[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] Q\ { Mémoire sur les moyens d'établir des rapports entre les troupes soldées et les milices nationales. Je me suis engagé à répondre au mémoire de M. le comte de la Tour du Pin, sur la question importante des milices nationales ; je le prie d’excuser ma franchise, et même me3 erreurs, je ne puis avoir en vue que le bien pubic : arrêté dans ma carrière militaire par M. de Saint-Germain, j’ai depuis longtemps perdu de vue les grands principes de ce ressort puissant du gouvernement. Sans espérance pour ma fortune, je suis également sans intérêt, je dois donc dire ce que je crois la vérité; et je ne crains pas de la dire à un ministre patriote. Dans toute autre circonstance, je ne devrais que des éloges à un plan qui améliore le sort des soldats, et celui même des officiers, dans une proportion sagement combinée ; j’admirerais le dévouement à la chose publique d’un ministre qui renonce, en faveur du bien du service, au plus doux dédommagement de ses travaux pénibles, celui de nommer à tous les emplois militaires : je serais bien plus étonné encore de cette réforme de tant de grandes places inutiles à la vérité, mais qui flattent d’au tant plus celui qui les donne, que ceux qui les reçoivent sont illustres et puissants.J’avoue quedans le système ancien, ce plan m’aurait paru le chef-d’œuvre de la justice, de la raison et de la probité. Mais dans un moment où la nation vient de fonder sa liberté sur les débris de tous les pouvoirs arbitraires, pour ne pas être forcé d’écraser ses détracteurs, ou risquer d’être leur victime, la France ne doit cesser d’allier le respect et l’amour qu’elle a pour son Roi avec la majesté de sa Constitution. Elle doit veiller dans un silence imposant, jusqu’à ce que le temps et l’opinion aient consolidé ce grand ouvrage, et que les ennemis de la patrie disparus de la surface du globe, aient fait place à de meilleurs citoyens; si la nation s’endort, son sommeil sera ceiui de la mort ..... Voilà mon avis. Dans cette position dangereuse, quel parti indiquent à la France la prudence et la raison ? Un seul, celui de rester sous les armes, si elle ne veut pas reprendre des fers si pesants que ceux qu’elle portait. L’organisation des milices de la nation est donc nécessaire pour sa liberté, et par conséquent pour son repos. Il ne serait pas exact de comparer ces soldats citoyens que des principes sages et constitutionnels vont établir, à cette insurrection subite et désordonnée que la crainte de l’oppression a fait éclore dans un jour. Il ne serait pas pius exact de comparer ces nobles milices aux tristes victimes du despotisme, qui, le cœur glacé, et d’une main tremblante, consultaient l’urne fatale, et tombaient sans connaissance entre les bras de leurs parents éplorés à l’aspect du billet noir. Je dis, et je dois cette heureuse expression à M. le comte de la Tour du Pin lui-même; c’est maintenant un droit de tous les Français de servir la patrie, c’est un honneur d’être. soldat, quand ce titre est celui de défenseur de la plus belle constitution du monde entier. Je dis que dans une nation qui veut être libre, entourée de voisins puissants, criblée de factions sourdes et ulcérées, tout citoyen doit être soldat, et tout soldat citoyen, sinon la France est arrivée au terme de son anéantissement. Injustement l présenterait-on en opposition les tristes résultats du moment présent; l’affaissement du pouvoir exécutif est dû à l’abus qu’on a voulu en faire ; le mépris des lois, à la conduite des juges ; l’horreur des distinctions politiques, aux exactions des hommes puissants qui les ont poussées jusqu’à la dégradation de la nature humaine ; la perte du crédit naiional, à la dilapidation des revenus publics, et aux opérations usuraires des gens de finance , enfin, la disette (même au sein de l’abondance) et les mouvements tumulluaires qu’elle occasionne, aux manœuvres les plus coupables de tous les ennemis du bien public. Cessons donc de calomnier ce pauvre peuple ; moi, j’admire son courage et sa patience, et je délie qu’on me ci Le une nation qui, ayant à lutter à la fois contre une aussi énorme masse de conjurations, ait su élever sa grandeur sur leurs débris avec autant de sagesse et aussi peu de cruautés. Certes je l’avouerai, l’anarchie est un fléau, mais la constitution d’un grand peuple peut-elle changer entièrement, sans qu’il y ait