32 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE de cavalerie et par plusieurs bataillons d’infanterie. Attaqué vivement par notre avant-garde, l’ennemi se retira avec précipitation et en désordre. Il fut poursuivi dans sa retraite plus de 2 lieues au-delà de Neuf château. On lui a fait 70 prisonniers, et aujourd’hui encore plusieurs ont été pris dans les bois où ils s’étaient dispersés; le nombre des morts et des blessés doit être considérable. La perte de notre côté consiste en 5 hommes et 15 blessés. Nous espérons bientôt avoir de plus grands succès à vous apprendre. La difficulté n’est pas de vaincre, mais de joindre des esclaves qui, n’osant se mesurer avec des hommes libres, fuient continuellement devant nous. ( Vifs applaudissements) . Presque tous les habitants avaient fui à notre approche avec leurs meubles et leurs bestiaux. Les autrichiens étaient parvenus à leur persuader que les français les auraient massacrés, après avoir dévasté leurs propriétés, et c’est avec ces calomnies qu’ils sont parvenus à armer plusieurs villages contre nous. Ils ont été bien détrompés lorsqu’ils ont appris la conduite de l’armée. Le soldat français est terrible envers ses ennemis, mais il est humain après la victoire. Aucun habitant n’a été maltraité, aucun dommage n’a été fait. Ce sont les autrichiens eux-mêmes qui ont eu l’infamie de piller ces malheureux avant de partir. Signé : Gilet, Duquesnoy. (Applaudissements) . [Le général Jourdan, commandant en chef de VA. de Moselle, au C. de S.P.; Au quartier général, Neuf château, 5 prair.]. « Citoyens représentants, L’Armée est arrivée hier à Neufchâteau; notre avant-garde a complètement battu celle du général Beaulieu, qui occupait une superbe position. Nos troupes légères, notamment le 1er régiment de Chasseurs et un détachement du 3e des Hussards, ont chargé la nombreuse cavalerie ennemie et leur ont fait une centaine de prisonniers. Je marcherai demain sur Saint-Hubert, et puis de là sur Rochefort; nos communications sont établies avec Bouillon et j’espère sous peu les établir avec Givet ». COUTHON donne ensuite la liste des prises : [ Courrier du 4 et du 5 prairial ]. Le navire anglais le Britannia, de 400 tonneaux, venant de Saint-Eustache, et allant à Amsterdam, avec un chargement de sucre et de café, pris par la frégate La Tamise, et entré au port de Brest. Le navire anglais l’Anna, de 300 tonneaux, armé de 15 canons, destiné à la traite des noirs; son chargement consiste en eau-de-vie, fusils, sabres, poudre à canon, fer, guinées et autres marchandises, pris par les corvettes La Difficile et Le Fabius, et entré en rivière de Nantes. Un bâtiment anglais, capitaine Berrenger, chargé de cordages, de cuir, lard, farine, de manioc et quelques marchandises sèches, pris par la corvette La Souffrante, et mené à Brest. Un sloop nommé Le Thames, de 80 tonneaux, chargé de draps, chapeaux, bas et autres effets. Un sloop nommé les Deux frères, de 80 tonneaux, venant de Molde, en Norvège, destiné pour Poilbas et chargé ainsi que le premier de morue, d’huile, légumes, pris l’un et l’autre par V Andromaque, arrivés à Rochefort. Un bâtiment anglais de 70 tonneaux, pris et amené à Lorient par la corvette La Suffisante. [ Courrier du 6 prairial ]. Prises entrées au port de Brest Un navire anglais de 160 tonneaux, chargé de cuirs, cordages, salaisons et autres marchandises, pris par la corvette La Suffisante. Un idem, de 100 tonneaux, chargé de vin et coton, venant de Porto, et allant à Dublin, pris par la corvette Le Pavillon. Idem à Dune-Libre Un bâtiment autrichien chargé de morue et de poisson frais, pris par le lougre Le Courageux. Un navire chargé de salaisons pris par idem. Idem à Ville-Franche Un chebeck anglais, de 150 tonneaux, chargé de vin, eau-de-vie et huile, venant de Sicile et allant à Loano, pris par le brigantin La Revanche. Un navire de 150 tonneaux, chargé pour Livourne de lin, cire, cuirs et 900 charges de blé. Pris par idem. Prise entrée à Calais Un bâtiment de 170 tonneaux, venant d’Amsterdam et allant à Barcelone, avec un chargement de froment et de fèves. [ Courrier du 6 prairial], Prise entrée en rivière de Nantes Le navire anglais Le Tom, de 130 tonneaux, armé de 12 canons, allant à la traite des noirs, avec une cargaison de fusils, sabres, poudre de guerre, plomb, eau-de-vie et autres marchandises, pris par les corvettes La Difficile et Le Fabius (1). (Applaudissements) . 43 Au nom du Comité de salut public, un membre [BARERE] présente un rapport et donne lecture d’une adresse sur les perfidies et tous les genres de corruptions et de crimes employés par le gouvernement anglais (2) . BARERE : Citoyens, dans la combinaison des crimes que l’Angleterre soudoie au milieu de nous, et qu’elle fait exécuter par les factions qu’elle a enrôlées à Paris, il s’agissait, il y a deux jours, de l’assassinat de Robespierre et de Collot (1) Mon., XX, 565. (2) P.V., XXXVIII, 137. 32 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE de cavalerie et par plusieurs bataillons d’infanterie. Attaqué vivement par notre avant-garde, l’ennemi se retira avec précipitation et en désordre. Il fut poursuivi dans sa retraite plus de 2 lieues au-delà de Neuf château. On lui a fait 70 prisonniers, et aujourd’hui encore plusieurs ont été pris dans les bois où ils s’étaient dispersés; le nombre des morts et des blessés doit être considérable. La perte de notre côté consiste en 5 hommes et 15 blessés. Nous espérons bientôt avoir de plus grands succès à vous apprendre. La difficulté n’est pas de vaincre, mais de joindre des esclaves qui, n’osant se mesurer avec des hommes libres, fuient continuellement devant nous. ( Vifs applaudissements) . Presque tous les habitants avaient fui à notre approche avec leurs meubles et leurs bestiaux. Les autrichiens étaient parvenus à leur persuader que les français les auraient massacrés, après avoir dévasté leurs propriétés, et c’est avec ces calomnies qu’ils sont parvenus à armer plusieurs villages contre nous. Ils ont été bien détrompés lorsqu’ils ont appris la conduite de l’armée. Le soldat français est terrible envers ses ennemis, mais il est humain après la victoire. Aucun habitant n’a été maltraité, aucun dommage n’a été fait. Ce sont les autrichiens eux-mêmes qui ont eu l’infamie de piller ces malheureux avant de partir. Signé : Gilet, Duquesnoy. (Applaudissements) . [Le général Jourdan, commandant en chef de VA. de Moselle, au C. de S.P.; Au quartier général, Neuf château, 5 prair.]. « Citoyens représentants, L’Armée est arrivée hier à Neufchâteau; notre avant-garde a complètement battu celle du général Beaulieu, qui occupait une superbe position. Nos troupes légères, notamment le 1er régiment de Chasseurs et un détachement du 3e des Hussards, ont chargé la nombreuse cavalerie ennemie et leur ont fait une centaine de prisonniers. Je marcherai demain sur Saint-Hubert, et puis de là sur Rochefort; nos communications sont établies avec Bouillon et j’espère sous peu les établir avec Givet ». COUTHON donne ensuite la liste des prises : [ Courrier du 4 et du 5 prairial ]. Le navire anglais le Britannia, de 400 tonneaux, venant de Saint-Eustache, et allant à Amsterdam, avec un chargement de sucre et de café, pris par la frégate La Tamise, et entré au port de Brest. Le navire anglais l’Anna, de 300 tonneaux, armé de 15 canons, destiné à la traite des noirs; son chargement consiste en eau-de-vie, fusils, sabres, poudre à canon, fer, guinées et autres marchandises, pris par les corvettes La Difficile et Le Fabius, et entré en rivière de Nantes. Un bâtiment anglais, capitaine Berrenger, chargé de cordages, de cuir, lard, farine, de manioc et quelques marchandises sèches, pris par la corvette La Souffrante, et mené à Brest. Un sloop nommé Le Thames, de 80 tonneaux, chargé de draps, chapeaux, bas et autres effets. Un sloop nommé les Deux frères, de 80 tonneaux, venant de Molde, en Norvège, destiné pour Poilbas et chargé ainsi que le premier de morue, d’huile, légumes, pris l’un et l’autre par V Andromaque, arrivés à Rochefort. Un bâtiment anglais de 70 tonneaux, pris et amené à Lorient par la corvette La Suffisante. [ Courrier du 6 prairial ]. Prises entrées au port de Brest Un navire anglais de 160 tonneaux, chargé de cuirs, cordages, salaisons et autres marchandises, pris par la corvette La Suffisante. Un idem, de 100 tonneaux, chargé de vin et coton, venant de Porto, et allant à Dublin, pris par la corvette Le Pavillon. Idem à Dune-Libre Un bâtiment autrichien chargé de morue et de poisson frais, pris par le lougre Le Courageux. Un navire chargé de salaisons pris par idem. Idem à Ville-Franche Un chebeck anglais, de 150 tonneaux, chargé de vin, eau-de-vie et huile, venant de Sicile et allant à Loano, pris par le brigantin La Revanche. Un navire de 150 tonneaux, chargé pour Livourne de lin, cire, cuirs et 900 charges de blé. Pris par idem. Prise entrée à Calais Un bâtiment de 170 tonneaux, venant d’Amsterdam et allant à Barcelone, avec un chargement de froment et de fèves. [ Courrier du 6 prairial], Prise entrée en rivière de Nantes Le navire anglais Le Tom, de 130 tonneaux, armé de 12 canons, allant à la traite des noirs, avec une cargaison de fusils, sabres, poudre de guerre, plomb, eau-de-vie et autres marchandises, pris par les corvettes La Difficile et Le Fabius (1). (Applaudissements) . 43 Au nom du Comité de salut public, un membre [BARERE] présente un rapport et donne lecture d’une adresse sur les perfidies et tous les genres de corruptions et de crimes employés par le gouvernement anglais (2) . BARERE : Citoyens, dans la combinaison des crimes que l’Angleterre soudoie au milieu de nous, et qu’elle fait exécuter par les factions qu’elle a enrôlées à Paris, il s’agissait, il y a deux jours, de l’assassinat de Robespierre et de Collot (1) Mon., XX, 565. (2) P.V., XXXVIII, 137. SÉANCE DU 7 PRAIRIAL AN II (26 MAI 1794) - N° 43 33 d’Herbois. Le lendemain il s’agissait encore de l’assassinat de Robespierre. Le 4 prairial, à 9 heures du soir, il s’est présenté une jeune fille dans la maison du citoyen Duplaix, chez qui Robespierre demeure; elle demande à parler à ce représentant du peuple ; on lui répond qu’il est sorti, l’inconnue témoigne de l’humeur, et dit, d’un ton insolent, qu’il était bien étonnant qu’il ne se trouvât point dans son appartement, étant fonctionnaire public, et qu’il était fait pour répondre à tous ceux qui pouvaient se présenter chez lui. Ce ton est celui de tous les ex-nobles, de ces fanatiques, de ces contre-révolutionnaires et de leurs partisans, qu’une mesure de police générale vous a obligés de faire sortir de Paris; c’est avec ces formes que, dans les premiers jours de l’exécution des décrets des 26 et 27 germinal, ils se présentaient dans nos habitations. Aussi ce ton causa quelque surprise aux citoyens Didier et Boulanger, qui crurent, dans les circonstances présentes, devoir conduire cette inconnue au Comité de sûreté générale. Voici les déclarations de ces citoyens et l’interrogatoire de la fille Renault, qui, à 20 ans, est une royaliste aussi fanatique que le plus invétéré des courtisans. [C. de sûreté générale et de surveillance , 4 prair. II]. A 9 heures du soir, s’est présentée une jeune fille dans la maison du citoyen Duplaix, a demandé Robespierre, et a dit qu’elle le cherchait depuis 3 heures. Sur la réponse faite par la citoyenne Duplaix, fille aînée, que Robespierre n’y était pas, cette jeune fille a dit qu’il était bien étonnant qu’il ne se trouvât point chez lui, et a témoigné beaucoup d’impertinence et d’humeur, en disant qu’il était fonctionnaire public, et qu’il était fait pour répondre à tous ceux qui pouvaient se présenter chez lui; ce qui nous a obligés d’après ses menaces, de la conduire au Comité de sûreté générale. Signé : Châtelet. « Nous affirmons de plus, qu’en la conduisant au Comité, elle nous a dit que, dans l’ancien régime, lorsque l’on se présentait chez le roi, l’on entrait tout de suite. Nous lui avons demandé si elle aimerait mieux avoir un roi; elle nous a répondu qu’elle verserait tout son sang pour en avoir un, que c’était son opinion, et que nous étions des tyrans ». Signé : Didier et Boulanger. [C. de sûreté générale et de surveillance; 4 p rair. II]. A été amenée au C. de sûreté générale une fille à laquelle ont été faites les questions suivantes : « D. Quel est votre nom, votre âge, votre profession et votre demeure ? — R. Je m’appelle Aimée-Cécile Renault, âgée de 20 ans, demeurant chez mon père, marchand papetier, rue de la Lanterne, près celle des Marmouzets, section de la Cité. « D. Où avez-vous été arrêtée, et par qui ? — R. J’ai été arrêtée dans la maison de Robespierre et par des gens que je ne connais pas. « D. Quel motif vous avait amenée chez le représentant du peuple Robespierre ? — R. Pour lui parler. « D. Quelle était l’affaire dont vous vouliez lui parler ? — R. C’est selon que je l’aurais trouvé. « D. Quelqu’un vous avait-il chargé de lui parler ? — R. Non. « D. Aviez-vous quelque mémoire à lui présenter ? — R. Cela ne vous regarde pas. « D. Connaissiez-vous le citoyen Robespierre ? — R. Non, puisque je demandais à le connaître. « D. Quel était le motif qui vous déterminait à vouloir le connaître ? — R. Pour voir s’il me convenait. « Interpellée d’expliquer clairement ce qu’elle entendait par ces mots, pour voir s’il me convenait. — R. Je n’ai rien à répondre, ne m’interrogez pas davantage. « D. Lorsque vous vous êtes présentée dans la maison du citoyen Robespierre, n’avez-vous pas témoigné de l’humeur de ce que vous ne trouviez pas chez lui ? — R. Oui. « D. Connaissez-vous la rue de l’Estrapade ? — R. Non. « D. Avez-vous dit aux citoyens qui vous ont arrêtée chez le citoyen Robespierre, que vous verseriez tout votre sang s’il le fallait pour avoir un roi ? — R. Oui, je l’ai dit. « D. Le soutenez-vous ? — R. Oui. « D. Quels étaient les motifs qui vous ont déterminée et qui vous déterminent encore à désirez un tyran ? — R. Je désire un roi, parce que j’en aime mieux un que 50 000 tyrans, et je n’ai été chez Robespierre que pour voir comment était fait un tyran. « De tout quoi nous avons dressé le présent procès-verbal, dont il a été fait lecture à la nommé Renault, qui a déclaré que ses réponses contiennent vérité, et qu’elle y persiste; et n’a signé avec nous, déclarant qu’elle ne signerait jamais. Et avant la signature, il a été représenté à la nommé Renault un paquet qu’elle avait déposé chez le citoyen Payen, limonadier, avant de se rendre chez Robespierre, ledit paquet contenant un habillement complet de femme. «Interpellée de déclarer quel était son dessein en se munissant de ces diverses hardes, « A répondu que, s’attendant bien à aller dans le lieu où elle va sûrement être conduite, elle était bien aise d’avoir du linge pour son usage. « D. De quel lieu entendez-vous parler ? — R. De la prison, pour aller de là à la guillotine. « D. Quel usage vous proposiez-vous de faire des deux couteaux qu’on a trouvé sur vous ? — R. Aucun, n’ayant intention de faire du mal à personne. Lecture