324 (Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (23 avril 1791.J le rivage opposé demeure à sec, le propriétaire du rivage enlevé pourra se mettre en possession du terrain abandonné par les eaux; s’il néglige de le l'aire, la nation en disposera, et elle disposera pareillement de toutes les relaissées, mortes, marais et autres terrains qui ne seront réclamés par personne. <■ Art. 5. Ceux qui auront été dépossédés par les eai x des fleuves et qui réclameront, à titre d’indemnite,les portions de terrain laissées à sec ou susceptibles de dessèchement seront tenus de se pourvoir dans trois ans au directoire du département qui les autorisera à s’en mettre en possession, après avoir pris l’avis du directoire du district. S’il survient quelques contestations sur la légitimité de la demande, soit entre plusieurs parties privées, soit contre le refus qui serait fait par le directoire du département, ces contestations seront portées par-devant les juges ordinaires, et l’intérêt national y sera défendu par le procureur général du département. <■ Art. 6. Les îles, îlots et atterrissements, formés insensiblement dans les lits des fleuves par des dépôts successifs, appartiennent aux propriétaires riverains les plus voisins de l’atterrissement. « Art. 7. Les accroissances qui se forment insensiblement sur les rivages des fleuves appartiennent au propriétaire du sol accru sur la longueur de la rive de son héritage. «"Art. 8. Les propriétaires actuels des îles, atterrissements, crémeiits, alluvions, mortes et re-lais-ées,dont la possession se trouve cooformeaux règles qui ont eu lieu jusqu’à présent ne pourront y être ti ou blés. « Art. b. Ceux qui jouissent des fonds désignés dans l’article précédent à titre de cens, rentes ou autres droits fonciers pourront en exercer le rachat conformément au décret du 3 mai dernier. TITRE III. De la pêche. « Arl. 1er. La pêche des fleuves et des rivières est une propriété commune et nationale; à la nation appartient le droit d’en régler l’exercice et l’usage. « Art. 2. Toute concession du droit de pêche aile à titre de fief, censive, rente foncière, engagement, échange, ou à tout autre titre, demeure supprimée. Il sera pourvu, s’il y a lieu, à l’indemnité des engagistes et échangistes, ainsi qu’à la restitution des deniers qui auraient été versés au Trésor public par les concessionnaires. « Art. 3. Les fruits de la pêche étant un moyen général de subsistance, la pèche des fleuves et des rivières sera exercée au nom de la nation et au profit du Trésor public. « Art. 4. En conséquence, elle sera affermée, dans chaque canton, par les directoires de districts à la diligence des procureurs syndics ; le prix des baux sera payé chaque année" entre les mains des receveurs de districts, qui en verseront le montant dans la caisse de l’extraordinaire; cependant les baux actuellement existants subsisteront jusqu’à leur expiration. « Art. 5. Il sera pourvu, par un règlement général, à la police et conservation de la pêche; .jusque-là, les règlements actuels seront exécutés; mais les baux qui seront faits à l’avenir contiendront la condition de se soumettre à tous les règlements qui seront faits ci-après. « Art. fi. Les pêcheurs pourront user des marches des fleuves et des bords des rivières pour l'exploitation de la pêche, mais sans porter aucun préjudice soit aux fonds riverains, soit aux fruits dont ces fonds seront emplantés, et sans pouvoir pénétrer dans le-; terrains clos. < Art. 7. La pêche des portions de rivières actuellement renfermées, soit dans des étangs dont leurcours fait partie, soit dans des jardins et enclos attenants a ix habitations, continuera d’appartenir aux propriétaires desdits étangs, jardins et enclos, s’ils en sont en possession ; ce qui aura lieu tant que les étangs et les clôtures subsisteront et seront entretenus. « Art. 8. Défenses sont faites à toutes personne-, autres que les fermiers de la pêche et leurs jpré-posés, de pêcher soit dans les fleuves, soit dans les rivières, de quelque manière et en quelque temps que ce soit, et ce sous les peines portées car les lois actuelles et par celles qui seront établies dans la suite. « Art. 9. La pêche des canaux de navigation, construits par artifice, hors des lits des rivières, continuera d’appartenir aux propriétaires desdits canaux; il en est de même de celle des étangs, réservoirs et pièces d’eaux formant des propriétés privées. (L’Assemblée décrète l’impression de ce rapport.) M. Malouet. Avant que la discussion s’engage, je demande que l’Assemblée décrète que les colonies sont exceptées du décret qui vous est proposé par vos comités. M. Arthur DIHon, député des colonies. Quelque judicieuse que soit cette observation, je la combats, attendu que si l’on prononce l’exception demandée en faveur des colonies quant au décret actuel, il s’ensuivrait que tous les autres décrets antérieurement portés par l’Assemblée nationale, dans lesquels une pareille exception n’a pas été énoncée, seraient applicables aux colonies; ce qui entraînerait les plus grands inconvénients. Je conclus de cette observation, que, conformément au décret du 8 mars 1790, il soit reconnu que les lois faites par l’Assemblée nationale, ne sont applicables aux colonies qu’autant qu’elles les désignent nominativement, ou qu’elles l’ordonnent d’une manière positive. (L’Assemblée adopte cette dernière observation et décrète qu’il en sera fait mention dans le procès-verbal.) M. Bouche. Avant qu’on ouvre cette discussion, je demande à faire une motion d’ordre. Le travail qn’on vous présente renferme des vues excellentes; mais il emporte avec lui la destruction du droit d’arrosage, si précieux pour l’agriculture dans les pays méridionaux ; et je vous annonce qu’un pareil décret porterait la désolation dans nos départements. Je demande donc qu’on se borne à décréter le