SÉANCE DU 25 THERMIDOR AN II (12 AOÛT 1794) - N° 51 545 pale défense de Trêves, était occupée par les Autrichiens. Des Autrichiens sur la montagne ! Cette idée révoltait les soldats de la liberté. Au milieu d’une grêle de balles, de boulets et d’obus, les cris de vive la montagne ! vive la Convention nationale ! vive la République ! se sont fait entendre; la charge a sonné : les redoutes ont été emportées de vive force à la baïonnette; l’ennemi a fui après avoir laissé sur la place 5 à 600 morts, beaucoup de blessés et 80 prisonniers. Près de 30 républicains ont payé leur dette à la patrie dans cette action; nous avons aussi quelques blessés. Le lendemain de ces différentes expéditions, toutes les colonnes se sont avancées, précédées par la terreur. Elles se sont développées dans un instant sur un espace immense; et ce mouvement a été si rapide et si bien combiné qu’en moins de 2 heures Trêves a été cernée de toutes parts. A 3 heures après midi nous y sommes entrés avec une des colonnes. L’ennemi l’avait déjà évacuée en désordre, pour se retirer, ainsi que les émigrés, les moines, les prêtres, les religieuses et tous les gros messieurs, à Co-blentz. Une garde bourgeoise, dont nous allons prendre toutes les armes, était toute sa force. Les officiers civils, le bourgmestre à la tête, sont venus en grand costume nous apporter les clefs de la ville, en nous félicitant de nos succès, et nous dire qu’ils étaient bien aises de nous voir. L’armée est restée sur les hauteurs qui commandent Trêves, et garde ses positions; par ce moyen nous sommes maîtres des deux rivières de Sarre et Moselle, et d’une grande partie de l’électorat de Trêves, pays riche, abondant, vraie vache à lait de la République française. Nous ne pouvons pas encore vous donner connaissance de tout ce que l’ennemi nous aura laissé à Trêves, en magasins. On est occupé, en ce moment, à dresser un inventaire de chaque objet, et nous vous le ferons passer aussitôt qu’il sera confectionné. Cent mille rations de pain seront fournies demain par la ville pour alimenter l’armée, et ainsi de suite. J’espère qu’elle trouvera ici une grande partie de ses subsistances. La Moselle, la Sarre, les bateaux nombreux qui sont dans le port serviront bien les évacuations de tout ce qui embarrasse ce pays, et dont la République a besoin. Je vais, en attendant mon collègue Goujon, qui est à l’armée du Rhin, m’occuper sur-le-champ d’un nouveau mode de contribution à établir dans l’électorat. Je pense que 3 à 4 millions en numéraire, dans un pays riche et abondant, pourront, dans 48 heures, être payés à la République facilement. C’est agir modérément sans doute. Honneur et gloire mille fois à tous les braves qui composent l’armée de la Moselle ! On ne peut fait distinction d’aucun corps, quand tous se sont montrés avec cette audace et cette énergie qui caractérisent les hommes libres. Des traits de bravoure ont bien pu signaler quelques individus; mais je m’occuperai du soin de vous transmettre leurs noms quand ils m’auront été fournis; je me bornerai à vous assurer en ce moment que les généraux et les soldats ont développé autant de zèle que de courage dans cette expédition, dont le succès a beaucoup dépendu des sages combinaisons du général en chef Moreau. Vive à jamais la République ! Salut et fraternité. Bourbotte. P.S. Je vous envoie les clefs de la ville de Trêves. Je me réunis en ce moment à mon collègue, ainsi que nous en étions convenus, pour concerter la suite des opérations des armées. Signé Goujon (1). Ces nouvelles sont entendues avec le plus vif intérêt. Le rapporteur termine par le projet de décret suivant, que la Convention adopte. La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de BARÈRE, au nom ] du comité de salut public, décrète : Art. 1er. L’armée de la Moselle ne cesse de bien mériter de la République. Art. II. L’adresse de l’armée de Sam-bre-et-Meuse sera insérée au Bulletin, avec mention honorable dans le procès-verbal; elle sera envoyée aux armées et aux dépar-temens (2). [ Applaudissements redoublés ]. 