58R [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] ble, je dirai que la défense de l’armée de Flandre s’étend depuis Dunkerque jusqu’à Montmédy ; celle d’Alsace, depuis Montmédy jusqu’à Hunin-£ue; et celle du Dauphiné, depuis le Fort-Barraux jusqu’à Antibes. La frontière, depuis Huningue jusqu’au Fort-Barraux, se trouve défendue par notre alliance avec la brave et loyale nation suisse, qui nous épargne l’entretien d’une armée d’au moins soixante mille hommes. Chacune de ces trois armées, en compensant les différences qu’exigeraient les localités, ne pourrait être, l’une dans l’autre, au-dessous de soixante mille hommes, infanterie, artillerie et cavalerie, tout compris. RÉCAPITULATION. Pour le service de mer. . . . 50,000 hommes. Pour l’armée de Flandre. . . 60,000 Pour l’armée d’Alsace ..... 60,000 Pour l’arméé du Dauphiné. 60,000 trois raisons auxquelles ils auront sûrement égard. La première est, que l’Assemblée nationale en a décrété l’impression; la deuxième, que j’ai appris la langue française trop tard pour y exceller; la troisième que je fais mes écrits moi-même, et que je ne peux prendre sur moi d’y retoucher. (L’Assemblée ordonne l’impression du discours.) M. le Président. M. le baron de Wimpfen demande que M. le marquis d’Ambly soit adjoint au comité militaire. L’Assemblée décrète que M. le marquis d’Ambly est adjoint au comité militaire. M. le Président. L’Assemblée passe maintenant à son ordre du jour de deux heures et va s'occuper de l’affaire de Toulon. M. Malouet monte à la tribune et veut parler. — On lui fait observer que l’affaire a été renvoyée au comité des rapports, et que ce comité n’est pas prêt. Total .......... 230,000 hommes. En établissant cette force défensive, je n’ai pas supposé que nous la porterions sur les terres ennemies, quoique ce soit le meilleur moyen de se défendre et de ménager son propre pays : j’ai seulement voulu établir le calcul le plus rigoureux, car il me resterait encore à parler des troupes en communication, pour assurer les derrières, les convois et la retraite après une bataille erdue. Mais une armée de cent cinquante mille ommes recrutée et renforcée par quatre-vingt mille hommes de milices, suffirait rigoureusement, avec le secours des gardes nationales, dont chaque département fournirait facilement un bataillon pour le service intermédiaire. Cette ressource jointe à d’autres motifs bien connus , milite fortement pour le maintien d’une troupe qui sera justement célébrée par les historiens de la Révolution. Si quelqu’un m’objectait qu’il n’est pas vraisemblable que nous soyons jamais attaqués à la fois par tous les points que j’ai indiqués; je lui répondrai que nous ne le serons jamais dans aucun des points indiqués, ou que nous le serons dans tous ces points à la fois, parce qu’il n’y aurait qu’une ligue de toute l’Europe, qui pourrait former une entreprise contre les Francs ressuscités, et que, malgré que je ne sois nullement inquiet de la manière vigoureuse dont nous prouverions à cette ligue que l’insurrection des Français fut la résurrection des Francs en corps et en âme, il y a toujours plus à gagner à empêcher la ligne de se former qu’à la combattre, et que ce n’est pas à l’aurore de notre renaissance, que nous devons négliger cet adage, vieux comme le temps, que, pour avoir la paix, il faut être prêt à la guerre. J’y ajouterai même encore que la sécurité d’un peuple nouvellement libre, est l’avant-coureur de son indifférence pour la liberté. Ce serait donc bien impolitique que de réduire, par un esprit d’économie, l’armée fort au-dessous de ce qu’elle doit être; car si la prodigalité dévore l’avenir, la parcimonie l’étrangle. Je finis par des excuses à mes lecteurs, d’avoir osé leur présenter un discours et des réflexions aussi mal rédigés. Mes excuses sont fondées sur M. Dufraisse-Duchey, pour écarter l’ajournement, demande que l’Assemblée se forme en grand comité, pour décider sur-le-champ, après avoir pris connaissance des pièces qui peuvent avoir été renvoyées, soit par les officiers de la