146 [Contention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j <§ Jéœmbre 1W d’avoir exécuté en secret la vente totale ou partielle de la bibliothèque de la veuve Bœuf, émigrée, dont il fut acquéreur caché, après avoir annoncé qu’elle enrichirait une bibliothèque publique? Comment se défend-il d’avoir acheté ou escroqué un billet par lui dû à des religieuses, au préjudice de la nation qui en perdra le montant? Pourquoi, consulté comme homme de loi si l’on voulait forcer un particulier d’accepter en assignats un remboursement que voulait faire la commune de Sept-Fontaine, fut-il d’avis que non et qu’il ne pouvait y être contraint? Il s’est donc entaché du plus grand mépris pour la loi, et lui qui veut châtier les agioteurs aurait-il pu échapper au châtiment dès qu’il est démontré qu’il a péché contre la loi, car c’est lui qui a sonné le tocsin contre le pair des assignats. Après cela, on ne peut douter que la suspension provisoire de Boissard a été bien et légitimement portée; que sa suspension définitive est assurée et que c’est rendre service à cet homme que de ia prononcer, à vue surtout de la pétition de la Société du neuf mai dernier, qui fut moins adressée aux citoyens représentants pour légiti-m er les plaintes de cette même société que pour déterminer irrévocablement la suspension défi¬ nitive du procureur syndic Boissard déjà précé¬ demment rayé de la Société. Fait et arrêté à Pontarlier, ensuite de délibé¬ ration du jour d’hier à la séance extraordinaire du 20 juillet 1793, l’an II de la République fran¬ çaise, une et indivisible. (Suivent 10 signatures.) Pièce n° 4 (1). Pontarlier ce 14 avril 1793, 2e de la Répu¬ blique française. Citoyens administrateurs, Notre Société s’est assemblée extraordinai-rement sur la demande de plusieurs de ses membres, ce jourd’hui à neuf heures du mâtin, pour délibérer sur les mesures à prendre relati¬ vement au désarmement et à l’arrestation faite hier du citoyen Lerebours, un de ses membres, en vertu des ordres du district. Nous avons de suite arrêté que quatre com¬ missaires de la Société se rendraient auprès du district pour s’informer des raisons qui l’a¬ vaient pu déterminer à désarmer tin citoyen qui a un certificat de civisme du conseil général de la commune de cette ville, qui en a tin autre de tout le bataillon de la garde nationale, qui lui a donné une preuve de sa confiance en le nommant capitaine de grenadiers; qui, outre cela, a été choisi pour diverses missions contre des fanatiques soulevés, qu’il a toujours réussi à ramener à l’ordre, et qui enfin jouit de la confiance pleine et entière de la Société, qui lui en a donné les témoignages les plus éclatants en le nommant successivement aux places de président, secrétaire et membre du eomité de correspondance où il a toujours donné des preu¬ ves du plus pur civisme. Nos quatre com¬ missaires, après avoir rempli leur mission, nous ( î } Archives nationales, carton W 35$, dossier 753, partie, pièce 75. ont dit qu’ayant fait part aux membres du dis¬ trict dé leur commission, ceux-ci leiir avaient déclaré qü’il y avait dans leur registre plusieurs arrêtés pris contre le citoyen Le Rebours, et sur la vérification que nos commissaires ont demandé d’en faire, il ne s’en est trouvé absolu¬ ment aucun contre ledit citoyen Le Rebours ; ils ont vu seulement un arrêté pris par le dis¬ trict concernant l’urgente nécessité de surveiller l’administration nationale des Postes, mais il n’v est fait aucune mention du citoyen Le Rebours. Le procureur syndic, s’étant ensuite rendu à la Société, nous a dit que si on avait désarmé le citoyen Le Rebours, c’est parce qu’il n’avait pas son certificat de civisme du district èt qu’à l’égard de son arrestation on ne s’y était déter¬ miné que parce que le citoyen Le Rebours qui se promenait dans la rue ëii habit bourgeois, alla prendre son habit d’uniforme lorsqu’il sut qu’on voulait le désarmer, et qu’ alors il se lâcha un propos injurieux contre le district. Mais est-il bien surprenant, citoyens adminis¬ trateurs, qu’un capitaine de grenadiers revête son habit d’uniforme lorsqûe sa compagnie re¬ çoit un ordre du district, de fournir un détache¬ ment pour désarmer les géris suspects ? Est -il