51 Le �rapporteur du comité de salut public [BARÈRE] donne l’état des emplois vacans dans l’armée, et qui sont à la nomination de la Convention (3). BARÈRE : Voici l’état des emplois vacants dans l’armée, à la connaissance du comité de salut public, du 20 thermidor, et qui sont à la nomination de la convention : 12e bataillon d’Angers, un chef de bataillon; 10e régiment de dragons, un capitaine, un lieutenant, un sous-lieutenant; 5e régiment de chasseurs, un sous-lieutenant. Votre comité de salut public vous propose les nominations suivantes : (4) La Convention nationale, sur la proposition du comité de salut public, nomme aux emplois vacans dans l’armée, et qui sont à son choix, les citoyens ci-après : 1) A la place du chef du 12e bataillon d’Angers, Latis, capitaine des grenadiers au 16e régiment. Il s’est jeté le premier dans les bateaux, au passage du détroit du Cacische le 10 thermidor, lors de la prise de Pile de Cadzand. (1) Moniteur (réimpr.), XXI, 481-483; Débats, nu691, 436-438, n° 692, 448-450, 452. (2) P.-V, XLIII, 199-200. Rapport de Barère. Décret n° 10 386. Reproduit dans Bm, 25 therm.; Moniteur (réimpr.), XXI, 483; J. Paris, n°590; J.Fr., nos 687, 688; F.S.P., nos 404, 405; Ann. R.F., nos 253, 254; Rép., nos 236, 237; Audit, nat., n° 688; J. Sablier, nos 1495, 1496; Ann. patr., nos DLXXXIX, DLXC; J. univ., n° 1724; M.U., XLII, 416; J. Perlet, n° 689; C. uniu., n° 955; J. Mont., n° 105; C. Eg., n° 724; J. S. -Culottes, n° 544. (3) P.-V., XLIII, 200. (4) Moniteur (réimpr.), XXI, 483. 35 SÉANCE DU 25 THERMIDOR AN II (12 AOÛT 1794) - N° 51 545 pale défense de Trêves, était occupée par les Autrichiens. Des Autrichiens sur la montagne ! Cette idée révoltait les soldats de la liberté. Au milieu d’une grêle de balles, de boulets et d’obus, les cris de vive la montagne ! vive la Convention nationale ! vive la République ! se sont fait entendre; la charge a sonné : les redoutes ont été emportées de vive force à la baïonnette; l’ennemi a fui après avoir laissé sur la place 5 à 600 morts, beaucoup de blessés et 80 prisonniers. Près de 30 républicains ont payé leur dette à la patrie dans cette action; nous avons aussi quelques blessés. Le lendemain de ces différentes expéditions, toutes les colonnes se sont avancées, précédées par la terreur. Elles se sont développées dans un instant sur un espace immense; et ce mouvement a été si rapide et si bien combiné qu’en moins de 2 heures Trêves a été cernée de toutes parts. A 3 heures après midi nous y sommes entrés avec une des colonnes. L’ennemi l’avait déjà évacuée en désordre, pour se retirer, ainsi que les émigrés, les moines, les prêtres, les religieuses et tous les gros messieurs, à Co-blentz. Une garde bourgeoise, dont nous allons prendre toutes les armes, était toute sa force. Les officiers civils, le bourgmestre à la tête, sont venus en grand costume nous apporter les clefs de la ville, en nous félicitant de nos succès, et nous dire qu’ils étaient bien aises de nous voir. L’armée est restée sur les hauteurs qui commandent Trêves, et garde ses positions; par ce moyen nous sommes maîtres des deux rivières de Sarre et Moselle, et d’une grande partie de l’électorat de Trêves, pays riche, abondant, vraie vache à lait de la République française. Nous ne pouvons