SÉANCE DU 18 VENDÉMIAIRE AN III (9 OCTOBRE 1794) - N° 51 29 tive à des projets de finances par lui présentés ; La Convention nationale, considérant, 1° que les projets du citoyen Caille, de faire rentrer dans le trésor public des sommes dues par des anciens fermiers-généraux, depuis le commencement de ce siècle, n’ont rien produit; 2° Que le citoyen Caille a travaillé seulement à tirer parti pour son compte d’un arrêt du conseil qu’il a long-temps et vainement sollicité ; et que, dans cette vue, il a négocié, vendu et revendu de vaines espérances, sans, aucun avantage, même apparent, pour l’Etat. Décrète qu’il n’y a lieu à délibérer. Art. XXI. - Sur la demande en indemnité formée par Joseph-François Eglez, Jean-Pierre-André-François-J oseph Thier-rin, et Claude-Eustache Chancy, ci-devant suisse, en charge et privilégié de Philippe-Joseph Orléans, dit Egalité; La Convention nationale, considérant, 1° que la demande des réclamans est fondée sur un privilège accordé aux Suisses, et dont l’effet a cessé par l’abolition des droits d’entrée sur le vin; 2° Que l’abolition de l’indemnité de 1 012 L 10 s accordée à chacun d’eux, date de l’année 1790; et qu’à cette époque, l’état des dépenses assignées sur les fermes générales a été déchargé du paiement de cette indemnité abusive; 3° Qu’en vain une déclaration enregistrée à la ci-devant cour des Aides de Paris en 1786, a confirmé la jouissance de cette indemnité qui ne peut plus subsister sous le régime de la liberté; Décrète qu’il n’y a lieu à délibérer. Art. XXII. - Sur les demandes en conservation de pensions formées par la citoyenne Catherine-Barbe Miran, épouse du citoyen Maragon, et fille de feu Jean Miran, et par les quatre enfans de feu Jean-Joseph Abeille, anciens fermiers des domaines de la ci-devant compagnie des Indes ; La Convention nationale, considérant, 1° que les pensions de 4 000 L, d’une part, accordées à la citoyenne Miran, et de 2 000 L, d’autre part, à chacun des quatre enfans de Jean-Joseph Abeille, avoient été le résultat de transactions faites et consommées entre l’ancien gouvernement et les familles Miran et Abeille; 2° Que le droit de la citoyenne Miran, femme Maragon, est certain; 3° Que celui de Jacques-Thomas Abeille, l’un des quatre enfans Abeille, l’est pareillement ; 4° Que les trois enfans Abeille sont trois filles mariées dans l’Inde, et dont on ne connoît pas les vrais prénoms; Décrète ce qui suit : Les pensions de 4 000 L, d’une part, pour la citoyenne Miran, et de 2 000 L pour chacun des enfans Abeille, sont converties en rentes viagères de pareille somme. La citoyenne Miran et Jacques-Thomas Abeille remettront au directeur-général de la liquidation leurs brevets de pensions, de laquelle remise leur sera donné recon-noissance motivée par le présent décret. Cette reconnoissance leur servira de titre pour toucher ce qui leur est dû desdites rentes viagères jusqu’au premier germinal dernier, sauf la déduction de ce qui peut leur avoir été payé, soit à compte, soit sous le titre de secours provisoire. A l’égard des trois autres enfans Abeille, dans les prénoms desquels il paroît y avoir eu erreur, il sera délivré à chacun d’eux, pour ce qui le concerne, pareille reconnoissance, en faisant la remise de leurs titres, ou en rapportant un certificat qui ne leur en a pas été fourni, et en justifiant de leurs véritables noms et qualités d’enfans de Jean-Joseph Abeille, pour toucher pareillement ce qui peut leur être dû desdites rentes jusqu’au premier germinal dernier, et sous les déductions ci-dessus énoncées. Les reconnoissances dont il s’agit seront remises comme titres desdites rentes viagères à fournir en vertu des décrets des 23 floréal et 3 prairial, relatifs aux rentes viagères, aux dispositions desquelles les réclamans seront tenus de se conformer. Art. XXIII. - Le comité des Décrets est chargé de faire passer sous trois jours, à la Trésorerie nationale, une expédition du sixième état annexé à la minute du présent décret, concernant les pensions supprimées, pour faire cesser le paiement des secours provisoires aux personnes y dénommées. Le présent décret ne sera inséré que dans le bulletin de correspondance (83). 51 La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des Secours publics sur la lettre de l’agent national du département de Paris, adressée le 27 fructidor au comité de Salut public ; Considérant que les décrets qui accordent des secours aux parens des défenseurs de la patrie, ne doivent essuyer aucun retard dans leur exécution, décrète : Qu’un membre des comités civils de sections de Paris suppléera provisoirement l’officier municipal appelé, par la loi du 13 prairial, à présider les assemblées pour la nomination des vérificateurs et distributeurs des secours à accorder aux parens des défenseurs de la patrie. (83) P.