178 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE teindre de sang le sol entier des français, pour semer partout l’épouvante et l’effroi et qui sem-bloit ne vouloir régner qu’au milieu des tombeaux et du carnage; cet événement ne nous permet plus une adhésion intérieure. A la vue de ce règne de vertu que vous avez substitué à ce règne de sang qui désoloit tous les départemens, de ce règne de justice qui attire à vos dignes collègues actuellement en mission les bénédictions d’un peuple bon et sensible, notre langue se délie et nos coeurs brûlent de s’épancher. Dignes représentans que n’avez vous pu être témoin des allarmes mutuelles qui ont si cruellement agité les meilleurs citoyens! Vous eussiez vu dans le silence respectable des nuits les époux arrachés des bras de leurs tendres et tremblantes compagnes, les pères arrachés à leurs familles désolées et fondant en larmes pour être plongés dans d’affreuses maisons d’arrêt ; vous eussiez vu la tristesse et la consternation peintes sur tous les visages. L’air n’étoit plus frappé que de gémissemens et les poumons resserrés ne le respiroient qu’avec peine. Vos coeurs paternels et sensibles auroient-ils résisté à ce spectacle douloureux? Non, vos coeurs déchirés, vos coeurs qui ne sont animés que du désir d’établir d’une manière constante et durable le bonheur et la prospérité du grand peuple dont vous êtes les mandataires se fussent hâtés d’arrêter le cours de ces scènes sinistres qui ont fait couler tant de larmes. Citoyens représentans, l’exécrable auteur de tant de maux, Robespierre n’est plus; mais n’a voit-il point de complices? et s’il en avoit sont-ils bien tous punis ! le sol de la république est-il entièrement purgé de tous ces vils intri-gans qui à la faveur du nom glorieux de patriote méditoient dans le secret la perte de tous ceux qu’ils croyoient capables de contrarier leurs horribles complots? Que serviroit la mort du chef si ses serviles suppôts respiroient toujours? Tallien a été assassiné, par qui? Quel monstre a mis le poignard à la main de ces scélérats? ils n’osent se montrer les perfides, ils craignent moins la mort que de faire découvrir leur infâme parti, les traîtres ! est-ce à Tallien seul qu’ils en vouloient? non sans doute, ils vou-loient perdre la Convention entière et nous ne pouvons la venger; voilà notre douleur. Ne pensez pas cependant, citoyens représentans, qu’en appelant sur eux votre sollicitude nous veuillons détourner votre surveillance des autres ennemis de la chose publique : loin de nous cette criminelle intention. Maintenez le gouvernement révolutionnaire ; il est la sauvegarde du vrai patriote et n’est redoutable qu’au méchant. Citoyens représentans, nous vous renouvelions notre attachement, il sera inviobable et c’est en jurant vous le conserver juqu’au tombeau que nous voulons consacrer nos noms. Nous vous invitons à rester à votre poste; c’est vous qui avez abattu le tyran, c’est vous qui avez fondé le gouvernement républicain, c’est vous qui rendez nos armées triomphantes, achevez votre glorieuse carrière. Vive la Convention nationale. Salut et fraternité. Suivent dix signatures. c [La société populaire de l’Isle d’Aix à la Convention nationale, du 1er vendémiaire an 7/7] (4) Citoyens représentans, La société républicaine de l’Isle d’Aix a été frapée d’indignation lorsqu’elle a appris l’orrible conjuration tramée par Robespierre et ses complices, mais elle a vu avec la plus grande admiration l’énergie que les représentans du Peuple français ont montré dans ce moment de crise, dont dépendoit le salut de la République, et la fermeté avec laquelle ils ont prononcé l’arrêt de mort de tous les conjurés. Continuez représentans à écraser du haut de la Montagne sainte tous ceux que l’ambition porteroit à envahir les droits sacrés du Peuple, pour le remettre sous le joug de l’affreux despotisme. Quand à nous, nous vous jurons toujours fidélité et attachement, nous ne voulons recon-noitre que la Convention nationale. Nous promettons n’obéir qu’à ces décrets, et de mourir à notre poste. Les membres du comité de correspondance, suivent sept signatures. d [La société populaire de Léognan à la Convention nationale, du 5ème jour s.