243 [Assemblée nationale, j ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 juin 1191.] (Ces deux articles sont successivement mis aux voix et adoptés.) M. Le Pelletier-Saint-Fargeau, rapporteur. Vous avez également renvoyé à vos comités une observation de M. Malouet relative aux crimes contre la Constitution (1). Voici l’article que nous vous proposons, d’accord avec lui, pour devenir l’article 2 de la troisième section du titre 1er de la deuxième partie : Art. 2 (nouveau). « Quiconque sera convaincu d’avoir, par force et violence, écarté ou chassé un citoyen actif d’une assemblée primaire, sera puni de la peine de la dégradation civique. » (Cet article est mis aux voix et adopté.) M. Le Pelletier-Saiiit-Fargean, rapporteur. Vous avez enfin. Messieurs, renvoyé à la rédaction de vos comités les articles 7, 8 et 9 de la troisième section du titre Ier (1), relatif à l’usurpation du pouvoir législatif qui pourrait être faite par les agents du pouvoir exécutif, ou à la supposition d’une loi, ou à la falsification d’une loi, ou enfin à l’établissement d’un impôt sans les formes déterminées par la Constitution. Ces dispositions n’étaient pas énoncées d’une manière assez précise dans la première rédaction; les comités ont pensé éclaircir davantage la matière en proposant les articles suivants, qui deviendraient les articles 8, 9, etc..., en raison de l’article 2 nouveau qui vient d’être adopté. Voici ces articles : « Art. 8. Si quelque acte était publié comme loi sans avoir été décrété par le Corps législatif, et que ledit acte soit extérieurement revêtu d’une forme législative différente de celle prescrite par la Constitution, tout ministre qui l’aura contresigné sera puni de mort. « Tout agent du pouvoir exécutif, commandant ou ofticier militaire ou civil qui l’aura fait publier ou exécuter, sera puni de la peine de la dégradation civique. « Art. 9. Si quelque acte, extérieurement révêtu de la forme législative prescrite par la Constitution, était publié comme loi, sans toutefois que ledit acte ait été décrété par le Corps législatif, le ministre qui l’aura contresigné, s’il est convaincu d’avoir sciemment et à dessein supposé le décret du Corps législatif, sera puni de mort. « Art. 10. En cas de publication d’une loi extérieurement revêtue de la forme législative prescrite par la Constitution, mais dont le texte aurait été altéré ou falsifié, le ministre qui l’aura contresignée, s’il est convaincu d’avoir sciemment et à dessein altéré ou fait altérer, falsifier ou fait falsifier le texte de ladite loi, sera puni de mort. « Dans le cas porté au présent et au précédent article, le ministre seul sera responsable. « Art. 11. Si quelque acte, portant établissement d’un impôt ou emprunt national, était publié sans que ledit impôt ou emprunt ait été décrété par le Corps législatif, et que ledit acte soit extérieurement revêtu d’une forme législative différente de celle prescrite par la Constitution, le ministre qui, sciemment et à dessein, aura contresigné ledit acte, donné ou contresigné des ordres pour percevoir ledit impôt ou recevoir les fonds dudit emprunt sera puni de mort. (1) Voy. ci-dessus, séance du 8 juin, pages 70 et 71. « Tous agents quelconques du pouvoir exécutif qui auront exécuté lesdits ordres, soit en percevant ledit impôt, soit en recevant les fonds dudit emprunt, seront punis de la peine de la dégradation civique. « Art. 12. Si ledit acte, extérieurement revêtu de la forme législative prescrite par la Constitution, était publié sans toutefois que ledit impôt ou emprunt ait été décrété par le Corps législatif, le ministre qui, sciemment et à dessein, aura contresigné ledit acte, donné ou contresigné des ordres pour percevoir ledit impôt ou recevoir les fonds dudit impôt, sera puni de mort. « Dans le cas porté au présent article, le ministre seul sera responsable. » M. Moreau. Les mots sciemment et à dessein me paraissent ne devoir pas être insérés dans ces articles. En effet, dans le cas des délits prévus dans les dispositions qui viennent de vous être lues, la nation serait obligée de prouver que le ministre a signé ou contresigné sciemment et à dessein, si on laissait subsister ces deux mots dans la rédaction, tandis que ce doit être au ministre de prouver le contraire. Je demande la radiation des mots sciemment et à dessein. M. Le Pelletier-Saint-Fargeau, rapporteur. Dans notre première rédaction, nous n'avions pas inséré les mots sciemment et à dessein par les considérations qui vous sont exposées par le préopinant. Nous avons cru cependant devoir les ajouter dans Ja seconde, parce qu’il est facile de surprendre une signature du ministre, lorsqu’il néglige d’examiner l’acte qui lui est présenté, et qu’il ne serait pas juste de le punir d’une négligence comme d’un délit prémédité. M. ©oupil-Préfeln. Je propose de substituer aux mots sciemment et à dessein la disposition additionnelle suivante : « Les ministres pourront être admis à prouver que leurs signatures ont été surprises; et en conséquence, les auteurs de la surprise seront poursuivis et punis. » M. Régnier. J’appuie la motion de M. Moreau; les mots sciemment et à dessein ne peuvent subsister dans la loi sans la rendre illusoire. Gomment veut-on que le juré lise dans le cœur du ministre pour savoir s’il a agi sciemment et à dessein? J’appuie donc ce retranchement. Quant à l’amendement de M. Goupil, je le considère comme inutile. La preuve qu’il propose est de droit, et un crime n’est réputé tel qu’au-taot qu’il a été commis avec une volonté déterminée. M. Le Pelletier-Saint-Fargeau, rapporteur. Je m’oppose à la radiation demandée par M. Moreau et je citerai pour exemple, à l’appui de mon opinion, ce qui est arrivé il y a peu de jours au ministre de la justice. Une loi a été oubliée et affichée, et le sens en a été altéré. Cette faute n’a été commise que par distraction. Ce n’était la faute ni du ministre, ni de ses commis. Il n’aurait pas été juste de les en punir. M. Régnier. L’exemple rapporté par M. Le Pelletier ne détruit pas la nécessité d’effacer de cet article les mots : sciemment et à dessein; car, dans le cas d’un délit de l’espèce posée, l’accu-