[8 mars 1791.] 733 ARCHIVAS PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] être nommé pour employés dans les nouvelles administrations des finances que des personnes qui justifieront avoir été précédemment employées au service de la nation dans les administrations dont la suppression et la réduction a été ou sera décrétée; le choix libre sera réservé aux nouveaux administrateurs entre tous lesdits employés. Art. 4. « Jusqu’à ce que les employés compris dans les états qui doivent être dressés en exécution du premier article aient été remplacés, ou qu’il ait été statué définitivement sur les secours qui leur seront accordés, ceux d’entre eux qui ne perçoivent pas au delà de la somme de 50 livres par mois d’appointements fixes continueront à être payés à compter du jour de leur suppression ou de leur réforme, soit ladite, somme de 50 livres, detouteautre somme inférieure qu’ils percevaient précédemment. « Ceux dont les appointements fixes excédaient la somme de 50 livres toucheront jusqu’à concurrence de ladite somme de 50 livres par chaque mois, le tout provisoirement sans tirer à conséquence pour l’avenir, et sans que lesdits payements puissent se prolonger au oelàdu 1er juillet sans un nouveau décret de l’Assemblée. Art. 5. « Les payements décrétés par le précédent article seront faits par les receveurs de districts, au moyen des fonds qui leur seront fournis par le Trésor public sur des états présentés par les ordonnateurs, chefs ou directeurs d’administration, visés par les districts et par les départements. Art. 6. « Le présent décret sera porté à la sanction dans le jour, et le roi sera supplié d’en ordonner l’exécution la plus prompte de la part de ses ministres et de celle de tous ordonnateurs, administrateurs ou régisseurs. » M. Bouche. Tout en rendant hommage aux vues de bienfaisance du comité, je trouve qu’il ne va pas assez loin. Je crois, Messieurs, et c’est une idée que j’ose vous soumettre, je crois qu’il serait à propos de donner un effet rétroactif à la la loi qu’on vous propose; autrement beaucoup de pères de famille, beaucoup d’honnêtes serviteurs dans les fermes générales — et certainement il y en avait — resteraient sans place, car dans tous les nouveaux établissements, on amis de côté tous les anciens commis, quoiqu’ils eussent des prétentions incontestables au remplacement. Je demande donc, Messieurs, qu’on donne à la loi un effet rétroactif qui remonte jusqu’à l’établissement des impôts, pour partir de cette époque et placer dans les branches diverses de la nouvelle administration tous les employés qui ont été déplacés, et qu’ils soient choisis préférablement à tous autres qui sont étrangers à l’an-cienne administration. M. Regnaud (de Saint-Jean-d’ Angély) . Deux raisons principales me font combattre l’amendement du préopinant. La première, c’est que la justice que l’on doit à des individus ne peut jamais justifier l’injustice commise envers d’autres. Les individus placés ont fait des dépenses dans leur nouveau poste ; leur installation leur a occasionné des frais ; vous ne pourriez donc les déplacer sans injustice. La seconde raison, c’est que le succès de l’établissement du contrôle dépend absolument des personnes qui sont préposées au recouvrement des droits dans des pays où ils sont inconnus et où l’emploi d’étrangers les rendrait peut-être intolérables. En Alsace, par exemple, l’adoption de la motion de M. Bouche causerait les plus grandes commotions. C’est par des employés du pays que les droits nouveaux se sont établis ; c’e-.t par le moyen de ces mêmes hommes qu’ils pourront être affermis. Les employés des différentes parties du royaume ne pourraient pas être envoyés en Alsace, car il faudrait qu’ils connussent la langue, et vous ne pouvez pas apprendre la langue à vos commis des aides en trois jours. Je désirerais que ce qu’on vous propose pût s’efïectuer; mais, comme cela est impossible, je demande la question préalable. M. Bouche. Ma motion n’est que provisoire; lorsqu’il sera question du définitif, je ferai connaître mon opinion. M. Martineau. Les observations de M. Re-gnaud sont très dignes de considération ; mais je ne pense pas qu’il faille mettre la