204 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 juin 1790. « Si donc les collecteurs sont libres de convertir en billets-assignats les deniers en argent provenant de leurs recouvrements, ou si les receveurs particuliers, après avoir reçu des collecteurs du numéraire effectif, sont les maîtres de faire un semblable échange, il est évident qu’aucune portion de ce numéraire ne sera destinée à la chose publique, et dès lors, soit pour payer la solde des troupes, soit pour entretenir les ateliers publics et pour acquitter enfin toutes les dépenses qui doivent être effectuées en argent effectif, le gouvernement se trouvera forcé de recourir à des moyens extraordinaires : et pour avoir permis aux collecteurs ou aux receveurs de déposer à leur profit des espèces d’or ou d’argent dont ils font recette, l’administration des finances sera obligée d’acheter d’autant plus de ce même numéraire, et les sacrifices qu’exigent de telles opérations retomberont sur le Trésor public. « Ainsi, non seulement l’Etat perdra ce que de simples agents, trafiquants des deniers effectifs de leurs recettes, auront gagné ; mais, ce qui est bien plus important, le gouvernement courra le risque de ne pas trouver, même à des prix onéreux, la quantité d’espèces réelles dont il a constamment le besoin le plus impérieux. « L’Assemblée nationale pensera peut être que le gouvernement serait en état de prévenir, par simple voie d’administration, les abus dont je viens de parler. Mais indépendamment du peu d’autorité dont il jouit maintenant, l’on doit remarquer que des receveurs prêts à perdre leur état, et des collecteurs exerçant par contrainte une fonction passagère, ne peuvent être facilement assujettisàdes règles nouvelles. D’ailleurs, aux termes stricts du décret du 22 avril dernier, qui n’admet aucune exception, ils sont fondés à s’acquitterenassignats, n’importe qu’ils aient fait recette ou non de cette monnaie. « Il est donc absolument nécessaire que l’Assemblée nationale, en distinguant dans les receveurs et les collecteurs leur qualité particulière de dépositaire, leur impose l’obligation de rendre un compte exact de la consistance de leurs recouvrements, sans confondre ensemble l’argent effectif et les assignats. « On ne peut assimiler en tous les points ces deux monnaies, puisque l’une n’est pas applicable au paiement de tous les objets au-dessous de deux cents livres. « Le plus grand nombre de receveurs particuliers des impositions, en raison de leurs anciens rapports avec l’administration, se rendrait peut être aux simples injonctions du gouvernement; mais ils sollicitent eux-mêmes une loi qui puisse les autoriser à exiger des collecteurs de faire leurs paiements dans la même monnaie qu’ils ont reçue. Et pour vous convaincre, par un seul exemple, de la nécessité d’une pareille disposition, je vous adresse la copie d’un acte où vous verrez qu’uu collecteur s’est fait accompagner par un huissier et deux recors pour sommer le receveur particulier de Mayenne de recevoir 8,500 livres en assignats, quoique, de son aveu, il eût reçu cette somme en argent effectif, et il s’appuie, dans cette démarche, de l’autorité même de l’Assemblée nationale. « Il est donc évident que, sans une nouvelle explication de la part du Corps législatif, le Trésor public ne pourrait plus faire fonds sur aucune recette en argent. » Je vous invite donc, Messieurs, à solliciter un décret qui obvie aux inconvénients dont je viens de vous donner connaissance ; il ne résultera pas de cette loi, comme on a paru le craindre, une extraction pour Paris, de l’argent des provinces ; elle empêchera seulement que l'administration ne soit obligée de faire sortir le numéraire de la capitale, pour satisfaire en entier au paiement de toutes les dépenses du royaume qui doivent être effectuées en espèces effectives. Une telle nécessité ne tarderait pas à arrêter le service, et déjà de grandes difficultés se font sentir. « On se tromperait en préjugeant qu’il suffit pour les aplanir d’avoir autorisé l’administration à faire tous les sacrifices nécessaires pour se procurer les fonds en argent que le paiement des appoints exige ; car ces appoints se montent extrêmement haut, lorsque tous les paiements au-dessous de deux cents livres en font partie, et il