un intervalle entre la désorganisation et le rapprochement des partis? Jetons un coup d’œil sur les siècles futurs, et nous verrons que cet instant est un éclair semblable à la secousse qui déplace les montagnes, et les fait rentrer dans les entrailles de la terre, pour offrir à ses habitants un nouveau sol plus ferme et désormais sans danger. M. le comte de la Tour du Pin a présenté au comité une très-belle organisation d’armée; mais ses bases sont les mêmes que celles de l’an dernier, et nous sommes à dix siècles de l’an dernier. Cette armée doit être de 150,000 hommes, et M. de la Tour du Pin avoue qu’au premier bruit de guerre il faut pouvoir amalgamer à cette armée 120,000 hommes de milices. C’est là le nœud gordien, et l’on peut bien dire que cette difficulté n’est pas vaincue. Rien n’est plus aisé sans doute que de composer dans le silence du cabinet une force militaire de300,000hommes, à choisir sur 24 millions de sujets; toutes les convenances du plan proposé sont très-estimables et faciles à saisir ; mais, il y a une furieuse distance de la formation du plan à l’exécution, et c’est en cela qu’il me paraît problématique. 1° Les provinces souffriront-elles dans leur sein des recruteurs de tous les régiments, de tous les pays, qui chercheront à abuser de l’effervescence des passions des jeunes gens, pour les enlever de force ou par ruse à leurs parents? 2° Les provinces souffriront-elles qu’une armée de 150,000 hommes, qu’elles soudoyent pour la défense de leurs propriétés, n’étant composée que de gens sans aveu, sans domicile fixe, aveuglément dévoués à la main qui les conduit, puisse à tout ÿistant envahir la plus chère de leur propriété, lù. liberté publique. 3° Les provinces souffriront-elles que dans toutes les places fermées, des régiments étrangers à l’intérêt du pays usurpent l’autorité municipale; et sous le prétexte de la conservation de la place, vexent arbitrairement les bourgeois? Je sais qu’on m’opposera l’obligation que les troupes contracteront d’exécuter les lois nouvelles; mais les lois ne peuvent prévoir tous les cas, et il est bien facile d’en abuser quand on a la force en main, et peut-être le consentement tacite de l’autorité; 4° Les provinces souffriront-elles que pour 612 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] la commodité des entrepreneurs de vivres, de fourrages, l’argent qu’elles payent pour la solde des troupes soit consommé hors de leur sein, tandis qu’elles mauquent elles-mêmes de consommateurs, et par conséquent de ce qui nourrit l’agriculture, reproduit les denrées et les moyens d’acquitter les impôts? 5° En supposant tous ces obstacles levés, nous n’avons rien de fait, car le plus difficile du problème reste à résoudre, c’est la composition des 100,000 hommes de milice, qui doivent, en cas de guerre, recruter l’armée. Je n’imagine pas qu’on veuille encore s’appesantir sur le moyen du tirage au sort ; cet impôt désastreux doit être relégué dans la classe de la taille, de la gabelle et de la corvée. 11 faut donc une conscription. Mais le mode de cette conscription sera ou l’abus le plus condamnable du pouvoir arbitraire, ou l’acte du patriotisme le plus éclairé. S’il existe encore une trace de privilège, un moyen quelconque de *se soustraire à la charge de citoyen, si l’on n’inscrit sur les registres que le nombre d’individus nécessaires au recrutement de l’armée en cas de guerre, si ces hommes soumis à une autorité purement militaire, en temps de paix, sans armes, sans défense, ne sont qu’un troupeau dévoué aux volontés des ministres, les bons citoyens n’ont plus qu a déserter la France, pour y renvoyer ces fugitifs, agents de l’oppression, que le cri de leur conscience en avait éloignés; car le retour aux anciens principes ne tarderait pas à se tenter; et je crois qu’il ne peut s’effectuer aujourd’hui sans un déchirement cruel et incommensurable. Il faut donc une conscription vraiment nationale, qui comprenne la seconde tête de l’empire et le dernier citoyen actif. Mais alors comment incorporer cette milice avec notre armée? Si cette armée n’est pas citoyenne, si elle n’est pas purgée de tous les vices qui l’on infectée jusqu’ici, est-il un patriotisme qui tienne à l’horreur de la corruption des mœurs? est-il un père de famille qui ne frémisse d’abandonner son fils, non aux hasards de la guerre, mais au milieu d’une foule de brigands inconnus, mille fois