faite de nouveau du présent procès-verbal, la nommée Renault y a persisté comme dessus; et n’a signé avec nous, déclarant qu’elle ne signait jamais. [Suivent les signatures des membres du C. de sûreté générale]. BARERE : Ne croyez pae que ces lumières acquises par les Comités sur ces complots meurtriers soient les seules que nous puissions présenter à vos recherches. Le coup qui devait être porté avait plusieurs moyens d’exécution par des scélérats pris dans diverses classes. Vous avez déjà vu un ancien domestique de l’émigré Bertin, un protégé d’un chambellan du tyran d’Autriche, lié avec d’autres scélérats détenus ou 3 SÉANCE DU 7 PRAIRIAL AN II (26 MAI 1794) - N° 43 33 d’Herbois. Le lendemain il s’agissait encore de l’assassinat de Robespierre. Le 4 prairial, à 9 heures du soir, il s’est présenté une jeune fille dans la maison du citoyen Duplaix, chez qui Robespierre demeure; elle demande à parler à ce représentant du peuple ; on lui répond qu’il est sorti, l’inconnue témoigne de l’humeur, et dit, d’un ton insolent, qu’il était bien étonnant qu’il ne se trouvât point dans son appartement, étant fonctionnaire public, et qu’il était fait pour répondre à tous ceux qui pouvaient se présenter chez lui. Ce ton est celui de tous les ex-nobles, de ces fanatiques, de ces contre-révolutionnaires et de leurs partisans, qu’une mesure de police générale vous a obligés de faire sortir de Paris; c’est avec ces formes que, dans les premiers jours de l’exécution des décrets des 26 et 27 germinal, ils se présentaient dans nos habitations. Aussi ce ton causa quelque surprise aux citoyens Didier et Boulanger, qui crurent, dans les circonstances présentes, devoir conduire cette inconnue au Comité de sûreté générale. Voici les déclarations de ces citoyens et l’interrogatoire de la fille Renault, qui, à 20 ans, est une royaliste aussi fanatique que le plus invétéré des courtisans. [C. de sûreté générale et de surveillance , 4 prair. II]. A 9 heures du soir, s’est présentée une jeune fille dans la maison du citoyen Duplaix, a demandé Robespierre, et a dit qu’elle le cherchait depuis 3 heures. Sur la réponse faite par la citoyenne Duplaix, fille aînée, que Robespierre n’y était pas, cette jeune fille a dit qu’il était bien étonnant qu’il ne se trouvât point chez lui, et a témoigné beaucoup d’impertinence et d’humeur, en disant qu’il était fonctionnaire public, et qu’il était fait pour répondre à tous ceux qui pouvaient se présenter chez lui; ce qui nous a obligés d’après ses menaces, de la conduire au Comité de sûreté générale. Signé : Châtelet. « Nous affirmons de plus, qu’en la conduisant au Comité, elle nous a dit que, dans l’ancien régime, lorsque l’on se présentait chez le roi, l’on entrait tout de suite. Nous lui avons demandé si elle aimerait mieux avoir un roi; elle nous a répondu qu’elle verserait tout son sang pour en avoir un, que c’était son opinion, et que nous étions des tyrans ». Signé : Didier et Boulanger. [C. de sûreté générale et de surveillance; 4 p rair. II]. A été amenée au C. de sûreté générale une fille à laquelle ont été faites les questions suivantes : « D. Quel est votre nom, votre âge, votre profession et votre demeure ? — R. Je m’appelle Aimée-Cécile Renault, âgée de 20 ans, demeurant chez mon père, marchand papetier, rue de la Lanterne, près celle des Marmouzets, section de la Cité. « D. Où avez-vous été arrêtée, et par qui ? — R. J’ai été arrêtée dans la maison de Robespierre et par des gens que je ne connais pas. « D. Quel motif vous avait amenée chez le représentant du peuple Robespierre ? — R. Pour lui parler. « D. Quelle était l’affaire dont vous vouliez lui parler ? — R. C’est selon que je l’aurais trouvé. « D. Quelqu’un vous avait-il chargé de lui parler ? — R. Non. « D. Aviez-vous quelque mémoire à lui présenter ? — R. Cela ne vous regarde pas. « D. Connaissiez-vous le citoyen Robespierre ? — R. Non, puisque je demandais à le connaître. « D. Quel était le motif qui vous déterminait à vouloir le connaître ? — R. Pour voir s’il me convenait. « Interpellée d’expliquer clairement ce qu’elle entendait par ces mots, pour voir s’il me convenait. — R. Je n’ai rien à répondre, ne m’interrogez pas davantage. « D. Lorsque vous vous êtes présentée dans la maison du citoyen Robespierre, n’avez-vous pas témoigné de l’humeur de ce que vous ne trouviez pas chez lui ? — R. Oui. « D. Connaissez-vous la rue de l’Estrapade ? — R. Non. « D. Avez-vous dit aux citoyens qui vous ont arrêtée chez le citoyen Robespierre, que vous verseriez tout votre sang s’il le fallait pour avoir un roi ? — R. Oui, je l’ai dit. « D. Le soutenez-vous ? — R. Oui. « D. Quels étaient les motifs qui vous ont déterminée et qui vous déterminent encore à désirez un tyran ? — R. Je désire un roi, parce que j’en aime mieux un que 50 000 tyrans, et je n’ai été chez Robespierre que pour voir comment était fait un tyran. « De tout quoi nous avons dressé le présent procès-verbal, dont il a été fait lecture à la nommé Renault, qui a déclaré que ses réponses contiennent vérité, et qu’elle y persiste; et n’a signé avec nous, déclarant qu’elle ne signerait jamais. Et avant la signature, il a été représenté à la nommé Renault un paquet qu’elle avait déposé chez le citoyen Payen, limonadier, avant de se rendre chez Robespierre, ledit paquet contenant un habillement complet de femme. «Interpellée de déclarer quel était son dessein en se munissant de ces diverses hardes, « A répondu que, s’attendant bien à aller dans le lieu où elle va sûrement être conduite, elle était bien aise d’avoir du linge pour son usage. « D. De quel lieu entendez-vous parler ? — R. De la prison, pour aller de là à la guillotine. « D. Quel usage vous proposiez-vous de faire des deux couteaux qu’on a trouvé sur vous ? — R. Aucun, n’ayant intention de faire du mal à personne. Lecture faite de nouveau du présent procès-verbal, la nommée Renault y a persisté comme dessus; et n’a signé avec nous, déclarant qu’elle ne signait jamais. [Suivent les signatures des membres du C. de sûreté générale]. BARERE : Ne croyez pae que ces lumières acquises par les Comités sur ces complots meurtriers soient les seules que nous puissions présenter à vos recherches. Le coup qui devait être porté avait plusieurs moyens d’exécution par des scélérats pris dans diverses classes. Vous avez déjà vu un ancien domestique de l’émigré Bertin, un protégé d’un chambellan du tyran d’Autriche, lié avec d’autres scélérats détenus ou 3 34 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE arrêtés, assassiner dans sa maison Collot d’Her-bois, n’ayant pu frapper Robespierre dans le vestibule du Comité. Je viens de vous montrer une jeune fille courant, le lendemain de cette scène horrible, dans la maison de Robespierre, murmurant de ne pas l’y rencontrer, disant qu’elle venait voir un tyran, et qu’elle donnerait son sang pour qu’il y eût un roi. Maintenant vous verrez un ex-moine attaché à la même faction des assassins des représentants du peuple, ex-prêtre d’autant plus dangereux qu’il occupe une place qui n’est due qu’au patriotisme, et qu’il tient dans ses mains la vie et l’existence même des défenseurs de la patrie blessés dans les combats. Le Comité révolutionnaire de Choisy-sur-Seine a envoyé hier au Comité de sûreté générale un nommé Saintanax, chirurgien à l’hôpital militaire établi près cette commune, et qui, par ses propos contre-révolutionnaires, a fait soupçonner qu’il était complice de l’assassin de Collot d’Herbois. Vous en jugerez par son interrogatoire, dont je vais vous présenter seulement un extrait; il suffira pour vous donner une juste idée de ces scélérats dont les représentants du peuple sont investis. « Sur les 11 heures du matin, du 5 prairial, chez un limonadier de Choisy-sur-Seine, un citoyen donnait avec regret la nouvelle d’un assassinat prémédité sur les représentants du peuple Collot d’Herbois et Robespierre, et se félicitait de ce que le coup n’avait pas eu de suite pour les autres représentants. Le citoyen Saintanax, ancien moine de Bordeaux, se plaignant d’avoir perdu ses revenus, et de plus officier de santé, ayant quitté son poste et son service pour venir à Paris le 4 prairial, et ayant été mené au Comité de la section des Lombards, pour une querelle prise dans un mauvais lieu, détruisit leur satisfaction en protestant que tôt ou tard ils seraient assassinés, et il proféra des injures contre Robespierre et Collot d’Herbois. « Le citoyen étonné lui demande si ces propos sont l’effet de son déjeuner. « Saintanax répond qu’il n’était point ivre et qu’il possédait toute sa raison, puisqu’il venait de faire un détail d’ostéologie, et qu’il était doué d’une heureuse mémoire. «Un marchand lui présente des cocardes tricolores; il les jette par terre, et les foule aux pieds. « Le marchand se plaint, la dispute s’échauffe; Saintanax veut courir sur lui avec son couteau; les spectateurs les arrêtent. «Plusieurs déclarations des citoyens entendus par le Comité révolutionnaire de Choisy-sur-Seine présentent les mêmes faits avec des circonstances plus aggravantes. L’ex-moine ne cesse de proférer des injures contre Robespierre et surtout contre Collot d’Herbois, injures qu’il motive sur les affaires d’Avignon. Il dit que Collot d’Herbois ne sera plus manqué, et il ajoute d’autres prophéties de ce genre *. BARERE poursuit : Citoyens, serons-nous toujours condamnés à ne devenir énergiques que par les événements, et à ne juger que par les faits qui se passent sous nos yeux ? Trop longtemps nous nous sommes reposés sur les conspirations des Hébert et des Danton; nous dormions sur un volcan, et la patrie a été sur le point de périr. Encore quelques jours d’impunité pour les traîtres à la patrie, et la patrie, livrée à l’Angleterre et à l’Autriche, n’était plus qu’un monceau de ruines et de cendres recouvertes des crimes et des vengeances du despotisme. Du temps de ces conspirateurs masqués en patriotes, il y avait une circulation permanente de calomnies atroces et de projets de mort contre certains membres de la Convention; circulation établie de Londres à Paris, et de Westminster dans les principales parties de la République. Nous étions mis l’un après l’autre à l’ordre du jour, sur le grand livre des forfaits de l’Angleterre; à l’ordre du jour dans les feuilles dégoûtantes et contre-révolutionnaires du Père Du-chesne ; à l’ordre du jour dans les soupers liber-ticides des banquiers Kocq et des frères Junius; à l’ordre du jour dans les prescriptions prophétisées par les journaux anglais, et dans les émeutes préparées par quelques scélérats à Paris; à l’ordre du jour dans les prisons et les maisons d’arrêt qui renferment les ennemis de la République; à l’ordre du jour dans les ateliers où le ministère anglais fait forger des poignards pour les scélérats qu’il entretient secrètement près les sections de Paris; enfin, à l’ordre du jour dans les ports de l’Angleterre et de la Flandre, d’où il envoie à ses affidés encore d’autres poignards dans une de nos villes principales sur les frontières du Nord. Il n’y a que peu de jours que les journaux de la Belgique, de l’Allemagne et de l’Angleterre annonçaient que les poignards avaient frappé la Convention nationale, et qu’une révolution s’y était opérée. Il n’y a que peu de jours que les journaux anglais disaient que les membres des Comités de salut public et de sûreté générale avaient été massacrés, et que tout était changé à Paris. Il n’y a que peu de jours que les journaux anglais prophétisaient que bientôt Robespierre ne serait plus. Alors même il répondait dans cette tribune par des discours énergiques et par des rapports destructeurs des crimes anglais et vengeurs de leurs conspirations parricides et fanatiques. Alors les journaux anglais ont changé de couleur; si Robespierre n’a pas péri sous le fer que les ministres de Georges avaient forgé à Londres, et par les mains criminelles qu’ils soudoient à Paris, du moins ils ont cru qu’il ne pourrait pas échapper aux calomnies qu’ils avaient préparées, ou à la haine qu’ils se proposaient d’exciter contre lui en l’érigeant en chef des armées de la République. Je tiens à la main le journal que paie le cabinet de Londres, le Courrier de VEurope, du mardi 6 mai. (Il est tout récent). Voyez comme il parle de nos victoires, des troupes de la République, et du représentant qu’ils veulent faire assassiner deux fois, en lui ôtant la confiance du peuple, si bien méritée, et enfin en lui perçant le sein. [Bruges, 2 mai]. «Les soldats de Robespierre ont attaqué Me-nin, dimanche 27 avril; il n’y avait d’autre artillerie que des pièces de campagne. Les régicides s’en étant aperçus s’approchèrent de la ville à portée de fusil, et y jetèrent des obus qui mirent le feu à plusieurs caissons... Les émigrés, commandés par M. Vilaine, sortirent de Menin le mardi 29, entre 10 et 11 heures du soir, par la 34 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE arrêtés, assassiner dans sa maison Collot d’Her-bois, n’ayant pu frapper Robespierre dans le vestibule du Comité. Je viens de vous montrer une jeune fille courant, le lendemain de cette scène horrible, dans la maison de Robespierre, murmurant de ne pas l’y rencontrer, disant qu’elle venait voir un tyran, et qu’elle donnerait son sang pour qu’il y eût un roi. Maintenant vous verrez un ex-moine attaché à la même faction des assassins des représentants du peuple, ex-prêtre d’autant plus dangereux qu’il occupe une place qui n’est due qu’au patriotisme, et qu’il tient dans ses mains la vie et l’existence même des défenseurs de la patrie blessés dans les combats. Le Comité révolutionnaire de Choisy-sur-Seine a envoyé hier au Comité de sûreté générale un nommé Saintanax, chirurgien à l’hôpital militaire établi près cette commune, et qui, par ses propos contre-révolutionnaires, a fait soupçonner qu’il était complice de l’assassin de Collot d’Herbois. Vous en jugerez par son interrogatoire, dont je vais vous présenter seulement un extrait; il suffira pour vous donner une juste idée de ces scélérats dont les représentants du peuple sont investis. « Sur les 11 heures du matin, du 5 prairial, chez un limonadier de Choisy-sur-Seine, un citoyen donnait avec regret la nouvelle d’un assassinat prémédité sur les représentants du peuple Collot d’Herbois et Robespierre, et se félicitait de ce que le coup n’avait pas eu de suite pour les autres représentants. Le citoyen Saintanax, ancien moine de Bordeaux, se plaignant d’avoir perdu ses revenus, et de plus officier de santé, ayant quitté son poste et son service pour venir à Paris le 4 prairial, et ayant été mené au Comité de la section des Lombards, pour une querelle prise dans un mauvais lieu, détruisit leur satisfaction en protestant que tôt ou tard ils seraient assassinés, et il proféra des injures contre Robespierre et Collot d’Herbois. « Le citoyen étonné lui demande si ces propos sont l’effet de son déjeuner. « Saintanax répond qu’il n’était point ivre et qu’il possédait toute sa raison, puisqu’il venait de faire un détail d’ostéologie, et qu’il