bien surprenant èhcore qu’un capitaine de grenadiers, reconnu pour excellent patriote, dans un premier mouvement d’indignation à là nouvelle de sôn désarmement, se permette quelques propos contre ceûx qui ont ordonné ce désarmement, et qui le veulent entacher dans l’opinion publique en lé mettant dans la classe des gens suspects? Mais à l’égard du désarmement lui-même, nous devons lui rendre le témoignage qu’il h’ a fait aucune résistahee, et que même voyant toutes les gardes nationales irritées du sanglant affront qu’on lui faisait, il les exhorta, avec lès plus vives instances, à ne point s’opposer aux ordres du district et à demeurer toujours dans le respect qui est dû aux autorités constituées. Tel est, citoyens administrateurs, le témoi¬ gnage que nous avons cru devoir rendre à hotrè frère et ami Le Rebours, que nous avons vu avec le plus vif chagrin conduit hier par la gen¬ darmerie dans la maison d’arrêt de notre ville. Nous envoyons deux commissaires de notrë Société, les citoyens Laroche et Ballyet, pour le mettre sous votre protection , spéciale ; nous espérons que vous voudrez bien lui faire rendre la justice qu’il mérite et que par votre moyen il nous sera bientôt rendu, et soyez bien persuadés, citoyens administrateurs, que dans ces mo¬ ments de danger nous n’interviendrions pas pour un citoyen sur lequel la patrie ne pourrait pas compter, mais la vraie cause de son désarme¬ ment et de son arrestation n’est autre chose que des propos mal rendus dans le but de lui faire perdre sa place de contrôleur des postes aux lettres. Les membres du comité de correspondance des Amis de la liberté et de Végalité de Pontarlier. ( Suivent 10 signatures.) Pièce n° . 5 (1). Ce jourd’hui, des cômmissaires de la muni¬ cipalité de la ville de Pontarlier ayant, à l’aide (1) Archives nationales, carton W 358, dossier 753, 2e partie, pièce 76. 147 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. \ � décembre3 1793 de la garde nationale, procédé au désarmement de quelques citoyens, nous, soussignés, compo¬ sant la compagnie des grenadiers de ladite ville, avons vu avec douleur que le citoyen Pi erre-René Le Rebours, notre capitaine, était compris dans la liste et que partie de nous a été obligée par son devoir, son obéissance aux corps constitués, d’aller chez son capitaine, enlever tant ses armes particulières que celles de la com¬ pagnie qu’il avait en dépôt. Le citoyen Le Rebours en a témoigné sa sur¬ prise en se plaignant d’un procédé qui couvre de blâme sa conduite irréprochable, et s’est soumis volontairement au désarmement, en dé¬ fendant que ceux de nous présents n’apportas¬ sent aucun trouble à l’exécution d’arrêtés de corps constitués; ainsi son désarmement s’est fait sans empêchement, puis ensuite il a été ar¬ rêté et conduit à Besançon. . Nous ignorerions encore les motifs qui ont déterminé le district à faire désarmer et empri¬ sonner notre capitaine, si le présent jour, à la Société des Amis de la liberté et de T égalité, tenue extraordinairement au sujet dudit citoyen Le Rebours, nous n’y avions entendu dire au citoyen Boissard, procureur syndic du district, que notre capitaine n’avait pu faire viser Son certificat de civisme, qu’il était soupçonné d’être d’intelligence avec le courrier Philibert, arrêté porteur de numéraire (nous observons qu’il ne l’a été qu’ après le dépôt dé ses paquets à la poste, et bien éloigné d’icelle), et d’avoir porté plainte contre le district lorsqu’on allait le dé¬ sarmer. Tous les soupçons dont le procureur syndic a parlé sont insignifiants, mais ceux d’entre nous commandés pour le désarmement, présents aux plaintes du citoyen Le Rebours, certifions, en notre particulier, qu’il n’a fait que de dire qu’il était soupçonné mal à propos, qu’il était bon citoyen, s’étant toujours montré tel et en avait fait les fonctions; que puisqu’il était décidé ainsi, il se soumettait aux autorités Constituées. Connaissant le citoyen Le Rebours, qui avant et depuis le commencement de la Révolution, a donné des preuves constantes de son civisme, de son dévouement pour lé bien public, qui n’a cessé de se montrer vrai et bon patriote ën toutes occasions, auquel le directoire a donné plusieurs fois sa confiance