plus dangereux? Si on m’oppose la dicipline, je répondrai que c’est un motif de plus de terreur ; des songes funestes me présenteront sans cesse mon fils enchaîné par son inexpérience et des fausses suggestions, périssant de la main du bourreau, et dès lors plus de repos pour moi. Ah! Messieurs, levez ces obstacles et vous soulagerez mon cœur : il restera cependant encore à vaincre la défiance d’une nation que le souvenir de ses maux passés, la présence de l’appareil militaire, et l’abus le plus léger d’autorité peuvent en un instant porter à commettre les plus grands désordres. C’est d’après de si hautes considérations que je prie M. le comte de la Tour du Pin, ainsi que le comité militaire de peser dans leur sagesse les bases d’organisation que je prends la liberté de leur soumettre. Je dis qu’en France tout citoyen doit être soldat, et tout soldat doit être citoyen, ou nous n’aurons jamais de constitution. 11 n’en résulte pas que nous devons arracher, sans cesse, aux travaux de l’agriculture ou du commerce, ni aux autres fonctions utiles que ce vaste empire offre à l’industrie, des bras essentiels : eh! à quoi servirait la liberté, si l’on tarissait les sources du bonheur? Mais je pense que l’état militaire français doit être divisé en trois parties, tellement organisées qu’elles puissent, sans effort, sans subir une trop grande métamorphose ne faire au besoin qu’un seul et même corps, n’ayant qu’un même esprit, également intéressé à se réunir sous l’étendard du patriotisme, aux ordres du chef de la nation. Ainsi, pour rendre la France respectable au dedans comme au dehors, je pense que nous devons présenter à ses ennemis un front de 150,000 hommes de troupes réglées, destinées à couvrir nos frontières et à se porter partout où l’exigera la défense ou l’attaque, combinées par le pouvoir exécutif suprême. Il faut placer en deuxième ligne dans ce tableau 150,000 hommes de milices provinciales, destinées à doubler l’armée active, dès que le besoin de l’Etat et les circonstances l’exigeront. Enfin je propose une troisième ligne de plus de 1,200,000 citoyens armés, prêts à défendre leurs foyers et leur liberté envers et contre tous. Pour former cette troisème ligne, tout homme en état de porter les armes, ayant droit d’électeur, père de famille ou célibataire, jeune ou vieux, sera inscrit au rôle de sa municipalité : il aura son fusil, son sabre et sa giberne, mais sans activité, sur la foi des traités et la protection de la loi. Voilà ce que j’appelle la garde nationale con-stitutionelle, ou le véritable sceau de la loi. Les milices provinciales seront composées de tous les citoyens actifs de chaque département, célibataires, depuis 18 jusqu’à 40 ans; ceux-ci seront enregistrées sous des chefs choisis par la garde nationale, et aux ordres immédiats de leur municipalité ou canton. Il n’existera pour eux aucun autre engagement : ils seront libres de prendre parti dans les troupes de ligne, de changer même de province suivant leur intérêt; mais tant qu’un homme n’aura pas 40 ans, ou qu’il ne sera pas établi, il ne pourra, s’il est sur les lieux, se soustraire au service qui lui sera commandé. Ces milices, dans les villes s’assembleront toutes les semaines une fois en été, pour exercer en commun : elles seront chargées de la police, du bon ordre et de veiller à la tranquillité des citoyens; enfin elles seront destinées à compléter l’armée à raison du besoin, des circonstances, à tour de rôle, et à commencer par les vieux. Les milices des villages ne seront qu’agrégées à celle du chef-lieu de leur canton, mais il y aura dans chaque village six hommes choisis tous les ans pour prêter main-forte à la police. Et je crois qu’avec cette composition il y aura peu besoin de maréchaussée, surtout si l’on enrégimente les pionniers, et qu’on leur confie la police des routes. Enfin les 150,000 hommes de troupes réglées seront recrutés par engagement volontaire, sur toutes les classes de citoyens ; mais chaque régiment affecté à une province ne pourra être composé en officiers ou soldats que d’individus domiciliés dans cette province ; et j’insiste d’autant plus particulièrement sur ce principe, que je le regarde comme la hase précieuse d’une excellente organisation, d’une confraternité nécessaire à la liberté publique, et de l’amalgame simple et facile à établir au premier bruit de guerre entre les troupes de ligne et les