était doué d’une heureuse mémoire. «Un marchand lui présente des cocardes tricolores; il les jette par terre, et les foule aux pieds. « Le marchand se plaint, la dispute s’échauffe; Saintanax veut courir sur lui avec son couteau; les spectateurs les arrêtent. «Plusieurs déclarations des citoyens entendus par le Comité révolutionnaire de Choisy-sur-Seine présentent les mêmes faits avec des circonstances plus aggravantes. L’ex-moine ne cesse de proférer des injures contre Robespierre et surtout contre Collot d’Herbois, injures qu’il motive sur les affaires d’Avignon. Il dit que Collot d’Herbois ne sera plus manqué, et il ajoute d’autres prophéties de ce genre *. BARERE poursuit : Citoyens, serons-nous toujours condamnés à ne devenir énergiques que par les événements, et à ne juger que par les faits qui se passent sous nos yeux ? Trop longtemps nous nous sommes reposés sur les conspirations des Hébert et des Danton; nous dormions sur un volcan, et la patrie a été sur le point de périr. Encore quelques jours d’impunité pour les traîtres à la patrie, et la patrie, livrée à l’Angleterre et à l’Autriche, n’était plus qu’un monceau de ruines et de cendres recouvertes des crimes et des vengeances du despotisme. Du temps de ces conspirateurs masqués en patriotes, il y avait une circulation permanente de calomnies atroces et de projets de mort contre certains membres de la Convention; circulation établie de Londres à Paris, et de Westminster dans les principales parties de la République. Nous étions mis l’un après l’autre à l’ordre du jour, sur le grand livre des forfaits de l’Angleterre; à l’ordre du jour dans les feuilles dégoûtantes et contre-révolutionnaires du Père Du-chesne ; à l’ordre du jour dans les soupers liber-ticides des banquiers Kocq et des frères Junius; à l’ordre du jour dans les prescriptions prophétisées par les journaux anglais, et dans les émeutes préparées par quelques scélérats à Paris; à l’ordre du jour dans les prisons et les maisons d’arrêt qui renferment les ennemis de la République; à l’ordre du jour dans les ateliers où le ministère anglais fait forger des poignards pour les scélérats qu’il entretient secrètement près les sections de Paris; enfin, à l’ordre du jour dans les ports de l’Angleterre et de la Flandre, d’où il envoie à ses affidés encore d’autres poignards dans une de nos villes principales sur les frontières du Nord. Il n’y a que peu de jours que les journaux de la Belgique, de l’Allemagne et de l’Angleterre annonçaient que les poignards avaient frappé la Convention nationale, et qu’une révolution s’y était opérée. Il n’y a que peu de jours que les journaux anglais disaient que les membres des Comités de salut public et de sûreté générale avaient été massacrés, et que tout était changé à Paris. Il n’y a que peu de jours que les journaux anglais prophétisaient que bientôt Robespierre ne serait plus. Alors même il répondait dans cette tribune par des discours énergiques et par des rapports destructeurs des crimes anglais et vengeurs de leurs conspirations parricides et fanatiques. Alors les journaux anglais ont changé de couleur; si Robespierre n’a pas péri sous le fer que les ministres de Georges avaient forgé à Londres, et par les mains criminelles qu’ils soudoient à Paris, du moins ils ont cru qu’il ne pourrait pas échapper aux calomnies qu’ils avaient préparées, ou à la haine qu’ils se proposaient d’exciter contre lui en l’érigeant en chef des armées de la République. Je tiens à la main le journal que paie le cabinet de Londres, le Courrier de VEurope, du mardi 6 mai. (Il est tout récent). Voyez comme il parle de nos victoires, des troupes de la République, et du représentant qu’ils veulent faire assassiner deux fois, en lui ôtant la confiance du peuple, si bien méritée, et enfin en lui perçant le sein. [Bruges, 2 mai]. «Les soldats de Robespierre ont attaqué Me-nin, dimanche 27 avril; il n’y avait d’autre artillerie que des pièces de campagne. Les régicides s’en étant aperçus s’approchèrent de la ville à portée de fusil, et y jetèrent des obus qui mirent le feu à plusieurs caissons... Les émigrés, commandés par M. Vilaine, sortirent de Menin le mardi 29, entre 10 et 11 heures du soir, par la SÉANCE DU 7 PRAIRIAL AN II (26 MAI 1794) - N° 43 35 porte opposée à celle de Bruges, suivirent le long des murs et tournèrent jusqu’au faubourg de Bruges où il y avait 400 soldats de Robespierre qui se reposaient tranquillement dans les maisons, et ne s’attendaient nullement à la visite de nos braves. Pas un seul n’échappa; ils furent tous égorgés ». Voici une nouvelle preuve : « 7 à 800 soldats de Robespierre se sont avancés vers Furmes, le 15, pour enlever les bestiaux et ravager les environs. 80 chasseurs de Royal-Emigrant, commandés par M. Najac, leur ont fait tête pendant 3 heures. La perte des Carmagnoles est de 4 hommes ». Plus loin, le même journaliste britannique ajoute : «Des lettres d’Ostende, datées du vendredi, nous apprennent que les soldats de Robespierre évacuent les avant-postes du côté de Courtray et de Menin, et qu’ils se retirent vers Lille avec grande précipitation. 18 000 Carmagnoles sont entrés dans Courtray le 26 ou le 27, jour de l’ouverture de la foire; il est aisé de juger quel a dû être le pillage. « Un détachement considérable d’anglais et d’autrichiens, commandés par sir William Ers-kine, et 3 régiments de cavalerie, sous les ordres de sir Robert Leurie, ont passé Valenciennes le 28 et se sont portés sur la gauche de Saint-Amand. Nous devons nous attendre à quelque événement qui compensera ce qu’a eu de fâcheux cette irruption de barbares. « On écrit de Luxembourg, en date du 20, que les soldats de Robespierre, rassasiés de pillage et de crimes, ont évacué Arlon». Je croirais faire injure à la puissance du peuple, à l’autorité de la Convention, aux travaux constants du Comité, au patriotisme pur de Robespierre et au courage des armées [poursuit BARERE], si je pensais seulement à réfuter un instant ces calomnies plus bêtes qu’atroces, et qui ne sont propres qu’à tromper des fripons de cour, à distraire les hautes seigneuries du parlement, et à amuser des anglais dans leurs tavernes. J’ai rapporté ces faits des journaux anglais pour faire sentir la relation intime qui se trouve entre les calomnies publiées à Londres et les crimes commis à Paris, entre les moyens que le léopard britannique emploie au dehors et au dedans de la République qu’il voudrait dévorer, et les auxiliaires perfides qu’il compte au sein de la France; entre l’agent anglais qui calomnie Robespierre dans le Courrier de l’Europe, et l’agent anglais qui lui envoie une nouvelle Cor-day dans Paris. Ce sont ces mêmes anglais et leurs fidèles échos en France qui disaient dans leurs journaux, il y a deux mois, en parlant des armées françaises : Les hordes conventionnelles ont fait telle opération; et ils le disaient comme si le peuple français n’était pour rien dans cette guerre, et comme si la République n’existait pas. Ce sont ces mêmes anglais et leurs complices en France qui ont dit ensuite : Le Comité de salut public a ordonné telle mesure; comme si la représentation nationale était toute dans le Comité, et comme si la Convention n’existait pas. Ce sont ces mêmes anglais et leurs partisans en France qui disent aujourd’hui : Robespierre a fait ordonner, ou bien les soldats de Robespierre ont pris telle place; comme si le Comité de salut public n’existait pas, et comme si le gouvernement était dans un seul homme. Ainsi donc les anglais ont toujours voulu égarer l’opinion des départements par leurs intrigues, et l’opinion de l’Europe par leurs journaux. Ils ont voulu faire croire qu’à la première époque de notre liberté nous ne nous battions que pour le choix des tyrans, et qu’un changement de roi ou de dynastie était notre unique ambition politique. Ils ont voulu insinuer ensuite, et leurs échos ne cessaient de répéter en France, qu’à la seconde époque de notre liberté il y avait un projet de dictadure. Cette dictature, ils la portaient sur le Comité de salut public, pour la transférer ensuite sur la tête de Robespierre. C’est un fantôme de royauté que les imposteurs britanniques promenaient à leur gré sur les têtes qu’ils voulaient perdre, ou plutôt sur les républicains incorruptibles dont les travaux, secondés par le courage des armées et la puissance du peuple, doivent anéantir l’Angleterre. Ils parlaient de dictature pour rabaisser la Convention, pour dégrader les Comités de salut public et de sûreté générale, pour effrayer les esprits faibles, et pour exciter le peuple égaré par les accusations contre-révolutionnaires, et pour donner le signal de meurtre sur les représentants du peuple. Sommes-nous donc revenus au temps des Brissot et des Guadet, lorsque l’insidieux Louvet broyait des poisons contre Robespierre ? Sommes-nous encore à l’époque de la conspiration patriotiquement déguisée des seconds Capet, des Orléans ? et faut-il encore des efforts pour préserver les amis de la liberté et les armées de la République des nouveaux pièges que l’Angleterre lui tend dans les journaux perfides dont elle couvre les départements de nos frontières, et avec lesquels elle veut corrompre les soldats de la liberté ? C’est ainsi qu’on voit aujourd’hui, sous une hypocrite inquiétude pour les représentants du peuple, proposer de leur donner des gardes, de les entourer du vain appareil du pouvoir, de les distinguer des autres citoyens. Amis de la liberté, défiez-vous de toutes ces propositions insidieuses; ils ne sont pas les partisans sincères de la République, ils ne sont pas les défenseurs vrais de la représentation nationale ceux qui, dans de pareilles circonstances, dépassent les mesures décrétées par la Convention. La véritable garde des représentants du peuple, celle qui n’est ni fédéraliste ni suspecte, celle qui déjouera tous les complots, c’est l’amour du peuple, résultats des bonnes lois, le véritable courage des représentants, c’est la conscience du bon citoyen qui aime et veut sincèrement la République. 5 années d’expérience révolutionnaire ont instruit le peuple français. Non, il ne se méprendra plus ni aux exagérations constantes, ni au costume patriotique des hommes qui sont les ennemis naturels de l’égalité et de la liberté, ou des ambitieux qui veulent s’en faire un patrimoine, ni aux gazettes si artistement composées pour perdre l’esprit public et égarer l’opinion nationale. Ce sont donc les tyrans qui, pour nous faire haïr, sont obligés de nous faire ressembler à eux, de faire parler des troupes d’un député comme on parle des troupes de François, de SÉANCE DU 7 PRAIRIAL AN II (26 MAI 1794) - N° 43 35 porte opposée à celle de Bruges, suivirent le long des murs et tournèrent jusqu’au faubourg de Bruges où il y avait 400 soldats de Robespierre qui se reposaient tranquillement dans les maisons, et ne s’attendaient nullement à la visite de nos braves. Pas un seul n’échappa; ils furent tous égorgés ». Voici une nouvelle preuve : « 7 à 800 soldats de Robespierre se sont avancés vers Furmes, le 15, pour enlever les bestiaux et ravager les environs. 80 chasseurs de Royal-Emigrant, commandés par M. Najac, leur ont fait tête pendant 3 heures. La perte des Carmagnoles est de 4 hommes ». Plus loin, le même journaliste britannique ajoute : «Des lettres d’Ostende, datées du vendredi, nous apprennent que les soldats de Robespierre évacuent les avant-postes du côté de Courtray et de Menin, et qu’ils se retirent vers Lille avec grande précipitation. 18 000 Carmagnoles sont entrés dans Courtray le 26 ou le 27, jour de l’ouverture de la foire; il est aisé de juger quel a dû être le pillage. « Un détachement considérable d’anglais et d’autrichiens, commandés par sir William Ers-kine, et 3 régiments de cavalerie, sous les ordres de sir Robert Leurie, ont passé Valenciennes le 28 et se sont portés sur la gauche de Saint-Amand. Nous devons nous attendre à quelque événement qui compensera ce qu’a eu de fâcheux cette irruption de barbares. « On écrit de Luxembourg, en date du 20, que les soldats de Robespierre, rassasiés de pillage et de crimes, ont évacué Arlon». Je croirais faire injure à la puissance du peuple, à l’autorité de la Convention, aux travaux constants du Comité, au patriotisme pur de Robespierre et au courage des armées [poursuit BARERE], si je pensais seulement à réfuter un instant ces calomnies plus bêtes qu’atroces, et qui ne sont propres qu’à tromper des fripons de cour, à distraire les hautes seigneuries du parlement, et à amuser des anglais dans leurs tavernes. J’ai rapporté ces faits des journaux anglais pour faire sentir la relation intime qui se trouve entre les calomnies publiées à Londres et les crimes commis à Paris, entre les moyens que le léopard britannique emploie au dehors et au dedans de la République qu’il voudrait dévorer, et les auxiliaires perfides qu’il compte au sein de la France; entre l’agent anglais qui calomnie Robespierre dans le Courrier de l’Europe, et l’agent anglais qui lui envoie une nouvelle Cor-day dans Paris. Ce sont ces mêmes anglais et leurs fidèles échos en France qui disaient dans leurs journaux, il y a deux mois, en parlant des armées françaises : Les hordes conventionnelles ont fait telle opération; et ils le disaient comme si le peuple français n’était pour rien dans cette guerre, et comme si la République n’existait pas. Ce sont ces mêmes anglais et leurs complices en France qui ont dit ensuite : Le Comité de salut public a ordonné telle mesure; comme si la représentation nationale était toute dans le Comité, et comme si la Convention n’existait pas. Ce sont ces mêmes anglais et leurs partisans en France qui disent aujourd’hui : Robespierre a fait ordonner, ou bien les soldats de Robespierre ont pris telle place; comme si le Comité de salut public n’existait pas, et comme si le gouvernement était dans un seul homme. Ainsi donc les anglais ont toujours voulu égarer l’opinion des départements par leurs intrigues, et l’opinion de l’Europe par leurs journaux. Ils ont voulu faire croire qu’à la première époque de notre liberté nous ne nous battions que pour le choix des tyrans, et qu’un changement de roi ou de dynastie était notre unique ambition politique. Ils ont voulu insinuer ensuite, et leurs échos ne cessaient de répéter en France, qu’à la seconde époque de notre liberté il y avait un projet de dictadure. Cette dictature, ils la portaient sur le Comité de salut public, pour la transférer ensuite sur la tête de Robespierre. C’est un fantôme de royauté que les imposteurs britanniques promenaient à leur gré sur les têtes qu’ils voulaient perdre, ou plutôt sur les républicains incorruptibles dont les travaux, secondés par le courage des armées et la puissance du peuple, doivent anéantir l’Angleterre. Ils parlaient de dictature pour rabaisser la Convention, pour dégrader les Comités de salut public et de sûreté générale, pour effrayer les esprits faibles, et pour exciter le peuple égaré par les accusations contre-révolutionnaires, et pour donner le signal de meurtre sur les représentants du peuple. Sommes-nous donc revenus au temps des Brissot et des Guadet, lorsque l’insidieux Louvet broyait des poisons contre Robespierre ? Sommes-nous encore à l’époque de la conspiration patriotiquement déguisée des seconds Capet, des Orléans ? et faut-il encore des efforts pour préserver les amis de la liberté et les armées de la République des nouveaux pièges que l’Angleterre lui tend dans les journaux perfides dont elle couvre les départements de nos frontières, et avec lesquels elle veut corrompre les soldats de la liberté ? C’est ainsi qu’on voit aujourd’hui, sous une hypocrite inquiétude pour les représentants du peuple, proposer de leur donner des gardes, de les entourer du vain appareil du pouvoir, de les distinguer des autres citoyens. Amis de la liberté, défiez-vous de toutes ces propositions insidieuses; ils ne sont pas les partisans sincères de la République, ils ne sont pas les défenseurs vrais de la représentation nationale ceux qui, dans de pareilles circonstances, dépassent les mesures décrétées par la Convention. La véritable garde des représentants du peuple, celle qui n’est ni fédéraliste ni suspecte, celle qui déjouera tous les complots, c’est l’amour du peuple, résultats des bonnes lois, le véritable courage des représentants, c’est la conscience du bon citoyen qui aime et veut sincèrement la République. 