SÉANCE DU 22 THERMIDOR AN II (9 AOÛT 1794) - Nos 11-13 385 Mention honorable et insertion au bulletin (1). 11 Le représentant du peuple Thabaud demande un congé de quatre décades pour rétablir sa santé : le congé lui est accordé (2). [Thabaud, repr., au présid. de la Conv.; Paris, 22 therm. II] (3) Citoyen président, L’état actuel de ma santé m’oblige nécessairement à demander à la Convention un congé de quelques décades. J’aurois bien désiré différer encore le moment, mais les incommodités que j’éprouve depuis longtems ne font qu’accroître chaque jour; elles me forcent impérieusement à me résoudre enfin à aller faire usage des remèdes qui me sont prescrits. J’attends de la justice de la Convention nationale qu’elle ne me refusera pas la même faveur qu’elle a accordée à beaucoup d’autres de mes collègues; j’ai d’autant plus lieu de l’espérer que, depuis 23 mois entiers, je ne me suis point absenté. Je te prie donc, citoyen président, de vouloir bien lui faire part de la demande que je lui fais d’un congé de quatre décades pour le rétablissement de ma santé. S. et F. Thabaud. P.-S. Je joins le certificat de l’officier de santé qui m’a donné ses soins, afin de prévenir toute difficulté à cet égard. Je soussigné, officier de santé de la section armée des Arcis et du comité de bienfaisance de la même section, certifie que, depuis 2 ans, je donne mes soins au citoyen Thabaud, député de l’Indre, dem[euran]t rue du Petit Carouselle, n° 659; lequel est affecté d’une humeur catarrheuse qui s’est fixée dans les bronches du poulmon et qui occasione de temp[s] en temp[s] une oppression, qui, devenant plus forte, l’empêche de se livrer à ses travaux ordinaires. En conséquence, j’estime que l’aire natal respirée un couple de mois, aidé des remèdes atténuants que je lui ai prescrits, lui est d’une absolue nécessité, et surtout dans la saison actuelle. En foi de quoi, je lui ai délivré le présent, à Paris, 21 thermidor l’an 2e de la République une et indivisible. Leylaud. Vu au comité de la section des Arcis. Certifions véritable la signature du citoyen Leylaud, chirurgien-m[a]j[o]r de la section et du comité (1) P.V., XLIII, 130. Bm, 29 therm. (2e suppl1). La lettre du représentant Pflieger figure à la séance du 21 therm., affaires non mentionnées, n° 31. La mention marginale qui termine le P.-V. ci-dessus porte la date du 21 therm. (C 311, pl. 1 231, p. 18). (2) P.V., XLIII, 130. Décret n° 10 323. Rapporteur : Merlin de Douai. (3) C 312, pl. 1 236, p. 9 et 10. de bienfaisance des Arcis; que foy doit y estre ajoutée. Paris 21 therm. II. Baron (présid. du c. civil), Musson, Barré (se-crét. -greffier). 12 Les tambours des sections de Paris réclament des effets d’équipement et d’habillement. Renvoyé au comité de salut public (1). [Les tambours des secfs de l’armée parisienne, aux cns représentans du peuple; s.d .] (2) Législateurs, Les tambours des sections de l’armée parisienne soumettent à votre justice leurs observations. 1) Il revient à plusieurs d’entre eux chacun 45 liv., somme que les tambours-majors et tambours-maîtres ont touché en augmentation de leur solde. 2) Il n’est accordé à chaque tambour qu’une culotte par an; la qualité du drap, qui est brûlé par la chaux, fait que, malgré toute leur économie pour en allonger l’usage, elle ne peut suffire à beaucoup près pour une année; aussi celui qui n’a que sa solde ne peut fournir aux premiers besoins, ainsi qu’aux restes de l’entretien, chaussures, blanchi[s]age, etc. Pourquoi ils en demandent une seconde. 3) Pour également se maintenir dans un état de propreté convenable, un habit tous les 2 ans ne peut pas suffire, vu le frottement de la caisse portée sur l’épaule, ce qui l’use bientôt; ils croiroient qu’un surtout seroit d’un grand ménage pour les tems hors de service et pour l’école, ne seroit-il fait qu’avec du drap de vieux habits ou rodinguottes. 4) Qu’ils soient déchargés des caisses, vu les événemens imprévus qui se reproduisent à chaque instant et qui les ruineroient. 5) Ils oserveront encore que leurs chapeaux sont beaucoup trop petits, et que leurs bonets de police sont faits avec, de vieux draps et n’ont pas l’uniforfne. Les tambours de l’armée parisienne mettent toute leur confiance dans la justice et la bienveillance des législateurs qui voudront bien faire droit à leur juste réclamation. 13 La section de l’Homme-Armé dénonce le comité de surveillance de son arrondissement pour avoir pris part à la conspiration. (1) P.V., XLIII, 130. J. Fr., n° 684; F.S.P., n° 401; J. Jacquin,, n° 741. (2) C 315, pl. 1 264, p. 36; M.U., XLII, 362; J. Sablier, n° 1 489. 