milices provinciales de chaque canton. Je crois me rappeler quelques observations très-importantes du mémoire de M. le comte de la Tour du Pin, et j’ai beaucoup de regret de n’en avoir pas pris de notes. Par ce régime, est-il dit, nous n’avons plus d’armée, plus d’unité d’exécution, les provinces résisteront plus aisément à la volonté générale, elles refuseront de marcher pour secourir une autre province, trop éloignée pour que le feu de [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. la guerre puisse les atteindre ; par caprice, elles résisteront au souverain, se croiront fortes des troupes qui, par ce nouveau régime, seront toujours à leurs ordres, en cas d’insurrection, et nécessiteront des expéditions sanglantes pour les réduire à l’obéissance. Le soldat deviendra mutin, indiscipliné ; l’officier négligera sa troupe et son métier, pour s’occuper de ses intérêts (1), les recrues ordinaires, dans certaines provinces, enlèveront des bras utiles au commerce et à l’agriculture, tandis qu’elles laisseront dans d’autres des hommes oisifs, qui seront obligés de s’aller vendre à l’étranger; enfin l’établissement des milices nationales actives peut exciter des troubles locaux, qui se propagent et finissent par incendier le royaume. Pour répondre à toutes ces objections, il faudrait entrer dans de grands détails, et je sens combien il est avantageux pour moi d’abréger. Je dirai donc que pour opérer un si grand changement, il n’est pas nécessaire de détruire l’armée , mais simplement d’appliquer à chaque régiment le nom d’un département, et de commencer à n’y recevoir que des officiers et soldats domiciliés dans ce département. L’unité d’exécution tient à l’unité de principes, et la France en donne en ce moment un assez bel exemple. Gomment imaginer qu’à l’avenir, lorsque tous les droits, tous les intérêts seront communs, une province veuille s’isoler et faire exception ; la loi qui est l’expression de la volonté générale, qui ne lèse aucun intérêt particulier, parce que tous y sont librement soumis, et profitent également de sa protection, inspire aux peuples le respect qu’on porte à la Divinité. Ce sentiment d’ailleurs est renforcé par celui de la reconnaissance, et lorsqu’on a fait une loi pour son bien-être, y obéir est un devoir, et jamais un devoir pénible. Prenons garde que l’abus du pouvoir est souvent mis à la place de l’autorité légitime, et que pour en éviter la secousse , il faut se mettre en mesure de n’en avoir rien à craindre. Je conviens que les troupes seront peut-être un peu moins marionnettes, que les pompons seront négligés : mais l’homme sera mieux soigné, mais l’espèce sera régénérée, mais les mœurs plus pures exigeront une discipline moins sévère; et je me flatte qu’il ne sera pas rare de trouver des soldats dignes d’être officiers. Les pertes de la guerre sont un malheur inséparable de ce fléau, mais celui qui a fait dignement son métier, laisse toujours à ses parents un motif de consolation. Lorsqu’un régiment aura été trop fatigué, on le fera sortir de la ligne : il est du devoir du pouvoir exécutif de n’être pas prodigue du -sang que ses sujets offrent si généreusement au salut de la patrie. Le chapitre des recrues ordinaires ne me paraît pas plus embarrassant; j’ai entendu comparer l’Alsace au pays d’Auch, et j’ai seulement vu que l’Alsacien plus paresseux ou moins industrieux, préférait le métier des armes à tont autre. Pour bien juger cette question, il faut éprouver quelque temps la révolution que fera dans les esprits, la constitution : elle doit avoir une grande influence sur l'agriculture, sur le commerce et sur l’esprit militaire. Le pis-aller sera de recruter en Alsace de préférence, soit notre artillerie, soit nos troupes légères, dont la composition ne peut être la même que celle des troupes dites nationales. (1) Il arrive à la guerre que des régiments sont plus exposés que d’autres au feu de l’ennemi, il y en a qui sont écrasés, et cet événement peut dépeupler une province. [15 décembre 1789.] 