5 années d’expérience révolutionnaire ont instruit le peuple français. Non, il ne se méprendra plus ni aux exagérations constantes, ni au costume patriotique des hommes qui sont les ennemis naturels de l’égalité et de la liberté, ou des ambitieux qui veulent s’en faire un patrimoine, ni aux gazettes si artistement composées pour perdre l’esprit public et égarer l’opinion nationale. Ce sont donc les tyrans qui, pour nous faire haïr, sont obligés de nous faire ressembler à eux, de faire parler des troupes d’un député comme on parle des troupes de François, de 36 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Georges ou de Guillaume; ce sont donc les tyrans qui, pour s’assurer de la haine de quelques mauvais français, les enivrent de crimes, les gorgent de guinées, les fanatisent de royalisme, et voudraient nous faire passer pour des tyrans, biens convaincus que tout Français déteste la tyrannie. Oui, spéculateurs britanniques, marchands de trahisons et d’esclaves, banquiers de crimes et de contre-révolutionnaires, nous détestons la tyrannie car nous vous abhorrons. La haine de Rome contre Carthage revit dans les âmes françaises, comme la foi punique revit dans les cœurs anglais. Crédules que nous étions, un sentiment de préférence et d’estime nous attachait aux habitants de l’Angleterre. Dans les derniers jours de notre esclavage, nous invoquions sa liberté, nous croyions à sa philanthropie, et nous tournions des regards avides vers sa constitution. Cette erreur dangereuse, ils nous l’avaient donnée, les perfides; ils nous l’avaient donnée avec leurs modes pour nous vendre leur luxe et ruiner nos manufactures; ils nous l’avaient donnée avec leurs livres, pour nous empêcher de jouir jamais des bienfaits de l’égalité et d’aspirer à une constitution républicaine. Un écrivain mercenaire avait célébré la constitution britannique avec son roi héréditaire, son veto absolu, sa liste civile énorme, ses ministres agioteurs, son Parlement septénaire, sa prérogative royale immense, les impôts onéreux; et bientôt le livre funeste, composé par un génevois appelé Delolme, eut plusieurs éditions en langue française pour inonder l’Europe et nous montrer la constitution royale, ministérielle et vénale de nos ennemis, comme le maximum de la liberté politique. Tel a été pendant les 2 premières Assemblées nationales, l’ascendant pris en France par les émissaires anglais et par leurs missionnaires constitutionnels, que nous cherchons toujours à imiter les lois et les usages de nos voisins. On eût dit que nous ne voulions, que nous ne pouvions plus être ennemis. Les rois Capet et Georges nous auraient ordonné vainement de nous haïr. Et cependant, tandis que nous nous élancions vers la liberté, tandis que la révolution se faisait en France avec une explosion incroyable, tandis qu’un cri unanime proclamait la souveraineté du peuple, le ministère anglican calculait dans ses comptoirs diplomatiques de Westminster notre enthousiasme et les profits que pouvait en tirer sa politique, semblable à ces brigans qui, dans les incendies ou dans les grandes convulsions de la nature, pillent les maisons bouleversées par les volcans ou frappées par quelque accident funeste. Révoltée contre notre liberté dès sa naissance, la vieille haine de l’Angleterre fut contenue d’abord par l’admiration de l’Europe; mais la constitution de l’égalité était trop voisine de la constitution royaliste et féodale de l’Angleterre pour qu’elle demeurât simple spectatrice de notre révolution. Elle ameuta sourdement les rois coalisés, tous les petits tyrans, intrigua auprès des neutres, menaça les faibles, accapara les gouvernement aristocratiques, trompa l’Espagne, et forgea le traité de Pilnitz pour abreuver l’Europe du sang des hommes, et pour les empêcher de se ressaisir de leurs droits. C’est là, c’est à Pilnitz, que fut conclu le traité de diffamation, de corruption et d’assassinat auquel il n’appartenait qu’à la royauté de l’Europe de mettre le sceau. C’est du cabinet de Georges que la terreur ou l’espérance est distribuée aux rois, que les armes et les crucifix se distribuaient à la Vendée, que les libelles et les guinées se distribuaient à Paris. Non contents de nous égorger par des assassins à ses ordres, et de nous diffamer par des calonniateurs à ses gages, ce gouvernement, si vanté dans les livres qu’il paie, achetait chez nous les grains pour les faire pourrir, et les arrêtait sur la mer pour nous affamer. Son système favori est de corrompre l’espèce humaine, ou d’en faire mourir une partie pour asservir l’autre. Ce qu’il entend le mieux est d’organiser le meurtre et d’exécuter un plan de famine. Il l’a fait pour nous, au dedans, en paralysant la circulation et en alimentant la guerre civile; il l’a fait, au dehors, en arrêtant tous les vaisseaux neutres porteurs de subsistances pour la République, et en faisant arrêter et jeter dans les cachots nos envoyés auprès des gouvernements étrangers. Qui pourrait s’étonner d’un système aussi machiavélique ? et quel est le peuple, je ne dis pas en Europe, mais sur le globe entier, qui n’ait pas des accusations à former contre ces insulaires ? L’Afrique lui redemande les noirs qu’il a fait périr; l’Amérique lui reproche ses malheurs, et l’Europe sa corruption. L’Anglais ne peut démentir son origine : descendant des Carthaginois et des Phéniciens, il vendait des peaux de bêtes et des esclaves et ce peuple n’a pas changé son commerce. César, en abordant dans cette île, n’y trouva qu’un peuple féroce, se disputant les forêts avec les loups, et menaçant de brûler tous les bâtiments qui tentaient d’y aborder. Sa civilisation successive, ses guerres civiles et ses guerres maritimes ont toutes porté le caractère de cetie origine sauvage. Dans l’Inde, l’Anglais a acheté les chefs du pays quand il n’a pu les opprimer ou s’en servir. Dans le Bengale, il a fait mourir de faim, par les ordres de lord Clive, plusieurs millions d’hommes pour en conquérir un petit nombre échappé à son projet de famine, exécuté avec une cruaté froide, comme son caractère national. Il aima mieux régner sur un cimetière plutôt que de ne pas asservir les habitants. Dans l’Amérique, aux Antilles, il a fait faire des progrès à la traite des noirs, et consacré des millions d’hommes à ce commerce infâme. Dans l’Amérique septentionale, l’Anglais a fait ravager les côtes, détruit les ports, brûlé les villes et massacré les habitants des campagnes. Il a forcé les américains, fait prisonniers en pleine mer, à porter les armes contre leur patrie, à devenir les bourreaux de leurs amis et de leurs frères, ou à périr eux-mêmes par des mains si chères. Il a couvert les américains de trahisons, corrompu leurs chefs, salarié les criminels condamnés, acheté des seigneurs et des princes d’Allemagne, des soldats, comme des troupeaux, et corrompu l’humanité des sauvages au point de les faire sortir de leur tactique ordinaire et de leur donner une récompense pour chaque 36 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Georges ou de Guillaume; ce sont donc les tyrans qui, pour s’assurer de la haine de quelques mauvais français, les enivrent de crimes, les gorgent de guinées, les fanatisent de royalisme, et voudraient nous faire passer pour des tyrans, biens convaincus que tout Français déteste la tyrannie. Oui, spéculateurs britanniques, marchands de trahisons et d’esclaves, banquiers de crimes et de contre-révolutionnaires, nous détestons la tyrannie car nous vous abhorrons. La haine de Rome contre Carthage revit dans les âmes françaises, comme la foi punique revit dans les cœurs anglais. Crédules que nous étions, un sentiment de préférence et d’estime nous attachait aux habitants de l’Angleterre. Dans les derniers jours de notre esclavage, nous invoquions sa liberté, nous croyions à sa philanthropie, et nous tournions des regards avides vers sa constitution. Cette erreur dangereuse, ils nous l’avaient donnée, les perfides; ils nous l’avaient donnée avec leurs modes pour nous vendre leur luxe et ruiner nos manufactures; ils nous l’avaient donnée avec leurs livres, pour nous empêcher de jouir jamais des bienfaits de l’égalité et d’aspirer à une constitution républicaine. Un écrivain mercenaire avait célébré la constitution britannique avec son roi héréditaire, son veto absolu, sa liste civile énorme, ses ministres agioteurs, son Parlement septénaire, sa prérogative royale immense, les impôts onéreux; et bientôt le livre funeste, composé par un génevois appelé Delolme, eut plusieurs éditions en langue française pour inonder l’Europe et nous montrer la constitution royale, ministérielle et vénale de nos ennemis, comme le maximum de la liberté politique. Tel a été pendant les 2 premières Assemblées nationales, l’ascendant pris en France par les émissaires anglais et par leurs missionnaires constitutionnels, que nous cherchons toujours à imiter les lois et les usages de nos voisins. On eût dit que nous ne voulions, que nous ne pouvions plus être ennemis. Les rois Capet et Georges nous auraient ordonné vainement de nous haïr. Et cependant, tandis que nous nous élancions vers la liberté, tandis que la révolution se faisait en France avec une explosion incroyable, tandis qu’un cri unanime proclamait la souveraineté du peuple, le ministère anglican calculait dans ses comptoirs diplomatiques de Westminster notre enthousiasme et les profits que pouvait en tirer sa politique, semblable à ces brigans qui, dans les incendies ou dans les grandes convulsions de la nature, pillent les maisons bouleversées par les volcans ou frappées par quelque accident funeste. Révoltée contre notre liberté dès sa naissance, la vieille haine de l’Angleterre fut contenue d’abord par l’admiration de l’Europe; mais la constitution de l’égalité était trop voisine de la constitution royaliste et féodale de l’Angleterre pour qu’elle demeurât simple spectatrice de notre révolution. Elle ameuta sourdement les rois coalisés, tous les petits tyrans, intrigua auprès des neutres, menaça les faibles, accapara les gouvernement aristocratiques, trompa l’Espagne, et forgea le traité de Pilnitz pour abreuver l’Europe du sang des hommes, et pour les empêcher de se ressaisir de leurs droits. C’est là, c’est à Pilnitz, que fut conclu le traité de diffamation, de corruption et d’assassinat auquel il n’appartenait qu’à la royauté de l’Europe de mettre le sceau. C’est du cabinet de Georges que la terreur ou l’espérance est distribuée aux rois, que les armes et les crucifix se distribuaient à la Vendée, que les libelles et les guinées se distribuaient à Paris. Non contents de nous égorger par des assassins à ses ordres, et de nous diffamer par des calonniateurs à ses gages, ce gouvernement, si vanté dans les livres qu’il paie, achetait chez nous les grains pour les faire pourrir, et les arrêtait sur la mer pour nous affamer. Son système favori est de corrompre l’espèce humaine, ou d’en faire mourir une partie pour asservir l’autre. Ce qu’il entend le mieux est d’organiser le meurtre et d’exécuter un plan de famine. Il l’a fait pour nous, au dedans, en paralysant la circulation et en alimentant la guerre civile; il l’a fait, au dehors, en arrêtant tous les vaisseaux neutres porteurs de subsistances pour la République, et en faisant arrêter et jeter dans les cachots nos envoyés auprès des gouvernements étrangers. Qui pourrait s’étonner d’un système aussi machiavélique ? et quel est le peuple, je ne dis pas en Europe, mais sur le globe entier, qui n’ait pas des accusations à former contre ces insulaires ? L’Afrique lui redemande les noirs qu’il a fait périr; l’Amérique lui reproche ses malheurs, et l’Europe sa corruption. L’Anglais ne peut démentir son origine : descendant des Carthaginois et des Phéniciens, il vendait des peaux de bêtes et des esclaves et ce peuple n’a pas changé son commerce. César, en abordant dans cette île, n’y trouva qu’un peuple féroce, se disputant les forêts avec les loups, et menaçant de brûler tous les bâtiments qui tentaient d’y aborder. Sa civilisation successive, ses guerres civiles et ses guerres maritimes ont toutes porté le caractère de cetie origine sauvage. Dans l’Inde, l’Anglais a acheté les chefs du pays quand il n’a pu les opprimer ou s’en servir. Dans le Bengale, il a fait mourir de faim, par les ordres de lord Clive, plusieurs millions d’hommes pour en conquérir un petit nombre échappé à son projet de famine, exécuté avec une cruaté froide, comme son caractère national. Il aima mieux régner sur un cimetière plutôt que de ne pas asservir les habitants. Dans l’Amérique, aux Antilles, il a fait faire des progrès à la traite des noirs, et consacré des millions d’hommes à ce commerce infâme. Dans l’Amérique septentionale, l’Anglais a fait ravager les côtes, détruit les ports, brûlé les villes et massacré les habitants des campagnes. Il a forcé les américains, fait prisonniers en pleine mer, à porter les armes contre leur patrie, à devenir les bourreaux de leurs amis et de leurs frères, ou à périr eux-mêmes par des mains si chères. Il a couvert les américains de trahisons, corrompu leurs chefs, salarié les criminels condamnés, acheté des seigneurs et des princes d’Allemagne, des soldats, comme des troupeaux, et corrompu l’humanité des sauvages au point de les faire sortir de leur tactique ordinaire et de leur donner une récompense pour chaque SÉANCE DU 7 PRAIRIAL AN II (26 MAI 1794) - N° 43 37 crâne d’homme libre qu’ils apporteraient au commandant anglais. Dans l’Acadie, l’Angleis a fait périr les Français neutres de cette colonie pour qu’ils ne retournassent pas à la mère-patrie. Voilà pourtant le peuple dont nos troupes ménagent les soldats, et dont nos baïonnettes semblent