754 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 septembre 1"90.] de nos frontières. Sa Majesté a cru cependant devoir prendre les mesures nécessaires pour mettre nos places à l’abri de toute invasion, et je vous prie d’en faire part à l’Assemblée nationale. » Par la seconde, M. de La Luzerne envoie copie d’une lettre de M. d’Albert, datée du 11. Deux vaisseaux, armés dans le port de Lorient, ont rejoint l’escadre. Le code pénal de la marine a été lu aux équipages. Les mouvements qui avaient eu lieu paraissent calmés. (La séance est levée à 3 heures et demie.) ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. D’ANDRÉ, EX-PRÉSIDENT. Séance du mardi 14 septembre 1790, au soir. La séance est ouverte à six heures et demie du soir. M. d’André, ex-président, occupe le fauteuil. Un de MM. les secrétaires donne lecture de la lettre suivante dont l’Assemblée ordonne l’impression : « Monsieur le Président, « Permettez que je réclame votre organe, pour faire agréer à l’Assemblée nationale le vœu des trente élèves composant l’école militaire de Nanterre ; comme je partage autant que je leur inspire cette sensibilité patriotique, qui fait le vrai citoyen, je me joins à leurs désirs, pour demander aux pères de la patrie deux orphelins des braves volontaires de Metz qui ont cimenté de leur sang notre régénération; ces deux orphelins, nommés par le département de la Meurtbe, seront élevés, instruits, nourris et entretenus à mes frais. Je regrette bien sincèrement que mes moyens trop limités ne me permettent pas d’en demander davantage; mais j’aime à croire que j’aurai des imitateurs qui s’empresseront de suivre un exemple aussi doux pour un cœur patriote. « Je suis, avec respect, Monsieur le Président ; votre très humble et très obéissant serviteur, L’abbé Hasard, Directeur de l'école militaire de Nanterre. » (Cette lettre est fort applaudie). Le même secrétaire fait ensuite lecture des adresses suivantes : Adresses de félicitation, remerciaient et adhésion de la communauté de CoDtalmaison, district de Péronne, département de la Somme ; indépendamment de la contribution patriotique, elle fait don du produit des impositions sur les ci-devant privilégiés, pour les six derniers mois de 1789 ; Du directoire du département de l’Aveyron, qui présente à l’Assemblée le tribut de son admiration et de son dévouement ; Du directoire du district de Gaillac, département du Tarn, qui adhère particulièrement aux décrets de l’Assemblée, concernant l’ordre judiciaire ; Des gardes nationales de la ville de Lescar, en Béarn, qui, vivement affligées des calomnies que les ennemis de la patrie ont répandues sur le patriotisme de leurs amis et frères d’armes, les gardes nationales du berceau d’Henri IY, sollicitent la justice de l’Assemblée contre les calomniateurs. Ils font en même temps une pétition d’armes ; De soixante-dix jeunes citoyens de la paroisse de Mereville, qui, le jour de leur première communion, ont prêté le serment civique. Délibération des administrateurs du directoire et district de Boussac, au département de la Creuse, qui, désirant concourir aux vues paternelles du roi, à la sagesse des opérations de l’Assemblée et au bonheur des peuples, déclarent qu’ils se contenteront de recevoir la moitié des honoraires qui leur seront fixés et attribués par l’Assemblée nationale, quelque modiques que ces honoraires puissent être ; déclarent aussi qu’ils font dès à présent remise de ladite moitié au profit des contribuables de leur district, et en décharge des impôts qui leur seront donnés, invitant ceux de MM. les officiers qui seront nommés pour administrer le tribunal de justice de leur district, de faire pareille remise sur les émoluments qui leur seront accordés, pour le soulagement des administrés. Adresses de la garde nationale de Cassaigne contenant adhésion aux décrets de l’Assemblée et la demande d’un soldat expérimenté pour lui apprendre l’exercice militaire; Des membres de la société patriotique et littéraire