0| 3 Et ce moyen absorbera le superflu de la population de ces cantons privilégiés par la nature. Enfin, les milices nationales, dit-on, peuvent exciter des troubles. C’est une hypothèse, moi, je ne vois à leur composition qu’un moyen d’ordre et d’équilibre, que le germe du vrai patriotisme, l’usage habituel de l’obéissance, et le respect pour tout ce qui doit être sacré à des cœurs français. Je suis donc d’avis qu’avant de s’occuper de détails relatifs à l’organisation de l’armée, le comité militaire devrait proposer à l’Assemblée les bases suivantes ; Art. lvr. Que tout homme ayant droit d’électeur et en état de porter les armes, sera inscrit au rôle de sa municipalité comme garde national, et que le Roi sera supplié d’aviser aux moyens de pourvoir incessamment chaque citoyen des armes nécessaires à sa défense, sur la demaude et aux frais de chaque département. Art. 2. Que toute homme libre ayant droit d’électeur, âgé de 18 à 40 ans, sera inscrit dans un 2e registre, comme faisant partie de l’armée active et plus particulièrement destiné que la milice nationale à repousser les ennemis de l’Etat. Article 3. Qu’en conséquence de ce principe, il soit incessamment proposé à l’Assemblée par le comité un plan d’organisation des ces milices provinciales, actives, destinées à maintenir l’ordre public en temps de paix, et à doubler l’armée en temps de guerre. Art. 4. Que les conventions et traités faits avec les Suisses et Grisous seront respectés, que la nation les approuve, et que le Roi sera supplié de les renouveler au besoin. Art. 5. Qu’excepté les bataillons légers, toute l’infanterie française sera divisée en régiments nationaux, dont chacun sera attaché à un ou deux départements, et emportera le nom. Art. 6. Que les officiers et soldats de chacun de ces régiments ne pourront être choisis que dans les départements dont le régiment portera le nom. Art. 7. Que la composition de la cavalerie sera renouvelée sur les mêmes principes que l’infanterie. Art. 8. Que les régiments nationaux, soit en cavalerie, soit en infanterie, ne pourront, eu temps de paix , être en quartier à plus de 30 lieues du chef-lieu de leur département. Art. 9. Que cette base étant adoptée, le comité fixera l’emplacement de chaque corps, de toutes les armes, de concert avec une député de chaque département. Art. 10. Que le sort des soldats et celui des officiers sera fixé par des ordonnances primaires et constitutionnelles, d’une manière indépendante du caprice et de la légèreté des supérieurs. Art. 11. Que les lois militaires qui régiront l’armée, seront déterminées et arrêtées par F Assemblée. Art. 12. Qu’aussitôt après que le travail du comité aura été agréé de l’Assemblée et du pouvoir exécutif, lecture en sera faite dans chaque quartier aux troupes actuellement en activité et le serment exigé. Art. 13. Qu’il sera demandé à chaque individu, s’il désire s’incorporer au régiment du département dans lequel il est né, ou s’il enteud rester attaché au département dans lequel il se trouve. Art. 14. Que la même proposition sera faite aux officiers et bas officiers, pour être remplacés dans le même grade ou un meilleur, s’il y a lieu. Art. 15. Que les agents du pouvoir exécutif 614 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [IC décembre 1789.] seront tenus de prendre toutes les précautions nécessaires pour que ces changements amiables puissent s’opérer librement et sans danger pour la chose publique. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. FRÉTEAU DE SA1NT-JUST. Séance du mercredi 16 décembre 1789 (1). M. lïamel-HTogaret, à l’ouverture de la séance rend compte d’un trait de patriotisme qui mérite les applaudissements de l’Assemblée. Le 2 de ce mois, 90 sacs de blé avaient été pillés au bourg de Pénautier. La milice nationale de Carcassonne s’est transportée au lieu du délit et a fait rentrer les attroupés dans le devoir. On a proclamé contre eux la loi martiale, mais on n’a point été obligé de la mettre à exécution: la manière prudente dont la garde nationale s’est conduite à fait rentrer tout te monde dans le devoir et l’ordre sans coup férir. M. Brostaret annonce que les officiers municipaux et la garde nationale de Montolieu ont porté le même secours, pour le même motif de pillage de grains, le 30 novembre dernier, à la municipalité de Saissac. L’Assemblée autorise M. le président à témoigner sa satisfaction à ces différentes municipalités et gardes nationales. M. Talon, lieutenant civil et suppléant de M. le baron de Montboissier, député de Chartres, est admis à le remplacer, ses pouvoirs ayant été trouvés en bonne forme par le comité des vérifications. Un de MM. les secrétaires donne ensuite lecture des adresses suivantes : Adresse des prébendiers de l’église collégiale de Carcassonne, qui