350 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 juillet 1790.] 16 du présent mois; la seconde comprendra les pensions rétablies par les articles 2, 3,4 et 5 du présent décret ; la troisième liste comprendra les secours établis par l’article 9; la quatrième liste comprendront les personnes dignes de récompenses établies par l’article 5 du décret du 10 de ce mois, et qui les auront préférées aux récompenses pécuniaires. Ces listes serontprésentées à l’Assemblée à l’effet d’être approuvées ou réformées, et le décret qui interviendra sera présenté à la sanction du roi. Art. 15. Lorsque le décret porté par l’Assemblée aura été sanctionné par le roi, lespensions compri-sesdansla première liste serontpayées sur le fonds qui y est destiné par l’article 14 du décret du 16 de ce mois. A l’égard des pensions et secours compris dans les seconde et troisième listes, il sera fait fonds par addition, entre les mains des personnes chargées du payement des pensions, du montant desdites listes. Chacune des années suivantes, le fonds de ces deux listes ne sera fourni que déduction faite des portions dont jouissaient les personnes qui seront décédées dans le cours de l’année précédente ; de manière que lesdits fonds diminuent chaque année graduellement, sans que, sous aucun prétexte, il y ail lieu au remplacement d’aucune des personnes qui auront été employées dans les seconde et troisième listes. Art. 16. Les quatre listes seront rendues publiques par la voie de l’impression, avec l’exposé sommaire des motifs pour lesquels chacun de ceux qui s’y trouveront dénommés y aura été compris. Art. 17. Lespensions accordées commenceront à courir du 1er janvier 1790; mais sur les arrérages qui reviendront à chacun pour l’année 1790, il sera fait imputation de ce qu’on aurait reçu pour ladite année, en exécution du décretdulôde ce mois. M. Martineau. Avant d’adopter aucun décret, je demande que M. le rapporteur veuille bien nous indiquer quel sera le montant total de toutes les pensions. M. Camus. Nous ne connaissons point encore tous les détails pour donner une réponse exacte, mais je crois que la somme nécessaire pour toutes les pensions, y compris les articles d’exception à décréter, ne montera pas à plus de 18 millions. M-de Foucault. Pour gagner du temps on nous en fera perdre beaucoup ; on commence par nous avertir dans le premier article qu’il reste plusieurs cas à déterminer ; ce sont ces cas qu’il est indispensable de nous présenter avant de rétablir les pensionssurdes bases solides ; ce serait mettre la charrue devant les bœufs. M. Camus. Nous avons annoncé des modifications suivant les diverses occupations des personnes. Ces détails ne sont pas encore absolument déterminés ; ils résultent, par exemple, de la manière de compter les années de services, soit en paix, soit en guerre. M. de Foucault. Je persiste dans ma première proposition; je fais mon devoir, j’en suis fâché ; mais nous ne devons pas décréter les conséquences avant de connaître les principes. M. le Président donne une nouvelle lecture de l’article 1M. 11 est décrété en ces termes : Art. 1er «Les personnes qui, ayant servi l’Etat, se trouveront dans les cas déterminés par les décrets de l’ Assemblée, des 10 et 16 du présent mois, ou dans ceux qui restent à déterminer, d’après les rapports particuliers, relatifs à chaque nature de service, obtiendront une pension de la valeur réglée par lesdits décrets, s’ils avaient déjà une pension, mais de moindre valeur que celle que lesdits décrets leur assurent, la pension dont ils jouissaient demeurera supprimée, et elle sera remplacée par la pension plus considérable qu’ils obtiendront. » (L’article 2 est mis en discussion.) M. d’Elbhecq. Vous ne me ferez sans doute pas l’injure de penser que, poussé par l’intérêt personnel, je monte à la tribune pour défendre mes pensions. Lorsque la patrie est en danger, un militaire lui doit, non seulement son sang, mais encore sa fortune tout entière, et à plus forte raison le sacrifice des pensions qu’il tient de sa munificence. .. J’ai quatre réflexions à présenter à l’Assemblée sur l’article 2. J’observerai d’abord. que les officiers généraux ne sont jamais regardés comme retirés du service, et que tel officier général, qui n’a pas été employé cette année, le sera peut-être l’année prochaine. En effet, supposons que, d’après le plan du