224 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 juin 1790.] (L’article 30 est ensuite décrété sans changement.) M. Martineau lit les articles 31, 32 et 33 qui n’éprouvent aucune contestation et sont adoptés en ces termes : « Art. 31. La proclamation des élus sera faite par le président du corps électoral dans l’église principale, avant la messe solennelle, qui sera célébrée à cet effet, et en présence du peuple et du clergé. « Art. 32. Pour être éligible à une cure, il sera nécessaire d’avoir rempli les fonctions de vicaire dans une paroisse ou dans un hôpital, et autre maison de charité du diocèse, au moins pendant cinq ans. « Art. 33. Les curés dont les paroisses auront été supprimées, en exécution du présent décret, pourront être élus encore qu’ils n’eussent pas cinq années d’exercice dans le diocèse. » M. Martineau lit l’article 34 en ces termes : « Pourront aussi êtres élus tous ceux qui ont été ci-dessus déclarés éligibles aux évêchés. » M. le chevalier de Mursnais.il existe un point sur lequel votre sollicitude doit s’appesantir : c’est Insubordination demeurés à l’égard des vicairesdu diocèse, c’est l’obéissance des curés aux évêques diocésains: il faut qu’ils leur soient subordonnés pour ce qui regarde la bonne conduite. Ce que vous avez décrété pour les soldats envers leurs officiers, il faut le décréter aussi pour les curés envers les évêques : c’est pour cela que je vous propose d’arrêter « que les évêques auront le droit de nommer aux différents degrés de cure, et que les proportions aux bénéfices plus ou moins lucratifs leur seront absolument dévolues ». M. Garat, Vaînè. Quand une fois vous avez décrété un principe constitutionnel, quelle que soit mon opinion particulière, je m’y soumets avec respect. Vous avez décrété que les curés seraient choisis par voie d’élection, ce principe est indéfini ; il détruit la distinction des cures plus ou moins lucratives; c’est pourquoi je demande la question préalable sur la proposition de M. le chevalier de Murinais. ' M. l’abbé Gassendi. Remplir son devoir n’était pas, sous l’ancien régime, un titre pour être récompensé : une foule d’ecclésiastiques respecta-tables ont été ensevelis dans les campagnes, où ils se livraient à toute l’austérité de leur ministère. Si vous leur donnez soixante mille concurrents pour l’élection aux cures, ils risqueront beaucoup de n’être pas placés. Je demande donc, pour leur donner une espèce de préférence, que les ecclésiastiques qui n’auront pas servi dans les paroisses ne puissent être élus aux curesqu’après dix années de sacerdoce. M. Goupil de Préfeln. Ils n’auront plus à redouter les grades, les courses ambitieu ses en cour de Rome : ainsi ils n’aüront plus à se plaindre. M. Martineau modifie la rédaction de l’article qui est adopté ainsi qu’il suit : « Art. 34. Seront pareillement éligibles aux cures tous ceux qui ont été ci-dessus déclarés éligibles aux évêchés, pourvu qu’ils aient aussi cinq années d’execcice. » M. Martineau fait lecture des articles 35 à 43 quisonta doptés, sans discussion, ainsi qu’il suit: « Art. 35. Celui qui aura été proclamé élu à une cure se présentera en personne à l’évêque avee le procès-verbal de son élection et proclamation, à l’effet d’obtenir de lui l’institution canonique. « Art. 36. L’évêque aura la faculté d’examiner l’élu, en présence de son conseil, sur sa doctrine et ses mœurs; s’il le juge capable, il lui donnera l’institution canonique; s’il croit devoir la lui refuser, les causes de son refus seront données par écrit, signées de l’évêque et de son conseil, sauf aux parties leur recours à la puissance civile, ainsi qu’il sera dit ci-après. « Art. 37. En examinant J’élu qui lui demandera l’institution canonique, l’évêque ne pourra exiger de lui d’autre serment, sinon qu’il fait profession de la religion catholique, apostolique et romaine. •> Art. 38. Les curés élus et institués prêteront le même serment que les évêques, dans leur église, un jour de dimanche, avant la messe paroissiale, en présence des officiers municipaux du lieu, du peuple et du clergé: jusque-là ils ne pourront faire aucune fonction curiale. « Art. 39. Il y