Séance du 28 vendémiaire an III (dimanche 19 octobre 1794) Présidence de CAMBACÉRÈS 1 La séance est ouverte à onze heures. Au nom du comité des Dépêches, un membre fait lecture de la correspondance. Les membres composant le conseil-général de la commune d’Abbeville “, ceux composant le conseil-général de la commune de Provins b, les citoyens composant les sociétés populaires d’Hazebrouck c, de Guîtres d, de Nemours e, de Gisors f, de Gouraay g et de Plauzat h, félicitent la Convention sur la journée du 9 thermidor, et sur les principes développés dans son Adresse au Peuple français; ils ne reconnoissent point d’autre centre d’union, d’autre point de ralliement que la Convention nationale ; ils protestent de leur inviolable attachement pour elle; ils ne reconnoissent plus ni prêtres ni nobles; tous ceux qui ont sincèrement abjuré des erreurs mensongères, des préjugés d’une naissance fantastique, sont leurs frères; ils promettent de surveiller les in-trigans et les hypocrites, et de ne recon-noître que la loi, la justice, la Convention et les autorités constituées. La Convention décrète mention honorable de ces adresses, et leur insertion au bulletin (1). a [Les membres du conseil général de la commune d’Abbeville, département de la Somme, aux représentants du peuple français en Convention nationale, du 24 vendémiaire an III] (2) Législateurs, Nous avons lu à nos concitoyens votre adresse au peuple français; ils ont applaudi aux principes de sagesse et de fermeté qui l’ont dicté. (1) P. V., XLVII, 253. (2) C 321, pl. 1348, p. 15. Depuis que le règne de la justice a chassé la terreur, nous nous sentons renaître à la liberté. Son feu sacré que les nouveaux tyrans avoient tenté d’éteindre, s’est ranimé subitement pour briller d’un nouvel éclat. La faction que vous venez d’anéantir avoit, il est vrai, moins vexé notre département que bien d’autres ; ses émissaires n’avoient pu parvenir à troubler notre tranquilité; mais nos coeurs pouvoient-ils être insensibles aux malheurs de nos frères ; les cris des innocentes victimes égorgées dans un département voisin, retentissoient à nos oreilles, leur sang rejaillisoit sur nous. C’en étoit fait de la france, elle alloit être effacée du livre des nations; la mort hideuse assise sur les débris de la république avoit promené son sceptre sanglant sur la tête des hommes libres ; et le vaste tombeau qu’elle avoit creusé ne se seroit refermé qu’après avoir englouti nos fidèles représentants. Mais vous veilliez sur les destinées du peuple. Tous à coup vous saisites la massue nationale, et le colosse monstrueux qui vous me-naçoit, tomba réduit en poussière. Votre défaitte eût jetté la patrie dans le deuil. Votre triomphe a rempli de joie les amis de la Répubhque. Mais le combat n’est pas fini; les restes impurs du reptile s’agittent encore quoique séparés du tronc : achevez de les écraser ; que tout s’abaisse devant la majesté du Peuple; que tout pouvoir s’incline devant celui de ses représentants. La dignité nationale réside en vous ; ne souffrez pas qu’elle soit outragée, déclarez la guerre à tous les ennemis de la révolution, quelque soit le masque dont ils se couvrent; poursuivez les royalistes cachés comme ces prétendus patriotes qui ne respirent que le sang. Faites dégorger ces avides sangsues qui s’engraissent depuis longtems de notre substance. Gouvernez avec justice et fermeté. C’est de votre fermeté surtout que dépend le salut de l’Etat. Tout Paris s’empresse de vous porter l’hommage de son dévouement et de son adhésion à vos principes; l’orage est dissipé; le calme va renaître dans l’intérieur et la coalition désabusée, perdant l’espoir de nous diviser, viendra poser les armes devant le berceau de la République et nous demander humblement la paix.