ministre, la nouvelle organisation de l’armée exige 94 officiers généraux, comment remplacerez-vous ceux qui pourraient mourir ou quitter? Fera-t-on une promotion anticipée, tandis qu’il vous restera une foule d’officiers généraux, dont un grand nombre ont des talents et assez de santé pour servir encore longtemps? Vous trouverez, sans doute, plus juste et plus économique d’employer d’anciens officiers généraux qui ont bien servi, qui désirent de servir encore, et dont vous payez l’inactivité. Je demande donc que le second article soit rédigé ainsi : « Les officiers généraux qui seront employés jouiront des appointements qui leur seront attribués, et il sera établi une pension en faveur de ceux de ces officiers qui, etc. » — Seconde observation. Les régiments allemands, irlandais et italiens ont des capitulations particulières. Il est de toute justice de les suivre. Les pensions de retraite, dans ces régiments, ont toujours été plus fortes que dans les régiments français. Vous avez le droit d’exiger des sacrifices des 'Français; mais je pense que ceux qui n’ont pas le bonheur de l’être, ne nous en doivent aucun. Je demande donc que le comité des pensions soit chargé de s’occuper de la rédaction d’un article additionnel qui règle les pensions des officiers étrangers. — 3e observation. Ce même article n’établit aucune différence dans le traitement d’un officier que son nom et son rang à la cour ont porté rapidement au grade d’officier général, et celui qui n’y est parvenu qu’après avoir passé successivement par tous les grades militaires. Ce dernier portait constamment le poids du jour, dans les camps et dans les garnisons, tandis que le premier a été à peine aperçu à son régiment. Je demande donc que les récompenses soient proportionnées aux services, et que les officiers généraux appelés ci-devant de fortune , épithète honorable, puisqu’elle ne regardait que ceux qui avaient mieux et plus longtemps servi la patrie, soient mieux traités que les autres. — 4® observation. Le même article second, en attribuant 2,000 livres de pension aux officiers généraux qui auront fait deux campagnes de guerre, semble les refuser à ceux d’entre eux qui ne les auront pas faites; ce qui à mon avis est injuste. Pour le prouver je ne [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Î6 juillet 1790.] 351 citerai qu’un exemple. Je connais un officier général de la promotion de 84 qui a passé par tous les grades et qui a servi pendant 40 ans, avec la plus grande distinction; si je le nommais, vous verriez tous les militaires qui m’écoutent se lever our appuyer la motion que je fais en sa faveur. h bien! cet officier n’a pas fait la guerre. Est-ce la faute des officiers particuliers si le régiment dans lequel ils servent est jugé nécessaire ailleurs qu’à l’armée, ou si le colonel n’a pas assez de faveur pour faire employer son régiment? Je demande donc que les officiers généraux qui ont passé par tous les gardes jouissent d’une pension de 2,000 livres, quoiqu’ils n’aient pas fait deux campagnes, ou qu’ils soient traités commeiis l’auraient été dans les grades qu’ils occupaient avant d’être promusaugraded’officier général. En conséquence de ces quatre observations, je demande l’ajournement et une nouvelle rédaction. M. de Tous tain. Je pense, comme M.d’Elbhecq, qu’il faut retirer de l’article ces mots : seront regardés comme retirés ; et je demande que la pension des officiers généraux soit fondue dans leurs traitements. Je crois devoir me plaindre de l’injustice faite à un maréchal de camp, à moi, qui ai servi pendant 45 ans. J’ai vu donner la préférence à un sous-lieutenant qui avait servi sous mes ordres, lorsque j’étais colonel des carabiniers: il ne faut pas réduire les vieux militaires à une oisiveté qui fait leur tourment. Depuis que je suis maréchal de camp, les ministres m’ont fait éprouver mille injustices. MM. de Poix, de Gastries et d’Escars, tous jeunes officiers, m’ont été préférés. Je demande qu’on établisse des règles à cet égard. M. de Meuville. Il me semble qu’il est de la justice de donner un traitement aux officiers généraux, d’abord en cette qualité; en second lieu, un supplément, lorsqu’ils seronten activité; enfin, ud second supplément, lorsqu’ils seront à laguerre. Je demande donc qu’il ne leur soit pas donné de pensions, mais des traitements. M. deCnstine. Je réclame surtout la