pas encore vous donner connaissance de tout ce que l’ennemi nous aura laissé à Trêves, en magasins. On est occupé, en ce moment, à dresser un inventaire de chaque objet, et nous vous le ferons passer aussitôt qu’il sera confectionné. Cent mille rations de pain seront fournies demain par la ville pour alimenter l’armée, et ainsi de suite. J’espère qu’elle trouvera ici une grande partie de ses subsistances. La Moselle, la Sarre, les bateaux nombreux qui sont dans le port serviront bien les évacuations de tout ce qui embarrasse ce pays, et dont la République a besoin. Je vais, en attendant mon collègue Goujon, qui est à l’armée du Rhin, m’occuper sur-le-champ d’un nouveau mode de contribution à établir dans l’électorat. Je pense que 3 à 4 millions en numéraire, dans un pays riche et abondant, pourront, dans 48 heures, être payés à la République facilement. C’est agir modérément sans doute. Honneur et gloire mille fois à tous les braves qui composent l’armée de la Moselle ! On ne peut fait distinction d’aucun corps, quand tous se sont montrés avec cette audace et cette énergie qui caractérisent les hommes libres. Des traits de bravoure ont bien pu signaler quelques individus; mais je m’occuperai du soin de vous transmettre leurs noms quand ils m’auront été fournis; je me bornerai à vous assurer en ce moment que les généraux et les soldats ont développé autant de zèle que de courage dans cette expédition, dont le succès a beaucoup dépendu des sages combinaisons du général en chef Moreau. Vive à jamais la République ! Salut et fraternité. Bourbotte. P.S. Je vous envoie les clefs de la ville de Trêves. Je me réunis en ce moment à mon collègue, ainsi que nous en étions convenus, pour concerter la suite des opérations des armées. Signé Goujon (1). Ces nouvelles sont entendues avec le plus vif intérêt. Le rapporteur termine par le projet de décret suivant, que la Convention adopte. La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de BARÈRE, au nom ] du comité de salut public, décrète : Art. 1er. L’armée de la Moselle ne cesse de bien mériter de la République. Art. II. L’adresse de l’armée de Sam-bre-et-Meuse sera insérée au Bulletin, avec mention honorable dans le procès-verbal; elle sera envoyée aux armées et aux dépar-temens (2). [ Applaudissements redoublés ]. 51 Le �rapporteur du comité de salut public [BARÈRE] donne l’état des emplois vacans dans l’armée, et qui sont à la nomination de la Convention (3). BARÈRE : Voici l’état des emplois vacants dans l’armée, à la connaissance du comité de salut public, du 20 thermidor, et qui sont à la nomination de la convention : 12e bataillon d’Angers, un chef de bataillon; 10e régiment de dragons, un capitaine, un lieutenant, un sous-lieutenant; 5e régiment de chasseurs, un sous-lieutenant. Votre comité de salut public vous propose les nominations suivantes : (4) La Convention nationale, sur la proposition du comité de salut public, nomme aux emplois vacans dans l’armée, et qui sont à son choix, les citoyens ci-après : 1) A la place du chef du 12e bataillon d’Angers, Latis, capitaine des grenadiers au 16e régiment. Il s’est jeté le premier dans les bateaux, au passage du détroit du Cacische le 10 thermidor, lors de la prise de Pile de Cadzand. (1) Moniteur (réimpr.), XXI, 481-483; Débats, nu691, 436-438, n° 692, 448-450, 452. (2) P.-V, XLIII, 199-200. Rapport de Barère. Décret n° 10 386. Reproduit dans Bm, 25 therm.; Moniteur (réimpr.), XXI, 483; J. Paris, n°590; J.Fr., nos 687, 688; F.S.P., nos 404, 405; Ann. R.F., nos 253, 254; Rép., nos 236, 237; Audit, nat., n° 688; J. Sablier, nos 1495, 1496; Ann. patr., nos DLXXXIX, DLXC; J. univ., n° 1724; M.U., XLII, 416; J. Perlet, n° 689; C. uniu., n° 955; J. Mont., n° 105; C. Eg., n° 724; J. S. -Culottes, n° 544. (3) P.