[Assemblée nationale. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Il septembre 4791.} la séance du 29 août dernier sont indispensables pour le complément de �organisation de la gendarmerie nationale. Personne de vous, Messieurs, n’ignore que ce travail est suspendu ; qu’il l’est pour plusieurs motifs qu’il est inutile de vous exposer. Ges articles ont été discutés dans le comité militaire et convenus avec le ministre de la guerre. Voici le premier article : « Les maréchaux des logis, anciens exempts, qui n’ont pu être employés dans les grades supérieurs, resteront provisoirement attachés aux brigades que le ministre de la guerre leur assignera; et à mesure des vacances qui auront lieu dans les places de lieutenants de la gendarmerie, ils y seront nommés selon l’ordre d’ancienneté de ceux restant à placer, pour prendre parmi tous les lieutenants de gendarmerie, le rang que devra leur donner la date de leur commission d’exempt. » M. Chabrond s’élève contre la disposition de cet article, et prétend qu’on devrait commencer de donner une juste idée des différents grades, notamment de celui d’exempt ; que, par la dernière phrase de l’article, il semble qu’on porte atteinte à ce qui a été déjà décrété en faveur des compagnies incorporées dans la gendarmerie, et surtout aux choix déjà faits par les directoires des départements. M. de Wimpfen propose d’introduire un amendement accordant aux directoires de département la nomination des officiers dont il s’agit. M. Chabroud répond que ce décret sera toujours injuste, de quelque manière qu’il soit rédigé. M. Euimery demande la question préalable sur tout le projet, observant qu’on doit s’en tenir à la loi générale déjà décrétée sur l’avancement; que les mêmes dispositions ont été présentées aux comités réunis, et même à l’Assemblée ; que partout elles ont été rebutées; qu’il est extrêmement dangereux de revenir, tantôt sous un prétexte, tantôt sous un autre, sur des lois rendues en parfaite connaissance de cause. M. Rabaud-Saint-Etiemie, rapporteur , répond que la première observation deM. Chabroud est juste, mais qu’elle s’applique plus particulièrement à l’article 10 ; quant à la question préalable, il s’y oppose et soutient contre M. Emmery que l’Assemblée rt’a jamais eu à s’occuper dû projet actuellement soumis à sa délibération. M. Chabroud répond qu’il est aisé de se convaincre par le rapprochement de plusieurs articles, et notamment par l’article 10, qu’on favorise les officiers de la gendarmerie au préjudice des choix faits et à faire par les directoires de départements; le projet ne tend qu’à conserver l’esprit de corps de l’ancienne maréchaussée dans la gendarmerie ; pour placer quelques exempts, on exclut ou l’on suspend des militaires appelés par la loi et par ce moyen, on dégoûte d’excellents sujets reconnus tels par les administrations de départements. La gendarmerie mérite la plus scrupuleuse attention dans sa formation et dans sa composition, et le décret actuel irait contre la volonté de l’Assemblée de ne pas livrer au hasard des places qui confèrent l’exercice de fonctions civiles si importantes. Plusieurs membres demandent qu’on aille aux voix sur la question préalable. M. Rabaud-Saint-Elienne, rapporteur , observe qu’il est indispensable qu’on s’occupe de suite des articles proposés, afin que le ministre puisse enfin organiser un corps aussi utile. M. Emmery répond qu’en rejetant le projet de décret proposé, la compositioa de la gendarmerie sera plus tôt achevée. M. de Wimpfen demande que les choix des sujets pris dans la ci-devant maréchaussée, qui auraient été faits en conformité de la loi par les directoires des départements, fussent déclarés valables. Un membre , considérant que les précédents décrets n’excluent pas la maréchaussée, demande l’ordre du jour sur la motion de M. de Wimpfen. (L’Assemblée, consultée, passe à l’ordre du jour sur la motion de M. de Wimpfen.) M. le Président met ensuite aax voix la question préalable demandée sur le projet de décret du comité. (L’Assemblée décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer.) M. Démewnier propose la disposition suivante : « Les nominations d’officiers de la gendarmerie nationale, faites conformément à la loi par les directoires des départements, sortiront leur effet. « Lesdits officiers recevront leurs commissions. du pouvoir exécutif, et seront envoyés, dans le plus court délai possible, aux lieux qui ont été ou qui seront fixés pour leur résidence. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) L’ordre du jour est la suite du rapport du comité de Constitution sur l'instruction publique. M. de Talleyrand-Périgord, ancien évêque d’Autun, rapporteur , termine la lecture de son rapport commencée dans la séance d’hier au matin et qui est interrompue par tes applaudissements répétés de l’Assemblée. ( Voir ci-dessus ce document , séance du 10 septembre 1791.) M. le Président. M. le ministre de l’intérieur demande la parole. ( Mouvement d’ attention.) M. Delessart, ministre de l’intérieur. Messieurs, il est de mon devoir d’appeler l’attention de l’Assemblée sur un objet important dans les circonstances. La récolte actuelle, inférieure en général à celle de l’année anterieure, a de plus l'inconvénient d’être très inégale, de manière que, tandis que des départements sont dans l’abondance, d’autres éprouvent une disette absolue. Les environs de la capitale à une trè-grande distance, et tout le nord de la France, ont fait une bonne récolte; mais, à mesure qu’oQ remonte vers le midi, le résultat des récoltes diminue, et il est presque nul à l’extrême front ère. Sans doute, il reste encore des grains de l’année dernière et peut-être que, réunis à ceux de cette année, ils suffiraient en masse à la subsistance entière du royaume; mais l’inégalité de distribution qui existe ne pourrait être compensée que par une circulation parfaitement active et libre. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [12 septembre 1791.] Kgn Je ne dois pas dissimuler à l’Assemblée nationale que, dans les circonstances présentes, il y aurait de l’imprudence à compter entièrement sur ces moyens. Les départements qui, jusqu'à présent, m’ont fait connaître leurs besoins sont : la Dordogne, la Lozère, le Cantal, le Lot-et-Garonne, les Landes, le Gers, les Basses-Alpes et les Basses-Pyrénées. Plusieurs départements se sont adressés à l’Assemblée ; la plupart demandent qu’on leur fasse des avances de fonds, quelques-uns sollicitent des grains en nature, le Gantai en particulier déclare que, sans un secours de ce genre, les terres ne seront pas ensemencées, et en effet sa situation est telle que, ne pouvant rien tirer des départements voisins qui sont loin d’avoir du superflu, n’ayant d’ailleurs que peu de capitaux, il est exposé à manquer de ce qui lui est nécessaire pour subsister cette année, et il ne peut assurer sa subsistance à l’avenir si l’on ne vient efficacement à son secours. Ces différentes choses présentent plusieurs questions plus délicates et plus importantes les unes que les autres. Fera-t-on des avances aux départements qui en réclament? Dans quelle mesure et par qui ces avances seront-elles faites ? Four-nira-l-on des grains à ceux qui sont hors d’état de s’en procurer par eux-mêmes? Quels fonds emploiera-t-on pour cette fourniture ? Sur quels fonds les dépenses seront-elles assignées ? Dans quelle forme s’effecluera-t-elle ? En s’occupant de résoudre ces questions, et quelque parti qu’elle prenne à cet égard, l’Assemblée nationale aura encore à s’occuper de la libre circulation, sans laquelle tous les soins, tous les efforts, toutes les dépenses deviendraient inutiles. Quand l’Assemblée a consacré cette liberté, par ses décrets, elle en a fait un des objets de sa Constitution ; elle a voulu qu’on poursuivît et qu’on punît, comme perturbateurs du repos public, ceux qui se permettraient d’y porter atteinte. Bientôt, sans doute, le progrès des lumières, l’usage de la liberté, l’habitude de la soumission aux lois mettront la libre circulation des subsistances au rang des premiers devoirs dont le peuple sentira la nécessité. Mais