[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 mars 1791.) 465 culture et de commerce, soient chargés de présenter à l’Assemblée un plan de législation sur les chemins. M. d’Estourinel . Je prie Monsieur le rapporteur d’énoncer ici si cette dénonciation est faite par le pouvoir exécutif. M. Lebrun. C’est une dénonciation du pouvoir exécutif. M. Démeunier. Il est étonnant que le comité des finances vienne proposer un pareil décret. Les routes sont une matière d’administration générale. Par vos décrets antérieurs, vous avez déclaré qu’aucun arrêté de directoire de département, en matière d’administration générale ne pourrait avoir son effet qu’avec l’approbation du roi. Voilà le point dont on ne peut se départir. Quant au parti que vous avez à prendre, il est constant que le comité des finances, celui des contributions publiques, les autres comités chargés de ce travail devraient s’empresser de fournir un mode par lequel on avisera aux réparations des chemins qui se dégradent dans ce moment-ci. Vous avez décrété, comme l’a dit M. Defermon, des sous additionnels qui remplaceront la corvée, qui fourniront aux fiais des départements. 11 n’y a donc pas lieu à délibérer sur ce décret. Je demande que dans le procès-verbal il soit dit que les actes du département eu matière de chemins conformément aux décrets, ne pouvant être exécutés qu’avec l’approbation du roi, on renvoie au pouvoir exécutif; que d’ailleurs on enjoigne aux comités de présenter incessamment leurs vues sur cet objet, et je demande ensuite qu’on passe à l’ordre du jour. M. de Liancourt. Je demande qu’on emploie tous les moyens possibles pour étendre à toutes les parties du royaume les avantages des communications. (L’Assemblée consultée, accorde la priorité à la motion de M. Démeunier.) Cette motion est décrétée, avec l’amendement de M. de Liancourt, dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, considérant que la corvée en nature étant déjà abolie, le pouvoir exécutif doit en empêcher le rétablissement; que d’ailleurs les délibérations des corps administratifs sur cette matière ne peuvent être exécutées sans son approbation, a renvoyé l’affaire au pouvoir exécutif. Elle a, au surplus, chargé ses comités des linances, des contributions publiques, et d’agriculture et de commerce, de lui présenter leurs vues sur la législation des chemins, et sur les moyens de faire profiter toutes les parties du royaume de la facilité des communications. » M. Lebrun, au nom du comité des finances, Messieurs, le moment des travaux dans les ponts et chaussées est arrivé; ces travaux n’oct pas même été interrompus pendant tout le cours de l’hiver. Vous n’avez pas encore ordonné la manière dont les départements feraient les fonds de cette dépense. Sur ce, le comité vous propose ce projet de décret : « Il sera avancé par le Trésor public une somme de 2 millions, pour être employée, soit au payement des ouvrages d’arts et d’entretien des routes, déjà faits cette année, soit au payement des appointements, salaires et frais de con-T. XXIV duite du quartier de janvier, sauf le remplacement sur les départements, pour les parties qui devront être à leur charge. » (Ce décret est adopté.) M. Lebrun, au nom du comité des finances. Messieurs, eu 1784, il a été ordonné, par un arrêt du conseil, qu’il serait fait dans la province du Nivernais un canal. Ce canal a été continué depuis le 1er janvier par les entrepreneurs, qui y ont employé 1,200 ouvriers. Cette entreprise consomme à peu près 50,000 livres par mois; comme elle a été faite sur le fond des domaines et bois, votre comité a pensé qu’elle devait être reportée sous la direction des ponts et chaussées et sous l’inspection du département de la Nièvre. Il vous propose le projet de décret suivant : « L’Assemblé nationale décrète : « Art. 1er., Il sera payé par le Trésor public la somme de 150,000 livres pour les travaux du canal du Nivernais, faits depuis le 1er janvier de la précédente année. » M. Regnaud (de Saint-Jean d'Angêlÿ). Je demande que l’Assemblée