principe que les fleuves et les rivières navigables sont une propriété nationale. M. d’André. J’appuie cette proposition ; car s’il faut des règlements pour le cours des eaux, cour la pêche, etc., ces règlements font partie des h iis civiles que vous avez renvoyées à la pro-cliaine législature. La seule chose que vous ayez à décréter, c’est un article qui fasse cesser les principaux abus qui s’introduisent dans la pêche-, car il est évident, et il ne faut pas un nouveau décret pour déclarer que la féodalité est détruite sur le s eaux comme dans les campagnes. Quant lAssôiûblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [i2r> avril 1791.] aux droits de péage, vous vous eu êtes déjà occupés. Je demande donc le renvoi à la prochaine législature. Plusieurs membres appuient ce renvoi au nom de leurs départements. M. Mongins. Il existe des lois particulières sur le cours des eaux, lois dictées par les convenances et les localités; il serait im politique de les anéantir dans ce moment. Cette subversion des principes actuellement existants en cette matièrepourrait faire naître desdésordre - dans bien des pays et surtout dans les provinces méridionales. La pèche, dont les ci-devant seigneurs s’étaient appropriés l’usage exclusif dans certaines provinces, a été anéantie par le décret qui abolit la féodalité; il serait dangereux de la faire revivre en attribuant la faculté de pêche exclusive à des fermiers, au nom de la nation et au préjudice des particuliers riverains. D’après ces observations, je conclus : 1° à ce que l’Assemblée renvoie le détail des articles à la prochaine législature ; 2° à ce qu’elle charge ses comités d’agriculture, de commerce et de féodalité, de lui présenter des articles dans lesquels seront déterminées les eaux qui appartiennent à la nation, et celles qui appartiennent aux particuliers; quelles sont les eaux où la pêche appartient à la nation, et celles où elle appartient aux particuliers. Un membre, appuyant la motion deM. Mougins de Roquefort, propose la rédaction suivante : « L’Assemblée nationale ajourne les détails réglementaires compris dans le projet dont le rapport a été fait par ses comités de féodalité, des domaines, du commerce et d’agriculture ; et cependant, charge les mêmes comités de lui présenter incessamment des principes généraux et constitutionnels sur la propriété des cours d’eau, sur la liberté des irrigations, et sur la conservation de la pêche. » (Cette motion est décrétée.) La députation qui s'était rendue chez le roi rentre dans la salle des séances. M. Chabroud, président. Messieurs, la députation que vous avez nommée s’est rendue chez le roi; voici ce que j’ai dit à Sa Majesté : « Sire, c L’Assemblée nationale nous a chargé d’apporter à Votre Majesté l’expression des sentiments qu’elle vient d’éprouver. « L’instruction que vous avez ordonné d’adresser à vos ministres, dans les cours étrangères, est le fidèle abrégé de la Constitution française. Pour la première fois peut-être, les maximes sacrées qui énoncent les droits des hommes entreront dans les mystères d’une correspondance diplomatique. « L’étranger, Sire, apprendra de vous qu’a-près avoir aidé le peuple français à régénérer la Constitution, vous avez voulu en être le gardien et le défenseur; et l’étranger la respectera. Assis sur le plus beau trône du monde, vous avez donné le premier exemple d'un grand roi proclamant au loin la liberté des peuples. « Les Français ne seront pas surpris de celte nouvelle preuve que vous leur donnez de votre amour. Votre cœur, Sire, leur est connu ; ils sont accoutumés à prononcer votre nom avec ces 325 épanchements de tendresse et de reconnaissance que commandent de grands bienfaits. « Il est venu, le moment où le calme va succéder aux craintes et aux espérances entre lesquelles la nation flottait incertaine. Vous imposez silence aux détracteurs de nos lois nouvelles. L’hydre des factions avait 100 têtes : vous avez fait tomberla dernière. « Sire, j’ai la présomption d’annoncer à Votre Majesté qu’elle sera heureuse; car elle vient de fixer le bonheur du peuple. » ( Applaudissements répétés.) Voici la réponse que le roi nous a faite : « Je suis infiniment touché de la justice que me rend l’Assemblée. Si elle pouvait lire au fond de mon cœur, elle n’y verrait que des sentiments propres à justifier la confiance de la nation ; toute défiance serait bannie d’entre nous, et nous en serions tous heureux. » (Vifs applaudissements à gauche et cris répétés de : Vive le roi!) M. Emmery. Je fais la motion que l’Assemblée décrète l’impression du discours de son Président et de la réponse du roi à la suite de la lettre écrite aux ambassadeurs et ministres de France et qu’elle en ordonne le renvoi aux différents corps énoncés dans le décret qu’elle vient de rendre. (Cette motion est décrétée au milieu des acclamations. M.le Président. Voici le résultat du scrutin pour la nomination du Président : Sur 265 votants, M. Rewbell a obtenu 136 voix et M. Moreau Saint-Merry, 100; en conséquence M. Rewbell est nommé Président. Le scrutin pour la nomination des secrétaires a donné à MM. Lavie et Geoffroy, 171 voix, et à M. Baillot, 158 voix; en conséquence, MM. Lavie, Geoffroy et M. Baillot sont nommés secrétaires en remplacement de MM. de Rancourt de Villiers, Boissy-d’Anglas et de Visme. M. le Président lève la séance à dix heures. ASSEMBLÉE NATIONALE Dimanche 24 avril 1791. Nota. L’Assemblée nationale ne tient pas séance ce jour-là à cause de la solennité de la fête de Pâques. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. REWBELL. Séance du lundi 25 avril 1791 (1). La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin. M. llongins, secrétaire , fait lecture du procès-verbal de la séance de samedi au matin. (Ce procès-verbal est adopté.) (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.