-V., XLIII, 200. (4) Moniteur (réimpr.), XXI, 483. 35 546 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 2) A l’emploi de capitaine au 10e régiment de cavalerie, Bonnot, aide-de-camp du général Moreau. Il a conduit le premier bateau à la nage au passage du détroit du Cacische le 10 thermidor, lors de la prise de l’île de Cadzand. 3) A la lieutenance du même régiment, Boullé, sous-lieutenant et doyen du 7e régiment de dragons : cet officier chargeant seul 6 tirailleurs ennemis à Maconi, en sabra deux; les 4 autres feignirent de se rendre, mirent bas les armes, et s’approchèrent de Boullé qu’ils démontèrent : celui-ci se relève, en sabre deux autres, et un dragon qui accourt tue les 2 derniers. 4) A la sous-lieutenance du même régiment, Michel Manu, dragon au 17e régiment. Plusieurs actions attestent son courage. A l’affaire de Niederothenback, il tua un hussard ennemi, et emmena son cheval. A l’attaque de Weyersheim, il tua 4 fantassins du corps de Rohan, et reçut 2 coups de feu. La veille de la prise de Lauterbourg, il tua un hussard autrichien, prit son cheval, et arracha un dragon du 11e des mains des ennemis. A Frankendal, il prit un dragon ennemi et son cheval, retourna ensuite au combat, tomba sur un corps d’infanterie, le dispersa, et s’empara du cheval du commandant. 5) A la sous-lieutenance du 5e régiment de chasseurs, Charles-André Meda, gendarme de l’escadron des hommes du 14 juillet. Lors de l’expédition de la commune, dans la nuit du 9 au 10 thermidor, il est le premier qui ait fait feu sur les traîtres Couthon et Robespierre. Le présent décret sera inséré au bulletin (1). [Applaudissements] . 52 Un membre [OUDOT] entretient la Convention d’un acte de bravoure resté dans l’oubli, sans doute parce qu’il appartient à un sans -culotte et à un homme modeste, qui, quoique dans le plus pressant besoin, attendait, sans les solliciter, et avec patience, les bienfaits de la nation qui lui avoient été promis. Michel Cabieu, sergent des milices gardes-côtes de la compagnie de la commune d’Ouistreham, apprend, le 12 juillet 1762, qu’une escadre anglaise, mouillée à l’embouchure de la rivière de l’Orne, département du Calvados, avoit le dessein de brûler 15 vaisseaux français chargés de bois de construction, et que 50 soldats avoient débarqué sur la rive gauche de l’Orne. Cabieu se porte seul dans la nuit à l’entrée du village d’Egsterham, couvert par un canal de (1) P.V., XLIII, 200-201. Rapport de Barère. Décret nu 10 389. Reproduit dans B1", 25 therm.; Moniteur (réimpr.), XXI, 483; Débats, n°692, 451; F.S.P., n° 405; J. Paris, n° 590. Ann. R.F., n° 257. 30 pieds de largeur : le seul tambour de sa compagnie l’avoit suivi. Bientôt l’intrépide sergent apperçoit la troupe anglaise qui prolongeoit le canal; il s’avance à l’autre rive, fait feu sur les ennemis, gagne rapidement un autre poste, renouvelle son feu; il voit que les Anglais sondent le canal; alors il prend le ton imposant d’un commandant, ordonne à 100 hommes de sa troupe de tourner l’ennemi, et ensuite le feu de bataillon : cette ruse intimide l’ennemi, qui fuit et laisse quelques morts : ainsi Cabieu préserva du feu 15 vaisseaux français et son village (1). OUDOT : Citoyens, je vais vous entretenir d’un acte de bravoure qui a été connu de l’Assemblée constituante, et qu’elle avait promis de récompenser avec la générosité d’une grande nation. Mais cet acte de courage est resté dans l’oubli, sans doute parce qu’il appartient à un sans-culotte, et à un homme modeste, qui, quoique dans le plus pressant