respecter la vie : ces aménagements sont un crime envers la liberté; ils sont un mal pour la République. Mais il suffira sans doute d’avertir le patriotisme des armées pour que cette fausse humanité disparaisse. Il n’est pas permis de penser que les républicains qui combattent tous les jours pour la liberté se permettent jamais de perdre de vue que les crimes du gouvernement britannique sont à l’ordre de tous les jours en Europe comme en France. Ce n’était pas assez pour les brigands politiques d’acheter nos frontières maritimes depuis Lorient jusqu’à Dunkerque; De corrompre nos chefs militaires depuis Dunkerque jusqu’à Landau et Strasbourg; De s’emparer de la Méditerranée par la vénalité des infâmes toulonnais, pour anéantir ensuite la pusillanime neutralité des Etats d’Italie; De faire arrêter, de la manière la plus perfide, les envoyés de la République auprès des puissances étrangères; De s’assurer de Bayonne et de Perpignan par les métaux que l’Espagne arrache au Pérou; Dintimider, insulter les puissances neutres de la Baltique, et de leur défendre d’apporter des subsistances aux Français; D’intriguer insolemment à la Porte, et corrompre artificieusement à Pétersbourg; D’entretenir des intelligences avec les chefs des vaisseaux de la République, accaparer l’inertie des ouvriers de nos ports; De salarier des incendiaires dans nos magasins et nos arseaux; De souffler et d’entretenir la guerre civile dans la Vendée, infecter de royalisme une de nos principales villes manufacturières; D’établir et propager un système perfide de fédéralisme, qui, couvrant le sol entier de la liberté, a menacé de la dévorer et de l’anéantir à sa naissance. Il manquait à l’histoire de ces despotes de l’Inde et de ces tyrans de l’Amérique un nouveau forfait. Un grand et nombreux assassinat, profondément médité, se préparait sans doute pour la ville qui a été le foyer ardent de la révolution et l’exemple sublime du dévouement à la patrie. Il fallait déshonorer Paris en transportant les fureurs de la Vendée pour effrayer la liberté et la noyer dans un bain de sang. C’est depuis la naissance de la Convention, c’est depuis qu’on se préparait au jugement du tyran, que le crime traversait la Manche pour nous apporter des poignards. Leur destination était pour être déposés ou échoués clandestinement sur les côtes, d’où les conjurés les auraient ensuite introduits dans Paris. Mais les vents furent contraires, la nature refusa son secours à ces projets parricides, et le pilote du crime fut obligé de relâcher dans un de nos ports. C’est à Calais que Lebon, représentant du peuple, a trouvé, en vérifiant les caisses déposées depuis plusieurs mois à la douane, un nombre de caisses remplies de poignards; et le nombre adressé à Paris correspondant au nombre de sections. C’est à Lille que l’on vient de découvrir, il y a peu de jours, un autre envoi de poignards venant d’Angleterre. Nation bretonne, agioteuse et marchande, fière de ton grand commerce, voilà donc les cargaisons que tu envoies à la France et à l’Europe, jusqu’à ce que la France et l’Europe, enfin éclairées sur ton exécrable ambition, te renvoient à leur tour une cargaison de poudre et de boulets et aillent imposer la liberté aux hommes sur les bords de la Tamise, après avoir exterminé les tyrans exécrables, les royalistes nombreux, et brisé ton sceptre maritime. Mais pour y parvenir, citoyens, il faut que la haine nationale se prononce; il faut que, pour les communications commerciales et politiques, il y ait un océan immense entre Douvres et Calais; il faut que les jeunes républicains sucent la haine du nom anglais avec le lait des nourrices. O mon pays ! si au seul nom des anglais mon sang s’échauffe et mon âme s’irrite, c’esl qu’étant né dans cette partie de la Guyenne où les anglais, du temps de Charles VII, ravagèrent tout et régnèrent avec un septre de fer, mes oreilles ont entendu dès l’enfance cette tradition de haine qui, pour sauver la liberté en Europe et affermir la République en France, doit devenir nationale. C’est dans les armées de terre et de mer, c’est dans l’armée du Nord surtout, que ce discours doit retentir. Le croiriez-vous, citoyens, que dans la dernière affaire, à Lannoy, où l’ennemi a été complètement battu, c’est là que les troupes anglaises ont été faites prisonnières, c’est là qu’était ce prétendant si célèbre par ses belles campagnes de la Flandre, l’année dernière; c’est là qu’était le duc d’York, et des rapports dignes de foi nous assurent qu’il était au pouvoir des républicains de les tuer tous . les observateurs présument que l’on y traite les anglais avec plus de ménagement que les autrichiens. Tous les officiers et soldats prisonniers déclarent que les républicains les ont parfaitement traités. « Les autrichiens, dit un rapport fait au Comité, n’ont point reçu de quartier. Leurs officiers que j’ai questionnés étaient consternés et vouaient à l’infâmie Pitt et York : comme ils se comportent d’une manière plus militaire, nos volontaires, tout en leur donnant des preuves de leur courage, leur marquent de même leur générosité; car d’une main ils anéantissent 1 autrichien, tandis que de l’autre ils accordaient la vie à l’anglais. » Que l’autricien féroce et lâche périsse sans pitié dans les combats, cela se conçoit par une nation qui a tant à se plaindre de cette famille de tyrans autrichiens; mais que l’anglais soit épargné, que pour l’esclave de Georges et le soldat-machine d’York la langue de nos armées conserve encore le mot de générosité, c’est ce que la Convention nationale ne peut souffrir. L’Erope n’a point à nous reprocher d’avoir manqué de donner des exemples généreux • inutilement nous les avons prodigués à des hommes féroces; aujourd’hui l’humanité nous commande de n’être plus aussi généreux. Disons SÉANCE DU 7 PRAIRIAL AN II (26 MAI 1794) - N° 43 37 crâne d’homme libre qu’ils apporteraient au commandant anglais. Dans l’Acadie, l’Angleis a fait périr les Français neutres de cette colonie pour qu’ils ne retournassent pas à la mère-patrie. Voilà pourtant le peuple dont nos troupes ménagent les soldats, et dont nos baïonnettes semblent respecter la vie : ces aménagements sont un crime envers la liberté; ils sont un mal pour la République. Mais il suffira sans doute d’avertir le patriotisme des armées pour que cette fausse humanité disparaisse. Il n’est pas permis de penser que les républicains qui combattent tous les jours pour la liberté se permettent jamais de perdre de vue que les crimes du gouvernement britannique sont à l’ordre de tous les jours en Europe comme en France. Ce n’était pas assez pour les brigands politiques d’acheter nos frontières maritimes depuis Lorient jusqu’à Dunkerque; De corrompre nos chefs militaires depuis Dunkerque jusqu’à Landau et Strasbourg; De s’emparer de la Méditerranée par la vénalité des infâmes toulonnais, pour anéantir ensuite la pusillanime neutralité des Etats d’Italie; De faire arrêter, de la manière la plus perfide, les envoyés de la République auprès des puissances étrangères; De s’assurer de Bayonne et de Perpignan par les métaux que l’Espagne arrache au Pérou; Dintimider, insulter les puissances neutres de la Baltique, et de leur défendre d’apporter des subsistances aux Français; D’intriguer insolemment à la Porte, et corrompre artificieusement à Pétersbourg; D’entretenir des intelligences avec les chefs des vaisseaux de la République, accaparer l’inertie des ouvriers de nos ports; De salarier des incendiaires dans nos magasins et nos arseaux; De souffler et d’entretenir la guerre civile dans la Vendée, infecter de royalisme une de nos principales villes manufacturières; D’établir et propager un système perfide de fédéralisme, qui, couvrant le sol entier de la liberté, a menacé de la dévorer et de l’anéantir à sa naissance. Il manquait à l’histoire de ces despotes de l’Inde et de ces tyrans de l’Amérique un nouveau forfait. Un grand et nombreux assassinat, profondément médité, se préparait sans doute pour la ville qui a été le foyer ardent de la révolution et l’exemple sublime du dévouement à la patrie. Il fallait déshonorer Paris en transportant les fureurs de la Vendée pour effrayer la liberté et la noyer dans un bain de sang. C’est depuis la naissance de la Convention, c’est depuis qu’on se préparait au jugement du tyran, que le crime traversait la Manche pour nous apporter des poignards. Leur destination était pour être déposés ou échoués clandestinement sur les côtes, d’où les conjurés les auraient ensuite introduits dans Paris. Mais les vents furent contraires, la nature refusa son secours à ces projets parricides, et le pilote du crime fut obligé de relâcher dans un de nos ports. C’est à Calais que Lebon, représentant du peuple, a trouvé, en vérifiant les caisses déposées depuis plusieurs mois à la douane, un nombre de caisses remplies de poignards; et le nombre adressé à Paris correspondant au nombre de sections. C’est à Lille que l’on vient de découvrir, il y a peu de jours, un autre envoi de poignards venant d’Angleterre. Nation bretonne, agioteuse et marchande, fière de ton grand commerce, voilà donc les cargaisons que tu envoies à la France et à l’Europe, jusqu’à ce que la France et l’Europe, enfin éclairées sur ton exécrable ambition, te renvoient à leur tour une cargaison de poudre et de boulets et aillent imposer la liberté aux hommes sur les bords de la Tamise, après avoir exterminé les tyrans exécrables, les royalistes nombreux, et brisé ton sceptre maritime. Mais pour y parvenir, citoyens, il faut que la haine nationale se prononce; il faut que, pour les communications commerciales et politiques, il y ait un océan immense entre Douvres et Calais; il faut que les jeunes républicains sucent la haine du nom anglais avec le lait des nourrices. O mon pays ! si au seul nom des anglais mon sang s’échauffe et mon âme s’irrite, c’esl qu’étant né dans cette partie de la Guyenne où les anglais, du temps de Charles VII, ravagèrent tout et régnèrent avec un septre de fer, mes oreilles ont entendu dès l’enfance cette tradition de haine qui, pour sauver la liberté en Europe et affermir la République en France, doit devenir nationale. C’est dans les armées de terre et de mer, c’est dans l’armée du Nord surtout, que ce discours doit retentir. Le croiriez-vous, citoyens, que dans la dernière affaire, à Lannoy, où l’ennemi a été complètement battu, c’est là que les troupes anglaises ont été faites prisonnières, c’est là qu’était ce prétendant si célèbre par ses belles campagnes de la Flandre, l’année dernière; c’est là qu’était le duc d’York, et des rapports dignes de foi nous assurent qu’il était au pouvoir des républicains de les tuer tous . les observateurs présument que l’on y traite les anglais avec plus de ménagement que les autrichiens. Tous les officiers et soldats prisonniers déclarent que les républicains les ont parfaitement traités. « Les autrichiens, dit un rapport fait au Comité, n’ont point reçu de quartier. Leurs officiers que j’ai questionnés étaient consternés et vouaient à l’infâmie Pitt et York : comme ils se comportent d’une manière plus militaire, nos volontaires, tout en leur donnant des preuves de leur courage, leur marquent de même leur générosité; car d’une main ils anéantissent 1 autrichien, tandis que de l’autre ils accordaient la vie à l’anglais. » Que l’autricien féroce et lâche périsse sans pitié dans les combats, cela se conçoit par une nation qui a tant à se plaindre de cette famille de tyrans autrichiens; mais que l’anglais soit épargné, que pour l’esclave de Georges et le soldat-machine d’York la langue de nos armées conserve encore le mot de générosité, c’est ce que la Convention nationale ne peut souffrir. L’Erope n’a point à nous reprocher d’avoir manqué de donner des exemples généreux • inutilement nous les avons prodigués à des hommes féroces; aujourd’hui l’humanité nous commande de n’être plus aussi généreux. Disons 38 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE donc au nom de la République : Guerre à mort à tout soldat anglais ou hanovrien! Si, plus éclairé que le soldat des autres gouvernements, l’anglais vient assassiner la liberté sur le continent, il est plus coupable; la générosité exercée envers lui est un crime de lèse-humanité. Comment les anglais traitent-ils les prisonnier français ? Tandis que nous leur laissons une existence douce, et qu’ils consomment nos subsistances après avoir tenté de nous les ravir, ils maltraitent nos prisonniers, et les condamnent avec mépris aux travaux réservés aux bêtes de somme. Ainsi donc ils brisent tous les liens de la nature envers nos frères, tandis que nous suivons le droit des gens envers eux; ainsi donc ils nous affament à la fois par leurs complots et par leurs prisonniers. Répétons donc : Guerre à mort à tout esclave anglais ou hanovrien ! Si, l’année dernière, au siège de Dunkerque, le traître Houchard n’avait pas épargné les soldats anglais, dont la fierté insolente apprit à se mettre à genoux devant les républicains victorieux; si, dis-je, à cette époque, les troupes commandées par Houchard avaient exterminé tous les anglais, au lieu de venir empoisonner nos places de leur présence, le gouvernement anglais ne serait pas revenu cette année insulter nos frontières. Il n’y a que les morts qui ne reviennent pas, mais les rois et leurs esclaves son incorrigibles; il faut qu’ils disparaissent, si vous voulez une paix durable, si vous voulez que la liberté prospère. Quelle est donc cette épidémie morale qui a jeté dans nos armées de fausses idées d’humanité et de générosité ? l’humanité consiste à exterminer ses ennemis : la générosité consiste à ménager le sang des républicains. C’était comme une tradition passée de la bouche des généraux, dans les camps français, qu’il fallait ménager les Anglais; c’était l’opinion philanthropique des Brissotins; c’est la conduite civique de Dumouriez; c’était aussi le système politique de Custine et la manière républicaine de Houchard. Ne nous y méprenons pas, citoyens, les Anglais et leurs factions sont partout; de la Convention aux Alpes et aux pyrénées, ils ont des agents pour exaspérer les départements, pour vendre Toulon, pour contre-révolutionner Marseille, pour révolter Lyon, pour corrompre Bordeaux, pour livrer les Pyrénées -Orientales, pour paralyser la défense de l’occident de ces montagnes, pour raviver les révoltés de Jalès, les fanatiques de l’Ardèche et de la Lozère, et pour exciter du trouble à Orléans. Les anglais ont des émissaires et des factions soldées parmi nous pour arrêter l’activité de nos ports, pour mettre le feu aux arsenaux, pour faire communiquer nos bateaux pêcheurs avec leurs bâtiments, pour renouveler la Vendée, pour encourager les chouans, pour corrompre la première réquisition des départements de la ci-devant Bretagne. Les anglais ont, de Dunkerque à Bayonne et de Bergues à Strasbourg, des corrupteurs secrets, des officiers sauve qui peut , et des intelligences dans les garnisons. Les anglais ont pour auxiliaires des fonctionnaires publics