84 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 août 1790.] de donner ses ordres pour la procédure commencée contre l’abbé Raynal, et les décrets subséquents, restent sans exécution, et demeurent comme non avenus. » (La motion de M. Malouet est généralement applaudie surtout du côté gauche.) M. Rewbell. Je demande la suppression du préambule du projet de décret proposé par M. Malouet. M. Dufralsse-Duchey. Je rends hommage au mérite de l’ouvrage de M. l’abbé Raynal ; mais je pense, en même temps, qu’il renferme des opinions exagérées, dangereuses, et même contraires aux bonnes mœurs ; l’Assemblée n’est pas un tribunal et fût-elle un tribunal, elle ne pourrait décider sans connaître les motifs qui ont déterminé le décret lancé par le parlement de Paris. Quant à la déclaration des droits, elle ne peut d’avoir d’effet rétroactif, d’où je conclus que l’arrêt ne peut-être regardé comme nul que si l’abbé Raynal veut renoncer aux erreurs qui sont renfermées dans son histoire philosophique. M. l’abbé Bourdon. J’appuie le retranchement du préambule proposé par M. Rewbell eu y ajoutant aussi le retranchement de la partie du décret qui renferme un éloge de M . l’abbé Ray-nal. M. de Bonnal, évêque de Clermont. Il n’est point de la sagesse de l’Assemblée d’adopter le projet de décret de M. Malouet. Ce serait donner à l’Europe l’exemple d’une tolérance dangereuse. L’ouvrage de M. l’abbé Raynal attaque la religion, et il se fait gloire d’avoir abandonné l’état ecclésiastique. Il est de mon devoir de citoyen, de représentant de la nation et de pontife de l’Eglise, de m’opposer de toutes mes forces à ce que l’homme, qui s’est glorifié d'avoir abjuré la prêtrise, reçoive de l’Assemblée une marque d’approbation. Je demande la question préalable sur le décret proposé par M. Malouet. (La question préalable est rejetée.) M. Méric de Montgazin. Je demande l’ajournement qui seul peut donner le temps aux divers membres de l’Assemblée de se fixer sur les phrases impies qui se trouvent dans toutes les pages de l’histoire philosophique. M. Voldel. Je pense qu’il est inutile de combattre l’ajournement, car l’opinion des membres de l’Assemblée est faite depuis longtemps sur les mérites et les défauts de l'ouvrage de M. l’abbé Raynal. Je me borne à vous soumettre une nouvelle rédaction du projet de décret. ( L’orateur lit ce projet.) M. Malouet. On a reproché à mon projet de décret de contenir des explications trop longues; j’adopte celui qui vous est proposé. (L’ajournement est rejeté.) Le projet de M. Voidel, accepté par M-Malouet, est ensuite mis aux voix et adopté en ces termes : « L’Assemblée nationale, sur le compte qui lui a élé rendu du décret lancé contre l’abbé Raynal, le 25 mai 1781, et de la saisie et annotation de ses biens par le parlement de Paris, déclare que ce décret étant contraire aux droits naturels et imprescriptibles de l’homme rappelés dans l’article 10 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, le tout est comme non avenu; charge son président de se retirer par devers le roi, pour le prier de donner les ordres nécessaires pour l’exécution du présent décret. » M. Pierre de Delley d’Agler, au nom du comité d’aliénation des domaines nationaux, propose un projet de décret qui est adopté sans discussion en ces tenues : « L’Assemblée nationale, voulant accélérer les travaux pour l’aliénation des domaines nationaux, et simplifier ceux des directoires de départements et de districts dans leur correspondance avec le comité, a décrété et décrète ce qui suit : « Art. 1er. Les municipalités et les particuliers qui feront à l’avenir des soumissions pour l’acquisition des domaines nationaux, seront tenus d’envoyer trois copies de leur soumission, une au comité d’aliénation à Paris, une au directoire du département et une au directoire du district dans l’étendue desquels sont situés les domaines nationaux qu’ils se proposent d’acquérir. « Art. 2. Les municipalités et les particuliers qui ont déjà fait des soumissions, seront tenus, dans le plus court délai, de compléter le triple envoi prescrit par l’article 1er. « Art. 3. Le comité de l’aliénation et les directoires