marine, soit par le commissaire du Roi, soit par les officiers municipaux ; et dans le cas où la décision serait impossible, par le défaut de ces pièces, que la discussion soit ajournée jusqu’à l’instant où on les aura. M. Hairac. D’où M. Malouet a-t-il eu les pièces dont il a parlé hier? Si ce sont des lettres particulières, le courrier extraordinaire envoyé par la ville de Toulon n’a donné nulle inquiétude. L’intérêt des citoyens de cette ville doit rassurer davantage encore. M. le baron de Menou. Personne n’est indifférent sur le sort de la ville de Toulon ; mais nous n’avons nulle connaissance officielle des détails sur lesquels on veut que nous délibérions. Je fais la motion expresse que le président se retire par-devers le Roi, à l’effet de savoir quelle est la situation actuelle du port de Toulon. M. Malouet. J’ai déposé au comité des rapports les pièces qui constatent les faits sur lesquels je désire fixer l’attention de l’Assemblée. Leur importance me fait insister pour qu’on délibère sans délai. Une partie de l’Assemblée persiste à demander que la délibération soit différée, jusqu’à ce que le comité des rapports ait été entendu sur l’ensemble des faits. On décide de s’occuper sur-le-champ de cette affaire. M. Malouet. Les lettres que j’ai déposées ont été écrites au ministère par M. d’André, par M. le commandant de la ville, et par l’officier qui commande le port à la place de M. d’Albert. Une fausse nouvelle a été répandue ; elle favorise l’insurrection, en donnant le prétexte de rester en armes. Les entrepreneurs du port sollicitent la résiliation de leur marché, parce que les ouvriers font des demandes tumultueuses et des menaces inquiétantes. Je demande que M. le président soit autorisé a écrire à la municipalité de Toulon qu’aucune [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] 589 escadre ne menace le port, et qu’on prendra en considération les demandes des ouvriers, sitôt que le calme et la subordination seront rétablis. (On presse M. Malouet de donner la preuve des demandes des ouvriers.) M. Ricard de Séalt, l'un des députés de la sénéchaussée de Toulon. Nous avons reçu des lettres de Toulon ; elles sont datées du 7, et ne contiennent rien qui soit conforme à celles qui ont été communiquées à M. Malouet. Il est incroyable que l’on effraie le Roi et les ministres, par des bruits aussi faux qu’invraisemblables. Je certifie qu’il y a une connexité évidente entre les deux événements arrivés le mois dernier à Toulon. Je certifie qu’on a préparé le combat, qu’on a exhorté les soldats dans leurs quartiers, que des gargousses et des cartouches, faites dans le parc d’artillerie, leur ont été délivrées, tandis qu’on avait refusé deux cartouches à chaque poste de la garde nationale. Je certifie qu’on a commandé aux soldats de tirer sur le peuple, avant qu’on pût prévoir un soulèvement. Je certifie que M. d’Albert aurait pu arrêter l’insurrection, s’il avait accordé la grâce aux deux charpentiers qui ajoutaient à leur délit celui de porter la cocarde nationale. Cette grâce fut enfin donnée, lorsqu’on eut refusé d’exécuter la loi martiale, et que l’effervescence fut portée à l’excès. C’est cette milice nationale qui a sauvé M. d’Albert, et que l’on a cherché à inculper ; c’est elle qui a défendu bravement les officiers du Roi et les droits des citoyens, et c’est contre elle qu’on veut aujourd’hui surprendre un décret à l’Assemblée... J’ai été indigné d’entendre dire hier que les demandes des ouvriers, quelque raisonnables qu’elles fussent, ne seraient accueillies qu’après le calme rétabli..... Mon devoir m’oblige de le dire, si on pouvait croire à Toulon qu’un artifice ou qu’une intrigue quelconque nous ont arraché un décret qui ne serait pas le vœu de l’assemblée, c’en serait fait de la classe de ceux qui y auraient participé ..... M. de llonflosier interrompt M. Ricard, et demande qu’il répète ses dernières expressions. M. Ricard les répète, et continue : Il y a deux partis dans toute ville de guerre. Celui qui, à Toulon, s’oppose encore à la