mécontents ou ambitieux, les âmes vénales, héritières des factions qui viennent d’être frappées de mort, les agents de l’ancien despotisme l’armée de l’ancien fisc, licenciée seulement depuis deux mois avant la condamnation des ci-devant fermiers généraux, es ex-nobles que vous avez chassés, les prêtres et les hommes corrompus. Toutes les calamités mises à la suite de la révolution, et frappant le peuple, sont venues de ce système d’horreurs, organisé à Londres, exécuté à Paris, dans nos cités et sur nos frontières. Des fils invisibles les lient tous ces comploteurs sacrilèges; déjà vous en avez brisé quelques-uns par le gouvernement révolutionnaire; lui seul peut vous en délivrer entièrement. Mais tandis que, par une police vigoureuse et active, vous purgez l’intérieur, rappelez aux armées qu’il ne peut y avoir ni trêve, ni paix, ni grâce pour aucun anglais ou hanovrien. Et s’il pouvait encore s’élever quelque répugnance ou plutôt quelque ménagement industrieux en faveur de ces étemels ennemis de la France, qu’il me soit permis de présenter rapidement les maux que l’Angleterre nous a faits depuis cette guerre. Intrigues et cabales avant la déclaration de guerre. — L’Angleterre a employé, pour ameuter les tyranneaux de l’Europe, le plus immoral des hommes et le plus fripon des ministres de Capet. Calonne a été choisi pour prêcher une croisade contre la France du Nord, tandis que Maury la prêchait en Italie. Pendant ce temps l’anglais accueillait avec un zèle affecté les plus furieux de nos émigrés et les plus scélérats de nos constituants; le ministre de la République pouvait à peine obtenir une audience de ce Pitt, à qui l’on a déjà fait trop de réputation même en scélératesse. A peines nous avions conquis une portion de notre liberté, l’anglais lâchait l’orateur Burke contre la France : ses écrits injurieux et ses jongleries soldées inondaient nos départements, tandis que les créatures de l’Angleterre à l’Assemblée constituante ne cessaient de prodiguer un encens vénal à la nation britannique; c’est-à-dire qu’on rabaissait constamment le peuple français pour élever insolemment l’Angleterre et ses prétendues lois. L’anglais correspondait impunément avec plu-sieur hommes influents en France, et dont les intentions criminelles ont été depuis découvertes et punies. Du temps de l’Assemblée législative, c’est l’anglais qui dirigeait le château des Tuileries, qui armait les chevaliers du Poignard, qui encourageait le traître Capet, et disposait les départements à le servir en contre-révolution. Pendant la Convention, il avait ici, au milieu de nous, d’un côté la faction de Brissot, de l’autre la faction de Danton; à la commune, la faction de Chaumette; dans les Sociétés populaires, la faction de Desfieux et de Kock; dans les sections, celle de Gusinan et de Hébert. Pendant que ces scélérats agissaient contre la République, en se couvrant de ses bienfaits et de ses couleurs, on nous disait à la Convention qu’une grande révolution en Angleterre était inévitable et prochaine, tandis que dans la vérité on incarcérait à Londres les patriotes qui osaient former des Sociétés populaires, et qu’on voyait à Botany-Bay les Margarot et les 38 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE donc au nom de la République : Guerre à mort à tout soldat anglais ou hanovrien! Si, plus éclairé que le soldat des autres gouvernements, l’anglais vient assassiner la liberté sur le continent, il est plus coupable; la générosité exercée envers lui est un crime de lèse-humanité. Comment les anglais traitent-ils les prisonnier français ? Tandis que nous leur laissons une existence douce, et qu’ils consomment nos subsistances après avoir tenté de nous les ravir, ils maltraitent nos prisonniers, et les condamnent avec mépris aux travaux réservés aux bêtes de somme. Ainsi donc ils brisent tous les liens de la nature envers nos frères, tandis que nous suivons le droit des gens envers eux; ainsi donc ils nous affament à la fois par leurs complots et par leurs prisonniers. Répétons donc : Guerre à mort à tout esclave anglais ou hanovrien ! Si, l’année dernière, au siège de Dunkerque, le traître Houchard n’avait pas épargné les soldats anglais, dont la fierté insolente apprit à se mettre à genoux devant les républicains victorieux; si, dis-je, à cette époque, les troupes commandées par Houchard avaient exterminé tous les anglais, au lieu de venir empoisonner nos places de leur présence, le gouvernement anglais ne serait pas revenu cette année insulter nos frontières. Il n’y a que les morts qui ne reviennent pas, mais les rois et leurs esclaves son incorrigibles; il faut qu’ils disparaissent, si vous voulez une paix durable, si vous voulez que la liberté prospère. Quelle est donc cette épidémie morale qui a jeté dans nos armées de fausses idées d’humanité et de générosité ? l’humanité consiste à exterminer ses ennemis : la générosité consiste à ménager le sang des républicains. C’était comme une tradition passée de la bouche des généraux, dans les camps français, qu’il fallait ménager les Anglais; c’était l’opinion philanthropique des Brissotins; c’est la conduite civique de Dumouriez; c’était aussi le système politique de Custine et la manière républicaine de Houchard. Ne nous y méprenons pas, citoyens, les Anglais et leurs factions sont partout; de la Convention aux Alpes et aux pyrénées, ils ont des agents pour exaspérer les départements, pour vendre Toulon, pour contre-révolutionner Marseille, pour révolter Lyon, pour corrompre Bordeaux, pour livrer les Pyrénées -Orientales, pour paralyser la défense de l’occident de ces montagnes, pour raviver les révoltés de Jalès, les fanatiques de l’Ardèche et de la Lozère, et pour exciter du trouble à Orléans. Les anglais ont des émissaires et des factions soldées parmi nous pour arrêter l’activité de nos ports, pour mettre le feu aux arsenaux, pour faire communiquer nos bateaux pêcheurs avec leurs bâtiments, pour renouveler la Vendée, pour encourager les chouans, pour corrompre la première réquisition des départements de la ci-devant Bretagne. Les anglais ont, de Dunkerque à Bayonne et de Bergues à Strasbourg, des corrupteurs secrets, des officiers sauve qui peut , et des intelligences dans les garnisons. Les anglais ont pour auxiliaires des fonctionnaires publics mécontents ou ambitieux, les âmes vénales, héritières des factions qui viennent d’être frappées de mort, les agents de l’ancien despotisme l’armée de l’ancien fisc, licenciée seulement depuis deux mois avant la condamnation des ci-devant fermiers généraux, es ex-nobles que vous avez chassés, les prêtres et les hommes corrompus. Toutes les calamités mises à la suite de la révolution, et frappant le peuple, sont venues de ce système d’horreurs, organisé à Londres, exécuté à Paris, dans nos cités et sur nos frontières. Des fils invisibles les lient tous ces comploteurs sacrilèges; déjà vous en avez brisé quelques-uns par le gouvernement révolutionnaire; lui seul peut vous en délivrer entièrement. Mais tandis que, par une police vigoureuse et active, vous purgez l’intérieur, rappelez aux armées qu’il ne peut y avoir ni trêve, ni paix, ni grâce pour aucun anglais ou hanovrien. Et s’il pouvait encore s’élever quelque répugnance ou plutôt quelque ménagement industrieux en faveur de ces étemels ennemis de la France, qu’il me soit permis de présenter rapidement les maux que l’Angleterre nous a faits depuis cette guerre. Intrigues et cabales avant la déclaration de guerre. — L’Angleterre a employé, pour ameuter les tyranneaux de l’Europe, le plus immoral des hommes et le plus fripon des ministres de Capet. Calonne a été choisi pour prêcher une croisade contre la France du Nord, tandis que Maury la prêchait en Italie. Pendant ce temps l’anglais accueillait avec un zèle affecté les plus furieux de nos émigrés et les plus scélérats de nos constituants; le ministre de la République pouvait à peine obtenir une audience de ce Pitt, à qui l’on a déjà fait trop de réputation même en scélératesse. A peines nous avions conquis une portion de notre liberté, l’anglais lâchait l’orateur Burke contre la France : ses écrits injurieux et ses jongleries soldées inondaient nos départements, tandis que les créatures de l’Angleterre à l’Assemblée constituante ne cessaient de prodiguer un encens vénal à la nation britannique; c’est-à-dire qu’on rabaissait constamment le peuple français pour élever insolemment l’Angleterre et ses prétendues lois. L’anglais correspondait impunément avec plu-sieur hommes influents en France, et dont les intentions criminelles ont été depuis découvertes et punies. Du temps de l’Assemblée législative, c’est l’anglais qui dirigeait le château des Tuileries, qui armait les chevaliers du Poignard, qui encourageait le traître Capet, et disposait les départements à le servir en contre-révolution. Pendant la Convention, il avait ici, au milieu de nous, d’un côté la faction de Brissot, de l’autre la faction de Danton; à la commune, la faction de Chaumette; dans les Sociétés populaires, la faction de Desfieux et de Kock; dans les sections, celle de Gusinan et de Hébert. Pendant que ces scélérats agissaient contre la République, en se couvrant de ses bienfaits et de ses couleurs, on nous disait à la Convention qu’une grande révolution en Angleterre était inévitable et prochaine, tandis que dans la vérité on incarcérait à Londres les patriotes qui osaient former des Sociétés populaires, et qu’on voyait à Botany-Bay les Margarot et les SÉANCE DU 7 PRAIRIAL AN II (26 MAI 1794) - N° 43 39 Thuir, coupables d’avoir senti leur cœur palpiter pour la liberté; on nous faisait dire qu’il se préparait une secousse politique en Angleterre, tandis que dans le fait le gouvernement anglais accueillait tous les Français qui se déclaraient les ennemis les plus acharnés de la France, et qu’il prodiguait les bienfaits aux contre-révolutionnaires les plus coupables, aux Lameth, aux Dandré et aux Duport. Soldats de la République, français, épargnez maintenant une nation qui soutient un gouvernement aussi exécrable ! Doutez-vous encore ? écoutez la violation du traité de commerce, tout avantageux qu’il était aux anglais, et cette violation remonte avant la déclaration de guerre. Une proclamation du roi Georges invite tous les navigateurs étrangers à relâcher dans ses ports, avec pleine liberté de repartir avec leurs cargaisons, et ordre est donné 6 semaines après de mettre un embargo sur tous les bâtiments chargés de subsistances qui avaient relâché en Angleterre sur la foi de cette proclamation. C’est cette perfidie attisée avant la déclaration de guerre, qui est la principale cause du dénûment de subsistances où nous nous sommes trouvés depuis 18 mois. C’est par cette violation de la foi publique envers les autres peuples de l’Europe que l’Angleterre a commencé l’exécution de son plan de famine pour la France, en la privant de tous les approvisionnements de la Baltique et d’une partie de ceux des Etats-Unis. Entendez ce bill contre les étrangers qui, contre la foi du traité de commerce, fait expulser d’Angleterre tous les français, pendant que les anglais jouissaient en France de la plus grande liberté pour les propriétés et les personnes; ce bill qui défend de recevoir en Angleterre aucun billet au porteur, aucun effet de commerce ou de banque, aucune lettre de change venant de France. Négociations secrètes avec toutes les cours étrangères pour les engager à ne permettre l’exportation d’aucune denrée pour la France. — C’est ici surtout que la perfidie du tyran anglais est plus atroce. Nous connaissons les ordres donnés de nous attaquer dans l’Inde, ce qui est prouvé par la prise d’un bâtiment français, appelé la Constitution, par le vaisseau anglais le Léopard. C’est un usage reçu en Angleterre de piller tout le commerce d’une nation voisine avant de lui déclarer la guerre. Cet usage, qui convient parfaitement à un gouvernement lâche et perfide, a dû être suivi dans la guerre actuelle. Les ordres pour l’Inde ayant été expédiés en novembre ou en octobre 1792, on peut présumer que l’intention de Georges a été de nous déclarer la guerre vers le mois de juillet 1793. Cette prise a eu lieu le 23 avril dernier dans les mers de l’Inde, à deux degrés et demi nord de la ligne. Elle n’est pas ignorée de vous la conduite insultante des Anglais envers l’ambassadeur de la République, qui, après avoir vainement réclamé contre les violations du traité de commerce, a reçu l’ordre du roi Georges de quitter la Grande-Bretagne. Nous avons le droit de reprocher encore aux anglais la violation du droit des gens depuis la déclaration de guerre. Que peuvent-ils alléguer à raison des ordres donnés aux bâtiments anglais d’intercepter tous navires neutres chargés de subsistances pour nos ports, quoique les traités s’y opposent formellement pour les ports qui ne sont ni bloqués ni en état de siège ? Que peuvent-ils alléguer à raison de cet acte de famine, d’après lequel l’escadre russe empêchait dans la Baltique les danois et les suédois de venir vendre leurs denrées en France, pendant que l’escadre de l’amiral Hood nous fermait les ports de l’Italie et de l’Afrique ? Que peuvent-ils alléguer à raison des mémoires présentés dans toutes les cours neutres pour exiger impudemment qu’elles ne permettent plus l’exportation d’aucune denrée pour la France ? Que diront-ils du fait arrivé sur le corsaire le Vrai Patriote, en relâchant à Stavanger en Norwége, pris par la frégate anglaise la Di-don ? Son équipage a été massacré sans défense dans un port neutre, par cela seul qu’il était français. Il existe cependant entre toutes les nations entre toutes les sociétés humaines, une sorte de droit naturel connu sous le nom de droit des gens. Mais il est inconnu des sauvages policés de la Grande-Bretagne; c’est donc une peuplade étrangère à l’Europe, étrangère à l’humanité : il faut qu’elle disparaisse. Je ne veut que citer ce trait pour vous en convaincre davantage. Qui n’a pas été indigné, je ne dis pas en France, mais dans le monde entier, au récit de cet autre massacre, plus détestable encore, commis dans le port de Gênes, où 300 français, composant l’équipage de la frégate la Modeste, ont été inopinément massacrés, foudroyés, pendant qu’ils attendaient à dîner. Voici les détails envoyés par l’agent de la République. [Le chargé d’affaires, au M. des affaires étrangères ; Gênes, 5 octobre.'] « Il est entré ce matin dans le port de Gênes 3 vaisseaux anglais et 2 frégates. Vers les 11 heures, un vaisseau s’est approché de la frégate française la Modeste, et dans le moment où il a été assez près pour pouvoir mettre un pont d’un bâtiment à l’autre, les anglais ont sauté dans la frégate, tandis que des dunes et du bord du vaisseau anglais on fusillait nos malheureux frères. Dans le même temps, des chaloupes anglaises ont attaqué les 2 tartanes françaises. Plusieurs de nos matelots se sont jetés à la mer et ont eu le bonheur de se sauver. Le reste a été fait prisonnier et réparti sur les vaisseaux anglais. Il y a des morts et des blessés; je