25 386 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Renvoyé aux comités de sûreté générale et de salut public (1) [La section de VHomme-Armê à la Conu.; s.l.n.d .] (2) Législateurs, Lorsque la section de l’Homme-Armé vint, le 9 au soir, vous jurer un attachement inviolable, et vous déclarer que les coups des traîtres ne vous atteindroient qu’après son annéantisse-ment, elle étoit loins de penser quelle renfermât dans son sein des monstres qui conspiroient avec les tirans et qui en étoient les plus vils supost. Le croirez-vous, législateurs ? Ces monstres forment l’une des authorités dont l’institution tendoit au bonheur du peuple et au maintien de la liberté : c’est notre comité révolutionnaire, c’est ce comité sanguinaire, qui, tandis que la section entière formoit des vœux pour le triomphe de la liberté, et juroit de mourir avec vous pour une aussy belle cause, communiquoit avec les chefs de la conspiration et prenoit toutes les mesures utiles à l’élévation d’un thrône sur les cadavres sanglans des patriottes. La suitte de la journée du 9 a découvert tous les complots tramés autour de nous; tous les faits sont attestés par un grand nombre de citoyens; le détail va être déposé sur le bureau, à moins que la Convention ne veuille l’entendre. Législateurs, Comme vous, nous avons long-tems vécu dans l’oppression; nos voix étoient étouffées; on ne nous abreuvoit que de sang; celui qui osoit parler en sens contraire au tiran étoit traitté de scélérat, de brigand, et menacé d’incarcération; plusieurs mêmes ont été victimes. Non, Il n’est pas de crimes que nous n’ayons vu, sous nos yeux; l’oppression et le despotisme ont été poussés au plus haut degré. Enfin, le 15 thermidor, les tirans de la section ont été démasqués; l’assemblée, composée de plus de 950 citoyens, a unanimement voté que le plus scélérat de tous (il se nomme Chalendon) avoit perdu sa confiance, et qu’il seroit dénoncé aux comités de salut public et de sûreté générale. Tandis que la section prenoit cette délibération, le comité révolutionnaire a eu la perfidie d’envoyer une députation à vos comités pour leur faire part que l’assemblée étoit en insurrection ouverte et qu’elle vouloit la destruction des comités révolutionnaires; sans doutte qu’il croyoit, par là, échaper au juste châtiment que mérite les coupables. Législateurs, Jugez de la calomnie; Voilà le procès-verbal entier de la sçéance, que nous déposons sur le bureau; jamais assemblée aussi nombreuse ne fut plus unie dans ses opinions et ne professa des principes plus purs; notre allégresse, qu’on traitte d’insurrection, étoit comme la vôtre, pour la chute des tirans et de la tiranie. Nous respectons l’institution des comités révolutionnaires, et personne, plus que nous, (1) P.V., XLIII, 131. (2) C 315, pl. 1 264, p. 40, 37, 38, 39. n’est convaincu de leur nécessité dans un gouvernement révolutionnaire, mais II leur faut une autre composition ! les hommes s’usent dans les places, Ils abusent souvent d’un pouvoir trop longtems laissé dans leurs mains. Vous avez, législateurs, déjà senti cette vérité. [ Applaudissements ] . Notre sçéance du 20 n’a pas mois été inter-ressante que celle du 15, puisqu’elle a été entièrement consacrée au triomphe de la liberté et de ses principes; nombre de crimes ont été de nouveau dévoilés, et l’assemblée, composée de près de 1 200 citoyens, a unanimement voté que son comité révolutionnaire avoit perdu sa confiance, et que la section en masse se rendrait aujourd’huy dans le sein de la représentation nationnale pour demander le prompt renouvellement de ce comité indigne de son institution. Législateurs, c’est ce vœu bien prononcé que nous venons émettre; ce n’est ni la passion ni la vengeance de quelques individus qui ont déterminé nos délibérations, mais l’amour seul de servir la patrie. Vos comités de salut public et de sûreté générale sont investis d’une grande partie de nos plaintes; nous laissons à leur justice le soin de la punition des coupables. Déjà ils ont fait incarcérer l’infâme Chalendon. Nous espérons tout de la Convention nationnale. Les membres de notre tirannique comité ne sont pas également coupables, mais nous disons avec vérité que les uns ont commis les crimes, et les autres ne les ont pas dévoilés. Nous concluons en vous renouvellant, législateurs, l’assurance du plus parfait attachement, et nous nous écrions comme vous : à bas la tiran[n]ie, périssent les tirans, vive la République, Vive la Convention nationnale ! Gautier (présid.), Charlet (secret.). Détail succinct de la conduite et des manœuvres du comité révolutionnaire de la section de l’Homme-Armé, dans la soirée et la nuit du 9 au 10 thermidor. A 4 heures du soir, Louvet, membre de la commune, monte au comité révolutionaire : là, il confèbe avec les membres qu’il y rencontre, notamment Chalandon président du comité; un moment après, on les voit descendre; Louvet reprend le chemin de la commune; Chalandon assemble les tambours, se met à leur tête, et parcourt ainsi l’étendue de la section, appellant les citoyens aux armes; d’un autre côté, Cotin, autre membre du comité, excitoit les citoyens à la rébellion, en leur reprochant de n’être pas encore sous les armes : « La vertu est opprimée », disoit-il, « on égorge les patriotes, il faut encore une journée du 31 mai ». Cependant les citoyens se réunissent en armes au chef-lieu. Chalandon, de retour, continue l’exécution de ses projets coupables. Il s’empare des canons et les fait sortir, de son autorité privée : il les dispose dans la rue. A cet instant, arrive un citoyen qui annonce l’arrestation du traître Hanriot, avec sa destitution du commandement de la force armée. Chalandon, furieux, saisit au collet ce citoyen, le traite d’allarmiste et le fait incarcérer; ensuite il passe à la cour Soubise, s’écrie à la force armée