le souvenir trop récent du passé, un sentiment exagéré de crainte, un reste d’agitation, qui se manifeste encore, ne permettent pas de compter sur cette sécurité, soutenue de cette espèce d’abandon qui peut seul favoriser ce genre de circulation. Une disposition contraire, de la part du peuple, souvent décourage ceux qui seraient tentés d’entreprendre ce commerce; cependant, ce n’est que par l’intervention du commerce que les grains peuvent être exportés des lieux où ils sont abondants dans ceux où ils sont rares, et que la circulation pourrait s’y rétablir. Je penserais donc qu’il serait essentiel de rassurer les commerçants en leur procurant une espèce de garantie qui ne leur laissât aucun risque à courir que ceux qui résulteraient de la nature même des choses ; il me semble qu’on remplirait ce but en rendant une loi qui porterait qu’en cas de pillage ou de violence exercés relativement à la circulation des grains, celui qui aurait éprouvé le dommage en serait indemnisé par la nation. La nation s’indemniserait ensuite elle-même en imposant l’indemnité sur le département où le pillage aurait été commis : le département ferait porter cette charge sur le district, le district sur la municipalité, de manière qu’en dernière analyse le poids en retomberait et sur les auteurs et sur ceux qui, pouvant et devant l’empêcher, n’y auraient pas mis obstacle. Du reste, toutes les précautions deviendront moins nécessaires à mesure que les effets de la Révolution pourront se développer ; un des biens les moins indisputables qu’elle doit produire est de rendre à l’agriculture et au commerce les capitaux et les bras qu’un luxe impie et une foule de charges et d’emplois inutiles leur enlevaient depuis trop longtemps; et le moment n’est pas trop éloigné où le sol de la France cultivé par des mains libres, après avoir subvenu aux besoins des habitants, offrira encore un superflu aux spéculations du commerce; mais il faut pourvoir aux besoins actuels, il faut faire cesser les inquiétudes, il faut empêcher que l’ordre public soit troublé; ces grands intérêts sont dignes d’occuper l’Assemblée nationale. Jusqu’à présent, elle a renvoyé à son comité des finances les diverses demandes qui lui ont été faites à ce sujet; je la supplie de vouloir bien charger ce même comité de prendre une connaissance générale de l’état des choses et de lui proposer incessamment des mesures capables de répondre à l’importance et à l’urgence d’un objet qui touche de si près à la tranquillité publique. {Applaudissements.) (L’Assemblée ordonne le renvoi du mémoire du ministre de l’intérieur aux comités de commerce et d’agriculture et des finances.) M. le Président annonce l’ordre du jour de la séance de demain. La séance est levée à trois heures et demie. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. THOURET. Séance du lundi 12 septembre 1791 (1). La séance est ouverte à neuf heures du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal delà séance du dimanche 11 septembre, qui est adopté. M. Camus. Il arrive journellement à Paris un grand nombre de députés élus à la prochaine législature, qui manifestent le désir d’assister aux téances de l’Assemblée nationale. Je demande que, sur le vu de leur certificat d’inscription sur les registres des archives de l’Assemblée, ils soient admis dans les tribunes actuellement abandonnées au public. M. Chabroud. J’observe qu’il est plus convenable que ces députés soient admis dans le sein de l’Assemblée, je veux dire dans l’amphithéâtre du côté droit, qui est toujours à moitié vide. {Applaudissements.) M. Bouche. J’appuie la proposition de M. Chabroud ; mais je voudrais que, pour la liDerté et la sûreté des opinions, la place des nouveaux députés fût séparée de l’Assemblée. Il y a beaucoup de place, il est vrai, dans cette extrémité de la salle. {Il montre le côté droit), mais on dit que l’air y est contagieux {Rires et applaudissements.) ; peut-être cependant est-il bou de les y admettre : iis purifieront la place. {Rires.) (1) Celte séance est incomplète au Moniteur.