n’ai pu savoir encore le nombre des uns et des autres. Les anglais sont maîtres de la frégate et des tartanes. » Signé, Tilly. Faut-il d’autres faits ? [demande BARERE] voyez l’enlèvement horrible des français de tout sexe et de tout âge, sur bâtiments neutres, même ceux qui, voulant se sauver du massacre de Saint-Domingue, ont trouvé des chaînes et de nouveaux bourreaux à la Jamaïque. Parcourons le tableau de ces manœuvres infâmes dans l’intérieur de la République et de SÉANCE DU 7 PRAIRIAL AN II (26 MAI 1794) - N° 43 39 Thuir, coupables d’avoir senti leur cœur palpiter pour la liberté; on nous faisait dire qu’il se préparait une secousse politique en Angleterre, tandis que dans le fait le gouvernement anglais accueillait tous les Français qui se déclaraient les ennemis les plus acharnés de la France, et qu’il prodiguait les bienfaits aux contre-révolutionnaires les plus coupables, aux Lameth, aux Dandré et aux Duport. Soldats de la République, français, épargnez maintenant une nation qui soutient un gouvernement aussi exécrable ! Doutez-vous encore ? écoutez la violation du traité de commerce, tout avantageux qu’il était aux anglais, et cette violation remonte avant la déclaration de guerre. Une proclamation du roi Georges invite tous les navigateurs étrangers à relâcher dans ses ports, avec pleine liberté de repartir avec leurs cargaisons, et ordre est donné 6 semaines après de mettre un embargo sur tous les bâtiments chargés de subsistances qui avaient relâché en Angleterre sur la foi de cette proclamation. C’est cette perfidie attisée avant la déclaration de guerre, qui est la principale cause du dénûment de subsistances où nous nous sommes trouvés depuis 18 mois. C’est par cette violation de la foi publique envers les autres peuples de l’Europe que l’Angleterre a commencé l’exécution de son plan de famine pour la France, en la privant de tous les approvisionnements de la Baltique et d’une partie de ceux des Etats-Unis. Entendez ce bill contre les étrangers qui, contre la foi du traité de commerce, fait expulser d’Angleterre tous les français, pendant que les anglais jouissaient en France de la plus grande liberté pour les propriétés et les personnes; ce bill qui défend de recevoir en Angleterre aucun billet au porteur, aucun effet de commerce ou de banque, aucune lettre de change venant de France. Négociations secrètes avec toutes les cours étrangères pour les engager à ne permettre l’exportation d’aucune denrée pour la France. — C’est ici surtout que la perfidie du tyran anglais est plus atroce. Nous connaissons les ordres donnés de nous attaquer dans l’Inde, ce qui est prouvé par la prise d’un bâtiment français, appelé la Constitution, par le vaisseau anglais le Léopard. C’est un usage reçu en Angleterre de piller tout le commerce d’une nation voisine avant de lui déclarer la guerre. Cet usage, qui convient parfaitement à un gouvernement lâche et perfide, a dû être suivi dans la guerre actuelle. Les ordres pour l’Inde ayant été expédiés en novembre ou en octobre 1792, on peut présumer que l’intention de Georges a été de nous déclarer la guerre vers le mois de juillet 1793. Cette prise a eu lieu le 23 avril dernier dans les mers de l’Inde, à deux degrés et demi nord de la ligne. Elle n’est pas ignorée de vous la conduite insultante des Anglais envers l’ambassadeur de la République, qui, après avoir vainement réclamé contre les violations du traité de commerce, a reçu l’ordre du roi Georges de quitter la Grande-Bretagne. Nous avons le droit de reprocher encore aux anglais la violation du droit des gens depuis la déclaration de guerre. Que peuvent-ils alléguer à raison des ordres donnés aux bâtiments anglais d’intercepter tous navires neutres chargés de subsistances pour nos ports, quoique les traités s’y opposent formellement pour les ports qui ne sont ni bloqués ni en état de siège ? Que peuvent-ils alléguer à raison de cet acte de famine, d’après lequel l’escadre russe empêchait dans la Baltique les danois et les suédois de venir vendre leurs denrées en France, pendant que l’escadre de l’amiral Hood nous fermait les ports de l’Italie et de l’Afrique ? Que peuvent-ils alléguer à raison des mémoires présentés dans toutes les cours neutres pour exiger impudemment qu’elles ne permettent plus l’exportation d’aucune denrée pour la France ? Que diront-ils du fait arrivé sur le corsaire le Vrai Patriote, en relâchant à Stavanger en Norwége, pris par la frégate anglaise la Di-don ? Son équipage a été massacré sans défense dans un port neutre, par cela seul qu’il était français. Il existe cependant entre toutes les nations entre toutes les sociétés humaines, une sorte de droit naturel connu sous le nom de droit des gens. Mais il est inconnu des sauvages policés de la Grande-Bretagne; c’est donc une peuplade étrangère à l’Europe, étrangère à l’humanité : il faut qu’elle disparaisse. Je ne veut que citer ce trait pour vous en convaincre davantage. Qui n’a pas été indigné, je ne dis pas en France, mais dans le monde entier, au récit de cet autre massacre, plus détestable encore, commis dans le port de Gênes, où 300 français, composant l’équipage de la frégate la Modeste, ont été inopinément massacrés, foudroyés, pendant qu’ils attendaient à dîner. Voici les détails envoyés par l’agent de la République. [Le chargé d’affaires, au M. des affaires étrangères ; Gênes, 5 octobre.'] « Il est entré ce matin dans le port de Gênes 3 vaisseaux anglais et 2 frégates. Vers les 11 heures, un vaisseau s’est approché de la frégate française la Modeste, et dans le moment où il a été assez près pour pouvoir mettre un pont d’un bâtiment à l’autre, les anglais ont sauté dans la frégate, tandis que des dunes et du bord du vaisseau anglais on fusillait nos malheureux frères. Dans le même temps, des chaloupes anglaises ont attaqué les 2 tartanes françaises. Plusieurs de nos matelots se sont jetés à la mer et ont eu le bonheur de se sauver. Le reste a été fait prisonnier et réparti sur les vaisseaux anglais. Il y a des morts et des blessés; je n’ai pu savoir encore le nombre des uns et des autres. Les anglais sont maîtres de la frégate et des tartanes. » Signé, Tilly. Faut-il d’autres faits ? [demande BARERE] voyez l’enlèvement horrible des français de tout sexe et de tout âge, sur bâtiments neutres, même ceux qui, voulant se sauver du massacre de Saint-Domingue, ont trouvé des chaînes et de nouveaux bourreaux à la Jamaïque. Parcourons le tableau de ces manœuvres infâmes dans l’intérieur de la République et de 40 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE nos colonies pour égarer un grand nombre de nos concitoyens. C’est ainsi que les fanatiques de la Vendée, les égoïstes de Lyon et de Toulon, les aristocrates de la Guadeloupe, de la Martinique et de Saint-Domingue ont été victimes des mensonges et des promesses du gouvernement britannique, dont le machiavélisme a tué indirectement plus d’un million de français. Vous croyez peut-être que le gouvernement anglais cache la main qui ourdit ces trames ? Les lettres officielles des chefs de la Vendée se trouvent dans les papiers ministériels. On attribue effrontément toutes les autres rébellions à la sage influence de Pitt. Et la nation anglaise n’a pas encore fait éclater son indignation pour un pareil ministère ! Quel gouvernement ! quel peuple ! Il y a plus : les papiers ministériels rendent compte avec une sorte de complaisance, qui ajoute encore à leur infamie, des menées secrètes du gouvernement à Brest, à Nantes, à Saint-Malo, au fort Vauban, à Strasbourg et ailleurs. On trouve dans ces gazettes tous les détails de la trahison du fort Vauban, avec de grands éloges de la sagacité de Pitt, qui, dit-on, sait tirer parti des circonstances. Jamais la corruption n’a été prônée plus impudemment comme un moyen légitime d’attaque. Voyez l’incendie des arsenaux et des magasins à poudre à Bayonne, à Huningue et à Lorient; les ordres donnés pour massacrer les patriotes, les poignards fabriqués pour cette effet à Londres; la lettre et le portefeuille interceptés qui renferment les preuves de ces attentats inouïs contre l’humanité. Je ne parlerai point d’un crime qui paraît un moyen légitime à Londres; faut-il nommer cette fabrication publique de faux assignats à Londres, pendant que nos décrets punissent de mort tout fabricateur de fausse monnaie étrangère ? C’est un métier que George entend parfaitement. On sait que, pendant la révolution d’Amérique, il a fabriqué plus de 100 millions de faux dollars que ses émissaires ont distribués adroitement dans les Etats-Unis pour corrompre quelques patriotes tièdes, pour déprécier et avilir la monnaie du congrès. Qu’avons-nous opposé à cette infernale manœuvre des anglais ? Qu’avons-nous fait ? Il y a quelque temps qu’un anglais réfugié proposa à notre gouvernement de contrefaire les billets de Banque d’Angleterre. Le Comité de salut public a fait saisir cet anglais qui est renfermé dans nos prisons. Je ne vous rappellerai pas que ce sont les anglais qui ont fabriqué ces grandes bières, ces vaisseaux négrier dans lesquels ils encaquent les noirs; il ne leur manquait que de perfectionner les prisons. Ce sont eux qui ont inventé les vaisseaux de ce nom, et qui ont ainsi construit les bastilles sur l’eau. Cela me ramène à la conduite atroce des anglais envers les patriotes de Toulon, qu’ils ont fait entasser dans ces vaisseaux-prisons, et déporter ou fait périr au milieu des souffrances les plus horribles. C’est encore une répétition des forfaits de Georges pendant la révolution américaine. Un seul vaisseau -prison, stationné dans la rade de New-York a fait périr près de 40,000 patriotes; d’autres ont été pendus comme rebelles, tandis que le traître Arnold jouissait d’une grosse pension et commandait une partie de l’armée. Les officiers hessois refusèrent de servir sous ce traître; les anglais n’eurent pas la même délicatesse. Pendant cette guerre horrible, on a vu massacrer de sang froid les patriotes paisibles au sein de leur famille. On a trouvé en Virginie des enfants cloués sur des planches, et leur mère morte de chagrin... La plume s’arrête d’horreur à de pareils récits; il faut cependant qu’elle retrace encore le trait de cruauté exercé par les anglais envers les représentants du peuple de Toulon, tandis que les patriotes traitent avec humanité O’Hara et les autres prisonniers anglais. Je ne vous parlerai point des déclarations insolentes faites dans toutes les cours, et en dernier lieu en Suisse et en Danemark, dans lesquelles ont traite le peuple français avec un mépris qui blesse la dignité de toutes les nations libres. Nos canons et nos vaisseaux leur répondront. C’est aux nations étrangères de se rappeler tour à tour la conduite hautaine et vile du gouvernement anglais envers les puissances neutres, la violation constante du pavillon de ces puissances par les corsaires anglais et par leurs frégates et bâtiments de guerre. La violation du territoire du Danemark et de Gênes en attaquant des bâtiments français dans leurs ports; les déclarations impérieuses faites à Copenhague, à Stockholm, à Venise, à Constantinople, à Gênes, à Florence, en Suisse, en Barbarie et dans les Etats-Unis d’Amérique, pour ordonner à ces puissances de rompre toute liaison avec la France et de prendre part à la coalition; L’insolence de Lord Hervey à Florence, qui ne se contente pas d’exposer le duc de Toscane au ressentiment de la nation française en lui ordonnant de chasser tous nos concitoyens, mais qui lui extorque une contribution de 2 000 000 et, posant sa montre sur la table du duc, lui dit : « Je ne vous donne pas des heures, mais des minutes, pour vous décider en faveur de l’Angleterre ». Je pourrais citer encore, pour augmenter la haine de tout français contre ces insulaires, le trait que des papiers publics rapportèrent il y a 2 mois : « Un bâtiment génois, sur lequel était un seul passager français, est menacé de périr dans la Méditerranée; il réclame du secours d’un vaisseau anglais; le secours est accordé. Les passagers s’accrochent au vaisseau, mais à peine le français a remercié de cet acte bien naturel qu’il est reconnu comme français et rejeté à la mer, où les Anglais le contemplent avec délectation se noyer ». Comment auraient-ils eu quelque humanité, ces hommes qui ont exercé contre Bayle et Beauvais, représentants du peuple, les plus cruels traitements et leur ont prodigué les plus sanglants outrages pendant qu’ils étaient renfermés au fort Lamalgue ? Les contre-révolutionnaires de Toulon, et surtout les anglais, se réunissaient sous les fenêtres de leur cachot : les uns parlaient de leur arracher la langue, les autres, de verser dans leurs veines du plomb fondu, et 40 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE nos colonies pour égarer un grand nombre de nos concitoyens. C’est ainsi que les fanatiques de la Vendée, les égoïstes de Lyon et de Toulon, les aristocrates de la Guadeloupe, de la Martinique et de Saint-Domingue ont été victimes des mensonges et des promesses du gouvernement britannique, dont le machiavélisme a tué indirectement plus d’un million de français. Vous croyez peut-être que le gouvernement anglais cache la main qui ourdit ces trames ? Les lettres officielles des chefs de la Vendée se trouvent dans les papiers ministériels. On attribue effrontément toutes les autres rébellions à la sage influence de Pitt. Et la nation anglaise n’a pas encore fait éclater son indignation pour un pareil ministère ! Quel gouvernement ! quel peuple ! Il y a plus : les papiers ministériels rendent compte avec une sorte de complaisance, qui ajoute encore à leur infamie, des menées secrètes du gouvernement à Brest, à Nantes, à Saint-Malo, au fort Vauban, à Strasbourg et ailleurs. On trouve dans ces gazettes tous les détails de la trahison du fort Vauban, avec de grands éloges de la sagacité de Pitt, qui, dit-on, sait tirer parti des circonstances. Jamais la corruption n’a été prônée plus impudemment comme un moyen légitime d’attaque. Voyez l’incendie des arsenaux et des magasins à poudre à Bayonne, à Huningue et à Lorient; les ordres donnés pour massacrer les patriotes, les poignards fabriqués pour cette effet à Londres; la lettre et le portefeuille interceptés qui renferment les preuves de ces attentats inouïs contre l’humanité. Je ne parlerai point d’un crime qui paraît un moyen légitime à Londres; faut-il nommer cette fabrication publique de faux assignats à Londres, pendant que nos décrets punissent de mort tout fabricateur de fausse monnaie étrangère ? C’est un métier que George entend parfaitement. On sait que, pendant la révolution d’Amérique, il a fabriqué plus de 100 millions de faux dollars que ses émissaires ont distribués adroitement dans les Etats-Unis pour corrompre quelques patriotes tièdes, pour déprécier et avilir la monnaie du congrès. Qu’avons-nous opposé à cette infernale manœuvre des anglais ? Qu’avons-nous fait ? Il y a quelque temps qu’un anglais réfugié proposa à notre gouvernement de contrefaire les billets de Banque