aura, tant dans l’église cathédrale que dans chaque église paroissiale, un registre particulier sur lequel le greffier-secrétaire de ia municipalité du lieu écrira sans frais le procès-verbal de la protestation du serment de l’évêque ou du curé, et il n’y aura pas d’autre acte de prise de possession que le procès-verbal. « Art. 40. Les évêchés et les cures seront réputés vacants jusqu’à ce que les élus aient prêté le serment ci-dessus mentionné. « Art. 41. Pendant la vacance du siège épiscopal, le premier, et à son défaut, le second vicaire de l’églisecathédrale remplacera l’évêque, tan t pour les fonctions curiales que pour les actes de juridiction qui n’exigent pas le caractère épiscopal ; mais en tout il sera tenu de se conduire par les avis du conseil. « Art. 42. Pendant la vacance d’une cure, l'administration de la paroisœ sera confiée au premier vicaire, sauf à y établir uo vicaire de plus, si la municipalité le requiert ; et dans le cas où il n’y aurait pas de vicaire dans la paroisse, il sera établi un desservant par l’évêque. » M. Martineau lit les articles 43 et 44. « Art. 43. Chaque curé aura le droit de choisir ses vicaires, mais il ne pourra fixer son choix que sur des prêtres ordonnés pour le diocèse, ou admis dans le diocèse par i’évêque. « Art. 44. Aucun curé ne pourra révoquer ses vicaires que pour des causes légitimes, jugées telles par l’évêque et son conseil. » M. Camus. Je demande qu’on retranche du premier de ces deux articles : ou admis dans le diocèse par V évêque. (U s'élève beaucoup de murmures dans la partie gauche ). M. le chevalier de Murinais. Il faut faire donner l’approbation par le procureur-syndic du département. M. Camus. Les prêtres parmi lesquels choisira le curé doivent être pris dans le diocèse et en faire partie. J’insiste sur mon amendement. Il est certain que les pouvoirs du saint ministère sont conférés par l’ordination, et que l’ordination, une fois reçue, toute autre approbation est inutile [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 juin 1790.] (Il s’élève de nouveaux murmures dans la partie droite) ; il faut donc qu’on ne sache ni pour quelle cause, ni pour quelle somme les évêques en France ont demandé et obtenu la faculté de donner des approbations ; et quand on se permet de tels murmures, on ne prévoit pas jusqu’où l’on peut être poussé. Pendant quinze siècles, il n’a point été question de l’approbation ; ce n’est qu’au seizième siècle qu’on a voulu soumettre les prêtres à des épreuves. En imposant les mains, l’évêque ordonne au prêtre de remplir ses devoirs : ces devoirs consistent à prêcher, à confesser, et on lui retient les pouvoirs nécessaires pour les remplir. Des moines mendiants avaient des privilèges pour faire toutes les fonctions du saint ministère au préjudice des légitimes pasteurs : il n’v avait d’autre moyen, pour réformer cet abus, que de rendre ces privilèges commus à tous les prêtres ; on ne le prit pas au concile de Trente. On imagina les approbations ; le texte du concile porte ces mots : Sacerdotes etiam regulares ; mais on dit qu’il y a des textes où le mot etiam ne se trouve pas. Ainsi, d’après ce concile même, les approbations ne porteraient, que sur les prêtres réguliers. En effet, c’étaient des moines qui avaient donné lieu à la disposition du concile. Ce n’est point ainsi que cette disposition a été interprétée. Le Concile de Trente n’est point en usage en France ; mais on a trouvé cette discipline commode, et l’on a voulu l’introduire dans le royaume. Quelques événements arrivés à Agen ont été le premier prétexte qu’on ait saisi pour y parvenir. Le conseil du roi décida que les ecclésiastiques ne pourraient prêcher dans un diocèse sans le consentement de l’évêque. Un autre arrêt du conseil étendit ensuite un peu cette disposition : enfin, en 1695, un édit défendit à tous les prêtres séculiers et réguliers de prêcher sans le consentement de leur évêque, auquel cette loi donnait la faculté de limiter les pouvoirs, soit pour tel lieu, soit pour tel temps et de les suspendre à volonté, sans être obligé de dire les causes de son refus, sauf l’appel comme d’abus. On voit assez combien