-V., XLVn, 61-70. Décret attribué à Bordas selon C*II 21, p. 8. Bull., 18 vend, (suppl.); Débats, n° 756, 415-416, n 757, 425-428; M.U., XLIV, 318, 397-400, 413-414. 30 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Le présent décret sera imprimé au bulletin de correspondance, et envoyé, sans délai, à l’agent national du département de Paris (84). 52 La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de Sûreté générale, décrète que le représentant du peuple Genissieu se rendra dans les départemens de l’Orne et de la Sarthe, et le représentant du peuple Calés dans celui de la Côte-d’Or, ils sont investis des mêmes pouvoirs que les autres représentons du peuple dans les départemens (85). 53 Ramel présente un projet de décret relatif au Théâtre des Arts : Le Théâtre des Arts, ci-devant Académie de musique, a été mis sous la surveillance du gouvernement; bientôt il sera présenté un projet de décret pour donner à ce théâtre toute l’attitude républicaine qu’il doit avoir pour former l’esprit public et nourrir dans les âmes l’amour de la liberté et du beau. En attendant ce travail, Ramel, organe des comités des Finances et d’instruction publique, présente un projet de décret tendant à régler la partie économique de cet établissement. Ce projet est ajourné (86). Merlin (de Thionville) observe que, si l’organisation des théâtres est utile, parce qu’elle tient essentiellement à la morale publique, il n’est pas moins utile d’asseoir l’opinion publique par la déclaration solennelle de principes qui dirigent la Convention nationale. En conséquence, Merlin demande que Cambacérès monte à la tribune et donne lecture à la Convention de l’Adresse dont la rédaction a été confiée aux trois comités (On applaudit) (87). [Harmand demandoit la parole pour présenter ses vues sur le commerce, lorsque Merlin (de Thionville) la réclame pour la lecture de l’adresse aux François.] (88) (84) P.V., XL VII, 71. C 321, pl. 1332, p. 37, minute de la main de Merlino. Décret anonyme selon C*II 21, p. 8. Bull., 18 vend (suppl.); M.U., XLIV, 297. (85) P.-V., XL VII, 71. C 321, pl. 1332, p. 38, minute de la main de Clauzel, rapporteur. Ann. R.F., n 19; F. de la Républ., n“ 19; Gazette Fr., n° 1012; J. Fr., n° 744; J. Perlet, n 746. (86) F. de la Républ., n" 19; J. Fr., n° 744; J. Paris, n” 19; Mess. Soir, n" 782; M.U., XLIV, 283; Rép., n“ 19. (87) Moniteur, XXII, 200 ; Débats, n° 748, 286. (88) J. Paris, n” 19. Un membre demande, par motion d’ordre, que le rapporteur des trois comités de Salut public, de Sûreté générale et de Législation, soit entendu sur la rédaction du projet d’adresse aux Français, décrétée par la Convention. Cambacérès en fait la lecture qui est souvent interrompue par les plus vifs applaudis-semens, et la rédaction est adoptée en ces termes (89). CAMBACÉRÈS : Citoyens, par votre décret du 11, vous avez ordonné à vos trois comités de Salut public, de Sûreté générale et de Législation, de vous présenter une Adresse aux Français, qui contiendrait des principes autour desquels doivent se réunir les amis de la liberté. Je viens, en leur nom, vous présenter le résultat de leurs méditation. Cambacérès fait lecture de l’Adresse suivante ; elle est souvent interrompue par les plus vifs applaudissements, et adoptée unanimement par un mouvement simultané. La voici : La Convention nationale au peuple français (90). Français, Au milieu de vos triomphes, l'on médite votre perte. Quelques hommes pervers voudroient creuser au sein de la France le tombeau de la liberté. Nous taire, seroit vous trahir; et le plus saint de nos devoirs est de vous éclairer sur les périls qui vous entourent. Vos ennemis les plus dangereux ne sont pas ces satellites du despotisme que vous êtes accoutumés à vaincre; ce sont leurs perfides émissaires qui, mêlés avec vous, combattent votre indépendance par l'imposture et par la calomnie. Les héritiers des crimes de Robespierre et de tous les conspirateurs que vous avez terrassés, s'agitent en tous sens pour ébranler la République, et, couverts de masques différens, cherchent à vous conduire à la contre-révolution à travers les désordres et l’anarchie. Tel est le caractère de ceux que l’ambition pousse à la tyrannie ; ils proclament des principes; ils se parent des sentimens qu’ils n’ont pas; ils se disent les amis du peuple, et ils n'aiment que la domination; ils parlent des droits du peuple, et ils ne cherchent qu’à les lui ravir. (89) P.-V., XLVII, 71. (90) Moniteur, XXII, 200; Bull., 18 vend.; Débats, n° 748, 286-290; Ann. R.F., n° 18, 21, 23; Ann. Patr., n° 647; C. Eg., n” 782, 784, 785; F. de la Républ., n° 20; Gazette Fr., n° 1012, 1014; J. Fr., n° 744, 745; J. Mont., n” 163, 164; J. Paris, n° 19; J. Perlet, n” 746, 749; Mess. Soir, n” 783; M.U., XLIV, 284, 290-293; Rép., n° 19.