61 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 janvier 1790.] altéré le sens d’un mot employé par M. de Grancé, et qui répandent des bruits contraires à la paix publique. M. Fréteau. Il ne suffit point de faire lire cette lettre à la tête de chaque corps, et je propose, par amendement, que dans la lettre qui serait écrite par M. le président, pour témoigner à tous les régiments de France l’estime particulière de l’Assemblée nationale, il les assure particulièrement que le membre de l’Assemblée, dont on s'est efforcé de rendre les opinions suspectes , a témoigné de la manière la plus authentique qu’il n’avait jamais cessé d’avoir pour tous ceux qui composent l’armée les mêmes sentiments d’estime que les représentants de la nation n’avaient jamais cessé un instant d’avoir pour eux. M. Muguet de Nantliou. Je propose, par forme d’amendement, qu’il soit fait mention, dans la lettre qui sera écrite à l’armée, du décret qui déclare « qu’aucun de ses membres ne peut ni ne doit être inquiété pour ses opinions.» Cet amendement n’est pas appuyé. M. le prince de Poix. Il est nécessaire que la lettre soit portée au roi, et que Sa Majesté soit suppliée de vouloir bien donner ses ordres, alin qu’il en soit fait lecture à tous les régiments. M. le’, vicomte de Mouilles. J’ajouterai à cette proposition, qu'il en soit fait en outre lecture dans chaque chambrée. La discussion est fermée. On va aux voix sur l’amendement de M. Fréteau, qui est rejeté. L’assemblée décrète que M. le président sera chargé d’écrire une lettre à tous les régiments de l’armée ; que cette lettre exprimera les sentiments de l’Assemblée nationale à son égard, et sera lue à la tête de chaque corps. M. le Président. J’annonce à l’Assemblée que le comité des finances a trois rapports à lui faire. M. Camus. Je n’ai point oublié que ma motion sur les pensions a été ajournée à ce matin, et je réclame qu’on s’en occupe avant d’entendre les rapports du comité des finances. Le peuple attend de nous une décision à cet égard. L’année 1790 est commencée; ne souffrons pas que la nation puisse imaginer que les abus contre lesquels elle s’élève depuis si longtemps subsisteront encore cette année comme par le passé. M. de Cazalcs. La motion de M. Camus a pour objet une amélioration dans une partie de l’administration des finances. Il me paraît impolitique de s’occuper d’une partie des finances avant d’avoir établi un système général, ou tout au moins le plan d’un système général pour les finances ; sans cette précaution, nous nous exposerions à travailler sans ordre, sans méthode, et peut-être à rendre très-difficile un travail qui deviendra simple lorsque la marche que vous voudrez adopter sera connue. Je réclame donc la priorité pour les rapports du comité des finances. M. Target. Je n’ai qu’une observation bien simple à faire : il me semble que Je préopinant vient de confondre un travail détaché, et cependant fixe, du système général des finances, avec une précaution simplement provisoire, et que les circonstances rendent urgente et indispensable. Je demande que si, dans les trois rapports proposés par le comité des finances, il en est un relatif aux pensions, celui-là seul soit fait, et qu’on passe ensuite à la motion de M. Camus. L’Assemblée décide qu’elle entendra la lecture du plan de travail du comité des finances. M. le marquis de Montesquiou monte à la tribune et donne lecture du rapport suivant : (Nota. — Le rapport de M. le marquis de Montesquiou, ayantété imprimé par avance, a été annexé à la séance du 16 novembre 1789. — Voy. Archives parlementaires, tome X, p. 70). M. le Président a ensuite annoncé qu’il avait présenté au roi le décret sur l’affaire de Belesme et celui relatif au péage perçu à File Barbe sur la Saône, près de Lyon. M. Se Président a rendu compte à l’Assemblée de la députation faite hier au Roi à l’occasion du renouvellement de l’année, et a donné lecture, du discours qu’il a prononcé, ainsi que de la réponse de Sa Majesté, tels qu’ils suivent l’un et l’autre. Discours de M. le président au Roi: Sire, cc L’Assemblée nationale vient offrir à Votre Majesté le tribut d’amour et de respect qu’elle lui offrira dans tous les temps. Le restaurateur de la liberté publique, le Roi qui, dans les circonstances difficiles, n’a écouté que son amour pour la fidèle nation dont il est le chef, mérite tous nos hommages, et nous les présentons avec un dévouement parfait. « Les sollicitudes paternelles de Votre Majesté auront un terme prochain : les représentants de la nation osent l’en assurer. Cette considération ajoute au zèle qu’ils mettent dans leurs travaux : pour se consoler des peines de leur longue carrière, ils songent à cet heureux jour où paraissant en corps devant un prince ami du peuple, ils lui présenteront un recueil de lois calculées pour son bonheur et pour celui de tous les Français; où leur tendresse respectueuse suppliera un Roi chéri d’oublier les désordres d’une époque orageuse, de ne plus se souvenir que de la prospérité et du contentement qu’il aura répandus sur le plus beau royaume de l’Europe; où Votre Majesté reconnaîtra par l’expérience, que sur le trône, ainsi que dans les rangs les plus obscurs. les mouvements d’un cœur généreux sont la source des véritables plaisirs. « Alors on connaîtra toute la loyauté des Français; alors on sera bien convaincu qu’ils abhorrent et savent réprimer la licence; qu’au moment où leur énergie a causé des alarmes, ils ne voulaient qu’affermir l’autorité légitime; et que si la liberté est devenue pour eux un bien nécessaire, ils la méritent par leur respect pour les lois et pour le vertueux monarque qui doit les maintenir. » Réponse du Roi. « Je suis fort sensible aux nouveaux témoignages d’affection que vous me présentez au nom de l’Assemblée nationale. Je ne veux que le bonheur de mes sujets, et j’espère, comme vous, que l’année que nous allons commencer sera pour toute la France une époque de bonheur et de prospérité. » La députation s’est ensuite rendue chez la reine, qui avait auprès d’elle Mgr le dauphin et