4 7g [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Ie* juillet 1789.] « Nos-cahiers attribuent le pouvoir exécutif au Roi et nous laissent l’exercice du pouvoir législatif. « Nous devons nous renfermer dans nos mandats; or, de quoi s’agit-il ici? d’un fait de police, d’une discipline militaire qui ne nous concerne pas. Est-ce à nous à nous attribuer la discipline militaire? est-ce à nous à veiller sur la sûreté publique ? Gcs soins importants sont ceux du pouvoir exécutif; c’est au Roi qu’ils appartiennent. » M. Mounier détaille avec éloquence les mêmes principes, et en tire la même conséquence. M. de Clermont-Tonnerre. Laissons gronder autour de nous les orages, soyons impassibles sur nos sièges ; faire de bonnes lois, assurer à nos concitoyens le bonheur qu’ils nous ont confié, tels sont les grands travaux auxquels nous sommes appelés. Plusieurs membres n’ont parlé que pour s’opposer au renvoi à un comité, que pour abandonner les gardes-françaises à la justice ordinaire; personne ne proposait de moyen pour adoucir la rigidité d’un principe, qui, loin de calmer le peuple, l’aurait peut-être excité davantage, lorsque M. Desmeuniers présente cette motion : Motion de M. Desmeuniers. « Je n’ignore pas quelles sont les bornes qui séparent le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif ; je sais que le pouvoir législatif seul réside dans nos mains. Mais il est des circonstances où ces deux pouvoirs se rapprochent, se confondent, et c’est certainement dans des circonstances aussi orageuses qu’ils doivent agir de concert et d’intelligence pour ramener la paix et le calme. « Ayant l’honneur d’être député de cette ville, qu’il me soit permis d’y porter plus particulièrement mes regards. Je croirais qu’il convient d’envoyer des députés, non pas au Roi, non pas aux ministres, non pas au colonel des gardes françaises, mais à la capitale, pour calmer, par leur présence et leurs exhortations, des troubles dont le feu peut s’étendre rapidement dans toutes les parties du royaume. » Plusieurs membres de la noblesse parlent ensuite. - M. le prince de Poix prétend qu’il ne faut point prendre connaissance d’une affaire purement militaire, et qui doit être jugée selon les lois militaires. D'autres membres de la noblesse répondent à la motion de M. Desmeuniers, au sujet de la députation qu’il a proposée pour calmer les émeutes de la capitale. Ils prétendent que cette députation ne peut avoir lieu sans l’autorisation du Roi ; que c’est là un acte public qui appartient à l’autorité exécutive. Cette opinion est combattue par des membres des trois ordres. Le Roi, disent-ils, ne peut empêcher que les députés ne se transportent dans la ville de Paris pour y ramener la paix : revêtus de l’opinion publique, ils auront une influence qui ne pourra produire que la concorde. M. le comte de Mirabeau présente un autre moyen de conciliation : il propose d’envoyer à la ville de Paris une adresse dont il fait lecture. Cette adresse contient les sentiments de paix et les exhortations les plus touchantes pour faire cesser les émeutes populaires, qui contrarient l’activité des opérations des Etats généraux, et donnent lieu aux calomnies les plus atroces, en les attribuant aux membres de l’Assemblée nationale, qui fera tous ses efforts auprès du Roi pour obtenir la grâce des malheureuses victimes qui se sont laissées entraîner par l’impulsion du patriotisme. M. Target propose de charger les députés de la ville de Paris d’écrire, au nom de l’Assemblée, à MM. les électeurs de la ville de Paris, pour les inviter à calmer les agitations auxquelles la capitale est livrée. M. Camus propose d’envoyer au Roi une députation de quatre prélats, pour solliciter la clémence de Sa Majesté. On demande à aller aux voix ; M. Chapelier demande la parole. M. Chapelier. Cette Assemblée ne doit pas manifester une indifférence trop sévère dans les circonstances malheureuses où nous nous trouvons. Je distingue, comme tout autre, le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif ; mais faut-il s’en tenir si strictement à cette distinction, que l’on ne puisse porter des secours aux malheureuses victimes de l’injustice ou du despotisme? C’est dans ce moment que les deux pouvoirs qui se balancent mutuellement doivent se confondre pour prévenir les malheurs publics, suites inévitables d’un incendie qui est prêt à se manifester. C’est dans ce moment qu’il serait dangereux de témoigner une insensibilité cruelle pour ceux qui, dans toute autre circonstance, seraient coupables, mais qui aujourd’hui ne sont que trop excusables. En effet, quelle est l’origine des révoltes qui éclatent dans Paris ? C’est la séance royale, c’est le coup d’autorité porté aux Etats généraux, c’est cette espèce de violation , celte usurpation de l’autorité exécutive sur l’autorité législative, effets funestes, mais toujours inévitables, lorsque l’une de ces deux autorités l’emporte sur l’autre. Je propose l’arrêté suivant : Il sera nommé six députés qui s’accorderont avec les ministres du Roi sur le parti à prendre pour apaiser le plus promptement l’émeute de la capitale. Cet arrêté est couvert d’applaudissements. M. l’évêque de Langres, n’adoptant point cet arrêté, demande la parole. M. de La Luzerne, évêque de Langres. Ce n’est point le moment d’envoyer une députation prise parmi les prélats pour solliciter la bonté dû Roi ; sans doute leur caractère est celui de la re-j ligion et de la charité, mais il ne leur convient point de demander grâce pour des hommes qui sont encore dans un état de sédition ; la question se réduit à celle de savoir si, en allant implore!* la clémence du Roi, ce ne serait point tenter une démarche imprudente, qui ne promettrait que l’impunité. M. Le Franc de Pomplgnan, archevêque de Vienne , est du même avis que M. l’évêque dé Langres. . i Enfin, après bien des débats, on fait le résumé des différentes motions, et l’on va aux voix sur la question de priorité entre les suivantes : J