de départements et de districts pourront, dans leur correspondance, n’envoyer que des extraits des soumissions qu’ils auront reçues, les copies de ces soumissions devant se trouver à l’avenir d’après le présent décret, et au comité, ét dans chacun des directoires du département et du district dans le ressort desquels les domaines nationaux seront situés. » M. le Président. Je rappelle à l’Assemblée qu’après sa séance, elle doit se retirer dans ses bureaux pour la nomination d'un nouveau président. M. Grossin, membre du comité de Constitution, présente, au nom de ce comité, un projet de décret sur le mode à suivre pour le règlement du compte de l'ancienne administration de l'Ile-de-France. Messieurs, par votre dernier article du décret constitutif des assemblées administratives et par l’article 2 du décret du 22 décembre, vous avez ordonné que dans les provinces qui ont eu jusqu’à présent une administration commune ou qui sont divisées en plusieurs départements, chaque administration de département nommerait deux commissaires, qui se réuniraient pour faire ensemble la liquidation des dettes contractées sous le régime précédent, pour établir la répartition des dettes dans les différentes parties de la province et pour mettre à fin les anciennes affaires; qu’ensuite Je compte en serait rendu dans une assemblée formée de quatre autres commissaires nommés par chaque administration de département. Les départements de Seine-et-Oise, d’Yonne, d’Eure-et-Loir se sont mis en devoir d’exécuter les décrets. Les anciens administrateurs du bureau de la commission intermédiaire de l’Ile-de-France ont répondu qu’ils ne rendraient leurs comptes qu’en présence de tous les commissaires et particulièrement de ceux du département de Paris. Dans ces circonstances, le comité de Constitution a pensé qu’il était utile d’éviter les frais d’un nouveau voyage aux commissaires déjà rendus à Paris et qu’il importait d’accélérer la reddition des comptes de l’ancien bureau pour que les directoires puissent, au mois d’octobre, proposer au conseil général de leurs départements, un {Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 août 1790.) 85 plan d’opérations que commande l’intérêt public et celui de dix départements qui se partagent l’ancienne province de l’Ile-de-France. En conséquence, nous vous proposons le projet de décret suivant : • « L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de Constitution, considérant que l’administration du département de Paris n’est pas encore formée, qu’il est néanmoins instant de procéder en exécution de l’article 10 du décret constitutif des assemblées administratives, autorise la nouvelle municipalité de cette ville à nommer pour cette exécution deux commissaires qui, conjointement avec ceux des départements d’Yonne, Seine-et -Marne, Seine-et-Oise, de l’Aube, de la Côte-d’Or, de l’Eure, du Loiret, de l’Oise et de la Nièvre, recevront le compte général de l’ancienne admininistration de la ci-devant pro-’vince de l’Ile-de-France; « Décrète que les anciens administrateurs seront tenus de préparer sans délai ce compte, de manière qu’ils puissent le rendre, au plus tard pour le premier septembre, aux commissaires des différents départements, lesquels seront aussi tenus de se rendre à Paris à cette époque pour le recevoir. » (Adopté.) M. l’abbé Grandi», député du Maine , demande la permission de s’absenter pendant trois semaines. Elle lui est accordée. M. de La-Tour-du-Pin, ministre de la guerre , envoie à l’Assemblée un état des gratifications qui se payent en vertu de l’article 11 de l’ordonnance du 15 décembre 1766, aux officiers invalides. Cette affaire est renvoyée aux comités militaire et des pensions réunis. M. le Président donne lecture de la note suivante des décrets qu’il a présentés à la sanction du roi, le 14 juillet du présent mois : Décret pour accélérer la liquidation et le payement du traitement du clergé actuel ; Autre qui déclare qu’il n’y a lieu à accusation contre M. Toulouse-Lautrec ; Autre portant qu’il sera instruit jusqu’au jugement définitif, sur les faits concernant le sieur Meslé, officier du régiment des chasseurs de