révolution, est beaucoup moins fort que celui des citoyens. Il serait imprudent de rendre un décret tel qu’on le propose : ce serait exposer mille personne à la vengeance de dix-neuf mille. On peut éviter ce malheur en ne précipitant pas la décision d’une affaire importante, qui ne sera bien jugée que quand elle sera bien connue. M. Malouet par le des lettres écrites le 7, avant midi : nous en avons reçu par un courrier extraordinaire, datées du 7, avant minuit ; elles ne disent rien des faits que contiennent celles des ministres du Roi. Dans les circonstances où nous sommes, si l’arsenal de Toulon est en péril, si vous voulez véritablement le sauver, le premier moyen est de prier le Roi de retirer les officiers de Toulon. Je ne prétends pas attaquer leur réputation ; je reconnais qu’ils sont tous de braves gens ; mais leur propre salut existe uniquement dans leur retraite. L’insurrection subsistera tant qu’ils resteront dans la place. Le second moyen est de nommer des officiers qui ne soient pas suspects au peuple. Le troisième moyen consiste à témoigner un peu plus de confiance à un peuple généreux, aussi avide de la liberté que fier de la force qu’il a développée pour la conquérir, et qu’il conserve pour la maintenir. La motion de M. Malouet est inadmissible. Si l’Assemblée le juge nécessaire, la députation de Toulon écrira à la municipalité pour détruire le bruit absurde qu’on prétend s’être répandu dans cette ville. M. Malouet. Le préopinant a traité le fond de l’affaire ; je m’en étais abstenu. Il a exposé des faits graves contre M. d’Albert ; je dois y répondre pour éviter la prévention défavorable qui ne tarderait pas à s’établir. Je puis les expliquer d’une manière bien simple. Tous les jours on fait de l’artifice dans le parc d’artillerie et dans l’arsenal. Toutes les dépositions se réunissent à constater qu’au premier ordre donné aux soldats de charger leurs armes, ils ont désobéi. Je demande si on a pu ensuite ordonner de faire feu avec des armes qui n’étaient pas chargées. L’heure étant très-avancée, la suite de cette affaire est renvoyée à demain deux heures. La séance est levée à quatre heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. FRÉTEAU DE SAINT-JUST. Séance du mardi 15 décembre 1789, au soir (1). M. Lebrun, au nom du comité des finances , propose un décret concernant les impositions de la ville de Paris, qui est adopté sans discussion ainsi qu’il suit : « L’Assemblée nationale , ayant entendu le rapport fait au nom de son comité des finances, d’une demande formée par le maire et les officiers municipaux de la ville de Paris, au nom de la commune, relativement à la perception des impositions de 1789, et à la réparlion prochaine de 1789, a jugé convenable de ne prononcer, dans ce moment, que sur la connaissance des contestations relatives à la répartition ou au recouvrement de 1789 et années antérieures : en conséquence, elle a décrété que les contestations qui ont pu ou pourront s’élever sur les impositions de 1789 ou années antérieures, seront jugées provisoirement et sans frais par le comité composé des conseillers administrateurs de Ja ville de Paris, au département des impositions, présidé par le maire de Paris, ou en son absence, par le lieutenant de maire; et que ce même comité surveillera le recouvrement des impositions de ladite année 1789, ainsi que des années antérieures. » M. Le Chapelier demande à être entendu sur la conduite de la chambre des vacations du parlement de Rennes. Il dit que cette chambre s’est conduite d’une manière plus répréhensible que les parlements de Rouen et de Metz, en ce qu'elle a d’abord refusé nettement de transcrire sur ses registres le décret du 3 novembre dernier sanctionné par le Roi; ensuite, refusé une seconde fois sur des premières lettres de jussion; et une troisième, après de secondes lettres semblables, en répondant au Roi, suivant le mémoire adressé par M. le garde des sceaux à l’Assemblée, qu’elle ne pouvait se charger des fonctions qui lui étaient (i) Celte séance est incomplète au Moniteur.