ne décide, rien sur la question avant de savoir au compte de qui seront ces dépenses. M. Lebrun, rapporteur. En ce cas, on peut mettre : » sauf le remplacement de cette somme sur le département de la Nièvre » et rédiger comme suit le décret : Art. 1er. « 11 sera payé par le Trésor public la somme de 150,000 livres pour les travaux du canal du Nivernais, faits depuis le 1er janvier de la présente année, sauf le remplacement de cette somme sur te département de la Nièvre, s’il y a lieu. Art. 2. « Lesdits travaux seront provisoirement continués sous la même réserve, sous l’inspection du département de la Nièvre et de la direction des ponts et chaussées. Art. 3. « Le directoire du département de la Nièvre et l’administration des ponts et chaussées, rendront, au plus tard dans deux mois, un compte raisonné de l’importance et de la situation de cette entreprise. » (Ce décret est adopté.) M. Defermon, au nom du comité des contributions publiques. Messieurs, j’ai à vous soumettre deux dispositions relativement à la contribution mobilière et à la contribution des patentes. Dans l’ordre que nous vous avons proposé pour la contribution mobilière nous ne pouvions rien décider que vous n’eussiez décrété les patentes; nous vous avons demandé, et vous avez décrété, que chaque citoyen, pour la formation du rôle de la contribution mobilière, serait tenu de faire une déclaration du montant du loyer de son habitation ; vous avez en même temps décrété, sur notre demande, que le montant du loyer des ateliers et magasins ne ferait pas partie de l’évaluation ni delà contribution fixée pour la cote d’habitation. Depuis le décret de la contribution mobilière, vous avez décrété que le droit de patente serait payé sur le montant des loyers, compris celui du I loyer des boutiques et magasins. D’après le dé-30 466 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 mars 1791.) cret des patentes, comparé à celui de la contribution mobilière, il nous a paru nécessaire de rectifier la déclaration, pour la contribution mobilière et de prescrire à celui qui fera sa déclaration, d’exprimer le montant du loyer complet qu’il tient, afin que l’on puisse avoir un objet de comparaison, lorsqu’il demandera sa patente. Voilà le motif des dispositions que je vais vous soumettre, elles n’ont pour but que de comparer les déclarations. Articles additionnels à la loi sur la contribution mobilière. Art. 1er. « Les personnes qui pour l’exercice de leur profession, occuperont des ateliers, chantiers, boutiques et magasins, seront tenues d’en déclarer la valeur locative, en même temps qu’elles feront la déclaration de la situation et valeur annuelle de leur habitation, ainsi qu’elle est prescrite par l’article 33 de la loi concernant la contribution mobilière. Les officiers municipaux, avec les commissaires adjoints, suppléeront ou rectifieront les déclarations prescrites par le présent article, quand il y aura lieu et ainsi qu’il est prescrit par l’article 34. Art. 2. « Nul ne pourra être admis à faire déduire de sa contribution mobilière la taxe proportionnelle à la valeur locative de ses ateliers, chantiers, boutiques et magasins, si la déclaration qu’il a dû faire de leur valeur locative pour obtenir sa patente, n’a été trouvée exacte. « Le présent décret sera porté dans le jour à l’acceptation. » (Adopté.) M. Germain. Les boutiques et magasins sont-ils compris dans le logement dont on donne l’évaluation? M. Defermon, rapporteur. On donne la valeur totale de ce qu’on occupe avec la distinction de ce qui est en magasin, pour que la municipalité puisse comparer, afin que si la déclaration se trouve fausse celui qui l’a faite soit privé de la déduction qu’il réclame. Il n’y a pas d’autre objet. M. Duport, au nom du comité de jurisprudence criminelle. Messieurs, on m’a dit hier qu’on avait mis à l’ordre du jour un rapport relativement à rétablissement des tribunaux criminels. Je suis fâché de vous commencer ce rapport par vous dénoncer une infidélité très importante qui s’est commise dans l’Assemblée : on a porté à la sanction du roi 4 ou 5 articles qui ont été extraits du travail sur l’institution des jurés et sur la loi criminelle, sans que personne n’en ait aucune connaissance, ni votre comité, ni le rapporteur, ni le président : personne n’a eu connaissance de ce travail, qu’il a plu à quelqu’un que je ne connais pas, que je ne veux pas connaître, d’extraire des 300 articles qui composent les jurés. Voici comment le fait est venu à ma connaissance : Plusieurs députés ont reçu de leurs départements lies demandes pour s*avoir s’il fallait procéder à la nomination des tribunaux criminels. Ces messieurs nous ont fait les mêmes demandes. J’ai répondu que, la loi n’étant pas sanctionnée, il me paraissait évident qu’elle n’avait pas encore le caractère authentique d’une loi et que l’on ne devait pas procéder à l’élection. Voilà quelle a été ma réponse lorsqu’il m’a été montré, par un de MM. les députés, la loi en forme exécutoire et sanctionnée. J’ai été sur-le-champ chez M. le garde des sceaux, lui demander s’il était vrai que l’on eut sanctionné cette loi, c’est-à-dire les 5 articles qui y sont renfermés; nous avons vérifié que celte loi était sanctionnée. Cela est la cause d’un grand embarras, et que, plusieurs départements ayant reçu la loi des mains du ministre de la justice, ont procédé à la nomination des membres du tribunal criminel; d’autres ne sachant pas s’ils devaient y procéder en ont écrit à des députés qui, sur la réponse que je leur ai faite dans l’ignorance où j’étais moi-même, ont répondu qu’il ne fallait pas y procéder. Un autre inconvénient, c’est que les qualités nécessaires pour être nommé à des tribunaux criminels ne sont pas même déterminées par vos décrets. Il en résulte que dans un département l’on a nommé un accusateur public qui n’a que 22 ans. Il s’agit de savoir quel parti l’Assemblée prendra relativement à cette circonstauce. Il yen a plusieurs à prendre : le premier serait d’ordonner le rassemblement des électeurs pour cet objet; l’autre parti serait de regarder les départements qui ont nommé comme ayant bien nommé, puisqu’ils ont agi au nom de la loi, et d’attendre, pour la nomination des autres, le moment où, comme il avait été convenu dans l’Assemblée, le comité de Constitution nous proposera le mode du rassemblement pour notre remplacement. Nous avons disculé les deux partis au comité de Constitution, et voici à quoi nous nous sommes arrêtés : c’est de ne rien faire, de laisser les élections faites, ou sur le point de se faire, pour bonnes, parce qu’elles sont la suite de la loi, et qu’elles sont faites régulièrement, et de différer les autres jusqu’à l’élection des membres de la nouvelle législature. M. tïe llontcsqniou. Il est nécessaire que l’Assemblée s’occupe des moyens d’empêcher une erreur pareille à celle qui vient d’être dénoncée. Il est impossible qu’il n’en arrive pas souvent de pareilles par le désordre qui règne dans les bureaux : on y remet très rarement les décrets qui sont rendus. Ensuite on n’en fait l’extrait et l’expédition qu’en raison des sollicitations du rapporteur, de sorte qu’on expédie souvent les décrets rendus dans le jour, tandis qu’il y en a depuis 15 jours qui ne le sont pas encore. Il faut donc nécessairement introduire de l’ordre dans ces bureaux. Je demande, en outre, que l’on ne vienne plus à la séance porter m--s expéditions à signer au président ou aux secrétaires, parce qu’il est impossible que dans le moment où ils travaillent à la rédaction des procès-verbaux, dans le moment où ils suivent les mouvements de l’Assemblée, ils puissent prêter aux expéditions qui leur sont soumises, toute l’attention qu’elles exigeraient. Je demande qu’il soit fait un règlement sur cette partie. M. Regnaml (de Saint-Jean d’Angêly). Je demande à observer à M. le rapporteur un fait qu’il n’a peut-être pas connu; c’est qu’il y a déjà sur ce point un décret de l’Assemblée nationale. Un département a écrit à l’Assemblée, en lui faisant part de la nomination d’un évêque, et d’un membre du tribunal criminel.