Flandres, qui sera transféré dans les prisons de Verdun; et à l’égard du sieur Leblanc, que le roi sera supplié de donner des ordres pour l’élargissement de ce chasseur, et son retour au régiment ; Autre qui autorise les habitants du duché de Bouillon à extraire en nature, et à importer chez eux le produit de leurs fermes, et à s’approvisionner de toutes sortes de grains sur les marchés de Sedan ; Autre relatif à la procédure civile commencée au bailliage de Caux à Montivilliers, contre la municipalité de Saint-Macloud-la-Bruyère, à la requête des nommés Pierre Chicot et Pierre Bailliage, au sujet d’un bail à eux passé par le sieur Mary, titulaire du prieuré de Saint-Laurent. M. le Président. L’ordre du jour est la suite de la discussion des rapports du comité des finances sur toutes les parties des dépenses publiques. M. liebrun, rapporteur. Dans votre séauce d’hier matin, vous avez adopté les articles 1 et 2 d’un projet de décret sur les payeurs de rentes. Gomme il est très important de déterminer, sans retard, tout ce qui se rapporte au payement des arrérages de la dette publique et des pensions, je demande à l’Assemblée de vouloir bien décréter la totalité des articles que nous lui proposons. Plusieurs membres présentent des observations. M. Gaultier de Biauzat. Je propose de charger le comité des finances de présenter un article additionnel pour garantir les créanciers de rentes sur l’ancien clergé et sur les ci-devant pays d’Etat, de toute retenue et autre dépense, sous prétexte d’immatricules, d’enregistrements et de toutes autres formalités déjà décrétées ou qui pourront être jugées nécessaires. M. I�ebrun, rapporteur. Les payeurs de rentes n’exigent et ne perçoivent rien pour ces objets. M. Gaultier de Biauzat. L’assurance qui vient de nous être donnée qu’il n’en coûtera rien aux créanciers de rentes rend inutile l’article additionnel que je proposais. M. I�ebrun, rapporteur, lit les articles suivants qui sont adoptés ainsi qu’il suit : Art. 3. Les trésoriers et payeurs des objets ci-dessus énoncés seront tenus de remettre incessamment auxdits payeurs des rentes un état certifié d’eux de toutes les parties dont ils étaient chargés, contenant les immatricules et l’énonciation des saisies et oppositions faites en leurs mains, lesquelles tiendront ès mains des payeurs pour les parties qui leur seront respectivement distribuées. Art. 4. Les trésoriers et payeurs des rentes de l’ancien et nouveau clergé, les trésoriers des pays d’Etat, le payeur des charges assignées sur la ferme générale, joindront à ces états celui des débets et parties non réclamées, et en verseront le montant au Trésor public, nonobstant toutes saisies et oppositions. Art. 5. Les parties non réclamées seront remplacées à mesure qu’elles seront demandées, et il en sera fait fonds aux payeurs des rentes de la même manière que pour les arrérages ordinaires. Art. 6. Les finances des trésoriers et payeurs des rentes et charges qui, en vertu des articles précédents, seront provisoirement acquittées par les payeurs des rentes, ainsi que celtes de leurs contrôleurs, seront liquidées et remboursées après l’apurement de leur compte. Art. 7. Les propriétaires des rentes constituées sur le clergé ou sur les pays d’Etat pour le compte du roi, lesquels étaient ci-devant payés de leurs arrérages dans les provinces, pourront, s’ils le préfèrent, être encore payés dans les districts où ils sont domiciliés. Art. 8. Pour cet effet, ils seront tenus : 1° de remettre au payeur des rentes, auquel leurs parties seront distribuées, une expédition en forme de leurs contrats, s’ils sont nouveaux propriétaires, et une déclaration du district dans lequel ils demanderont à être payés ; 2° de faire passer tous les six mois ou tous les ans, à leur choix, auxdits payeurs, les quittances des six mois ou de l’année d’arrérages échus, pour être par eux vérifiés. Art. 9. Lesdites quittances vérifiées resteront aux mains des payeurs, lesquels remettront en échange un certificat des quittances fournies, et au bas une rescription du montant de la somme sur le trésorier du district. Art. 10. Ladite rescription visée au Trésor