besoin, attendait sans les solliciter, et avec patience, les bienfaits de la nation qui lui avaient été promis. La Convention nationale entendra sans doute avec satisfaction le récit de cette action héroïque. J’ose dire qu’elle est aussi brillante que celle d’Horatius Codés, qui, seul, arrêta les ennemis de Rome sur le pont du Tibre. Le 12 juillet 1762, une escadre anglaise, mouillant à l’embouchure de la rivière de l’Orne, dans le Calvados, avec le dessein de détruire 15 vaisseaux français chargés de bois de construction, fit les préparatifs pour exécuter ses projets hostiles. Elle mit à terre, pendant la nuit, 2 détachements de soldats, pour protéger l’attaque que les chaloupes armées allaient entreprendre. Le détachement qui avait débarqué à la droite de la rivière surprit le poste qui veillait à la garde de la batterie, tua 7 soldats, en prit 16, mit les autres en fuite, et s’empara de la batterie. Cinquante soldats qui avaient débarqué à l’autre rive s’emparèrent aisément de la batterie, qui n’était gardée que par un matelot canonnier invalide et 7 vieillards qui eurent le bonheur d’échapper à la faveur de l’obscurité; mais, avant que d’abandonner leur poste, ils avaient tiré 2 coups de canon qui avaient mis en alarme les habitants du village d’Ouistreham, situé sur la rive gauche de l’Orne. Ce beau village, peuplé de pêcheurs intrépides, avait perdu presque tous ses habitants par la guerre; les uns avaient péri, les autres avaient été faits prisonniers. Mais tandis que les femmes et les enfants s’occupaient d’enlever leurs meubles et de cacher leurs bestiaux, Michel Cabieu, sergent des milices gardes des côtes de la compagnie d’Ouistreham, se porte seul à l’entrée du village, couvert par un canal de 30 pieds de largeur; le seul tambour de sa compagnie l’avait suivi; mais il ne tarda pas à le quitter pour aller prendre soin de sa famille et de ses effets. (1) P.-V., XLIII, 201-202. 546 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 2) A l’emploi de capitaine au 10e régiment de cavalerie, Bonnot, aide-de-camp du général Moreau. Il a conduit le premier bateau à la nage au passage du détroit du Cacische le 10 thermidor, lors de la prise de l’île de Cadzand. 3) A la lieutenance du même régiment, Boullé, sous-lieutenant et doyen du 7e régiment de dragons : cet officier chargeant seul 6 tirailleurs ennemis à Maconi, en sabra deux; les 4 autres feignirent de se rendre, mirent bas les armes, et s’approchèrent de Boullé qu’ils démontèrent : celui-ci se relève, en sabre deux autres, et un dragon qui accourt tue les 2 derniers. 4) A la sous-lieutenance du même régiment, Michel Manu, dragon au 17e régiment. Plusieurs actions attestent son courage. A l’affaire de Niederothenback, il tua un hussard ennemi, et emmena son cheval. A l’attaque de Weyersheim, il tua 4 fantassins du corps de Rohan, et reçut 2 coups de feu. La veille de la prise de Lauterbourg, il tua un hussard autrichien, prit son cheval, et arracha un dragon du 11e des mains des ennemis. A Frankendal, il prit un dragon ennemi et son cheval, retourna ensuite au combat, tomba sur un corps d’infanterie, le dispersa, et s’empara du cheval du commandant. 5) A la sous-lieutenance du 5e régiment de chasseurs, Charles-André Meda, gendarme de l’escadron des hommes du 14 juillet. Lors de l’expédition de la commune, dans la nuit du 9 au 10 thermidor, il est le premier qui ait fait feu sur les traîtres Couthon et Robespierre. Le présent décret sera inséré au bulletin (1). [Applaudissements] . 