pour les corvées et désarme¬ ments à faire dans les endroits soupçonnés et qui a montré la plus grande vigilance pour lè service dans la garde nationale, nous instruire au manie¬ ment des armes, etc.; etc. Considérant que tant le désarmement dudit citoyen Le Rebours que son arrestation ne Sont que l’effet de la malveillance dé quelques individus, puisqu’il est sans reproche; que le conseil général de cette commune l’a reconnu, tel et bon citoyen, ën lui accordant unanimement Un certificat de civisme qu’il méritait à juste ti¬ tre, qu’il lui a été confirmé par la Société popu¬ laire dont il est membre, avons arrêté dë faire la présente pétition aux citoyens administra¬ teurs du département, pour demander que le citoyen Le Rebours, notre capitaine, soit élargi des prisons de Besançon, où nous pensons qu’il est détenu mal et indûment, et renvoyé à son poste, en ordonnant que ses armes lui soient rendues. Tels sont les Vœux des soussignés, ils espèrent avec confiance qu’on fera droit sur leur réclamation. Fait à Pontarlier, le 14 avril 1793, l’an II de la République française. (Suivent 203 signatures). Pièce n° 6 (1). Citoyens représentants et eommissairës de la Convention nationale, Par votre arrêté du 25 du mois d’avril, sur une dénonciation du conseil général de la com¬ mune de Pontarlier, vous m’avez préjugé, moi citoyen Boissard, moi procureur syndic de la généralité de ce district, un oitoyén presque pervers et malfaisant, un fonctionnaire public dangereux et arbitraire; et, par des motifs de paix et de tranquillité, vous avëz cru devoir me suspendre par provision de mes fonctions. Citoyens commissaires, ce n’én était pas assez; si l’on eût pu reconnaître le citoyen Boissard à ces caractères d’infamie et d’indignité, il aurait encore fallu prononcer ma destitution em tière, et mon exclusion à jamais de là Société républicaine. Mais vous l’avez senti, citoyens, il y a loin encore d’une dénonciation de mots et de l’ar¬ bitraire en rumeur contre un fonctionnaire public, à cette vérité de faits bien circonstanciés et bien prouvés qui opèrent seuls une conviction intime; et comme la dénonciation qui m’a at¬ teint présentait et ne présentera toujours qu’un déluge de vèrbiage ajusté, un misérable tissu de haines, d’artifice et de mensonges, votre rudence, citoyens eommissairës, a déjà sû orner son autorité aux termes d’une suspénsion par provision seulement. Je la subis, citoyens; avec toute la résignation d’un cœur patriote; accoutumé aux sacrifices, et jusque dans l’amer¬ tume qui m’éprouve, je n’en respecterai pas moins la loi et l’autorité qui m’ont frappé. Aujourd’hui d’ailleurs, ma satisfaction est déjà telle que je commence à voir l’illusion trompeuse s’évanouir. La noire calomnie qui, jusqu’ici, m’a affligé, enveloppé, n’est plus qu’un chétif nuage que la Vérité, plus puis¬ sante, perce et dissipe victorieusement. Vous allez la reconnaître, citoyens commissaires, soit dans les témoignages, authentiques et non suspects, de mes collègues au district, soit dans les Vœux et suffrages d’un nombre de muni¬ cipalités bien prononcées en ma faveur; soit encore dans le certificat dë civisme que j’ai reçu naguère, à V unanimité et par acclamation, dë ce même conseil général qui me poursuit aussi injustement que Contradictoirement avec lui-même; et si vous daignez, citoyens, en rap¬ procher les vérités de faits qui en sortent à l’envi pour ma justification, vous ne tarderez sûreniënt pas d’y reconnaître : Que la dénonciation qui a occasionné nia suspension n’est qu’une œuvre impie de l’in¬ trigue et de la malignité ténébreuse, Un acte de fiel ët de ressentiment d’un groupe d’intéres¬ sés, heurtés et courroucés sans doute de ce qu’en un temps j’aurais pu les avoir indiqués et gênés comme étant hors de la vraie voie du patrio¬ tisme dans laquelle je n’ai pu les ramener. Vous y rencontrerez, citoyens commissaires, qüe les imputations qui m’ont été faites, sont précisément à l’inverse de tout ce que j’ai réelle¬ ment fait au vu et su de mes collègues, dans l’une et l’autre de mes fonctions de procureur de la Gommune et de procureur syndic du dis¬ trict de Pontarlier. (1) Archives nalionaîes, carton W 358, dossier 753, 2e partie, pièce 91.