question préalable sur la motion de M. Bouche. Je demande qu’elle soit renvoyée aux comités des finances et des pensions. Tout le monde est-il de cet avis ? Un grand nombre de membres : Oui ! oui ! (L’Assemblée décrète le renvoi de la motion de M. Bouche aux comités des finances et des pensions.) M. Prieur. Je demande la question préalable sur le projet du comité. M. Camus, rapporteur. Je crois que la dépense résultant du projet de décret sera considérable; car il peut y avoir 10 à 15,000 employés qui, au 1er avril ou au 1er mai, se trouveront sans aucun emploi. Toutes ces personnes, sans doute, ne méritent pas d’avoir 600 livres de pension par an, ni même, à titre de pension, les appointements inférieurs à la somme de 600 livres dont elles jouissaient; mais il n’est pas possible de réduire à la mendicité des personnes que vous supprimez et dont vous avez besoin encore pour des droits qu’ils reçoivent. (Le projet de décret du comité est décrété.) M. d’André. Messieurs, vous avez décrété au mois de janvier que la procédure commencée contre les personnes arrêtées à Aix et à Marseille serait continuée devant le tribunal d’Arles et cependant qu’il serait sursis à tout jugement. Il est résulté, à ce qu’on dit, de cette procédure qu’il n’y a pas de charges contre la plupart des accusés qui, en conséquence, ont présenté requête en élargissement provisoire devant le tribunal. Le tribunal a prétendu, nonobstant les conclusions du commissaire du roi, que le décret de l’Assemblée les empêchait d’élargir provisoirement. Il est important pour l’humanité que les tribunaux puissent élargir provisoirement ceux contre lesquels il n’y a pas de charges; il n’est pas juste que des hommes que J a calomnie a fait suspecter et arrêter dans un mouvement populaire, restent emprisonnés lorsqu’il n’y a aucune accusation contre eux. Je propose donc le décret suivant : 734 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 mars 1791.} <« L’Assemblée nationale déclare que, par le décret qui ordonne que les procédures prises à Aix, Marseille et Toulon, pour crimes de lèse-nation, lui seront envoyées, et que cependant il sera sursis à tout jugement, elle n’a pas entendu que les tribunaux (lussent refuser de statuer sur les requêtes des accusés, même sur les requêtes en élargissement provisoire. » (Ce décret est adopté.) M. l’abbé Gouttes. Messieurs, les commis avaient consenti à faire une caisse composée de sommes piises sur leurs appointements pour subvenir aux besoins de ceux d’entre eux que leur vieillesse ou leurs infirmités avaient mis hors de service. Ils se sont aperçus qu’on avait porté sur leur compte des personnes qui ne devaient pas y être. Ils vous demandent actuellement la permbsion de se pourvoir par devant les tribunaux pour se faire remettre les sommes. (L’Assemblée décrète l’ordre du jour.) M. l’abbé Gouttes. Je suis chargé également de vous faire le rapport de la pétition des invalides qui vous a été envoyée. Je n’ai pu prendre sur moi de vous donner mou avis là-dessus, parce que l’esprit est si fort monté, dans ces quartiers-là, que ces gens seraient capables de se lâcher contre celui qui leur aurait donné un conseil salutaire. (Rires.) (L’Assemblée passe à l’ordre du jour.) M. Merlin. J’ai demandé la parole pour présenter à l’Assemblée nationale J’ariêté du district de Bergues, département du Nord, qui parait mériter singulièrement l’attention de l’Assemblée. Pour avoir la clef de cet arrêté, il faut savoir que Bergues était ci-devaut dans le diocèse d’Ypres. Voici l’arrêté : « Le sieur Jean-Baptiste Legrand, curé de Saint-Martin-de-Bergues, s’est avisé de publier au prône, le dimanche 27 dudit mois de février, un mandement de l’évêque d’Ypres, pour le règlement du carême procbarn. La municipalité, ayant eu communication de cette publication, a résolu de faire appeler ledit sieur curé de Saint-Martin, pour prendre des informations à ce sujet; lequel ayant comparu a déclaré ne connaître, pour le présent, d’autre évêque diocésain que celui d’Ypres; que lui ayant demandé si l’évêque de Cambrai n’était point notre évêque diocésain, en conformité des décrets de l’As.