754 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [5 juillet 1791.] été la douleur de penser que dans cette Assemblée il ait pu s’élever des doutes sur le zèle et le patriotisme qui anime tous les membres de ce tribunal. Honorés d’avoir à rendre compte de nos opérations,� récit en sera court; mais il suffira pour dissiper tous les doutes, et pour montrer iusqu’à quel point a été porté notre zèle dans les importantes et honorables fonctions qui nous ont établi les gardiens et les vengeurs de la Constitution. Les membres du tribunal provisoire, établi depuis 3 mois, se sont trouvés tous réunis au jour indiqué par la loi. Quel a été leur étonnement! Ils n’ont trouvé ni prisons, ni accusés, ni procès. 6 semaines se sont écoulées dans cet état d’inaction forcé pour l’achèvement des prisons. C’est à partir de cette époque que 5 accusés ont été successivement, et dans le délai de 6 semaines, amenés dans les prisons. Ces 5 accusés, les seuls qui nous soient parvenus jusqu’à présent, fout matière de 3 procès. Le premier intéresse les sieurs Rique et Du-rivage, coaccusés du ci-devant évêque de Strasbourg. Ces accusés ont été écroués le 28 avril, interrogés le 29. La loi qui déclare qu’il y a lieu à accusation contre eux, seul titre que pouvait saisir le tribunal, ne lui est parvenu que le 18 mai, sur les demandes réitérées du tribunal. Le 20, a commencé l’instruction du procès qui, présentant une grande quantité de pièces écrites en langue allemande, a nécessité un jugement qui commet un interprète pour les traduire en langue française. Pendant l’intervalle de cette traduction sont arrivées, d’après les éclaircissements donnés par l’accusateur public, les pièces qui établissent deux procès faisant partie de celui du ci-devant évêque de Strasbourg. L’examen de ces nouvelles pièces a conduit le tribunal à la nécessité d’annuler un décret de prise de corps décerné, contre les accusés, ainsi que toutes les procédures qui s’en étaient suivies. Entin, depuis 4 ou 5 jours, la traduction des pièces allemandes est finie. L’accusateur public est en état de rendre sa plainte. Tel est le premier de ces 3 procès. Le deuxième concerne les sieurs Dufresney père et fils : ils ont été écroués le 16 mai, interrogés le 17. Le décret portant qu’il y a lieu à accusation est parvenu le 18, la transcription eu a été faite le 19 ; mais une nouvelle transcription en date du 27 mai est devenue indispensable par la réclamation du commissaire du roi, qui a soutenu la première nulle, en ce que l’autorisation du ministre de la justice avait été envoyée au tribunal par une erreur de bureau. Plainte de l’accusateur public du 11 juin, ordonnance du même jour, décret de prise de corps du 16; signification de ce décret le 22, interrogatoire subi les 24 et 25; ordonnance du 16 juin pour l’audition des témoins, exécutoire du 17, décerné au profit des témoins pour frayer à la dépense de leur voyage, vu leur éloignement et leur pauvreté. Audition des témoins fixée au 20, juillet et jours suivants; tel est encore Messieurs, l’état du second procès. A l’égard du troisième et dernier, qui concerne le sieur de Riol les, cet accusé a été écroué le 20 mai, interrogé les 20 et 30 mai. Les 13 et 22 juin, il a été écrit par l’accusateur public, par le tribunal et le rapporteur du procès pour avoir l’information du procès juridiquement fait à Vienne les 19 et 22 octobre. Cette information, dont nous avons l’honneur de rendre compte à l'Assemblée n’est point encore parvenue au tribunal. Tel est, Messieurs, le compte exact et fidèle des 3 seuls procès dont la haute cour a été à portée de prendre connaissance. Il vous appartient maintenant de juger si le tribunal a pu mettre plus de célérité dans ses opérations. Gréés par vous, Messieurs, pour maintenir la Constitution, c’est à vous de soutenir et d’encourager nos efforts contre les pièges qui nous seront continuellement tendus. Nous avons besoin d’une grande considération, et c’est en nous élevant à la hauteur de nos fonctions que nous pourrons suivre les grands exemples que vous offrez. Nous ne craindrons pas de le dire, Messieurs, et pourquoi tairions-nous une vérité utile; du sein de cetlte Assemblée ont été adressées aux accusés, déeuus dans nos prisons, des lettres peu respectueuses, injurieuses même pour l’As-semblée nationale et pour les membres du tribunal honoré de votre confiance, et ces lettres pleines de malveillance établissent des soupçons injurieux qui retournent à leurs auteurs. Nos ennemis ont beau s’agiter, notre courage sera inébranlable comme la Constitution; et nous osons protester devant cette auguste Assemblée, que, parmi les membres qui composent le tribunal de la haute cour nationale, il n’en est aucun qui, nouveau Romain dans le danger de la patrie, ne devienne de magistrat paisible un guerrier formidable. (Vifs applaudissements.) M. le Président répond : Messieurs, les vœux les plus chers de l’Assemblée ont été qu’il lui eût suffi d’inviter des hommes dignes de la liberté à se soumettre aux lois qui en assurent la jouissance. Il lui eût été doux sans doute de ne contraindre que par l’empire de la raison et de la justice; mais l’aveuglement obstiné des ennemis de la Constitution a forcé l’Assemblée nationale de remettre en vos mains le glaive de la loi, et c’est dans sa tendre soilicitude pour la sûreté de l’Etat, qu’elle vous a investis du saint et terrible devoir de juger ses ennemis. Les assurances que vous donnez à l’Assemblée nationale de votre zèle, de votre courage et de votre constance, vous concilieront la confiance de la nation. Pensez, Messieurs, que c’est d’elles principalement que dépendent l’ordre et la tranj-quillité publique. L’Assemblée nationale est satisfaite du compte que vous lui rendez de vos travaux et vous offre les honneurs de sa séance. (Applaudissements.) M. Lucas. Je fais la motion expresse que l’Assemblée nationale veuille bien ordonner que les lettres dont on vient de parler soient déposées sur le bureau pour être renvoyées au comité des recherches. Il est temps de connaître ceux qui veulent la paix et ceux qui veulent la troubler. (Applaudissements.) (La motion de M. Lucas est adoptée.) M. Malouet. On venge ainsi toutes les injures, excepté celles du roi. (Murmures.) L'orateur de la députation : Monsieur le Président, j’ai eu l’honneur d’observer à l’Assemblée que ces lettres n’étaient pas adressées à la haute cour, mais à des accusés détenus dans nos prisons : j’attends là-dessus les ordres de l’Assemblée. M. Malouet. Quelle morale ! quels principes 1