est à. craindre que, même avec le secours du décret que je vous prie de demander à l'Assemblée nationale, il ne faille être longtemps dans une action continuelle pour rassembler une quantité de numéraire équivalente à tous les besoins. L’envoi d’une grande quantité d’assignats dans les provinces paraît une circonstance avantageuse sous plusieurs rapports; mais le revers, c’est le paiement de tous les impôts dans cette monnaie. « Je dois vous rappeler, Messieurs, que la caisse d’escompte devant, aux termes du décret du 4 de ce mois, discontinuer son service, à commencer du 1er juillet prochain, le Trésor public aura besoin d’un plus grand fonds de numéraire. Cette caisse, à la vérité, n’aurait pu rendre plus longtemps les mêmes services, parceque, dans la vue sage de ne pas augmenter le prix de l’argent sur place, elle se bornait à faire venir de l’or et de l’argent des pays étrangers; opération très coûteuse, lorsqu’elle n’est pas contenue dans de justes bornes ; car, au moment où l’on extrait de ces mêmes pays étrangers une somme d’argent supérieure à leur dette envers la France, on ne peut le faire sans une contractation dans les changes, infiniment désavantageuse. « Il en coûterait aujourd’hui plus de 10 0/0, pour avoir des espèces par ce moyen, et la ressource encore serait petite. « Je soumets, Messieurs, toutes ces considérations à votre examen, et je ne doute point qu’elles ne vous paraissent, comme à moi, d’une très grande importance. « J’ai l’honneur d’être, etc. M. Vernier, rapporteur du comité des finances, propose un projet de décret pour autoriser les habitants de Mouton à emprunter 6,000 livres. Ce décret est adopté dans la teneur suivante : « L'assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, d’après la délibération prise en conseil général du bourg de Mouton en Auvergne, le 30 mai dernier, autorise les officiers municipaux dudit bourg à faire un emprunt de 6,000 livres pour être employé au soulagement des pauvres et à un atelier de charité, sous la charge et condition expresses que le remboursement sera fait en quatre ans par des délégations données aux créanciers sur les revenus patrimoniaux dudit bourg, et de rendre compte de l’emploi au district et département.» M. Ce Chapelier, au nom du comité de Constitution, dit que dans la paroisse de Saint-Claude, district de Paimboeuf, département de la Basse-Loire, les habitants abusés ont cru que les afféa-gements étaient annulés par les décrets et ont renversé les clôtures. Instruits de leur erreur, ils [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 jtnn 179®.] 205 ont entrepris de les relever, mais malheureusement les procureurs sont intervenus et les menacent d'une ruine prochaine. Plus de 150 pères de famille supplient l’Assemblée de les préserver de cette perte. Le comité propose un décret à ce sujet. M. le chevalier de Mûri nais demande que le décret soit général au lieu d’être particulier au district de Paimbeuf. Cet amendement est adopté. Le décret est rendu ainsi qu’il suit, sauf rédaction : « L’Assemblée nationale, instruite des vives poursuites judiciaires qui se font dans plusieurs lieux du royaume, et notamment dans le district de Paimbeuf, département de la Basse-Loire, à l’occasion des débats qui ont récemment eu lieu sur les terrains afféagés et les marais desséchés depuis quelques années, « Décrète que son président se retirera vers le roi pour le prier d’ordonner que les procédures relatives aux dédommagements qui peuvent être dus à raison des dégâts sur les terrains afféagés et les marais desséchés depuis quelques années, seront suspendues : de commettre les directoires de districts pour régler lesdits dédommagements dans les différents cantons du royaume où ces dégâts ont eu lieu ; à l’effet de quoi les directoires de districts pourront, s’il est besoin, nommer, parmi leurs membres, des commissaires qui se transporteront sur les lieux, vérifieront les dégâts, apprécieront les indemnités ; et aussitôt après le paiement ce celles-ci, les procédures demeureront absolument éteintes. « De commettre le premier juge du tribunal existant dans chaque ville de district, ou, s’il n’y en a pas, du tribunal de la ville la plus voisine pour régler sans frais les mémoires des procédures déjà faites, afin