- emblée nationale, il a fait réponse que l’Assemblée nationale ne pouvait pas nous donner d’évêque légitime, que son décret à cet égard était une loi abusive, et que ceux qui ne connaissent pas leur évêque légitime sont dans le schisme. « Considérant que les dispositions de l’article 4 du titre 1er du décret de l’Assemblée nationale du 12 juillet 1790, pour la constitution civile du clergé, sanctionné par le roi, par lequel il est défendu à toutes églises et paroisses de Fiance et à tous citoyens français, de reconnaître, dans aucun cas et sous quelque prétexte que ce soit, l’autorité d’un évêque ordinaire ou métropolitain dont le siège serait établi sous la nomination d’une puissance étrangère, ni celle de ses délégués résidant en France et ailleurs, le sieur curé de Saint-Martin a eu la coupable audace de publier le mandement fait à l’occasion du prochain carême par i'évêque d’Ypres, son ci-devant évêque, tandis que la loi lui ordonne de ne reconnaître pour son évêque que celui qui siège à Cambrai pour le département du Nord, dans l’étendue duquel se trouve la ville de Bergues; considérant que cette illégale publication n’a pu être faite qu’avec la plus criminelle intention d’ébranler b s bases tes (dus solides de notre admirable Constitution, et de transmettre dans l’esprit du peuple le mépris dont son auteur aveugle et insensé paraît être profondément pénétré, envers les lois qui ne tendent qu’à assurer l’exécution du dogme, à faire triompher la religion, et à opérer le bonheur et la gloire de l’Empire français: arrête que les dénonciations seront faites, tant à l’Assemblée nationale qu’au directoire du département, des faits dont ledit sieur curé est prévenu; en conséquence, que copie du procès-verbal ci-dessus sera envoyé à l’instant à M. le président de l’Assemblée nationale et au directoire du département du Nord, pour être pris en considération, et prononcé ce que de droit. » Messieurs, la nécessité de donner un grand exemple à cette partie de l'Empire dans laquelle le sieur curé de Bergues a trouvé beaucoup d’imitateurs et en trouvera encoie davantage si l’on n’y pourvoit promptement, impose à l’Assemblée le devoir de prendre de deux partis l’un, ou renvoyer à ses comités l’arrêté dont j’ai eu l’honneur de vous faire lecture, pour lui en être fait rapport incessamment, ou d’adopter un projet de décret tel que celui-ci : « L’Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu de l’arrêté pris par le diiectoire du district de Bergues, du 2 de ce mois, d’après le procès-verbal dressé par la municipalité de la même ville, le 28 février précédent, au sujet de la publication faite par le sieur Legrand, curé de la paroisse de Saint-Martin de ladite ville, d’un mandement de l’évêque d’Ypres, ci-devant diocésain du lieu ; « Décrète que le président se retirera dans le jour par devers le roi, pour prier Sa Maje>té de donner ordre au tribunal du district de Bergues, séant à Dunkerque, d’informer contre le sieur Legrand, pour le procès lui être fait, comme prévenu d’avoir1 troublé l’ordre public. « Décrète eu outre que le ministre de la justice sera tenu de rendre compte à l’Assemblée nationale, de huitaine en huitaine, de l’exécution du présent décret. » Plusieurs membres : C’est juste I Aux voix ! aux voix! (L’Assemblée adopte le décret.) M. Merlin. Les alarmes plus ou moins fondées qui se répandent sur les frontières m’obligent de vous présenter encore un autre projet de décret dont la seule lecture vous fera sentir la nécessité. Le voici : « L’Assemblée nationale décrète que le ministre de la guerre lui rendra compte, et que ses comités militaire, diplomatique et des recherches lui feront, dans la semaine, le rapport de la situation actuelle des fore-s militaires du royaume, de l’exécution qui a dû être donnée à ses décrets du 28 janvier dernier, ainsi que des mesures ultérieures qu’il pourrait y avoir lieu de prendre pour la défense de l’Etat. » (Ce décret est adopté.) M. Regnaud ( de Saint-Jean-d'Angèly). Je demande également qu’on ajoute à celte première disposition la disposition suivante : « L’Assemblée nationale décrète, en outre, que le ministre de la guerre iui rendra compte de l’état où se trouve l’organisation de la gendar-