de la ville de Loches, affiliée au club des jacobins de la ville de Paris. Ils sollicitent l'admission du public aux assemblées générales des départements et des districts; De M. Leblanc, curé de la paroisse de Saint-Jean, à Nevers. Il fait le don patriotique d’une demi-année de la pension destiuée aux curés des villes ; Des officiers municipaux de Mornand en Forez qui font le plus grand éloge du curé de la paroisse, et supplient l’Assemblée d’approuver un règlement de police qu’il leur a présenté. Adresse de lu garde nationale de Saint-LÔ et du régiment d’Angoulême, en garnison dans cette même ville; elle exprime tout à la fois, combien ces deux corps militaires sont reconnaissants envers l’Assemblée nationale des mesures qu’elle a prises pour le rétablissement de l’ordre dans la ville de Nancy, et leur désir de voir ériger à la mémoire de ceux qui ont péri dans cette journée, un monument sur lequel serait cette inscription : Ils moururent pour le rétablissement de la discipline militaire. L’Assemblée applaudit vivement au zèle patriotique des citoyens et de la garnison de Saint-Lô, et ordonne que leur adresse sera honorablement mentionnée dans le procès-verbal. M. Ii«cas, député du département de l’Ailier, expose que la garde nationale de Gannat, toujours fidèle à son serment, vient, sous les ordres de son commandant, d’arrêter et de conduire à la maison commune une voiture chargée de tabac de contrebande : il se plaint de ce que des hommes mal intentionnés blâmaient cette conduite, qui, d’après le procès-verbal qui lui a été envoyé, n’a pour objet que de favoriser la perception de l’impôt ; il propose que M. le président écrive à la garde nationale de Gannat, pour lui témoigner l’approbation et la satisfaction de l’Assemblée. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 septembre 1790.] 735 M. dé Tracy demande le renvoi du procès-verbal au comité des rapports. M. Mlichelon demande la division, qui est adoptée, et l’Assemblée décrète que son président est autorisé à écrire à la garde nationale, que les juges ordinaires connaîtront de la saisie. M. Devillas réclame contre un décret relatif à la municipalité de Mauriac. L’Assemblée renvoie cette affaire à examen du comité de Constitution, pour en faire incessamment le rapport. M. Voldel, au nom du comité des recherches, fait lecture de cinq procès-verbaux de la municipalité d’Angers, département de Maine-et-Loire; le premier fait mention de la dénonciation du procureur-syndic sur une insurrection élevée dans la halle et qu’avaient occasionnée la cherté des grains et des soupçons d’accaparement, et de la détermination du directoire qui avait envoyé des députés au commandant de la garde nationale, lequel avait informé ces députés que le régiment de Picardie venait de prendre les armes sur la réquisition de la municipalité, etc. Le second procès-verbal fait mention des moyens propres pour rétablir l’ordre. On s’était déterminé à faire une proclamation qui invitât les citoyens des deux dictricts à se réunir paisiblement et sans armes, et à discuter les moyens de faciliter la circulation des grains. Le troisième contient la propositiou de M. le maire d’organiser, sous le bon plaisir de l’Assemblée nationale, une force active, prise dans la garde citoyenne, pour maintenir l’ordre et protéger la circulation ; proposition qui a été provisoirement adoptée. Le quatrième annonce un attroupement des mauvais citoyens et d’un grand nombre de femmes qui commençaient déjà à investir le lieu de la séance et à menacer les membres du directoire. Le cinquième enfin annonce que les ouvriers des carrières s’armaient et se réunissaient pour faire dans la ville une invasion à force ouverte; que le tocsin sonnait ; que les soldats du régiment de Picardie étaient menacés ; que le directoire et la municipalité avaient proclamé une diminution de 4 deniers pour livre sur les deux dernières espèces de pain ; qu’à peine le calme paraissait rétabli, qu’on vint avertir le directoire