exprime d’une manière énergique les sentiments de respect, de reconnaissance et de dévouement dont ils sont pénétrés pour l’Assemblée nationale. Ils dénoncent les chanoines de la collégiale comme coupables de despotisme et d’une négligence blâmable sur les intérêts de la mense capitulaire, et demandent qu’il soit fait une apposition de scellés sur les papiers, livres, journaux et argent déposés chez le syndic du chapitre. Adresse de la garde nationale de la ville de Tarbes, capitale du Bigorre, contenant félicitations, remerciements, et adhésion à tous les décrets de l’Assemblée nationale, promesse de les faire exécuter, et ratification de la renonciation à tous les privilèges delà province. Elle demande à être un chef-lieu de département. Adresse du même genre, de la communauté de Begole en Bigorre: elle désire que l’Assemblée nationale fasse en sorte de procurer des armes à chaque citoyen actif, pour garantir l’exécution des nouvelles lois constitutionnelles. Adresse du même genre de la ville de Goray en Bretagne : elle demande une justice royale. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. Adresse du même genre de la ville de Lan-vollon en Bretagne : elle demande une justice royale. Adresse du même genre de la ville de Bourg-Argental en Forez : elle fait le don patriotique de tout reversement de supplément d’impôtde la présente année sur les ci-devant privilégiés, et demande la conservation du monastère des religieuses usurlines, établi dans cette ville. Adresse du même genre de la ville de Mon-contour en Bretagne: elle demandela conservation de son siège royal, et d’être un chef-lieu de district. Adresse des officiers de la garde nationale de Chauny, du même genre : ils jurent de maintenir au péril de leur vie, l’exécution des décrets de l’Assemblée nationale, et la supplient de conserver à cette ville son bailliage royal. Adresse du même genre des officiers de la maîtrise particulière des eaux et forêts de la même ville de Ghauny : ils font le serment d’exécuter et de faire exécuter, en tout ce qui les concerne, les décrets de l’Assemblée nationale, quoique, jusqu’à présent, ils n’en aient encore reçu aucun, pas même celui relatif à la procédure criminelle, ni celui pour la conservation des bois ecclésiastiques. Ils présentent à l’Assemblée un mémoire sur les forêts situées dans le ressort de Ja maîtrise de l’Ile-de-France, pour aider le comité des domaines et bois dans son travail sur cette matière. Adresse du même genre des habitants de Bourg de Lurey en Bourbonnais : il font part des difficultés qu’ils éprouvent relativement à la manière de répartir l’imposition sur les ci-devant privilégiés; ils demandent le siège d’une nouvelle assemblée de district. Adresse des religieuses ursulines de Sainte-Marie-d’Oloron en Béarn, qui témoignent leurs inquiétudes sur le changement de leur état, et leur désir de continuer un genre de vie qu’elles ont choisi librement, et qu’elles justifient par les précautions dont elles ont fait précéder leurs engagements. Elles ajoutent que leurs biens n’offrent rien à la spéculation, puisque les remboursements des capitaux dont elles sont chargées pour faire acquitter certaines fondations pieuses, et assurer des pensions viagères, égalera ou surpassera même le capital de leurs biens, tant meubles qu’immeubles. Elles demandent enfm à mourir dans leurs saintes habitudes. Extrait des registres de délibérations et adresses de la ville d’Oloron, qui renouvelle son adhésion à tous les décrets de l’Assemblée nationale, l’abandon qu’elle a fait de ses droits, exemptions et privilèges communs et individuels ; donne aux pouvoirs de ses députés toute l’extension nécessaire, et réclame tout le bien dont elle est susceptible, et qui ne préjudicierait à aucun autre lieu. M. Villoutreïx de Faye, évêque d'Oloron , au sujet des adresses de la ville d’Oloron, et des religieuses de Sainte-Marie, sollicite, avec instance,. l’Assemblée de vouloir bien prendre ces différents objets en considération. Il demande qu’en attendant que les décrets de l’Assemblée nationale, concernant la dotation de 1,200 livres au moins pour Jes curés, et de 600 livres pour les vicaires, puissent recevoir leur exécution, ces ministres de l’Église entrent, provisoirement et à commencer du l3r janvier prochain, en jouissance de l’augmentation de leur portion congrue, telle qu’elle a été réglée par la déclaration