-c. an 77] (5) Législateurs, Le silence exprime de grands sentimens. Nos adresses n’ont pas interrompu vos sublimes travaux, mais nous vous contemplons avec confiance et respect. Nous ne vous demandons pas si vous voulés sauver la République, si vous le pouvés; depuis longtemps nous connaissons votre volonté, et le 9 thermidor nous a montré votre pouvoir. Nous ne vous disons pas que le patriotisme est opprimé dans nos campagnes, parce qu’un patriote préferre l’amour à l’oppression. Mais nous vous dirons : courage législateurs, soyés inflexibles comme la justice, et l’aristocratie rongera le frein ; consultés l’indulgence pour l’homme égaré, et tous les patriotes seront rendus à la Patrie ; comprimés les intrigans de toute espèce, et les français ne douterons plus si le pouvoir suprême est essentiellement dans vos mains. Nous ne connaissons d’autres décisions que vos décrets, d’autre au-(4) C 322, pl. 1354, p. 18. (5) C 322, pl. 1354, p. 19, reçue le 15 vendémiaire. SÉANCE DU 25 VENDÉMIAIRE AN III (16 OCTOBRE 1794) - N08 2-3 179 thorité que la vôtre : notre bonheur dépend de vous, notre gloire est votre ouvrage. Exempts d’intrigues, l’influence du bien agit seule sur nous, nous le ferons sans ostentation. Depuis longtems nous avons dédié un temple à la raison; le patriotisme en fait l’ornement, la morale est notre culte. Dans les fêtes nationales nous dotons les filles, nous récompensons à la vertu : plusieurs citoyens ont distrait de l’héritage de leurs pères des terres et des logemens pour en former l’héritage du pauvre. Trois familles nombreuses entrent aujourd’huy en possession, et la fête de la récompense sera chés nous aussi mémorable qu’auguste. Législateurs, voilà nos sentimens, voilà nos travaux; ils n’appartiennent qu’à des républicains. Robin, président, Gassio fils, Marbaudon, secrétaires. e [La société populaire de Saint-Sauveur à la Convention nationale, du 14 vendémiaire an III\ (6) Représentans du Peuple, Le gouvernement révolutionnaire peut seul consolider la République et conduire la Révolution à son terme, mais, législateurs, continués à le rendre puissant pour le bien, et impuissant pour le mal. Nous ne voyons que la patrie, nous avons toujours été décidés à travailler à la sauver ou à périr avec elle. Le patriotisme triomphe ici, jusqu’à ce moment l’aristocratie a été sans influence. Votre énergie cimente journellement la république; malgré vos intentions paternelles, quelques patriotes ont pu être les victimes des intrigans, hâtez vous de les tirer du joug qui peut les opprimer, si vous en avez la moindre connaissance. Nous n’avons reconnu et ne reconnaitrons jamais d’autre point de ralliement que la Convention, elle seulle peut être notre appui et notre centre ; Nous regardons comme ennemis du peuple tous ceux qui voudroient se placer entre lui et ses mandataires pour lesquels notre reconnaissance sera immortelle. Faites disparoitre, législateurs, ceux qui ne veulent point, ceux qui n’ont jamais voulu sincèrement l’égalité et la liberté. Les membres du comité de correspondance Pichesson, président, Robineau, secrétaire et deux autres signatures. (6) C 322, pl. 1354, p. 21. Bull., 26 vend.; C. Eg., n" 792; M. U., XLIV, 424. f La société populaire de Moyaux, département du Calvados, écrit à la Convention nationale : la liberté, l’égalité, la République une et indivisible, attachement à la représentation nationale, obéissance à ses décrets ; voilà notre cri : le gouvernement révolutionnaire jusqu’à la paix, sa marche éclairée par l’humanité, dirigée par la justice, la liberté illimitée de la presse ; voilà notre voeu. Législateurs, faites rentrer dans le néant tous ces fripons, tous ces dilapidateurs qui insultent au peuple par un luxe scandaleux ; frappez de concert les continuateurs de l’exécrable Robespierre, qui, pour se soustraire à la vengeance nationale, tentent de perpétuer le règne de la terreur et de corrompre l’esprit public. Posez la félicité publique sur des bases inébranlables ; c’est ainsi que vous arriverez à la gloire immortelle qui vous attend (7). 2 La société populaire de la Montagne-de-la-Drôme [?], avertit que plusieurs conspirateurs et émigrés, sortis des maisons d’arrêt, lèvent une tête altière, insultent aux patriotes et ourdissent des trâmes contre la liberté. Elle invite la Convention à se mettre à l’abri de la trop grande indulgence et de l’excessive sévérité, et elle propose diverses mesures. La Convention renvoie cette adresse au comité de Sûreté générale, ainsi que celle des membres de la société populaire de Grignol [pour Grignan, Drôme?], qui se plaignent de ce que l’on calomnie les jacobins et les sociétés populaires, de ce qu’on veut les éloigner de la Convention, et de ce que le modérantisme menace d’anéantir la liberté publique (8). 3 Les membres du comité révolutionnaire de Gannat instruisent la Convention des calomnies répandues contre les patriotes de leur district par les aristocrates, et ils demandent qu’un représentant du peuple soit envoyé dans le département de l’Ailier. La Convention renvoie cette demande aux comités de Salut public et de Sûreté générale (9). (7) Bull. , 26 vend, (suppl.) ; Ann. Patr. , n“ 657 ; M. U., XLV, 441. (8) P. V., XL VII, 190. (9) P. V., XLVII, 191.