que le montant en soit réparti et payé de la même manière que les indemnités. « L’Assemblée nationale enjoint généralement à tous les citoyens trompés, qui ont commis des dégâts, le respect pour les propriétés qui sont toutes sous la garde de la loi, sauf à eux à se pourvoir dans les tribunaux et par les voies légales, s’ils croient avoir des droits sur les prairies, les terrains afféagés et les marais desséchés. M. Bouche fait une motion pour que toutes les ?ermissions d'emprunt données par les décrets de Assemblée nationale soient enregistrées aux greffes des districts. Cette motion n’est pas appuyée. Dom Gerle, chartreux. Pour fixer l’opinion publique sur des imprimés qui circulent dans Paris, relativement à une personne à qui on attribue des prédictions, et dans lesquels je suis nommé... (un demande l’ordre du jour.) (L’Assemblée décide que dom Gerle sera entendu.) Dom Gerle. Il existe dans le Périgord une personne nommée Suzanne la Bouze ; elle a annoncé à un grand nombre de personnes la révolution présente; elle m’a communiqué, il y a onze ans, un ouvrage dans lequel elle prédisait la convocation de l’Assemblée nationale, la cessation des vœux monastiques, la réforme des abus, le rappel du clergé à sa primitive pureté, la fédération de tous les peuples de la terre, pour ne former plus qu’un peuple de frères. Ces prédictions ont été communiquées dans le temps à M. l’évêque de Périgueux. L’Assemblée nationale a eu lieu, la cessation des vœux a eu lieu.... (Il s’élève des murmures.) (L’Assemblée décide qu’elle passera à l’ordre du jour.) Un des secrétaires fait lecture de la note suivante : Expéditions en parchemin, pôur être déposées dans les Archives de l’Assemblée nationale: « 1° D’une proclamation sur un décret du 20 avril dernier, relatif à la municipalité de Crécy, et au sieur de la Borde, lieutenant général de cette ville ; « 2° De lettres patentes sur le décret du 25 mai concernant la distribution des bois communaux en usance ; « 3° De lettres patentes sur le décret du 28, qui autorise les officiers municipaux d’Uzerche à imposer la somme de 1 ,600 livres sur tous les citoyens actifs qui payent au-dessus de 10 livres de toutes tailles ; « 4° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Ghef-Boutonne à imposer la somme de 2,000 livres sur tous les contribuables qui payent 6 livres de tailles et au-dessus ; « 5° Le lettres patentes sur un décret du même jour, qui déclare qu’il n’y a pas lieu à autoriser l’emprunt de 500 livres demandé par la ville de Marvejols, en lui laissant néanmoins la faculté de se pourvoir pour l’imposition de cette somme; « 6° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant la somme de 500 livres à imposer dans la communauté d’Audierne pour le soulagement de ses pauvres ; « 7° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant la somme de 6,000 livres à imposer dans la ville de Salon en Provence ; « 8° De lettres patentes sur le décret du même jour, relatif à la demande d’emprunter une somme de 1,800 livres, faite par la communauté de'Ghirac en Aogoumois ; « 9° De lettres patentes sur le décret du même jour, portant qu’il n’y a lieu d’autoriser les habitants de Lannion à faire un emprunt de 12,000 livres, sauf à eux à imposer 10,000 livres en deux ou quatre années ; « 10° De lettresfpatentes sur le décret du même jour, concernant l’imposition de la somme de 2,000 livres à lever en deux ou quatre années sur tous les contribuables de la ville de Gusset; « 11° De lettres patentes sur le décret du même jour, concernant l’imposition de 2,400 livres à lever sur les habitants de la ville de Nontron; «120Deletlres;patentes sur le décret du 29, concernant l’imposition de la somme de 1,200 livres, à faire sur les habitants du bourg de Bonnes, pour la construction de deux bateaux; « 13° De lettres patentes sur le décret du même jour, portant qu’il sera, par les officiers municipaux de Saint-Pierre-le-Moutier, imposé la somme de 1,200 livres sur tous leurs citoyens qui ont plus de 400 livres de revenu, soit en biens-fonds, rentes, pensions ou industrie; « 14° D’une proclamation sur le décret du même jour, relatif à l’émeute qui a eu lieu au marché de Tours, le 26 mai, à l’occasion du prix des grains; « 15° D’une proclamation sur le décret du 30,