52 Un membre [OUDOT] entretient la Convention d’un acte de bravoure resté dans l’oubli, sans doute parce qu’il appartient à un sans -culotte et à un homme modeste, qui, quoique dans le plus pressant besoin, attendait, sans les solliciter, et avec patience, les bienfaits de la nation qui lui avoient été promis. Michel Cabieu, sergent des milices gardes-côtes de la compagnie de la commune d’Ouistreham, apprend, le 12 juillet 1762, qu’une escadre anglaise, mouillée à l’embouchure de la rivière de l’Orne, département du Calvados, avoit le dessein de brûler 15 vaisseaux français chargés de bois de construction, et que 50 soldats avoient débarqué sur la rive gauche de l’Orne. Cabieu se porte seul dans la nuit à l’entrée du village d’Egsterham, couvert par un canal de (1) P.V., XLIII, 200-201. Rapport de Barère. Décret nu 10 389. Reproduit dans B1", 25 therm.; Moniteur (réimpr.), XXI, 483; Débats, n°692, 451; F.S.P., n° 405; J. Paris, n° 590. Ann. R.F., n° 257. 30 pieds de largeur : le seul tambour de sa compagnie l’avoit suivi. Bientôt l’intrépide sergent apperçoit la troupe anglaise qui prolongeoit le canal; il s’avance à l’autre rive, fait feu sur les ennemis, gagne rapidement un autre poste, renouvelle son feu; il voit que les Anglais sondent le canal; alors il prend le ton imposant d’un commandant, ordonne à 100 hommes de sa troupe de tourner l’ennemi, et ensuite le feu de bataillon : cette ruse intimide l’ennemi, qui fuit et laisse quelques morts : ainsi Cabieu préserva du feu 15 vaisseaux français et son village (1). OUDOT : Citoyens, je vais vous entretenir d’un acte de bravoure qui a été connu de l’Assemblée constituante, et qu’elle avait promis de récompenser avec la générosité d’une grande nation. Mais cet acte de courage est resté dans l’oubli, sans doute parce qu’il appartient à un sans-culotte, et à un homme modeste, qui, quoique dans le plus pressant besoin, attendait sans les solliciter, et avec patience, les bienfaits de la nation qui lui avaient été promis. La Convention nationale entendra sans doute avec satisfaction le récit de cette action héroïque. J’ose dire qu’elle est aussi brillante que celle d’Horatius Codés, qui, seul, arrêta les ennemis de Rome sur le pont du Tibre. Le 12 juillet 1762, une escadre anglaise, mouillant à l’embouchure de la rivière de l’Orne, dans le Calvados, avec le dessein de détruire 15 vaisseaux français chargés de bois de construction, fit les préparatifs pour exécuter ses projets hostiles. Elle mit à terre, pendant la nuit, 2 détachements de soldats, pour protéger l’attaque que les chaloupes armées allaient entreprendre. Le détachement qui avait débarqué à la droite de la rivière surprit le poste qui veillait à la garde de la batterie, tua 7 soldats, en prit 16, mit les autres en fuite, et s’empara de la batterie. Cinquante soldats qui avaient débarqué à l’autre rive s’emparèrent aisément de la batterie, qui n’était gardée que par un matelot canonnier invalide et 7 vieillards qui eurent le bonheur d’échapper à la faveur de l’obscurité; mais, avant que d’abandonner leur poste, ils avaient tiré 2 coups de canon qui avaient mis en alarme les habitants du village d’Ouistreham, situé sur la rive gauche de l’Orne. Ce beau village, peuplé de pêcheurs intrépides, avait perdu presque tous ses habitants par la guerre; les uns avaient péri, les autres avaient été faits prisonniers. Mais tandis que les femmes et les enfants s’occupaient d’enlever leurs meubles et de cacher leurs bestiaux, Michel Cabieu, sergent des milices gardes des côtes de la compagnie d’Ouistreham, se porte seul à l’entrée du village, couvert par un canal de 30 pieds de largeur; le seul tambour de sa compagnie l’avait suivi; mais il ne tarda pas à le quitter pour aller prendre soin de sa famille et de ses effets. (1) P.-V., XLIII, 201-202.