cet édit est absurde dans ses principes et dans ses détails. Comment l’a-t-on obtenu? Il est dit, dans le procès-verbal de l’assemblée du clergé de 1695, qu’il fut accordé un subside considérable. On ne dit pas, à la vérité, que ce fut pour obtenir l’édit, mais les circonstances peuvent le faire présumer. Cet édit fut d’abord envoyé au parlement de Paris, et contre l’usage, qui était que ces envois se fissent à tous les parlements par le garde des sceaux, le procès-verbal porte que le clergé fera faire les expéditions, et qu’après l’apposition du sceau, il se chargera de faire parvenir l’édit aux parlements. Il était naturel qu’une loi ainsi achetée produisît de mauvais effets : je ne les rappellerai pas, parce qu’ils ne sont que trop connus. Elle doit être anéantie, cette loi si absurde, si contraire à la religion : il faut donc parler dans l’article proposé des prêtres incorporés dans le diocèse, et ne passe servir du mot approbation. M. l’abbé Colson. Il est incontestable que, par l’ordination, le prêtre reçoit le droit d’exercer les fonctions sacrées, mais elle ne désigne pas les sujets sur lesquels il exercera ses pouvoirs. Autrefois, l’ordination n’était donnée que pour remplir tel emploi, le prêtre avait en même temps une juridiction. En admettant l’article, il y aurait autant d’évêques que de curés : on détruirait la lr« Série. T. XVI. m hiérarchie ecclésiastique, que nous ne pouvons anéantir sans cesser d’être catholiques. M. l’abbé Grégoire. Un prêtre est ordonné ; il reçoit, par l’ordination, le pouvoir radical. Il lui faut une juridiction ; c’est le curé qui la lui donne. M. l’abbé Dlllon. Il y aurait un grand inconvénient à ce que le curé pût renvoyer son vicaire, ou le vicaire quitter son curé sans cause légitime. Je demande qu’on fasse à ce sujet un article additionnel. (Après une légère discussion, l’Assemblée décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur cette proposition.) M. l’abbé Mougms de Roquefort. Il paraîtrait nécessaire de faire un article sur les permutations, ou que du moins il fût statué sur les conditions auxquelles un curé pourrait quitter sa cure, si des raisons de santé ou des circonstances particulières la rendaient inhabitable. (Cette observation est renvoyée au comité ecclésiastique.) M. le Président met aux voix les articles 43 et 44, présentés par le comité. Us sont adoptés. M. Sacher de La Pallières, député de Cou-tances, demande et obtient un congé de quinze jours. M. le garde des sceaux envoie à l’Assemblée une note de l’acceptation ou de la sanction du roi sur les décrets de l’Assemblée. Le roi a accepté ou sanctionné : 1° Le décret de l’Assemblée nationale, du 28 mai, portant que la levée des matelots sera faite provisoirement comme par le passé; 2° Le décret du 8 de ce mois, portant que les anciens officiers municipaux de la ville de Saint-Jean-de-Luz convoqueront l’assemblée des citoyens actifs de cette ville pour la nomination d’une nouvelle municipalité ; et que les armes enlevées de l’hôtel de ville y seront incessamment restituées ; 3° Le décret du même jour, portant que per-sonpe ne pourra avoir un commandement de gardes nationales dans plus d’un département ; 4° Le décret du même jour, relatif aux piastres et sommes d’or et d’argent arrêtées à Châtillon, le 8 mars dernier; 5° Le décret du même jour, qui déclare nulle l’élection de la municipalité de Schelestadt, faite le 27 janvier et jours suivants ; ordonne qu’il sera procédé à la formation d’une nouvelle municipalité, et déclare l’emprisonnement des sieurs Ambruster et Flichs illégal et vexatoire ; 6° Le décret, des 8 et 9 de ce mois, sur la fédération générale du royaume ; 7° Et enfin Sa Majesté a donné des ordres pour l’excution du décret du 9, relatif à la conduite des grenadiers et fusiliers des régiments de Beauce, Normandie, et des canonniers-matelots du corps de la marine ; à l’exécution provisoire des anciennes ordonnances de police et militaires, et au maintien de l’harmonie et de l’union entre les différents corps qui composent la garnison de Brest. M. le garde de sceaux a fait faire dans ces trois derniers décrets les changements et addi-15