dans son Journal logographique), relate le fait de la façon suivante : « Le roi s'apercevant que lui seul est debout, s’assied. »