que le peuple devenait plus furieux, que la municipalité a fait déployer le drapeau rouge ; mais qu’une décharge de mousqueterie, faite par les ouvriers des carrières armés, sur Je régiment de Picardie et de la garde nationale, a forcé ces derniers de repousser la force par la force, et que le parti des insurgés a perdu beaucoup de monde ; que plusieurs corps de gardes nationaux des environs se sont présentés le lendemain pour secourir la ville d’Angers ; mais que le directoire, informé qu’il se trouvait parmi eux un grand nombre des ouvriers des carrières, leur ordonna de se retirer, ce qu’ils exécutèrent ; que le tocsin, qui ne cessait de sonner, excitait de nouveaux attroupements, qui se dissipèrent au moment où on le lit cesser, en faisant enlever les cordes des cloches. M. Voidel propose, sur ces événements, un projet de décret qui est adopté en ces termes : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des recherches : « Approuve la conduite prudente et ferme du directoire du département de Maine-et-Loire, du directoire du district et de la municipalité d’Angers ; « Charge son président de se retirer par devers le roi, pour le prier de donner les ordres les plus prompts, afin que la procédure commencée soit continuée contre les auteurs, fauteurs et instigateurs des attentats commis à Angers le 6 de ce mois, circonstances et dépendances; « Décrète que copie de la procédure sera envoyée à son comité des recherches, sans que néanmoins cet envoi puisse retarder la poursuite et l’exécution des jugements; « Charge enfin son président d’écrire au bailliage d’Angers, à la garde nationale de la même ville, au régiment de royal-Picardie et au détachement du régiment de Conti, dragons, en la personne de leurs chefs respectifs, pour leur exprimer la satisfaction de l’Assemblée du zèle et de l’ardeur avec lesquels ils ont concouru au rétablissement de la paix et de l’ordre public.» M. Gossin, rapporteur du comité de Constitution. L’Assemblée a décidé l’établissement de six tribunaux pour le département de Paris ; il reste à en fixer les limites. Cet objet est instant pour l’organisation de l’ordre judiciaire et l’élection des juges. Nous avons, en conséquence, l’honneur de vous proposer un décret pour déterminer l’étendue de chacun de ces tribunaux. Le projet de décret du comité de Constitution est mis aux voix et adopté en ces termes : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité de Constitution, décrète que le territoire de chacun des six tribunaux du département de Paris est déterminé ainsi qu’il suit : Tribunaux du département de Paris , composés : « Premièrement. Des sections des Tuileries, des Champs-Elysées, du Roule, delà place Vendôme, du Palais-Royal, de la Bibliothèque, de la Grange-Batelière, et des cantons de Nanterre et Passy. « Deuxièmement. Des sections du faubourg, Montmartre, de la rue Poissonnière, de la Fontaine-Montmorency, de la place Louis XIV, des Postes, de la Halle aux blés, de l’Oratoire du Louvre, du Marché des Innocents, de Mauconseil, de Bonne-Nouvelle; « Et des cantons de Colombe, Glichy et Saint-Denis. « Troisièmement . Des sections du faubourg Saint-Denis, de Bondy, du Temple, du Ponceau, des Gravilliers, des Lombards, de la rue Beaubourg, des Arcis, des Enfants-Rouges; « Et des cantons de Pierrefitte, Pantin et Bel-leville. « Quatrièmement. Des sections de la Place-Royale, du Roi de Sicile, de l’Hôtel-de-Ville, de l’Arsenal, de Popincourt, de la rue de Montreuil, des Quinze-Vingts, de l’Isle; « Et des cantons de Montreuil, Vincennes et Charenton. « Cinquièmement. Des sections de Notre-Dame, des Thermes de Julien, de Sainte -Geneviève, du Jardin-des -Plantes, de l’Observatoire, des Gobelins; « Et des cantons de Villejuif et Choisy-le-Roi. « Sixièmement. Des sections d’Henri-Quatre, des Invalides, de la Fontaine-de-Grenelle, des Quatre Nations, du Théâtre-Français, de la Croix-Rouge, du Luxembourg; « Et des canions du Bourg-la-Reine, d’Issy et de Ghâtillon. »