justice de l’Assemblée pour ceux qui ont particulièrement contribué à la gloire de nos armées, tels que MM. de Bouillé, de Rochambeau, etc. M.d’Ambly. Je pourraisdire que j’ai vu nombre d’officiers généraux arrivés au grade de maréchal de camp pour avoir servi pendant la paix, et avoir de grosses pensions, tandis que nous, qui étions à la guerre, rien. Je ne demande pas d’argent ; mais je demande la permission de demander au roi des honneurs, si vous voulez bien me le permettre. M. de Foucault. Les mots : seront regardés comme retirés ne tendent à rien moins qu’à faire oublier les anciens officiers généraux, pour faire mieux traiter les jeunes héros de l’Amérique. M. Dubois ( ci-devant de Crancé). Laisser aux officiers généraux retirés la faculté de rester en place, c’estarrêter la marche des grades de l’armée. M. de Toulon se-Lautrec. Il n’y a donc qu’à les jeter à la rivière 1 Tous les amendements, excepté celui de M. Toustain, sont rejetés, et l’article est décrété en ces termes : Art. 2. « Il sera rétabli une pension en faveur des officiers généraux qui, ayant fait deux campagnes de guerre, en quelque grade et en quelque lieu que ce soit, avaient précédemment obtenu une pension ; mais elle cessera d’être payée, s’ils rentrent en activité, en sorte que, conformément à l’agticle 10 des décrets du 16 de ce mois, il ne soit jamais payé au même officier, pension et traitement. « La pension rétablie ne sera jamais plus forte que celle dont on jouissait. « Si la pension dont on jouissait était de 2,000 livres ou plus, la nouvelle pension sera de 2,000 livres, pour l’officier général qui aura fait deux campagnes de guerre; elle croîtra de 500 livres, à raison de chaque campagne de guerre, au delà des deux premières ; mais cet accroissement ne pourra porter le total au delà de la somme de 6,000 livres, qui est le maximum fixé pour lespensions mentionnées au présent article.» M. le Président met aux voix les articles 3 et 4. Ils sont successivement adoptés ainsi qu’il suit : « Art. 3. Les officiers des troupes de ligne et les officiers de mer qui avaient servi pendant 20 années dans les troupes de ligne, ou sur mer, qui avaient fait deux campagnes de guerre ou deux expéditions de mer, dans quelque grade que ce soit, et auxquels leur retraite avait été accordée avec une pension, soit par une suite des réformes faites dans la guerre ou dans la marine, soit à une époque antérieure aux règlementsqui seront mentionnés en l’article suivant, jouiront d'une nouvelle pension créée en leur faveur, laquelle ne pourra excéder celle dont ils jouissaient, mais pourra lui être inférieure, ainsi qu’il sera dit en l’article 7. » « Art. 4 Les personnes qui, n’étant dans l’un ni dans l’autre des cas prévus par les deux articles précédents, auront obtenu, avant le premier janvier 1790, une pension pour services rendus à l’Etat dans quelque département que ce soit, en conformité des ordonnances et règlements faits pour lesdits départements, jouiront d’une nouvelle pension rétablie en leur faveur, laquelle ne sera jamais au-dessus de celles dont elles jouissaient précédemment, mais pourra être au-dessous dans les cas prévus par l’article 7. *> M. Camus, rapporteur , donne une nouvelle lecture de l’article 5. M. d’Estourmel. Si vous adoptiez cet article tel qu’il est proposé, vous réduiriez à la misère les veuves des maréchaux de France, tels que les maréchaux de Muy et de Richelieu. La veuve de ce dernier, du vainqueur de Mahon, de cet homme qui a été si utile à Gênes, qui a vécu sous trois rois, et a été victime du despotisme ministériel, qui a rendu les plus grands services à l’Etat, se trouverait réduite à6,000 livres. . . (L'orateur est interrompu par des murmures.) Mmede Richelieu avait 20,000 livres sur le gouvernement de son mari par la suite de vos décrets; M. de Richelieu ne lui ayant laissé aucun douaire, elle se trouve, ainsi que Mmô de Muy, réduite à 2,000 écus. M. de Marinais. Je désirerais qu’on ajoutât, au commencement de l’article, ces mots : « Les veuves et les enfants de ceux qui ont été tués ». Dans la gendarmerie et dans toute la maison du roi, les officiers achetaient leurs emplois. A leur mort, cette finance était perdue pour leurs héritiers. La seul bataille de Minden fit rentrer 1,500,000 livres dans les coffres du roi. 11 serait convenable de dresser une liste des citoyens dont