d’Angleterre. Le Comité de salut public a fait saisir cet anglais qui est renfermé dans nos prisons. Je ne vous rappellerai pas que ce sont les anglais qui ont fabriqué ces grandes bières, ces vaisseaux négrier dans lesquels ils encaquent les noirs; il ne leur manquait que de perfectionner les prisons. Ce sont eux qui ont inventé les vaisseaux de ce nom, et qui ont ainsi construit les bastilles sur l’eau. Cela me ramène à la conduite atroce des anglais envers les patriotes de Toulon, qu’ils ont fait entasser dans ces vaisseaux-prisons, et déporter ou fait périr au milieu des souffrances les plus horribles. C’est encore une répétition des forfaits de Georges pendant la révolution américaine. Un seul vaisseau -prison, stationné dans la rade de New-York a fait périr près de 40,000 patriotes; d’autres ont été pendus comme rebelles, tandis que le traître Arnold jouissait d’une grosse pension et commandait une partie de l’armée. Les officiers hessois refusèrent de servir sous ce traître; les anglais n’eurent pas la même délicatesse. Pendant cette guerre horrible, on a vu massacrer de sang froid les patriotes paisibles au sein de leur famille. On a trouvé en Virginie des enfants cloués sur des planches, et leur mère morte de chagrin... La plume s’arrête d’horreur à de pareils récits; il faut cependant qu’elle retrace encore le trait de cruauté exercé par les anglais envers les représentants du peuple de Toulon, tandis que les patriotes traitent avec humanité O’Hara et les autres prisonniers anglais. Je ne vous parlerai point des déclarations insolentes faites dans toutes les cours, et en dernier lieu en Suisse et en Danemark, dans lesquelles ont traite le peuple français avec un mépris qui blesse la dignité de toutes les nations libres. Nos canons et nos vaisseaux leur répondront. C’est aux nations étrangères de se rappeler tour à tour la conduite hautaine et vile du gouvernement anglais envers les puissances neutres, la violation constante du pavillon de ces puissances par les corsaires anglais et par leurs frégates et bâtiments de guerre. La violation du territoire du Danemark et de Gênes en attaquant des bâtiments français dans leurs ports; les déclarations impérieuses faites à Copenhague, à Stockholm, à Venise, à Constantinople, à Gênes, à Florence, en Suisse, en Barbarie et dans les Etats-Unis d’Amérique, pour ordonner à ces puissances de rompre toute liaison avec la France et de prendre part à la coalition; L’insolence de Lord Hervey à Florence, qui ne se contente pas d’exposer le duc de Toscane au ressentiment de la nation française en lui ordonnant de chasser tous nos concitoyens, mais qui lui extorque une contribution de 2 000 000 et, posant sa montre sur la table du duc, lui dit : « Je ne vous donne pas des heures, mais des minutes, pour vous décider en faveur de l’Angleterre ». Je pourrais citer encore, pour augmenter la haine de tout français contre ces insulaires, le trait que des papiers publics rapportèrent il y a 2 mois : « Un bâtiment génois, sur lequel était un seul passager français, est menacé de périr dans la Méditerranée; il réclame du secours d’un vaisseau anglais; le secours est accordé. Les passagers s’accrochent au vaisseau, mais à peine le français a remercié de cet acte bien naturel qu’il est reconnu comme français et rejeté à la mer, où les Anglais le contemplent avec délectation se noyer ». Comment auraient-ils eu quelque humanité, ces hommes qui ont exercé contre Bayle et Beauvais, représentants du peuple, les plus cruels traitements et leur ont prodigué les plus sanglants outrages pendant qu’ils étaient renfermés au fort Lamalgue ? Les contre-révolutionnaires de Toulon, et surtout les anglais, se réunissaient sous les fenêtres de leur cachot : les uns parlaient de leur arracher la langue, les autres, de verser dans leurs veines du plomb fondu, et SÉANCE DU 7 PRAIRIAL AN II (26 MAI 1794) - N° 44 41 leur conversation cannibale retentissait à l’oreille des républicains fidèles. Ma voix est fatiguée de dénombrer les crimes de l’Angleterre; j’aime mieux vous présenter un trait récent, digne des républicains; il exprime le sentiment que j’ai essayé de faire passer dans l’âme de mes concitoyens; il prouve qu’il vaut mieux mourir que d’être leur prisonnier, et qu’il ne faut point de grâce à l’exécrable anglais. [Extrait de la lettre du citoyen Pourcel, sous-chef des bureaux civils de la marine, à la commission de la marine; Villefranche, 26 flor. II]. « Le capitaine Pierre Bertrand, ci-devant commandant la felouque de la République La Révolutionnaire, est arrivé ici avec 17 personnes de son équipage. Poursuivi le 14 de ce mois sur le cap de Noli par un vaisseau anglais, il préféra de chavirer sous voile à se rendre à l’ennemi. 4 républicains de son bord eurent le malheur de périr lors de cet accident. Il est parti de suite pour Nice ». Signé : Pourcel. P.c.c. : Dalbarade. Voilà, (continue BARERE), les sentiments de tout français parce qu’il sait qu’il appartient à une nation révolutionnaire comme la nature, puissante comme la liberté, et ardente comme le salpêtre qu’elle vient d’arracher aux entrailles de la terre. Il me suffit maintenant de m’adresser aux républicains qui combattent pour la liberté, et le langage sanctionné par les représentants du peuple sera bientôt entendu des armées. Le rapporteur termine en donnant lecture d’une adresse aux armées de la République ! La Convention nationale aux armées de la République. «Soldats de la liberté, l’Angleterre est coupable de tous les attentats envers l’humanité et de tous les crimes envers la République. Elle attaque les droits des peuples, et menace d’anéantir la liberté. Jusqu’à quand laisserez-vous exister sur nos frontières les esclaves de George, les soldats du plus imbécile des despotes et du plus atroce des tyrans ? Il forma le congrès de Pil-nitz et le marché honteux de Toulon; il massacra nos frères à Gênes et brûla nos vaisseaux et nos magasins dans les villes maritimes; il corrompit nos cités et voulut détruire la représentation nationale; il affama nos capagnes et acheta des trahisons sur les frontières. « Quand la disposition des combats vous offrira des anglais ou des hanovriens (1), portez votre souvenir sur les vastes contrées que les émissaires anglais ont dévastées; portez vos regards sur la Vendée, Toulon, Lyon, Landrecies, la Martinique et Saint-Domingue. Ces lieux fument en-fl) Dans le texte reproduit par Mon., XX (p. 587) il n’est question que des anglais; il s’agit d’une omission sans doute, puisque le décret mentionne les hanovriens, comme le font les journaux ci-après, qui ont reproduit l’adresse in extenso : J. Fr., n° 613; Rép., n° 161; C. Eg., n° 650; Audit, nat., n° 614. core du sang que l’atroce politique des Anglais a fait répandre. « Quand la victoire vous présentera des anglais ou des hanovriens, frappez; il ne doit en revenir aucun, ni sur les terres liberticides de la Grande-Bretagne, ni sur le sol libre de la France. Que les esclaves anglais périssent et l’Europe sera libre. « Ne croyez pas à leur astucieux langage; c’est un crime de plus de leur caractère perfide et de leur gouvernement machiavélique; ceux qui se vantent d’abhorrer le gouvernement de George peuvent-ils donc combattre pour lui ? » (1). Le discours de Barère a souvent excité le plus vif enthousiasme. Le cri de « guerre à mort aux soldats de Pitt et du tyran imbécile qu’il gouverne » a été répété par tous les citoyens dont la salle était remplie en ce moment, et a longtemps retenti au milieu des applaudissements et des cris répétés : Vive la République, vive la liberté ! (2). Sur son rapport, la Convention nationale rend le décret suivant. «La Convention nationale, après avoir entendu le rapport du Comité de salut public, décrète : «Art I. — Il ne sera fait aucun prisonnier anglais ou hanovrien. « Art. II. — Le rapport, l’adresse et le décret seront imprimés dans le bulletin, envoyés à toutes les armées, distribués à chaque membre de la Convention, au nombre de six exemplaires, et traduits dans toutes les langues » (3). 44 Robespierre donne lecture d’un discours sur les trahisons, les moyens de corruption et les attentats que les ennemis de la République ne cessent de mettre en usage pour en conjurer la perte, ainsi que celle de ses meilleurs défenseurs (4). Robespierre paraît à la tribune. (On applaudit) . ROBESPIERRE : Ce sera un beau sujet d’entretien pour la postérité; c’est déjà un spectacle digne de la terre et du ciel de voir l’Assemblée des représentants du peuple français, placée sur (1) Mon, XX, 580. (2) Débats, n° 614, p. 91. (3) P.V., XXXVIII, 137. Minute de la main de Barère (C 304, pl. 1122, p. 25). Décret n° 9287. Reproduit dans Bin, 9 prair.; mention dans Rép., nos 158 et 163; C. Eg., n° 647; Audit, nat., n° 611; Ann. R.F., nos 178 et 179; J. Matin, n° 675 (sic); J. Lois, n° 607; Mess, soir, nos 647 et 653; J. Sablier, n° 1343; J. Univ., nos 1645 et 1647; M.U., XL. 124; J. S.-Culottes, n08 466 et 470; J. Mont., n° 32; Débat, n08 614, p. 91 et 624, p. 267; Feuille Rép., n° 328; J. Perlet, n°8 612 et 615; J. Fr, n08 610, 611, 614 et 615; J. Paris, n08 512 et 515. (4) P.V., XXXVIII, 133. B in, 7 prair.; J. Fr., n08 610 et 611; Rép., n°8 158 et 160; J. Mont., n° 32; J. Matin, n° 675 (sic); J. Univ., n° 1647; J. Perlet, nos 612 et 615; Ann. R.F., n° 179; Mess, soir, n° 647; J. S. -Culottes, n° 466; Feuille Rép., n08 328 et 331; J. Paris, n° 512; J. Sablier, n08 1343 et 1350. SÉANCE DU 7 PRAIRIAL AN II (26 MAI 1794) - N° 44 41 leur conversation cannibale retentissait à l’oreille des républicains fidèles. Ma voix est fatiguée de dénombrer les crimes de l’Angleterre; j’aime mieux vous présenter un trait récent, digne des républicains; il exprime le sentiment que j’ai essayé de faire passer dans l’âme de mes concitoyens; il prouve qu’il vaut mieux mourir que d’être leur prisonnier, et qu’il ne faut point de grâce à l’exécrable anglais. [Extrait de la lettre du citoyen Pourcel, sous-chef des bureaux civils de la marine, à la commission de la marine; Villefranche, 26 flor. II]. « Le capitaine Pierre Bertrand, ci-devant commandant la felouque de la République La Révolutionnaire, est arrivé ici avec 17 personnes de son équipage. Poursuivi le 14 de ce mois sur le cap de Noli par un vaisseau anglais, il préféra de chavirer sous voile à se rendre à l’ennemi. 4 républicains de son bord eurent le malheur de périr lors de cet accident. Il est parti de suite pour Nice ». Signé : Pourcel. P.c.c. : Dalbarade. Voilà, (continue BARERE), les sentiments de tout français parce qu’il sait qu’il appartient à une nation révolutionnaire comme la nature, puissante comme la liberté, et ardente comme le salpêtre qu’elle vient d’arracher aux entrailles de la terre. Il me suffit maintenant de m’adresser aux républicains qui combattent pour la liberté, et le langage sanctionné par les représentants du peuple sera bientôt entendu des armées. Le rapporteur termine en donnant lecture d’une adresse aux armées de la République ! La Convention nationale aux armées de la République. «Soldats de la liberté, l’Angleterre est coupable de tous les attentats envers l’humanité et de tous les crimes envers la République. Elle attaque les droits des peuples, et menace d’anéantir la liberté. Jusqu’à quand laisserez-vous exister sur nos frontières les esclaves de George, les soldats du plus imbécile des despotes et du plus atroce des tyrans ? Il forma le congrès de Pil-nitz et le marché honteux de Toulon; il massacra nos frères à Gênes et brûla nos vaisseaux et nos magasins dans les villes maritimes; il corrompit nos cités et voulut détruire la représentation nationale; il affama nos capagnes et acheta des trahisons sur les frontières. « Quand la disposition des combats vous offrira des anglais ou des hanovriens (1), portez votre souvenir sur les vastes contrées que les émissaires anglais ont dévastées; portez vos regards sur la Vendée, Toulon, Lyon, Landrecies, la Martinique et Saint-Domingue. Ces lieux fument en-fl) Dans le texte reproduit par Mon., XX (p. 587) il n’est question que des anglais; il s’agit d’une omission sans doute, puisque le décret mentionne les hanovriens, comme le font les journaux ci-après, qui ont reproduit l’adresse in extenso : J. Fr., n° 613; Rép., n° 161; C. Eg., n° 650; Audit, nat., n° 614. core du sang que l’atroce politique des Anglais a fait répandre. « Quand la victoire vous présentera des anglais ou des hanovriens, frappez; il ne doit en revenir aucun, ni sur les terres liberticides de la Grande-Bretagne, ni sur le sol libre de la France. Que les esclaves anglais périssent et l’Europe sera libre. « Ne croyez pas à leur astucieux langage; c’est un crime de plus de leur caractère perfide et de leur gouvernement machiavélique; ceux qui se vantent d’abhorrer le gouvernement de George peuvent-ils donc combattre pour lui ? » (1). Le discours de Barère a souvent excité le plus vif enthousiasme. Le cri de « guerre à mort aux soldats de Pitt et du tyran imbécile qu’il gouverne » a été répété par tous les citoyens dont la salle était remplie en ce moment, et a longtemps retenti au milieu des applaudissements et des cris répétés : Vive la République, vive la liberté ! (2). Sur son rapport, la Convention nationale rend le décret suivant. «La Convention nationale, après avoir entendu le rapport du Comité de salut public, décrète : «Art I. — Il ne sera fait aucun prisonnier anglais ou hanovrien. « Art. II. — Le rapport, l’adresse et le décret seront imprimés dans le bulletin, envoyés à toutes les armées, distribués à chaque membre de la Convention, au nombre de six exemplaires, et traduits dans toutes les langues » (3). 44 Robespierre donne lecture d’un discours sur les trahisons, les moyens de corruption et les attentats que les ennemis de la République ne cessent de mettre en usage pour en conjurer la perte, ainsi que celle de ses meilleurs défenseurs (4). Robespierre paraît à la tribune. (On applaudit) . ROBESPIERRE : Ce sera un beau sujet d’entretien pour la postérité; c’est déjà un spectacle digne de la terre et du ciel de voir l’Assemblée des représentants du peuple français, placée sur (1) Mon, XX, 580. (2) Débats, n° 614, p. 91. (3) P.V., XXXVIII, 137. Minute de la main de Barère (C 304, pl. 1122, p. 25). Décret n° 9287. Reproduit dans Bin, 9 prair.; mention dans Rép., nos 158 et 163; C. Eg., n° 647; Audit, nat., n° 611; Ann. R.F., nos 178 et 179; J. Matin, n° 675 (sic); J. Lois, n° 607; Mess, soir, nos 647 et 653; J. Sablier, n° 1343; J. Univ., nos 1645 et 1647; M.U., XL. 124; J. S.-Culottes, n08 466 et 470; J. Mont., n° 32; Débat, n08 614, p. 91 et 624, p. 267; Feuille Rép., n° 328; J. Perlet, n°8 612 et 615; J. Fr, n08 610, 611, 614 et 615; J. Paris, n08 512 et 515. (4) P.V., XXXVIII, 133. B in, 7 prair.; J. Fr., n08 610 et 611; Rép., n°8 158 et 160; J. Mont., n° 32; J. Matin, n° 675 (sic); J. Univ., n° 1647; J. Perlet, nos 612 et 615; Ann. R.F., n° 179; Mess, soir, n° 647; J. S. -Culottes, n° 466; Feuille Rép., n08 328 et 331; J. Paris, n° 512; J. Sablier, n08 1343 et 1350.